Accès aux soins

Download Report

Transcript Accès aux soins

« Les services de santé pour de vrai ».

Normes Pratiques, culture professionnelle….

Fatoumata HANE Socio- anthropologue Enseignante chercheure à l’Université de Ziguinchor IRD/INSERM

Précisons

Accès aux soins ne signifie pas accès géographique ou financière mais elle est traitée en lien avec les contraintes liées à la pratique médicale dans des contextes éprouvés par le manque de ressources humaines et matérielles Et les effets de celles-ci dans les interactions en cours dans le champ sanitaire

Légitimité

Différentes légitimités professionnelles de interagissent.

l’organisation Les du règles travail concourent à privilégier l’accentuation des facteurs managériaux tandis que la multiplicité des spécialités médicales crée une multipolarité dans l’organisation des structures complexes de santé.

Fonctionnement au quotidien des services de soins

Postulat de base: les comportements des personnels de santé ne sont pas purement aléatoires mais s’inscrivent dans des logiques récurrentes qu’il s’agit d’identifier.

Par exemple: médecin qui évite certains services comme le PNT et qui dit «

la tuberculose ne m’intéresse pas, les malades sont sales, tristes. Quand tu les vois, tu n’as même pas envie de les

toucher », Lui c’est un concepteur: « Dr Ordinateur » Ou encore ce professeur en médecine qui « flique » les malades et leurs accompagnants

Normes Pratiques

 Entre les normes officielles et les comportements effectifs, il y a les « normes pratiques ».

 Les normes pratiques sont définies comme des normes de fait, des normes latentes qui régissent les comportements des acteurs

Décalage

Il suffit d’évoquer l’importance des décalages entre la formation très académique des soignants censée transmettre les normes professionnelles officielles et les conditions d’exercice du métier qui sont sans rapport avec ce qui a été appris. Non préparés à affronter des malades réels dans des situations réelles dépourvus des outils diagnostiques et cliniques appris dans les manuels , les soignants débutants éprouvent « un choc de la réalité » générateur de frustrations profondes

Assez vite, nombre d’entre eux baissent les bras ou simplement se protègent par la mise en place de barrières psychologiques ou comportementales entre les malades et eux mêmes.

On pourrait parler d’une « construction médicale de l’indifférence » nécessaire à la survie du soignant dans un environnement difficile auquel il n’est pas préparé.

Culture Professionnelle locale

Il s’agit d’une « culture » c’est-à-dire des représentations, des stratégies, des normes relativement partagées par les personnels de santé. Façon locale peu différente du modèle officielle tout en incorporant de nombreux éléments de celui-ci mais mêlés à des habitudes, des tours de mains correspondant à un savoir faire spécifique, des ajustements liés au site , au fonctionnement particulier de la structure, aux contextes….

Yow nopalul fi liguey bobu amou fi

Décrivons une journée ordinaire passée aux côtés des infirmières et des aides d’un service hospitalier.

Pendant que les médecins font les visites, elles sont dans leur bureau. Elles y arrivent souvent vers neuf heures ; une fois qu’elles se sont changées, elles vont prendre le petit déjeuner. Certaines discutent, d’autres somnolent ou encore vont voir leurs amies et collègues d’autres services.

Une journée ordinaire Entre 10h30 et 11h, les compresses sont cotons mis en boule et découpées, les stérilisés dans la poupinel qui avait auparavant servi à réchauffer les sandwichs. Entre temps passe le vendeur de cacahuètes ; quelqu’un du groupe en achète et les pose sur la table à coté des compresses ; on mange, on continue à discuter jusqu’à l’arrivée de la cousine d’une des infirmières pour présenter sa marchandise (sacs, chaussures et autres articles).

L’infirmière appelle alors ses collègues et stagiaires des autres services, on essaie, on marchande.

Une journée ordinaire Plus tard, passera le marchand de poisson. Outre que demande comment font toutes ces personnes font pour l’on se échapper au contrôle (alors qu’à certaines heures, l’accès aux différents services de l’hôpital est interdit aux visiteurs), on constate donc que ces personnels de activité santé consacrent très peu de temps à leur professionnelle.

