« Ce qu’éprouvent les grands-parents » Catherine Le Grand-Sébille : Socio-anthropologue, Maître de conférences, Faculté de médecine, Lille 2 Sociologie des Grands-Parents La sociologie.

Download Report

Transcript « Ce qu’éprouvent les grands-parents » Catherine Le Grand-Sébille : Socio-anthropologue, Maître de conférences, Faculté de médecine, Lille 2 Sociologie des Grands-Parents La sociologie.

Slide 1

« Ce qu’éprouvent les grands-parents »

Catherine Le Grand-Sébille : Socio-anthropologue,
Maître de conférences, Faculté de médecine, Lille 2

Sociologie des Grands-Parents
La sociologie de la grand-parentalité a connu en France,
grâce aux deux sociologues Claudine Attias-Donfut et
Martine Segalen une croissance et une fécondité
inégalées dans les autres pays francophones.
Depuis une vingtaine d’années, elles étudient un fait
démographique majeur, celui de l’allongement de la vie
et de la multiplication contemporaine des grandsparents, refusant de les laisser dans l’ombre.
Il y a près de 13 millions de grands-parents en France, on
ignore combien d’entre eux ont un petit enfant
gravement malade ou décédé.

Rôles et fonctions
Les
grands-parents
ont
des
fonctions
symboliques essentielles et exercent aussi un
rôle concret. Comme le dit M.F. Fuchs ce sont
des « relieurs » et des « transmetteurs » :
continuité familiale, inscription temporelle,
véhicules des valeurs familiales, garantie de
l’existence de l’histoire, témoignage de la mort
des générations plus âgées, légitimation du
parent auquel l’aïeul à passer le relais pour
devenir parent à son tour…

L’éternelle question de la « place »
• La récurrente question de la « bonne » place
est ainsi précisée par J-P Dommergues : « Le
rôle des grands-parents est d’être disponible
mais sans prendre la place des parents et en
sachant revenir au second plan quand les
parents sont présents. Ce jeu d’acteur de la
relation fait alterner un travail d’avant-scène
puis d’estompe en coulisse mais avec une
permanence affective qui garantit aux grandsparents de ne pas être des intermittents du
spectacle de la vie familiale… ».

• L’entreprise morale et normative
de
la
médecine
et
de
la
psychologie est ici perceptible, tant
le modelage spatial et relationnel
exigé
du
grand-parent
est
complexe
et
représente
probablement
un
défi
hors
d’atteinte.

Des dynamiques historiques
• Les processus politiques et sociaux que
sont la professionnalisation du soin, la
médicalisation, la technicisation et
l’institutionnalisation de la naissance et
de la mort, nous sont maintenant bien
connus
grâce
aux
travaux
des
historiens et des sociologues.

La disqualification des
savoirs familiaux


Il existe des tendances lourdes
qui caractérisent depuis la fin du
XIXe siècle, la disqualification puis
la mise à l’écart des savoirs
profanes sur la maladie et la mort
des enfants, et des soins familiaux
qui leur étaient afférents.

Une représentation de la
famille atomisée
De fait, les familles, longtemps tenues
éloignées des services de maternité et de
pédiatrie, trouvent depuis quelques
dizaines d’années, la possibilité d’y
entrer. Ce problème est structurel et
n’est pas lié à la seule volonté des
acteurs. Cette exclusion de la famille
élargie,
notamment,
est
une
caractéristique de notre médecine, à la
différence de celle d’autres pays.

Les parents de l’enfant sont les
interlocuteurs
privilégiés
et
souvent
uniques
des
professionnels, ce qui complique la
communication sur la santé du
bébé, entre parents et grandsparents.

Les liens « forts » n’excluent pas
les tensions et conflits
• Claudine Attias-Donfut et Martine Segalen qui
ont beaucoup travaillé sur les solidarités
familiales exercées par les grands-parents,
mettent aussi en lumière que ces liens
intenses sont tissés parfois de difficultés qui
vont de la tension passagère à la rancœur ou
au conflit. Elles rappellent que si les grandsparents, de par leur simple présence, offrent
un formidable socle identitaire à leurs petitsenfants, leurs relations n’échappent pas à la
complexité des liens interindividuels.

• Nous ne nions pas l’existence de
tels conflits au sein des familles,
dans le contexte de notre étude
qui donne la « part belle » aux
grands-parents, sans taire les
peines et les regrets qui teintent
de tristesse certains témoignages,
en cas de disputes.

Notre étude
«

Être le grand-parent d’un enfant
gravement malade aujourd’hui en
Suisse, au Québec et en France »
Réalisée en France grâce
l’association Soleil AFELT.

à

La population concernée
• Nombre de Grands-parents rencontrés:
France : 35, Québec : 24, Suisse : 21
• Petits-enfants décédés
France: 4, Québec : 6, Suisse : 2
• Âge des petits-enfants : 1 jour à 17 ans
• Pathologies concernées: cancers, maladies orphelines,
grande prématurité.
• Milieux sociaux, urbains / ruraux variés
• Soignants rencontrés médecins et professionnels
paramédicaux, sociaux, psychologues:
France : 18, Québec : 6, Suisse 5

Constats
Ils sont des aidants précieux pour
chacun, sur le chemin périlleux qui
suit le décès du bébé, mais des
aidants mal connus et peu
reconnus. L’aide qu’ils apportent
sera utile dans la traversée du
deuil de toute la famille.

Différences culturelles à l’hôpital dans l’accueil
des grands-parents

• Il apparaît que les différences sont plus marquées entre les
services hospitaliers parfois au sein du même hôpital, qu’entre
les pays.
• Quelques grandes tendances sociologiques cependant pour les
trois pays :
 Des grands-parents proches, en France, des deux
générations
plus jeunes.
 Un souci d’indépendance des enfants semblent plus
marqué en Suisse qu’en France.
 Des « figures » puissantes de grands-mères au Québec,
constituées historiquement comme telles, devant les
absences prolongées des hommes.

• Les soignants nous disent souvent que
grâce à cette enquête, et avant même
d’en connaître les résultats, ils ont été
plus attentifs aux grands-parents.

Mal connus, peu reconnus

• Les grands-parents sont encore trop souvent
les oubliés de la réflexion sur les proches de
l’enfant malade. Les associations aussi n’ont
pas toujours pensé à eux.
« On aurait aimé rencontrer quelqu’un, mais on ne savait pas
où taper... Je crois qu’on aurait aimé rencontrer des gens qui
ont vécu des grandes souffrances, pour pouvoir être
écoutés ». (GM)

Mal connus, peu reconnus
«

Y a des choses pour les parents, y a rien pour les
grands parents ! » (G-M)

« Parler à l’hôpital avec d’autres grands-parents, ça m’a
beaucoup aidé » (G-P)

• Quand on se soucie de les écouter, les grands-

parents ont en effet, beaucoup à dire.

Quelques uns des points récurrents dans
les témoignages des grands-parents

• Ils indiquent tous l’injustice de voir la
maladie grave et la mort frapper les plus
jeunes, quand la logique générationnelle
voudrait que ce soient eux qui soient victimes.
« Maman l’arrière grand-mère disait : « C’était
pas à Julie de partir, c’était à moi » (G-M)

Des grands-pères qui se
révèlent
• Apparemment moins présents, appartenant à des
générations peu loquaces, on retrouve des
grands-pères qui pleurent leur petit-enfant, qui
soutiennent leur fils ou leur fille de manière tout
aussi importante, plusieurs possédant de réels
savoir-être qui n’est pas souvent exprimé face aux
soignants.

La double souffrance
• Ils et elles disent tous combien leur statut
dans la famille les amène à souffrir « deux
fois », pour l’enfant et le petit-enfant.
« Finalement les grands-parents souffrent presque deux
fois : on souffre pour notre enfant et on souffre pour
notre petit enfant. Et voir sa fille souffrir, sa fille triste,
sa fille maigrir, c’est épouvantable. Et de la voir pas
toujours soutenue par son mari, j’ai trouvé que c’était
très difficile »(G-M)

L’intensité de leur deuil
« Nous croyons qu’il ne faut pas sous-estimer le rôle et la
douleur vécus par les grands-parents des familles
endeuillées. D’ailleurs, les expériences les plus appréciées
par les grands-parents au moment du décès étaient leur
inclusion dans les derniers moments où ils eurent la chance
de prendre leur petit-enfant dans leur bras avant de le
quitter, où ils étaient présents pendant les discussions avec
les médecins et infirmières ».
dans Le deuil des grands-parents.
Enquête par questionnaire postal auprès de 21 grands-parents
Sophie Lessard, M.D., Claude Cyr M.D.
Département de pédiatrie, Faculté de médecine et des sciences de la santé,
Université de Sherbrooke, Canada

Malgré l’intensité de leur peine, les
grands-parents apportent un soutien
d’ordre relationnel, affectif, matériel. Il
est aussi spirituel

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents

La garde des autres enfants
« J’ai pris ma retraite et pendant plusieurs
semaines, je me suis occupé des grandes
(sœurs) afin qu’elles ne se sentent pas
abandonnées » (GP)

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents
• La préparation des repas pour les parents du
bébé et ses frères et sœurs.

• Le maintien des fêtes familiales
« Les fêtes de famille on a toujours continué.
Mais, elles sont quand même très dures.... je
crois que, si on arrêtait, ce serait encore plus
dur... » (G-M)

Quelques éléments d’analyse

• Les grands-parents contribuent à la stabilité
intergénérationnelle tout au long de la vie
familiale.
• Beaucoup d’entre eux ont su organiser les
rituels funéraires, réunir une communauté
plus large que la seule famille, notamment
dans les villages. Ils rendent très souvent
visite à la sépulture
de l’enfant et
l’entretiennent en étant vigilants aux souhaits
des parents.

Les besoins des grands-parents
• Le besoin d’être considérés comme faisant partie de la
famille.
• Le besoin de sentir qu’ils ne dérangent pas.
• Le besoin de poser des questions et, pour certains
d’être seuls avec les soignants.
• Le besoin de pouvoir exprimer leurs inquiétudes et leur
peine.
• Le besoin d’un accueil chaleureux dans un moment
difficile.
 Peu de différences en matière de besoins des
grands-parents d’un pays à l’autre.

Conclusion
Grands-parents et arrières grands-parents ont toute leur
place dans la construction d’une mémoire générationnelle et
d’une vie familiale auxquelles les soignants et les parents
contribuent positivement quand ils favorisent la rencontre et
l’évocation , sans juger les places, les rôles, la distance
bonne ou mauvaise, mais en reconnaissant l’importance de
la filiation.
« Les grands-parents sont importants parce qu’ils
sont les parents des parents » F. Dolto


Slide 2

« Ce qu’éprouvent les grands-parents »

Catherine Le Grand-Sébille : Socio-anthropologue,
Maître de conférences, Faculté de médecine, Lille 2

Sociologie des Grands-Parents
La sociologie de la grand-parentalité a connu en France,
grâce aux deux sociologues Claudine Attias-Donfut et
Martine Segalen une croissance et une fécondité
inégalées dans les autres pays francophones.
Depuis une vingtaine d’années, elles étudient un fait
démographique majeur, celui de l’allongement de la vie
et de la multiplication contemporaine des grandsparents, refusant de les laisser dans l’ombre.
Il y a près de 13 millions de grands-parents en France, on
ignore combien d’entre eux ont un petit enfant
gravement malade ou décédé.

Rôles et fonctions
Les
grands-parents
ont
des
fonctions
symboliques essentielles et exercent aussi un
rôle concret. Comme le dit M.F. Fuchs ce sont
des « relieurs » et des « transmetteurs » :
continuité familiale, inscription temporelle,
véhicules des valeurs familiales, garantie de
l’existence de l’histoire, témoignage de la mort
des générations plus âgées, légitimation du
parent auquel l’aïeul à passer le relais pour
devenir parent à son tour…

L’éternelle question de la « place »
• La récurrente question de la « bonne » place
est ainsi précisée par J-P Dommergues : « Le
rôle des grands-parents est d’être disponible
mais sans prendre la place des parents et en
sachant revenir au second plan quand les
parents sont présents. Ce jeu d’acteur de la
relation fait alterner un travail d’avant-scène
puis d’estompe en coulisse mais avec une
permanence affective qui garantit aux grandsparents de ne pas être des intermittents du
spectacle de la vie familiale… ».

• L’entreprise morale et normative
de
la
médecine
et
de
la
psychologie est ici perceptible, tant
le modelage spatial et relationnel
exigé
du
grand-parent
est
complexe
et
représente
probablement
un
défi
hors
d’atteinte.

Des dynamiques historiques
• Les processus politiques et sociaux que
sont la professionnalisation du soin, la
médicalisation, la technicisation et
l’institutionnalisation de la naissance et
de la mort, nous sont maintenant bien
connus
grâce
aux
travaux
des
historiens et des sociologues.

La disqualification des
savoirs familiaux


Il existe des tendances lourdes
qui caractérisent depuis la fin du
XIXe siècle, la disqualification puis
la mise à l’écart des savoirs
profanes sur la maladie et la mort
des enfants, et des soins familiaux
qui leur étaient afférents.

Une représentation de la
famille atomisée
De fait, les familles, longtemps tenues
éloignées des services de maternité et de
pédiatrie, trouvent depuis quelques
dizaines d’années, la possibilité d’y
entrer. Ce problème est structurel et
n’est pas lié à la seule volonté des
acteurs. Cette exclusion de la famille
élargie,
notamment,
est
une
caractéristique de notre médecine, à la
différence de celle d’autres pays.

Les parents de l’enfant sont les
interlocuteurs
privilégiés
et
souvent
uniques
des
professionnels, ce qui complique la
communication sur la santé du
bébé, entre parents et grandsparents.

Les liens « forts » n’excluent pas
les tensions et conflits
• Claudine Attias-Donfut et Martine Segalen qui
ont beaucoup travaillé sur les solidarités
familiales exercées par les grands-parents,
mettent aussi en lumière que ces liens
intenses sont tissés parfois de difficultés qui
vont de la tension passagère à la rancœur ou
au conflit. Elles rappellent que si les grandsparents, de par leur simple présence, offrent
un formidable socle identitaire à leurs petitsenfants, leurs relations n’échappent pas à la
complexité des liens interindividuels.

• Nous ne nions pas l’existence de
tels conflits au sein des familles,
dans le contexte de notre étude
qui donne la « part belle » aux
grands-parents, sans taire les
peines et les regrets qui teintent
de tristesse certains témoignages,
en cas de disputes.

Notre étude
«

Être le grand-parent d’un enfant
gravement malade aujourd’hui en
Suisse, au Québec et en France »
Réalisée en France grâce
l’association Soleil AFELT.

à

La population concernée
• Nombre de Grands-parents rencontrés:
France : 35, Québec : 24, Suisse : 21
• Petits-enfants décédés
France: 4, Québec : 6, Suisse : 2
• Âge des petits-enfants : 1 jour à 17 ans
• Pathologies concernées: cancers, maladies orphelines,
grande prématurité.
• Milieux sociaux, urbains / ruraux variés
• Soignants rencontrés médecins et professionnels
paramédicaux, sociaux, psychologues:
France : 18, Québec : 6, Suisse 5

Constats
Ils sont des aidants précieux pour
chacun, sur le chemin périlleux qui
suit le décès du bébé, mais des
aidants mal connus et peu
reconnus. L’aide qu’ils apportent
sera utile dans la traversée du
deuil de toute la famille.

Différences culturelles à l’hôpital dans l’accueil
des grands-parents

• Il apparaît que les différences sont plus marquées entre les
services hospitaliers parfois au sein du même hôpital, qu’entre
les pays.
• Quelques grandes tendances sociologiques cependant pour les
trois pays :
 Des grands-parents proches, en France, des deux
générations
plus jeunes.
 Un souci d’indépendance des enfants semblent plus
marqué en Suisse qu’en France.
 Des « figures » puissantes de grands-mères au Québec,
constituées historiquement comme telles, devant les
absences prolongées des hommes.

• Les soignants nous disent souvent que
grâce à cette enquête, et avant même
d’en connaître les résultats, ils ont été
plus attentifs aux grands-parents.

Mal connus, peu reconnus

• Les grands-parents sont encore trop souvent
les oubliés de la réflexion sur les proches de
l’enfant malade. Les associations aussi n’ont
pas toujours pensé à eux.
« On aurait aimé rencontrer quelqu’un, mais on ne savait pas
où taper... Je crois qu’on aurait aimé rencontrer des gens qui
ont vécu des grandes souffrances, pour pouvoir être
écoutés ». (GM)

Mal connus, peu reconnus
«

Y a des choses pour les parents, y a rien pour les
grands parents ! » (G-M)

« Parler à l’hôpital avec d’autres grands-parents, ça m’a
beaucoup aidé » (G-P)

• Quand on se soucie de les écouter, les grands-

parents ont en effet, beaucoup à dire.

Quelques uns des points récurrents dans
les témoignages des grands-parents

• Ils indiquent tous l’injustice de voir la
maladie grave et la mort frapper les plus
jeunes, quand la logique générationnelle
voudrait que ce soient eux qui soient victimes.
« Maman l’arrière grand-mère disait : « C’était
pas à Julie de partir, c’était à moi » (G-M)

Des grands-pères qui se
révèlent
• Apparemment moins présents, appartenant à des
générations peu loquaces, on retrouve des
grands-pères qui pleurent leur petit-enfant, qui
soutiennent leur fils ou leur fille de manière tout
aussi importante, plusieurs possédant de réels
savoir-être qui n’est pas souvent exprimé face aux
soignants.

La double souffrance
• Ils et elles disent tous combien leur statut
dans la famille les amène à souffrir « deux
fois », pour l’enfant et le petit-enfant.
« Finalement les grands-parents souffrent presque deux
fois : on souffre pour notre enfant et on souffre pour
notre petit enfant. Et voir sa fille souffrir, sa fille triste,
sa fille maigrir, c’est épouvantable. Et de la voir pas
toujours soutenue par son mari, j’ai trouvé que c’était
très difficile »(G-M)

L’intensité de leur deuil
« Nous croyons qu’il ne faut pas sous-estimer le rôle et la
douleur vécus par les grands-parents des familles
endeuillées. D’ailleurs, les expériences les plus appréciées
par les grands-parents au moment du décès étaient leur
inclusion dans les derniers moments où ils eurent la chance
de prendre leur petit-enfant dans leur bras avant de le
quitter, où ils étaient présents pendant les discussions avec
les médecins et infirmières ».
dans Le deuil des grands-parents.
Enquête par questionnaire postal auprès de 21 grands-parents
Sophie Lessard, M.D., Claude Cyr M.D.
Département de pédiatrie, Faculté de médecine et des sciences de la santé,
Université de Sherbrooke, Canada

Malgré l’intensité de leur peine, les
grands-parents apportent un soutien
d’ordre relationnel, affectif, matériel. Il
est aussi spirituel

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents

La garde des autres enfants
« J’ai pris ma retraite et pendant plusieurs
semaines, je me suis occupé des grandes
(sœurs) afin qu’elles ne se sentent pas
abandonnées » (GP)

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents
• La préparation des repas pour les parents du
bébé et ses frères et sœurs.

• Le maintien des fêtes familiales
« Les fêtes de famille on a toujours continué.
Mais, elles sont quand même très dures.... je
crois que, si on arrêtait, ce serait encore plus
dur... » (G-M)

Quelques éléments d’analyse

• Les grands-parents contribuent à la stabilité
intergénérationnelle tout au long de la vie
familiale.
• Beaucoup d’entre eux ont su organiser les
rituels funéraires, réunir une communauté
plus large que la seule famille, notamment
dans les villages. Ils rendent très souvent
visite à la sépulture
de l’enfant et
l’entretiennent en étant vigilants aux souhaits
des parents.

Les besoins des grands-parents
• Le besoin d’être considérés comme faisant partie de la
famille.
• Le besoin de sentir qu’ils ne dérangent pas.
• Le besoin de poser des questions et, pour certains
d’être seuls avec les soignants.
• Le besoin de pouvoir exprimer leurs inquiétudes et leur
peine.
• Le besoin d’un accueil chaleureux dans un moment
difficile.
 Peu de différences en matière de besoins des
grands-parents d’un pays à l’autre.

Conclusion
Grands-parents et arrières grands-parents ont toute leur
place dans la construction d’une mémoire générationnelle et
d’une vie familiale auxquelles les soignants et les parents
contribuent positivement quand ils favorisent la rencontre et
l’évocation , sans juger les places, les rôles, la distance
bonne ou mauvaise, mais en reconnaissant l’importance de
la filiation.
« Les grands-parents sont importants parce qu’ils
sont les parents des parents » F. Dolto


Slide 3

« Ce qu’éprouvent les grands-parents »

Catherine Le Grand-Sébille : Socio-anthropologue,
Maître de conférences, Faculté de médecine, Lille 2

Sociologie des Grands-Parents
La sociologie de la grand-parentalité a connu en France,
grâce aux deux sociologues Claudine Attias-Donfut et
Martine Segalen une croissance et une fécondité
inégalées dans les autres pays francophones.
Depuis une vingtaine d’années, elles étudient un fait
démographique majeur, celui de l’allongement de la vie
et de la multiplication contemporaine des grandsparents, refusant de les laisser dans l’ombre.
Il y a près de 13 millions de grands-parents en France, on
ignore combien d’entre eux ont un petit enfant
gravement malade ou décédé.

Rôles et fonctions
Les
grands-parents
ont
des
fonctions
symboliques essentielles et exercent aussi un
rôle concret. Comme le dit M.F. Fuchs ce sont
des « relieurs » et des « transmetteurs » :
continuité familiale, inscription temporelle,
véhicules des valeurs familiales, garantie de
l’existence de l’histoire, témoignage de la mort
des générations plus âgées, légitimation du
parent auquel l’aïeul à passer le relais pour
devenir parent à son tour…

L’éternelle question de la « place »
• La récurrente question de la « bonne » place
est ainsi précisée par J-P Dommergues : « Le
rôle des grands-parents est d’être disponible
mais sans prendre la place des parents et en
sachant revenir au second plan quand les
parents sont présents. Ce jeu d’acteur de la
relation fait alterner un travail d’avant-scène
puis d’estompe en coulisse mais avec une
permanence affective qui garantit aux grandsparents de ne pas être des intermittents du
spectacle de la vie familiale… ».

• L’entreprise morale et normative
de
la
médecine
et
de
la
psychologie est ici perceptible, tant
le modelage spatial et relationnel
exigé
du
grand-parent
est
complexe
et
représente
probablement
un
défi
hors
d’atteinte.

Des dynamiques historiques
• Les processus politiques et sociaux que
sont la professionnalisation du soin, la
médicalisation, la technicisation et
l’institutionnalisation de la naissance et
de la mort, nous sont maintenant bien
connus
grâce
aux
travaux
des
historiens et des sociologues.

La disqualification des
savoirs familiaux


Il existe des tendances lourdes
qui caractérisent depuis la fin du
XIXe siècle, la disqualification puis
la mise à l’écart des savoirs
profanes sur la maladie et la mort
des enfants, et des soins familiaux
qui leur étaient afférents.

Une représentation de la
famille atomisée
De fait, les familles, longtemps tenues
éloignées des services de maternité et de
pédiatrie, trouvent depuis quelques
dizaines d’années, la possibilité d’y
entrer. Ce problème est structurel et
n’est pas lié à la seule volonté des
acteurs. Cette exclusion de la famille
élargie,
notamment,
est
une
caractéristique de notre médecine, à la
différence de celle d’autres pays.

Les parents de l’enfant sont les
interlocuteurs
privilégiés
et
souvent
uniques
des
professionnels, ce qui complique la
communication sur la santé du
bébé, entre parents et grandsparents.

Les liens « forts » n’excluent pas
les tensions et conflits
• Claudine Attias-Donfut et Martine Segalen qui
ont beaucoup travaillé sur les solidarités
familiales exercées par les grands-parents,
mettent aussi en lumière que ces liens
intenses sont tissés parfois de difficultés qui
vont de la tension passagère à la rancœur ou
au conflit. Elles rappellent que si les grandsparents, de par leur simple présence, offrent
un formidable socle identitaire à leurs petitsenfants, leurs relations n’échappent pas à la
complexité des liens interindividuels.

• Nous ne nions pas l’existence de
tels conflits au sein des familles,
dans le contexte de notre étude
qui donne la « part belle » aux
grands-parents, sans taire les
peines et les regrets qui teintent
de tristesse certains témoignages,
en cas de disputes.

Notre étude
«

Être le grand-parent d’un enfant
gravement malade aujourd’hui en
Suisse, au Québec et en France »
Réalisée en France grâce
l’association Soleil AFELT.

à

La population concernée
• Nombre de Grands-parents rencontrés:
France : 35, Québec : 24, Suisse : 21
• Petits-enfants décédés
France: 4, Québec : 6, Suisse : 2
• Âge des petits-enfants : 1 jour à 17 ans
• Pathologies concernées: cancers, maladies orphelines,
grande prématurité.
• Milieux sociaux, urbains / ruraux variés
• Soignants rencontrés médecins et professionnels
paramédicaux, sociaux, psychologues:
France : 18, Québec : 6, Suisse 5

Constats
Ils sont des aidants précieux pour
chacun, sur le chemin périlleux qui
suit le décès du bébé, mais des
aidants mal connus et peu
reconnus. L’aide qu’ils apportent
sera utile dans la traversée du
deuil de toute la famille.

Différences culturelles à l’hôpital dans l’accueil
des grands-parents

• Il apparaît que les différences sont plus marquées entre les
services hospitaliers parfois au sein du même hôpital, qu’entre
les pays.
• Quelques grandes tendances sociologiques cependant pour les
trois pays :
 Des grands-parents proches, en France, des deux
générations
plus jeunes.
 Un souci d’indépendance des enfants semblent plus
marqué en Suisse qu’en France.
 Des « figures » puissantes de grands-mères au Québec,
constituées historiquement comme telles, devant les
absences prolongées des hommes.

• Les soignants nous disent souvent que
grâce à cette enquête, et avant même
d’en connaître les résultats, ils ont été
plus attentifs aux grands-parents.

Mal connus, peu reconnus

• Les grands-parents sont encore trop souvent
les oubliés de la réflexion sur les proches de
l’enfant malade. Les associations aussi n’ont
pas toujours pensé à eux.
« On aurait aimé rencontrer quelqu’un, mais on ne savait pas
où taper... Je crois qu’on aurait aimé rencontrer des gens qui
ont vécu des grandes souffrances, pour pouvoir être
écoutés ». (GM)

Mal connus, peu reconnus
«

Y a des choses pour les parents, y a rien pour les
grands parents ! » (G-M)

« Parler à l’hôpital avec d’autres grands-parents, ça m’a
beaucoup aidé » (G-P)

• Quand on se soucie de les écouter, les grands-

parents ont en effet, beaucoup à dire.

Quelques uns des points récurrents dans
les témoignages des grands-parents

• Ils indiquent tous l’injustice de voir la
maladie grave et la mort frapper les plus
jeunes, quand la logique générationnelle
voudrait que ce soient eux qui soient victimes.
« Maman l’arrière grand-mère disait : « C’était
pas à Julie de partir, c’était à moi » (G-M)

Des grands-pères qui se
révèlent
• Apparemment moins présents, appartenant à des
générations peu loquaces, on retrouve des
grands-pères qui pleurent leur petit-enfant, qui
soutiennent leur fils ou leur fille de manière tout
aussi importante, plusieurs possédant de réels
savoir-être qui n’est pas souvent exprimé face aux
soignants.

La double souffrance
• Ils et elles disent tous combien leur statut
dans la famille les amène à souffrir « deux
fois », pour l’enfant et le petit-enfant.
« Finalement les grands-parents souffrent presque deux
fois : on souffre pour notre enfant et on souffre pour
notre petit enfant. Et voir sa fille souffrir, sa fille triste,
sa fille maigrir, c’est épouvantable. Et de la voir pas
toujours soutenue par son mari, j’ai trouvé que c’était
très difficile »(G-M)

L’intensité de leur deuil
« Nous croyons qu’il ne faut pas sous-estimer le rôle et la
douleur vécus par les grands-parents des familles
endeuillées. D’ailleurs, les expériences les plus appréciées
par les grands-parents au moment du décès étaient leur
inclusion dans les derniers moments où ils eurent la chance
de prendre leur petit-enfant dans leur bras avant de le
quitter, où ils étaient présents pendant les discussions avec
les médecins et infirmières ».
dans Le deuil des grands-parents.
Enquête par questionnaire postal auprès de 21 grands-parents
Sophie Lessard, M.D., Claude Cyr M.D.
Département de pédiatrie, Faculté de médecine et des sciences de la santé,
Université de Sherbrooke, Canada

Malgré l’intensité de leur peine, les
grands-parents apportent un soutien
d’ordre relationnel, affectif, matériel. Il
est aussi spirituel

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents

La garde des autres enfants
« J’ai pris ma retraite et pendant plusieurs
semaines, je me suis occupé des grandes
(sœurs) afin qu’elles ne se sentent pas
abandonnées » (GP)

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents
• La préparation des repas pour les parents du
bébé et ses frères et sœurs.

• Le maintien des fêtes familiales
« Les fêtes de famille on a toujours continué.
Mais, elles sont quand même très dures.... je
crois que, si on arrêtait, ce serait encore plus
dur... » (G-M)

Quelques éléments d’analyse

• Les grands-parents contribuent à la stabilité
intergénérationnelle tout au long de la vie
familiale.
• Beaucoup d’entre eux ont su organiser les
rituels funéraires, réunir une communauté
plus large que la seule famille, notamment
dans les villages. Ils rendent très souvent
visite à la sépulture
de l’enfant et
l’entretiennent en étant vigilants aux souhaits
des parents.

Les besoins des grands-parents
• Le besoin d’être considérés comme faisant partie de la
famille.
• Le besoin de sentir qu’ils ne dérangent pas.
• Le besoin de poser des questions et, pour certains
d’être seuls avec les soignants.
• Le besoin de pouvoir exprimer leurs inquiétudes et leur
peine.
• Le besoin d’un accueil chaleureux dans un moment
difficile.
 Peu de différences en matière de besoins des
grands-parents d’un pays à l’autre.

Conclusion
Grands-parents et arrières grands-parents ont toute leur
place dans la construction d’une mémoire générationnelle et
d’une vie familiale auxquelles les soignants et les parents
contribuent positivement quand ils favorisent la rencontre et
l’évocation , sans juger les places, les rôles, la distance
bonne ou mauvaise, mais en reconnaissant l’importance de
la filiation.
« Les grands-parents sont importants parce qu’ils
sont les parents des parents » F. Dolto


Slide 4

« Ce qu’éprouvent les grands-parents »

Catherine Le Grand-Sébille : Socio-anthropologue,
Maître de conférences, Faculté de médecine, Lille 2

Sociologie des Grands-Parents
La sociologie de la grand-parentalité a connu en France,
grâce aux deux sociologues Claudine Attias-Donfut et
Martine Segalen une croissance et une fécondité
inégalées dans les autres pays francophones.
Depuis une vingtaine d’années, elles étudient un fait
démographique majeur, celui de l’allongement de la vie
et de la multiplication contemporaine des grandsparents, refusant de les laisser dans l’ombre.
Il y a près de 13 millions de grands-parents en France, on
ignore combien d’entre eux ont un petit enfant
gravement malade ou décédé.

Rôles et fonctions
Les
grands-parents
ont
des
fonctions
symboliques essentielles et exercent aussi un
rôle concret. Comme le dit M.F. Fuchs ce sont
des « relieurs » et des « transmetteurs » :
continuité familiale, inscription temporelle,
véhicules des valeurs familiales, garantie de
l’existence de l’histoire, témoignage de la mort
des générations plus âgées, légitimation du
parent auquel l’aïeul à passer le relais pour
devenir parent à son tour…

L’éternelle question de la « place »
• La récurrente question de la « bonne » place
est ainsi précisée par J-P Dommergues : « Le
rôle des grands-parents est d’être disponible
mais sans prendre la place des parents et en
sachant revenir au second plan quand les
parents sont présents. Ce jeu d’acteur de la
relation fait alterner un travail d’avant-scène
puis d’estompe en coulisse mais avec une
permanence affective qui garantit aux grandsparents de ne pas être des intermittents du
spectacle de la vie familiale… ».

• L’entreprise morale et normative
de
la
médecine
et
de
la
psychologie est ici perceptible, tant
le modelage spatial et relationnel
exigé
du
grand-parent
est
complexe
et
représente
probablement
un
défi
hors
d’atteinte.

Des dynamiques historiques
• Les processus politiques et sociaux que
sont la professionnalisation du soin, la
médicalisation, la technicisation et
l’institutionnalisation de la naissance et
de la mort, nous sont maintenant bien
connus
grâce
aux
travaux
des
historiens et des sociologues.

La disqualification des
savoirs familiaux


Il existe des tendances lourdes
qui caractérisent depuis la fin du
XIXe siècle, la disqualification puis
la mise à l’écart des savoirs
profanes sur la maladie et la mort
des enfants, et des soins familiaux
qui leur étaient afférents.

Une représentation de la
famille atomisée
De fait, les familles, longtemps tenues
éloignées des services de maternité et de
pédiatrie, trouvent depuis quelques
dizaines d’années, la possibilité d’y
entrer. Ce problème est structurel et
n’est pas lié à la seule volonté des
acteurs. Cette exclusion de la famille
élargie,
notamment,
est
une
caractéristique de notre médecine, à la
différence de celle d’autres pays.

Les parents de l’enfant sont les
interlocuteurs
privilégiés
et
souvent
uniques
des
professionnels, ce qui complique la
communication sur la santé du
bébé, entre parents et grandsparents.

Les liens « forts » n’excluent pas
les tensions et conflits
• Claudine Attias-Donfut et Martine Segalen qui
ont beaucoup travaillé sur les solidarités
familiales exercées par les grands-parents,
mettent aussi en lumière que ces liens
intenses sont tissés parfois de difficultés qui
vont de la tension passagère à la rancœur ou
au conflit. Elles rappellent que si les grandsparents, de par leur simple présence, offrent
un formidable socle identitaire à leurs petitsenfants, leurs relations n’échappent pas à la
complexité des liens interindividuels.

• Nous ne nions pas l’existence de
tels conflits au sein des familles,
dans le contexte de notre étude
qui donne la « part belle » aux
grands-parents, sans taire les
peines et les regrets qui teintent
de tristesse certains témoignages,
en cas de disputes.

Notre étude
«

Être le grand-parent d’un enfant
gravement malade aujourd’hui en
Suisse, au Québec et en France »
Réalisée en France grâce
l’association Soleil AFELT.

à

La population concernée
• Nombre de Grands-parents rencontrés:
France : 35, Québec : 24, Suisse : 21
• Petits-enfants décédés
France: 4, Québec : 6, Suisse : 2
• Âge des petits-enfants : 1 jour à 17 ans
• Pathologies concernées: cancers, maladies orphelines,
grande prématurité.
• Milieux sociaux, urbains / ruraux variés
• Soignants rencontrés médecins et professionnels
paramédicaux, sociaux, psychologues:
France : 18, Québec : 6, Suisse 5

Constats
Ils sont des aidants précieux pour
chacun, sur le chemin périlleux qui
suit le décès du bébé, mais des
aidants mal connus et peu
reconnus. L’aide qu’ils apportent
sera utile dans la traversée du
deuil de toute la famille.

Différences culturelles à l’hôpital dans l’accueil
des grands-parents

• Il apparaît que les différences sont plus marquées entre les
services hospitaliers parfois au sein du même hôpital, qu’entre
les pays.
• Quelques grandes tendances sociologiques cependant pour les
trois pays :
 Des grands-parents proches, en France, des deux
générations
plus jeunes.
 Un souci d’indépendance des enfants semblent plus
marqué en Suisse qu’en France.
 Des « figures » puissantes de grands-mères au Québec,
constituées historiquement comme telles, devant les
absences prolongées des hommes.

• Les soignants nous disent souvent que
grâce à cette enquête, et avant même
d’en connaître les résultats, ils ont été
plus attentifs aux grands-parents.

Mal connus, peu reconnus

• Les grands-parents sont encore trop souvent
les oubliés de la réflexion sur les proches de
l’enfant malade. Les associations aussi n’ont
pas toujours pensé à eux.
« On aurait aimé rencontrer quelqu’un, mais on ne savait pas
où taper... Je crois qu’on aurait aimé rencontrer des gens qui
ont vécu des grandes souffrances, pour pouvoir être
écoutés ». (GM)

Mal connus, peu reconnus
«

Y a des choses pour les parents, y a rien pour les
grands parents ! » (G-M)

« Parler à l’hôpital avec d’autres grands-parents, ça m’a
beaucoup aidé » (G-P)

• Quand on se soucie de les écouter, les grands-

parents ont en effet, beaucoup à dire.

Quelques uns des points récurrents dans
les témoignages des grands-parents

• Ils indiquent tous l’injustice de voir la
maladie grave et la mort frapper les plus
jeunes, quand la logique générationnelle
voudrait que ce soient eux qui soient victimes.
« Maman l’arrière grand-mère disait : « C’était
pas à Julie de partir, c’était à moi » (G-M)

Des grands-pères qui se
révèlent
• Apparemment moins présents, appartenant à des
générations peu loquaces, on retrouve des
grands-pères qui pleurent leur petit-enfant, qui
soutiennent leur fils ou leur fille de manière tout
aussi importante, plusieurs possédant de réels
savoir-être qui n’est pas souvent exprimé face aux
soignants.

La double souffrance
• Ils et elles disent tous combien leur statut
dans la famille les amène à souffrir « deux
fois », pour l’enfant et le petit-enfant.
« Finalement les grands-parents souffrent presque deux
fois : on souffre pour notre enfant et on souffre pour
notre petit enfant. Et voir sa fille souffrir, sa fille triste,
sa fille maigrir, c’est épouvantable. Et de la voir pas
toujours soutenue par son mari, j’ai trouvé que c’était
très difficile »(G-M)

L’intensité de leur deuil
« Nous croyons qu’il ne faut pas sous-estimer le rôle et la
douleur vécus par les grands-parents des familles
endeuillées. D’ailleurs, les expériences les plus appréciées
par les grands-parents au moment du décès étaient leur
inclusion dans les derniers moments où ils eurent la chance
de prendre leur petit-enfant dans leur bras avant de le
quitter, où ils étaient présents pendant les discussions avec
les médecins et infirmières ».
dans Le deuil des grands-parents.
Enquête par questionnaire postal auprès de 21 grands-parents
Sophie Lessard, M.D., Claude Cyr M.D.
Département de pédiatrie, Faculté de médecine et des sciences de la santé,
Université de Sherbrooke, Canada

Malgré l’intensité de leur peine, les
grands-parents apportent un soutien
d’ordre relationnel, affectif, matériel. Il
est aussi spirituel

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents

La garde des autres enfants
« J’ai pris ma retraite et pendant plusieurs
semaines, je me suis occupé des grandes
(sœurs) afin qu’elles ne se sentent pas
abandonnées » (GP)

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents
• La préparation des repas pour les parents du
bébé et ses frères et sœurs.

• Le maintien des fêtes familiales
« Les fêtes de famille on a toujours continué.
Mais, elles sont quand même très dures.... je
crois que, si on arrêtait, ce serait encore plus
dur... » (G-M)

Quelques éléments d’analyse

• Les grands-parents contribuent à la stabilité
intergénérationnelle tout au long de la vie
familiale.
• Beaucoup d’entre eux ont su organiser les
rituels funéraires, réunir une communauté
plus large que la seule famille, notamment
dans les villages. Ils rendent très souvent
visite à la sépulture
de l’enfant et
l’entretiennent en étant vigilants aux souhaits
des parents.

Les besoins des grands-parents
• Le besoin d’être considérés comme faisant partie de la
famille.
• Le besoin de sentir qu’ils ne dérangent pas.
• Le besoin de poser des questions et, pour certains
d’être seuls avec les soignants.
• Le besoin de pouvoir exprimer leurs inquiétudes et leur
peine.
• Le besoin d’un accueil chaleureux dans un moment
difficile.
 Peu de différences en matière de besoins des
grands-parents d’un pays à l’autre.

Conclusion
Grands-parents et arrières grands-parents ont toute leur
place dans la construction d’une mémoire générationnelle et
d’une vie familiale auxquelles les soignants et les parents
contribuent positivement quand ils favorisent la rencontre et
l’évocation , sans juger les places, les rôles, la distance
bonne ou mauvaise, mais en reconnaissant l’importance de
la filiation.
« Les grands-parents sont importants parce qu’ils
sont les parents des parents » F. Dolto


Slide 5

« Ce qu’éprouvent les grands-parents »

Catherine Le Grand-Sébille : Socio-anthropologue,
Maître de conférences, Faculté de médecine, Lille 2

Sociologie des Grands-Parents
La sociologie de la grand-parentalité a connu en France,
grâce aux deux sociologues Claudine Attias-Donfut et
Martine Segalen une croissance et une fécondité
inégalées dans les autres pays francophones.
Depuis une vingtaine d’années, elles étudient un fait
démographique majeur, celui de l’allongement de la vie
et de la multiplication contemporaine des grandsparents, refusant de les laisser dans l’ombre.
Il y a près de 13 millions de grands-parents en France, on
ignore combien d’entre eux ont un petit enfant
gravement malade ou décédé.

Rôles et fonctions
Les
grands-parents
ont
des
fonctions
symboliques essentielles et exercent aussi un
rôle concret. Comme le dit M.F. Fuchs ce sont
des « relieurs » et des « transmetteurs » :
continuité familiale, inscription temporelle,
véhicules des valeurs familiales, garantie de
l’existence de l’histoire, témoignage de la mort
des générations plus âgées, légitimation du
parent auquel l’aïeul à passer le relais pour
devenir parent à son tour…

L’éternelle question de la « place »
• La récurrente question de la « bonne » place
est ainsi précisée par J-P Dommergues : « Le
rôle des grands-parents est d’être disponible
mais sans prendre la place des parents et en
sachant revenir au second plan quand les
parents sont présents. Ce jeu d’acteur de la
relation fait alterner un travail d’avant-scène
puis d’estompe en coulisse mais avec une
permanence affective qui garantit aux grandsparents de ne pas être des intermittents du
spectacle de la vie familiale… ».

• L’entreprise morale et normative
de
la
médecine
et
de
la
psychologie est ici perceptible, tant
le modelage spatial et relationnel
exigé
du
grand-parent
est
complexe
et
représente
probablement
un
défi
hors
d’atteinte.

Des dynamiques historiques
• Les processus politiques et sociaux que
sont la professionnalisation du soin, la
médicalisation, la technicisation et
l’institutionnalisation de la naissance et
de la mort, nous sont maintenant bien
connus
grâce
aux
travaux
des
historiens et des sociologues.

La disqualification des
savoirs familiaux


Il existe des tendances lourdes
qui caractérisent depuis la fin du
XIXe siècle, la disqualification puis
la mise à l’écart des savoirs
profanes sur la maladie et la mort
des enfants, et des soins familiaux
qui leur étaient afférents.

Une représentation de la
famille atomisée
De fait, les familles, longtemps tenues
éloignées des services de maternité et de
pédiatrie, trouvent depuis quelques
dizaines d’années, la possibilité d’y
entrer. Ce problème est structurel et
n’est pas lié à la seule volonté des
acteurs. Cette exclusion de la famille
élargie,
notamment,
est
une
caractéristique de notre médecine, à la
différence de celle d’autres pays.

Les parents de l’enfant sont les
interlocuteurs
privilégiés
et
souvent
uniques
des
professionnels, ce qui complique la
communication sur la santé du
bébé, entre parents et grandsparents.

Les liens « forts » n’excluent pas
les tensions et conflits
• Claudine Attias-Donfut et Martine Segalen qui
ont beaucoup travaillé sur les solidarités
familiales exercées par les grands-parents,
mettent aussi en lumière que ces liens
intenses sont tissés parfois de difficultés qui
vont de la tension passagère à la rancœur ou
au conflit. Elles rappellent que si les grandsparents, de par leur simple présence, offrent
un formidable socle identitaire à leurs petitsenfants, leurs relations n’échappent pas à la
complexité des liens interindividuels.

• Nous ne nions pas l’existence de
tels conflits au sein des familles,
dans le contexte de notre étude
qui donne la « part belle » aux
grands-parents, sans taire les
peines et les regrets qui teintent
de tristesse certains témoignages,
en cas de disputes.

Notre étude
«

Être le grand-parent d’un enfant
gravement malade aujourd’hui en
Suisse, au Québec et en France »
Réalisée en France grâce
l’association Soleil AFELT.

à

La population concernée
• Nombre de Grands-parents rencontrés:
France : 35, Québec : 24, Suisse : 21
• Petits-enfants décédés
France: 4, Québec : 6, Suisse : 2
• Âge des petits-enfants : 1 jour à 17 ans
• Pathologies concernées: cancers, maladies orphelines,
grande prématurité.
• Milieux sociaux, urbains / ruraux variés
• Soignants rencontrés médecins et professionnels
paramédicaux, sociaux, psychologues:
France : 18, Québec : 6, Suisse 5

Constats
Ils sont des aidants précieux pour
chacun, sur le chemin périlleux qui
suit le décès du bébé, mais des
aidants mal connus et peu
reconnus. L’aide qu’ils apportent
sera utile dans la traversée du
deuil de toute la famille.

Différences culturelles à l’hôpital dans l’accueil
des grands-parents

• Il apparaît que les différences sont plus marquées entre les
services hospitaliers parfois au sein du même hôpital, qu’entre
les pays.
• Quelques grandes tendances sociologiques cependant pour les
trois pays :
 Des grands-parents proches, en France, des deux
générations
plus jeunes.
 Un souci d’indépendance des enfants semblent plus
marqué en Suisse qu’en France.
 Des « figures » puissantes de grands-mères au Québec,
constituées historiquement comme telles, devant les
absences prolongées des hommes.

• Les soignants nous disent souvent que
grâce à cette enquête, et avant même
d’en connaître les résultats, ils ont été
plus attentifs aux grands-parents.

Mal connus, peu reconnus

• Les grands-parents sont encore trop souvent
les oubliés de la réflexion sur les proches de
l’enfant malade. Les associations aussi n’ont
pas toujours pensé à eux.
« On aurait aimé rencontrer quelqu’un, mais on ne savait pas
où taper... Je crois qu’on aurait aimé rencontrer des gens qui
ont vécu des grandes souffrances, pour pouvoir être
écoutés ». (GM)

Mal connus, peu reconnus
«

Y a des choses pour les parents, y a rien pour les
grands parents ! » (G-M)

« Parler à l’hôpital avec d’autres grands-parents, ça m’a
beaucoup aidé » (G-P)

• Quand on se soucie de les écouter, les grands-

parents ont en effet, beaucoup à dire.

Quelques uns des points récurrents dans
les témoignages des grands-parents

• Ils indiquent tous l’injustice de voir la
maladie grave et la mort frapper les plus
jeunes, quand la logique générationnelle
voudrait que ce soient eux qui soient victimes.
« Maman l’arrière grand-mère disait : « C’était
pas à Julie de partir, c’était à moi » (G-M)

Des grands-pères qui se
révèlent
• Apparemment moins présents, appartenant à des
générations peu loquaces, on retrouve des
grands-pères qui pleurent leur petit-enfant, qui
soutiennent leur fils ou leur fille de manière tout
aussi importante, plusieurs possédant de réels
savoir-être qui n’est pas souvent exprimé face aux
soignants.

La double souffrance
• Ils et elles disent tous combien leur statut
dans la famille les amène à souffrir « deux
fois », pour l’enfant et le petit-enfant.
« Finalement les grands-parents souffrent presque deux
fois : on souffre pour notre enfant et on souffre pour
notre petit enfant. Et voir sa fille souffrir, sa fille triste,
sa fille maigrir, c’est épouvantable. Et de la voir pas
toujours soutenue par son mari, j’ai trouvé que c’était
très difficile »(G-M)

L’intensité de leur deuil
« Nous croyons qu’il ne faut pas sous-estimer le rôle et la
douleur vécus par les grands-parents des familles
endeuillées. D’ailleurs, les expériences les plus appréciées
par les grands-parents au moment du décès étaient leur
inclusion dans les derniers moments où ils eurent la chance
de prendre leur petit-enfant dans leur bras avant de le
quitter, où ils étaient présents pendant les discussions avec
les médecins et infirmières ».
dans Le deuil des grands-parents.
Enquête par questionnaire postal auprès de 21 grands-parents
Sophie Lessard, M.D., Claude Cyr M.D.
Département de pédiatrie, Faculté de médecine et des sciences de la santé,
Université de Sherbrooke, Canada

Malgré l’intensité de leur peine, les
grands-parents apportent un soutien
d’ordre relationnel, affectif, matériel. Il
est aussi spirituel

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents

La garde des autres enfants
« J’ai pris ma retraite et pendant plusieurs
semaines, je me suis occupé des grandes
(sœurs) afin qu’elles ne se sentent pas
abandonnées » (GP)

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents
• La préparation des repas pour les parents du
bébé et ses frères et sœurs.

• Le maintien des fêtes familiales
« Les fêtes de famille on a toujours continué.
Mais, elles sont quand même très dures.... je
crois que, si on arrêtait, ce serait encore plus
dur... » (G-M)

Quelques éléments d’analyse

• Les grands-parents contribuent à la stabilité
intergénérationnelle tout au long de la vie
familiale.
• Beaucoup d’entre eux ont su organiser les
rituels funéraires, réunir une communauté
plus large que la seule famille, notamment
dans les villages. Ils rendent très souvent
visite à la sépulture
de l’enfant et
l’entretiennent en étant vigilants aux souhaits
des parents.

Les besoins des grands-parents
• Le besoin d’être considérés comme faisant partie de la
famille.
• Le besoin de sentir qu’ils ne dérangent pas.
• Le besoin de poser des questions et, pour certains
d’être seuls avec les soignants.
• Le besoin de pouvoir exprimer leurs inquiétudes et leur
peine.
• Le besoin d’un accueil chaleureux dans un moment
difficile.
 Peu de différences en matière de besoins des
grands-parents d’un pays à l’autre.

Conclusion
Grands-parents et arrières grands-parents ont toute leur
place dans la construction d’une mémoire générationnelle et
d’une vie familiale auxquelles les soignants et les parents
contribuent positivement quand ils favorisent la rencontre et
l’évocation , sans juger les places, les rôles, la distance
bonne ou mauvaise, mais en reconnaissant l’importance de
la filiation.
« Les grands-parents sont importants parce qu’ils
sont les parents des parents » F. Dolto


Slide 6

« Ce qu’éprouvent les grands-parents »

Catherine Le Grand-Sébille : Socio-anthropologue,
Maître de conférences, Faculté de médecine, Lille 2

Sociologie des Grands-Parents
La sociologie de la grand-parentalité a connu en France,
grâce aux deux sociologues Claudine Attias-Donfut et
Martine Segalen une croissance et une fécondité
inégalées dans les autres pays francophones.
Depuis une vingtaine d’années, elles étudient un fait
démographique majeur, celui de l’allongement de la vie
et de la multiplication contemporaine des grandsparents, refusant de les laisser dans l’ombre.
Il y a près de 13 millions de grands-parents en France, on
ignore combien d’entre eux ont un petit enfant
gravement malade ou décédé.

Rôles et fonctions
Les
grands-parents
ont
des
fonctions
symboliques essentielles et exercent aussi un
rôle concret. Comme le dit M.F. Fuchs ce sont
des « relieurs » et des « transmetteurs » :
continuité familiale, inscription temporelle,
véhicules des valeurs familiales, garantie de
l’existence de l’histoire, témoignage de la mort
des générations plus âgées, légitimation du
parent auquel l’aïeul à passer le relais pour
devenir parent à son tour…

L’éternelle question de la « place »
• La récurrente question de la « bonne » place
est ainsi précisée par J-P Dommergues : « Le
rôle des grands-parents est d’être disponible
mais sans prendre la place des parents et en
sachant revenir au second plan quand les
parents sont présents. Ce jeu d’acteur de la
relation fait alterner un travail d’avant-scène
puis d’estompe en coulisse mais avec une
permanence affective qui garantit aux grandsparents de ne pas être des intermittents du
spectacle de la vie familiale… ».

• L’entreprise morale et normative
de
la
médecine
et
de
la
psychologie est ici perceptible, tant
le modelage spatial et relationnel
exigé
du
grand-parent
est
complexe
et
représente
probablement
un
défi
hors
d’atteinte.

Des dynamiques historiques
• Les processus politiques et sociaux que
sont la professionnalisation du soin, la
médicalisation, la technicisation et
l’institutionnalisation de la naissance et
de la mort, nous sont maintenant bien
connus
grâce
aux
travaux
des
historiens et des sociologues.

La disqualification des
savoirs familiaux


Il existe des tendances lourdes
qui caractérisent depuis la fin du
XIXe siècle, la disqualification puis
la mise à l’écart des savoirs
profanes sur la maladie et la mort
des enfants, et des soins familiaux
qui leur étaient afférents.

Une représentation de la
famille atomisée
De fait, les familles, longtemps tenues
éloignées des services de maternité et de
pédiatrie, trouvent depuis quelques
dizaines d’années, la possibilité d’y
entrer. Ce problème est structurel et
n’est pas lié à la seule volonté des
acteurs. Cette exclusion de la famille
élargie,
notamment,
est
une
caractéristique de notre médecine, à la
différence de celle d’autres pays.

Les parents de l’enfant sont les
interlocuteurs
privilégiés
et
souvent
uniques
des
professionnels, ce qui complique la
communication sur la santé du
bébé, entre parents et grandsparents.

Les liens « forts » n’excluent pas
les tensions et conflits
• Claudine Attias-Donfut et Martine Segalen qui
ont beaucoup travaillé sur les solidarités
familiales exercées par les grands-parents,
mettent aussi en lumière que ces liens
intenses sont tissés parfois de difficultés qui
vont de la tension passagère à la rancœur ou
au conflit. Elles rappellent que si les grandsparents, de par leur simple présence, offrent
un formidable socle identitaire à leurs petitsenfants, leurs relations n’échappent pas à la
complexité des liens interindividuels.

• Nous ne nions pas l’existence de
tels conflits au sein des familles,
dans le contexte de notre étude
qui donne la « part belle » aux
grands-parents, sans taire les
peines et les regrets qui teintent
de tristesse certains témoignages,
en cas de disputes.

Notre étude
«

Être le grand-parent d’un enfant
gravement malade aujourd’hui en
Suisse, au Québec et en France »
Réalisée en France grâce
l’association Soleil AFELT.

à

La population concernée
• Nombre de Grands-parents rencontrés:
France : 35, Québec : 24, Suisse : 21
• Petits-enfants décédés
France: 4, Québec : 6, Suisse : 2
• Âge des petits-enfants : 1 jour à 17 ans
• Pathologies concernées: cancers, maladies orphelines,
grande prématurité.
• Milieux sociaux, urbains / ruraux variés
• Soignants rencontrés médecins et professionnels
paramédicaux, sociaux, psychologues:
France : 18, Québec : 6, Suisse 5

Constats
Ils sont des aidants précieux pour
chacun, sur le chemin périlleux qui
suit le décès du bébé, mais des
aidants mal connus et peu
reconnus. L’aide qu’ils apportent
sera utile dans la traversée du
deuil de toute la famille.

Différences culturelles à l’hôpital dans l’accueil
des grands-parents

• Il apparaît que les différences sont plus marquées entre les
services hospitaliers parfois au sein du même hôpital, qu’entre
les pays.
• Quelques grandes tendances sociologiques cependant pour les
trois pays :
 Des grands-parents proches, en France, des deux
générations
plus jeunes.
 Un souci d’indépendance des enfants semblent plus
marqué en Suisse qu’en France.
 Des « figures » puissantes de grands-mères au Québec,
constituées historiquement comme telles, devant les
absences prolongées des hommes.

• Les soignants nous disent souvent que
grâce à cette enquête, et avant même
d’en connaître les résultats, ils ont été
plus attentifs aux grands-parents.

Mal connus, peu reconnus

• Les grands-parents sont encore trop souvent
les oubliés de la réflexion sur les proches de
l’enfant malade. Les associations aussi n’ont
pas toujours pensé à eux.
« On aurait aimé rencontrer quelqu’un, mais on ne savait pas
où taper... Je crois qu’on aurait aimé rencontrer des gens qui
ont vécu des grandes souffrances, pour pouvoir être
écoutés ». (GM)

Mal connus, peu reconnus
«

Y a des choses pour les parents, y a rien pour les
grands parents ! » (G-M)

« Parler à l’hôpital avec d’autres grands-parents, ça m’a
beaucoup aidé » (G-P)

• Quand on se soucie de les écouter, les grands-

parents ont en effet, beaucoup à dire.

Quelques uns des points récurrents dans
les témoignages des grands-parents

• Ils indiquent tous l’injustice de voir la
maladie grave et la mort frapper les plus
jeunes, quand la logique générationnelle
voudrait que ce soient eux qui soient victimes.
« Maman l’arrière grand-mère disait : « C’était
pas à Julie de partir, c’était à moi » (G-M)

Des grands-pères qui se
révèlent
• Apparemment moins présents, appartenant à des
générations peu loquaces, on retrouve des
grands-pères qui pleurent leur petit-enfant, qui
soutiennent leur fils ou leur fille de manière tout
aussi importante, plusieurs possédant de réels
savoir-être qui n’est pas souvent exprimé face aux
soignants.

La double souffrance
• Ils et elles disent tous combien leur statut
dans la famille les amène à souffrir « deux
fois », pour l’enfant et le petit-enfant.
« Finalement les grands-parents souffrent presque deux
fois : on souffre pour notre enfant et on souffre pour
notre petit enfant. Et voir sa fille souffrir, sa fille triste,
sa fille maigrir, c’est épouvantable. Et de la voir pas
toujours soutenue par son mari, j’ai trouvé que c’était
très difficile »(G-M)

L’intensité de leur deuil
« Nous croyons qu’il ne faut pas sous-estimer le rôle et la
douleur vécus par les grands-parents des familles
endeuillées. D’ailleurs, les expériences les plus appréciées
par les grands-parents au moment du décès étaient leur
inclusion dans les derniers moments où ils eurent la chance
de prendre leur petit-enfant dans leur bras avant de le
quitter, où ils étaient présents pendant les discussions avec
les médecins et infirmières ».
dans Le deuil des grands-parents.
Enquête par questionnaire postal auprès de 21 grands-parents
Sophie Lessard, M.D., Claude Cyr M.D.
Département de pédiatrie, Faculté de médecine et des sciences de la santé,
Université de Sherbrooke, Canada

Malgré l’intensité de leur peine, les
grands-parents apportent un soutien
d’ordre relationnel, affectif, matériel. Il
est aussi spirituel

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents

La garde des autres enfants
« J’ai pris ma retraite et pendant plusieurs
semaines, je me suis occupé des grandes
(sœurs) afin qu’elles ne se sentent pas
abandonnées » (GP)

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents
• La préparation des repas pour les parents du
bébé et ses frères et sœurs.

• Le maintien des fêtes familiales
« Les fêtes de famille on a toujours continué.
Mais, elles sont quand même très dures.... je
crois que, si on arrêtait, ce serait encore plus
dur... » (G-M)

Quelques éléments d’analyse

• Les grands-parents contribuent à la stabilité
intergénérationnelle tout au long de la vie
familiale.
• Beaucoup d’entre eux ont su organiser les
rituels funéraires, réunir une communauté
plus large que la seule famille, notamment
dans les villages. Ils rendent très souvent
visite à la sépulture
de l’enfant et
l’entretiennent en étant vigilants aux souhaits
des parents.

Les besoins des grands-parents
• Le besoin d’être considérés comme faisant partie de la
famille.
• Le besoin de sentir qu’ils ne dérangent pas.
• Le besoin de poser des questions et, pour certains
d’être seuls avec les soignants.
• Le besoin de pouvoir exprimer leurs inquiétudes et leur
peine.
• Le besoin d’un accueil chaleureux dans un moment
difficile.
 Peu de différences en matière de besoins des
grands-parents d’un pays à l’autre.

Conclusion
Grands-parents et arrières grands-parents ont toute leur
place dans la construction d’une mémoire générationnelle et
d’une vie familiale auxquelles les soignants et les parents
contribuent positivement quand ils favorisent la rencontre et
l’évocation , sans juger les places, les rôles, la distance
bonne ou mauvaise, mais en reconnaissant l’importance de
la filiation.
« Les grands-parents sont importants parce qu’ils
sont les parents des parents » F. Dolto


Slide 7

« