De la Pédagogie Institutionnelle Adaptée

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Transcript De la Pédagogie Institutionnelle Adaptée

Quelques repères pour une prise en charge pédagogique adaptée aux
jeunes qui présentent des difficultés psychologiques dont l’expression,
notamment l’intensité des troubles du comportement, perturbe
gravement la socialisation et l’accès aux apprentissages.
Olivier Mayette,
Coordonnateur Pédagogique d’Unité d’Enseignement d’ITEP
Formateur
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« Nous ne pouvons pas avoir les mêmes
méthodes pédagogiques avec ceux qui vivent la
connaissance et la situation d’apprentissage
comme un danger qu’avec ceux qui la vivent
comme un moyen de réassurance.»
S.BOIMARE
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« L’élève en difficulté devient un élève
difficile. L’indiscipline est une manière de
survivre psychologiquement à la brutalité
symbolique de la violence scolaire. »
Eirick PRAIRAT,
Questions de discipline à l’école et ailleurs…
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Posez la question à l’opinion publique, allez explorer les représentations des
enseignants même spécialisés parfois : la mission de l’école n’est pas de
soigner.
 Et c’est sans doute en partie vrai. Mais en partie seulement. La preuve est
étymologique: eduquer vient de deux verbes; educere et educare…
 Les difficultés psychologiques ne sont pas l’apanage des élèves en difficulté
scolaire: l’anorexie touche très majoritairement des jeunes filles brillantes
dans leur cursus scolaire !
 Si le terme de psychopédagogie n’est plus à la mode ce n’est pas pour autant
que les rapports entre les deux disciplines n’existent magiquement plus. Elles
sont même indissociables quoi qu’on en dise…
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Qui n’a pas été confronté à un cas d’élève que l’institution école a
indéniablement mis à mal, notamment à ce niveau psychologique qui nous
intéresse ici.
 Si elle peut indéniablement abîmer psychiquement alors pourquoi l’inverse
ne serait pas vrai?
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Aucun pédagogue sérieux n’a jamais voulu pratiquer de thérapie dans sa
classe, Fernand OURY, frère du psychiatre Jean OURY, rappelait que
vouloir faire de la thérapie en classe reviendrait à peu près à pratiquer
« une opération à cœur ouvert dans un grenier. » L’école n’est pas un
centre de guérison, ni même un médicament.
Mais l’école, lorsqu’elle se veut pédagogique, ce qui ne va pas de soi,
peut participer elle aussi, et de façon parfois extrêmement efficace y
compris avec des enfants troublés, à la construction d’un sujet au sens
psychanalytique du terme.
L’école est le lieu où l’on rencontre le monde et les autres, et où,
en y donnant sens on va pouvoir quelque peu pacifier cette rencontre.
L’école a par elle-même des vertus soignantes pour certains enfants
TCC: elle apaise et outille les enfants intellectuellement lorsqu’elle
accueille la différence plutôt que de stigmatiser : c’est tout l’enjeu de
l’inclusion scolaire
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La question du diagnostic n’est évidemment pas du ressort des enseignants ou
des AESH;
Néanmoins: troubles du comportement, états limites et borderline, autisme,
TED, hyperactivité, psychose ou névrose, troubles associés …Les chapelles de
pensée de la psychiatrie et de la psychologie (référents théoriques) et leurs
enjeux doivent être connus des intervenants.
Mais quoi qu’il advienne gardons à l’esprit que 2 diagnostics identiques
porteront toujours sur des enfants particuliers et très différents l’un de
l’autre. Dire d’un enfant qu’il est autiste est une précieuse information… qui ne
dit pas grand-chose de l’enfant lui-même : il reste à rencontrer !
Si les causes sont multifactorielles et bien souvent plurifactorielles le concept
des « enfants non-sécure » (confiance foncière : théories de l’attachement) est
celui qui est avancé le plus souvent pour expliquer les difficultés de nombre de
ces enfants. (cf. Bowlby, Lorenz, Harlow, Erikson)
N’oublions jamais que la frontière entre normal est pathologique n’est jamais
figée, qu’elle est tout autant un état de fait qu’une valeur culturelle.
Et que nous sommes nous aussi sujets de nos angoisses et de nos passions…
« Rien de ce qui est humain ne m’est étranger. » Nietzsche…
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La notion de trouble des conduites et des
comportements s’applique à « des enfants,
adolescents ou jeunes adultes qui présentent des
difficultés
psychologiques
dont
l’expression,
notamment l’intensité des troubles du comportement,
perturbe gravement la socialisation et l’accès aux
apprentissages. Ces enfants, adolescents et jeunes
adultes se trouvent, malgré des potentialités
intellectuelles et cognitives préservées, engagés dans
un processus handicapant qui nécessite le recours à des
actions conjuguées et à un accompagnement
personnalisé » (cf. art. D312-59-1 et suivants du Code
de l’action sociale et des familles).
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Mêle les troubles relevant de la conduite (« transgression des
règles sociales »)…*
…et ceux relevant du comportement (« réactions émotionnelles
inadaptées »).
Mais qui sont des symptômes d’une difficulté psychologique : il
ne s’agit jamais d’un simple problème éducatif …
Est pathologique ce qui est trop fréquent et/ou trop intense par
rapport à la norme… et durable dans le temps
Les capacités mises en jeu par le scolaire entremêlent en
permanence la possibilité de penser et la relation à l’autre, qu’ils
soient les pairs ou l’enseignant.
