Induction et entretien d`une anesthésie générale

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Transcript Induction et entretien d`une anesthésie générale

Lopez/ Rabier
Anesthésio
18/03/09
15-16H
Induction et entretien d’une anesthésie générale
Dans ce cours, le prof va présenter les étapes de l’anesthésie et les choses à réaliser de façon
pratique lors d’une anesthésie.
Une anesthésie générale se fait en quatre temps, c’est une séquence globale :
-une phase préparatoire de l’animal et de l’environnement
-une phase d’induction de la narcose
-une phase de maintien et d’entretien de la narcose et d'une analgésie puissante
-une phase de réveil
« Il n’y a pas d’anesthésiques sans risque, il n’y a pas de techniques anesthésiques sans risque, il n’y
a que des anesthésistes prévoyants » dixit le Pr. Muir, référence mondiale en anesthésiologie
vétérinaire.
Il est donc important de surveiller et prévoir. « Pour une erreur commise par ignorance, cent le sont
par manque de prévoyance ou de vigilance » dixit le Pr. Yves Moens, célèbre anesthésiste européen.
Les enjeux de l’anesthésie générale sont de maîtriser les conséquences de la narcose (et plus
généralement du protocole anesthésique) sur les grandes fonctions, souvent les effets de la narcose
sont dose-dépendants.
Pendant l’anesthésie générale, les deux phases à risque sont l'induction et le réveil (ou résolution).
Pendant la phase de réveil, les animaux sont souvent remis en cage sans surveillance, mais il ne faut
pas oublier que l’anesthésie ne s’arrête que lorsque l’animal se réveille, donc il ne faut pas négliger
la surveillance post-opératoire. Il arrive parfois de retrouver l'animal mort cinq minutes avant que le
propriétaire vienne le chercher en fin de journée, alors que l'opération s'est tout à fait bien passée:
les causes possibles de la mort sont multiples (étouffement, hypothermie, défaut d'oxygène,
bronchopneumonie par fausse déglutition...)
La procédure anesthésique peut ainsi être comparée à un vol aéronautique quant aux différentes
phases à risque: le décollage et l'aterrissage (respectivement l'induction et le réveil). Ce sont à ces
moments qu'il est bon d'avoir un pilote qui manoeuvre l'appareil (le vétérinaire qui applique sa
procédure). L’anesthésie ne consiste pas uniquement à administrer des médicaments: il y a plein de
gestes techniques à réaliser en parallèle, une procédure globale prenant compte de l’ensemble de
l’animal.
La phase préparatoire = préanesthésie = préinduction
Les objectifs pratiques de cette phase sont de mettre l’animal en condition pour supporter
l’anesthésie, il doit être le plus stable possible (réanimation préopératoire), mais aussi de préparer
l’environnement, c’est-à-dire de quoi intuber, oxygéner, préparer les doses de médicaments, etc...
On vérifie que tout est opérationnel.
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 Préparation de l’animal
0/ L’animal doit être à jeûn (8 à 12H) sauf pour les sujets pédiatriques où ce temps est réduit voire
absent. Le jeûn permet de limiter les vomissements et chez les ruminants (par exemple le cheval qui
ne vomit pas), le volume de l’estomac doit être le plus petit possible pour limiter les éclatements
possibles mais rarissimes lorsque l’animal tombe.
1/ L’animal doit subir un examen clinique et des examens complémentaires. Il nous faut aussi
obtenir le consentement du propriétaire quant à la procédure qui sera appliquée sur son animal. Ce
consentement doit être éclairé par une argumentation pour que la décision prise par le propriétaire
soit cohérente et adaptée au bien être de l’animal.
2/ S'ensuit la réanimation pré-anesthésique si nécessaire, par exemple lors d’anomalies de l’état
de santé de l’animal, des fonctions respiratoires et/ou circulatoires. L'objectif est de limiter les
conséquences des facteurs favorisant les complications, à l'instar des troubles de la kaliémie, de
l'hydratation... Cela prend au maximum 1 à 2h.