Certains d’entre eux pouvant pratiquement ne rien faire jusqu’à la fin de leur service. Ce constat appelle néanmoins une autre remarque : le bureau des infirmières constitue un lieu de socialisation professionnelle et extra- professionnelle important. Ils sont le lieu de socialisation professionnelle et sociale, dont la fréquentation constitue un moyen pour s’intégrer au groupe : qu’ils soient professionnels ou non, les soignants qui ne participent pas aux sociabilités sont très vite marginalisés

La Délégation des tâches comme principe d’organisation des soins

Mode de fonctionnement des structures de santé c’est le confiage des tâches à des catégories subalternes Médecin délègue à l’infirmer les prescriptions , les consultations, l’infirmier délègue aux aides soignants , les brancardiers délèguent aux accompagnants…

Que délègue t- on et à qui?

La délégation des tâches a ses propres règles : on ne délègue pas tout, on ne délègue pas à n’importe qui. La délégation des tâches dépend de la capacité d’un personnel de santé à négocier l’exercice de tâches au quotidien. Ce principe de délégation de tâches crée de nouvelles fonctions au bas de la hiérarchie.

Déléguer

Ce décalage des fonctions vers le bas s’accompagne souvent de la banalisation des actes médicaux, dont la conséquence est une sur-valorisation des fonctions du personnel communautaire.

Effets sur les interactions

 Nivellement des pratiques par le bas  Confusion des tâches et des rôles: « doctorisation » de tous ceux qui portent une blouse  Emiettement des statuts  Dilution des responsabilités  Difficultés d’appliquer des sanctions = impunité  Impunité aussi entrainée par les modes de recrutement

Exemple

A. N. était un jeune qui se traitait dans le centre de santé depuis plus de trois mois. Chaque jour il se présentait pour prendre ses médicaments. Mais il était tout le temps essoufflé et le responsable de traitement estimait que c’était dû au fait qu’il faisait quelques kilomètres à pied, ce qui le fatiguait.

en plus.

Devant la persistance de cet essoufflement et des oedèmes aux pieds qui étaient interprétés comme des effets secondaires des antituberculeux, il lui donna de la vitamine B

Son état ne s’améliorant pas, il lui demanda de faire une radio, ce qu’il fit quelques jours plus tard. La radio fut présentée au médecin chef qui décida de l’hospitalisation de A.N. pour un problème cardiaque. Après deux jours, son état s’aggravait et nécessitait une référence à l’hôpital. Mais le jour où il devait être évacué, il fallut d’abord attendre la fiche du médecin, qu’il obtint en fin de matinée, puis que la famille rassemblât l’argent nécessaire pour payer le transport, l’ambulance n’étant pas disponible. Quelques heures avant son transfert, il commença à avoir des convulsions .

La responsable de traitement était désemparée, elle appela le major qui demanda au réanimateur de venir avec un masque à oxygène. Celui-ci voulut d’abord s’assurer que les examens de crachats étaient bien négatifs avant de le lui poser, par peur de la contamination. Il traîna les pieds et arriva bien une demi heure après, alors que son service était quasiment accolé à l’unité de traitement. Il n’eut jamais le temps de poser le masque car le patient mourut.

MAIS…. Des cercles vertueux existent encore

Les cercles vertueux peuvent être perçus à travers un ou des groupes organisés autour de valeurs communes de moralité, de fidélité à l’éthique et à la déontologie ou bien autour d’objectif précis réunissant des agents divers, se situant à des niveaux de responsabilités différents.

encore

En effet dans les comportements, la conception qu’ils ont de leur mission, les raisons qui les ont conduits à choisir le métier, leur souci de rigueur et de rentabilité, leur dévouement et leur disponibilité, les idées convergentes qu’ils développent dans des entretiens séparés, font qu’on peut classer trois ou quatre agents dans un cercle vertueux.

Au total, les établissements de santé se présentent comme des espaces qui ont fait l’objet d’une infiltration profonde et généralisée de pratiques culturelles propres à l’environnement social, pratiques qui cohabitent avec les normes hospitalières officielles, le plus souvent sous le mode d’une apparente et courtoise coexistence pacifique.