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Une heureuse mauvaise chute
Angoulême
Antécédents
• Tabagisme actif à 20PA.
• Éthylisme chronique avec plusieurs
épisodes d’alcoolisation aigue.
• Pas de suivi médical par ailleurs.
• Aucun traitement habituel.
Mode de vie
• Retraité, ancien facteur.
• Divorcé, 3 enfants.
• Vit seul à son domicile.
Histoire de la maladie (1)
• Admis aux Urgences pour une chute à
domicile
– Interrogatoire: notion d’alcoolisation aigue
48h auparavant.
– Clinique:
• TA 140/60, FC 110, SpO2 95% en AA, apyrexie.
• GCS 15, ralentissement idéomoteur.
• Ronchi diffus, qqs sibilants bilatéraux.
• Splénomégalie (SMG) importante isolée.
• Plaie de l’arcade sourcilière suturable.
Histoire de la maladie (2)
– Biologie
• Sd inflammatoire : CRP 394 mg/L.
• Pancytopénie 650 GB / 312 PNN et 332
lymphocytes, Hb 11.4 g/dl, plq 48000/mm3.
• Rhabdomyolyse : CPK 1292 UI/l (7N) ; cytolyse
hépatique (ASAT 10N, ALAT 2N), sans cholestase;
pancréatite biologique (lipase 3N).
• Insuffisance rénale : créat 235µmol/l, urée
19,3mmol/l.
– Imagerie
• RP et ASP sans anomalies particulières.
Histoire de la maladie (3)
• 24 heures plus tard, aggravation clinique et
biologique motivant le transfert en réanimation
– Clinique : sepsis sévère avec détresse respiratoire
• Hyperthermie à 40°C.
• GCS 15, ralentissement idéomoteur, sd confusionnel.
• Hypotension 80/50, tachycardie persistante 100bpm.
• Signes de déshydratation : pli cutané, sécheresse buccale,
soif.
• SpO2 97% AA, polypnée 32/min ; toux grasse ; quelques
ronchi auscultatoires, sans foyer de crépitants.
Histoire de la maladie (4)
– Biologie : persistance des anomalies
• Insuffisance rénale : créat 302µmol/l , urée 22.4mmol/l ;
pas de troubles hydro élecrolytiques ; CPK 1682 UI/l.
• Pancytopénie : GB 460 , Hb 10.4g/dl, plq 35000 /mm3.
• Acidose métabolique compensée : pH = 7.47, PaCO2
24mmHg, EB = -5, lactates normaux.
• Hypoxémie modérée en AA PaO2 84mmHg.
Diagnostics retenus
• Déshydratation et rhabdomyolyse post chute,
compliquées d’une insuffisance rénale.
• Pancréatite alcoolique aigue ?
• Pancytopénie et splénomégalie : origine?
• Sepsis d’origine indéterminée ?
PEC en réa
• Oxygénothérapie,
• Expansion volémique et alcalinisation,
• Prévention du délirium tremens,
• Prévention de l’ulcère de stress,
• Pas d’antibiothérapie devant l’absence de point
d’appel évident.
Évolution (1)
• Stabilité hémodynamique après remplissage.
• Aggravation respiratoire modérée secondaire à un
œdème pulmonaire et une décompensation respiratoire
chez un tabagique chronique, stabilisée sous
oxygénothérapie aux lunettes.
• Régression progressive de la rhabdomyolyse et de
l’insuffisance rénale après réhydratation.
• Pas d’aspect de pancréatite au scanner abdominal ;
normalisation progressive de la lipase.
Evolution (2)
• Hyperthermie majeure persistante sans
retentissement hémodynamique.
– Hémoc x 3, ECBU, ECBC, LCR stériles.
– VDRL/TPHA nég, sérologie VHB VHC nég
– TDM cérébral : pas d’anomalie particulière
– TDM TAP
TDM thoracique : condensation pulmonaire basale G avec
épanchement bilatéral de faible abondance.
• TDM abdomino-pelvien:
– Pas de pancréatite, pas d’abcès intra abdominal.
– Splénomégalie majeure.
En pratique
– Pas d’antibiothérapie initiale ;
– Mise en route d’un antibiothérapie à visée
anti-staphylococcique à J9 devant l’apparition
d’une veinite avec abcès cutané.
Évolution (3)
• Pancytopénie et SMG persistantes
– TDM abdo pelvien : formations ganglionnaires
médiastino hilaires et coelio mésentériques ; SMG
homogène.
– Anémie arégénérative ; dosages vitamines B1, B9,
B12 normaux ; haptoglobine normale ; schizocytes
positifs mais non significatifs.