3/ Les objectifs de la prémédication anesthésique sont de :
- Limiter le stress de l’animal (pire ennemi de l’anesthésiste), car il est synonyme de
catécholamines en quantité importante, de besoins accrus en O2, de risque de trouble des
rythmes cardiaque et respiratoire. L'animal doit être le plus calme possible, surtout s'il s'agit
d'un herbivore. Les chevaux (herbivores peu cérébrés d'après le professeur: « ça n'a rien de
choquant, c'est juste un constat clinique: un cheval a un Q.I. d'huître ») fuient dès qu’ils se
sentent agressés. Le contrôle du stress permet de se préserver l'animal des éventuelles
complications mais aussi de se protéger des mouvements brusques que l’animal pourrait
faire: on peut s'éviter un fer dans la figure sous prétexte que le cheval a croisé un mouton
(anecdote vécue par une malheureuse copromo du Professeur).
-
Débuter le plus précocement la mise en place de l’analgésie. Il s'agit ici de bloquer les
voies de remontée de l'influx nerveux avant que la douleur apparaisse.
-
Faciliter la préparation de l’animal, par exemple pour poser une voie veineuse sécurisée
ou permettre de tondre et le début de l’asepsie
-
Limiter les incidents. Ainsi, la qualité de la prémédication conditionne la qualité du réveil
(plus confortable, apaisé, moins agité). Il permet aussi de limiter les vomissements et le
trouble du rythme cardiaque
-
Réduire les besoins de narcose (et donc les doses administrées), ce qui est intéressant car
le premier risque anesthésique est la narcose. Par la prémédication on a une potentialisation
des agents de l’inconscience.
Les principaux médicaments utilisés en prémédication sont:
- Les alpha 2 agonistes, utilisés chez toutes les espèces et puissants analgésiques
- Les morphiniques, souvent combinés aux alpha 2 agonistes
- L’acépromazine (Vétranquil ou Calmivet), découverte par Henry Laborie et associée à des
morphiniques
- La benzodiazépine et les morphiniques
- etc...
Une des grandes règles de l’anesthésie est que l’association de médicaments rend le protocole
beaucoup plus efficace pour l’analgésie (= analgésie multimodale). Toute la subtilité du protocole
réside le plus souvent dans la prémédication.
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Les interventions sans prémédication sont extrêmement rares, par exemple les hernies
diaphragmatiques.
Notons qu’il faut attendre que la prémédication agisse avant d’induire la narcose.
Les différentes voies d’administration des médicaments sont :
- Intra-veineuse : la plus rapide pour l’efficacité des médicaments (action en 5 min)
- Intra-musculaire/Sous-cutanée : pour les animaux que l’on ne peut pas toucher (action en
15-20 min)
- Orale : rarement utilisée chez les carnivores domestiques mais plutôt chez les hommes. Le
problème de cette voie c’est qu’elle est peu reproductible car la biodisponibilité est aléatoire,
il faut attendre la mise en place des effets pour observer ses conséquences et vérifier son
intensité.
La réduction de l’induction de la narcose est possible si l’animal est beaucoup sédaté. Ainsi, il n’y a
pas de protocole précis, il faut observer l’animal après la prémédication et on en tire des
renseignements pour l’induction de la narcose.
 Préparation de l’environnement anesthésique
Il faut équiper la salle et le poste, vérifier si on utilise un anesthésique volatil que la pompe ne fuit
pas, préparer les seringues et les doses pour les injections...
La phase de prémédication est une phase capitale mais souvent négligée. En outre, si la
prémédication est bonne, le réveil est plus stable.
La phase d’induction
Les enjeux
L’animal doit être « prêt ». Par exemple, pour un cheval on doit vérifier l’endroit où va se coucher
l’animal, s’il y a assez de personnes pour le maintenir quand il va tomber. L’animal doit avoir une
voie veineuse sécurisée avec du cristalloïde.
L’induction de la narcose va provoquer une perte de vigilance et de tonus musculaire. Le cheval va
donc vous tomber sur les pieds, attention si la chute est trop brutale, elle peut créer des fractures.
Les voies d’administration
La voie doit être choisie pour être titrée et reproductible: la voie royale est donc la voie intraveineuse (IV). Elle permet de faire un ajustement au cours du temps, il n’y a pas de latence dans
l’apparition de la narcose et elle est reproductible.
La voie IM est possible mais uniquement choisie si l’IV n'est pas réalisable. La concentration
plasmatique augmente plus lentement dans ce cas et il y a un temps de latence avant l'apparition des
effets.
Par exemple, le cheval qui se sent partir peut stresser, se cabrer et se blesser ou nous blesser, il ne
faut donc pas faire d’IM chez le cheval.
Un autre exemple, un chat qui va mettre 30 min à s’endormir, stresse, et tant qu’il n’est pas endormi
on ne peut pas sécuriser les voies aériennes. Si l’animal a un problème respiratoire, on ne peut pas
intervenir.
L’IM n’est donc pas une voie de référence.
Les médicaments utilisés (pour s’imprégner des noms)
-
La kétamine : un dissociatif, son problème est d’augmenter le tonus musculaire donc il est
toujours associé à un myorelaxant: le diazépam (benzodiazépines). C’est un grand classique
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-
chez les chevaux car facile à surveiller, mais rarement utilisé chez les carnivores
(surveillance plus difficile).
Tilétamine + Zolazépal
Thiopental
Propofol (appelé le « lait » à cause de sa couleur)
Halogénés: utilisés par une induction au masque (voies respiratoires). Les masques utilisés
pour les NAC et les poulains peuvent stresser les animaux, il est donc important de bien les
prémédiquer.
Les techniques
- Il faut ajuster la dose à chaque animal, d'où l'importance de la pesée.
- Il faut aussi administrer en titrant, ainsi on administre un médicament jusqu’à obtenir l’effet
désiré.
- La prise en charge du décubitus est importante: un cheval debout doit se coucher sans se blesser.
Les techniques de couchage des grands animaux seront vues en D3. Pour tous les animaux, il faut
privilégier le décubitus sternal car il y a toujours une hypoventilation lors de l’anesthésie: cette
position permet d’optimiser la ventilation. La pire des positions est le décubitus dorsal pour les
mêmes raisons. Le décubitus latéral est une position moyenne. Un animal critique ou qui se réveille
d’une anesthésie doit toujours être en décubitus sternal.
- Il faut sécuriser les voies aériennes: on peut faire une intubation orotrachéale, une intubation
nasotrachéale chez les ruminants et les chevaux. L’intubation trachéale (la trachéotomie) est très
rare et difficile car la sonde se bouche tout le temps.
L’intubation doit se faire systématiquement sur toutes les narcoses supérieures à 20 min.
L’intubation se fait donc quelque soit le protocole anesthésique et pas uniquement pour les
anesthésies volatiles.
La pratique
En première intention, on utilise l’IV sauf sur les chats agressifs. C’est une voie de référence chez
toutes les espèces, elle permet une titration et une narcose facile: on peut donc sécuriser rapidement
les voies aériennes. Par exemple, il faut ventiler très rapidement pour les hernies diaphragmatiques,
donc tant que l’animal n’est pas inconscient il est en danger: il faut intuber très vite et maîtriser
rapidement l’anesthésie.
L’induction au masque se fait en deuxième intention. Pour les NAC surtout, il faut des masques
spéciaux que l’on peut bricoler avec des seringues (voir photo des masques pour cobaye, rat,
souris). On peut titrer mais la latence est longue. L’odeur des halogénés peut stresser l’animal, il
faut donc augmenter progressivement la dose. La rapidité de l’induction dépend de la ventilation.
L’induction à la cage se fait aussi en deuxième intention. Le pourcentage des vapeurs
anesthésiques est maximum dès le départ pour aller le plus rapidement possible. C’est utilisé pour
les chats agressifs qu’on met directement dans la cage, cependant on ne fait pas les examens
clinique et complémentaire, il n’y pas de prémédication, pas de voie veineuse sécurisée. On
augmente ainsi les risques, mais il n’y a pas d’autre moyen si les animaux sont agressifs.
La durée de la phase de la narcose est variable selon les médicaments utilisés. La tilétamine dure
30-40 min. Le propofol et les halogénés ont une courte durée d’action, ce qui permet l’entretien de
la narcose par injection en continu.
Pour les autres médicaments comme la kétamine, si on fait plusieurs injections, il faut faire
attention à la concentration des médicaments car la durée de la narcose est différente de la durée du
réveil complet et l’accumulation de produit augmente le temps de résolution (idéalement la plus
courte possible).
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La phase d’entretien
Les enjeux
On recherche une narcose stable pour avoir des fonctions vitales stables, il faut donc administrer en
continu et ajuster « régulièrement ». L’anesthésie est alors moins risquée car il n’y a pas de
succession de phases de réveils et d’endormissements, les phases les plus à risque.
Attention, il faut toujours vérifier l’analgésie, si un animal bouge lors de l’incision c’est que
l’analgésie n’est pas suffisante et pas forcément la narcose. La plupart des problèmes proviennent
d’un manque d’analgésie.
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