Le cognitif ne saurait fonctionner sans interagir avec le registre
psycho-affectif
Les comportements qui nous troublent ont la plupart du temps
une fonction défensive pour l’enfant qui agit ainsi…
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Les échecs scolaires des élèves « agités » par des troubles du comportement révèlent des échecs à
plusieurs niveaux : notamment
 situationnel : la situation scolaire liée à un cadre institutionnel et à une demande scolaire, :
 psychique : leurs troubles sont beaucoup plus handicapant pour la vie scolaire que ce que la banalité
des signes et des symptômes émergeant sur la scène scolaire laisse supposer
Ces enfants montrent une psychopathologie qui affecte principalement
 les liens (le rapport à l’autre différent de soi.
 les passages (passage d’une activité à une autre)
 les changements (regard, attitudes ou ambiance différents)
 la socialisation (le rapport à la communauté, à l’institution et à la loi).
Au niveau des apprentissages deux obstacles principaux liés l ’un à l’autre caractérisent souvent ces
enfants:
 La « peur d’apprendre » (S.BOIMARE) On ne peut comprendre l’énergie avec laquelle ces enfants
tentent de pervertir la scène scolaire qu’en admettant que l’exercice de la pensée et de
l’affrontement au manque qui va avec menacent leur équilibre psychique déjà précaire.
 Le manque d’appétence scolaire : le désir épistémique, l’envie d’apprendre est déjà une
sublimation des pulsions. Comment l’élève pourrait-il investir et vouloir découvrir le monde extérieur
alors même que son monde intérieur est en perpétuelle ébullition et questionnement ?
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L’élève troublé et troublant met en avant des modalités de défense
d’une profonde inquiétude humaine qui se traduit par :
 de l’agir et beaucoup de passages à l’acte ou d’hyper réactivité (ce qui ne peut
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être pensé ne peut être métabolisé et s’exprime dans l’agir du corps)
des temporalités très éphémères (pris par l’urgence de la pulsion),
des processus de défense très instables de type borderline ou sujet-limite,
(crise puis homéostasie)
de la rigidité comportementale,
de la violence très originaire et peu refoulable (projetée sur l’autre ou son
propre corps tentative de suicide),
des relations très addictives ou abandonniques (toute puissance de l’autre),
de la double contrainte : avoir besoin de l’autre (de par une grande insécurité
intérieure) en qui il ne peut avoir confiance,
ressentir d’une façon démesurée la mort,
beaucoup de fatigue et d’usure au contact de l’autre,
beaucoup de perméabilité à l’environnement...
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Trouver la limite étant la problématique majeure des
élèves ayant des troubles du comportement (Sylvie
Canat), c’est-à-dire pouvoir :
 contenir leurs affects (amour, passion, haine, colère, déception,
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dépression...),
contenir leurs pensées,
limiter l’impact de la demande de l’autre,
limiter les effets de la présence de l’autre (l’autre est intrusif) : le
regard de l’autre, la pensée de l’autre, les affects et les émotions
de l’autre...
se contenir dans l’espace, à sa table, sa chaise...
se contenir dans un cadre donné...
contenir leur agitation et besoin constant de mouvement dans
l’espace
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Il est quelques attitudes de base à adopter face à un élève porteur de TCC
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Engager une communication individualisée
Expliquer en privé ce qu’on attend de lui, et engager un dialogue
Demander si des propos ont pu le blesser
Eviter dans un premier temps l’humour, le second degré : certains peuvent ne
pas avoir accès à ce niveau de langage
Souligner tout succès
Encourager tout effort
Rester maitre de soi permet de diminuer l’agressivité : ce n’est pas la personne
qui est visée, mais la fonction
Permettre à l’élève de percevoir le manquement aux règles de fonctionnement
du groupe et ses conséquences
Gérer les problèmes de comportements mineurs d’une manière positive et
immédiate (ne pas différer la sanction)
Mettre en place des sanctions éducatives (ni brimer, ni humilier !!!!)
Faire réfléchir à sa finalité
Faire réparer le préjudice subi : prise en compte de la victime
Permettre la réinsertion dans le groupe
Définir des rituels d’entrée et de sortie
Charles Lagard,
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Observer, repérer
Partager ces observations ( aux autres
intervenants, à l’élève lui-même !)
 Adapter en fonction des observations
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Mettre en place des protocoles
Des stratégies
Aménager (notamment) l’espace et le temps
Aider en veillant à ne pas oublier l’autonomisation
 Mesurer les effets des aménagements, réguler…
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Le plus grand écueil est de ne pas mesurer que la difficulté
de ces enfants réside d’abord dans le rapport à l’autre, la
relation !
Ainsi l’AESH doit être conscient qu’il/elle ne pourra exercer
auprès de ce jeune qu’en se faisant accepter par lui
Autrement dit c’est très complexe et cela peut rapidement
devenir usant d’accompagner ces enfants si la relation
n’est pas sécurisante (pour les 2 !)
Sans quoi l’accompagnant risque de devenir à son tour un
danger permanent pour le jeune
Et de lui faire « fabriquer du trouble » pour se défendre…
Il faut réussir à nouer une alliance avec l’enfant, son
enseignant, sa famille : ensemble contre le trouble !
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http://cache.media.eduscol.education.fr/file/
Handicap/85/6/Formation_TCC_222856.pdf
http://pedagogie.actoulouse.fr/ash82/IMG/pdf/Troubles_des_con
duites_et_du_comportements_Charles_Laga
rd.pdf
http://sylviecastaing.chez.com/comportemen
t.htm
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