– Apparition progressive d’un sd mononucléosique.
– Myélogramme non contributif à 2 reprises.
– Majoration des déficits motivant une transfusion de
CG et de plaquettes.
Évolution (4)
• Patient toujours fébrile malgré le ttt anti staph ;
pas de réel point d’appel infectieux clinique ou
biologique.
• A J11, doute sur une hémoculture + à Brucella…
– Réalisation de sérologies brucellose, yersiniose,
tularémie.
– Introduction d’un ttt probabiliste par fluoroquinolone.
• Devant l’absence de défaillance, transfert en
médecine interne…
En médecine interne
• Régression progressive de la fièvre et des signes de
staphylococcie cutanée, normalisation partielle de
l’hémogramme.
• Poursuite du bilan :
– Myélogramme :
•
•
•
•
infiltrat plasmocytaire dystrophique,
blocage partiel de maturation granocytaire,
faible représentation mégacaryocytaire,
pas de blastose, pas de SAM.
– BOM :
• Localisation médullaire d’un lymphome à petites cellules B,
• Probable lymphome de la zone marginale splénique.
• Poursuite du ttt par fluoroquinolone…
Au final… 1 mois ½ + tard…!
–Hémoc + : francisella tularensis
holartica
– Sérologies tularémie +,
– Sérologie yersinia et brucella nég,
– PCR yersinia, brucella et francisella nég,
– Porte d’entrée évoquée : présence de rats au
domicile du patient (conditions de vie très précaires).
Au final… 1 mois ½ + tard…!
• Diagnostic de tularémie, forme
bactériémique avec possible pleuro
pneumopathie par dissémination!
• Et encore 1 mois après…
• Diagnostic de
leucémie à tricholeucocytes !!
• Les ttt ont été adaptés, le patient est
actuellement en rémission complète…
La tularémie
• Francisella tularensis :
– petit cocco bacille gram nég,
– aérobie, intra et extra cellulaire.
• Exclusivement dans l’hémisphère nord. Pic en hiver.
Réservoir principal : lagomorphes et rongeur mais
aussi ovins, bovins, tiques. En moyenne 30 cas/an en
France, surtout chez les chasseurs, agriculteurs et
personnel de labo.
• Transmission cutanéo muqueuse ++, digestive, par
inhalation, vectorielle, jamais interhumaine.
• Plusieurs formes :
– biovar tularensis (le + virulent, aux USA surtout),
– biovar holarctica (en Asie, Europe et Amérique).
Tularémie (2)
• Incubation : 3-5j (extrêmes 1 à 20 jours).
• Fièvre brutale, élevée, ondulante, avec frissons, sueurs,
céphalées, asthénie, myalgie, nausées.
• Durée : 3-4 sem sans traitement.
• Formes cliniques :
– Ulcéro ganglionnaire ++ avec, en général, adp axillaire sur
lésion ulcéreuse suintante et douloureuse de la main.
– Angineuse de Lavergne, surtout chez l’enfant.
– Oculo ganglionnaire de Parinaud : conjonctivite purulente
unilatérale et très douloureuse.
– Septicémique avec localisation pulmonaire secondaire.
– Respiratoire (maladie des trieurs de laine, rare en France).
Tularémie (3)
• Diagnostic :
– Importance de la notion « sujet à risque ».
– Sérologie : + à J10, attention quelques
réactions croisées avec brucella et yersinia.
– Isolement du germe sur sang, exsudat,
suppurations, expectoration : difficile car
exigence de milieu spécifique.
– PCR.
– IDR à la tularine.
Tularémie (4)
• Thérapeutique :
– Fluoroquinolone 14j, PO ou IV.
– Doxycycline 21j en curatif, 14j en prophylactique
post exposition.
– Association aminosides si très sévère.
• Prévention :
– Déclaration obligatoire des cas avérés.
– Précaution lors de manipulation d’animaux, lors des
soins aux malades.
– Mesure de prévention des morsures de tiques.
– Pas de vaccin efficace à ce jour.
Leucémie à tricholeucocytes
• LLC à cellules B matures de morphologie particulière.
• Clinique :
– Terrain : homme de 40 à 60 ans.
– Le + svt, pancytopénie + splénomégalie.
– HMG, infections répétées, asthénie.
• Biologie
– Pancytopénie avec monocytopénie.
– Présence de tricholeucocytes après leucoconcentration :
leucocytes chevelus.
– Myélogramme difficile car svt très pauvre.
– BOM : myélofibrose réticulinique.
• Traitement
– Analogues des purines : cladribine ou pentostatine.
– 1 semaine à 3 mois.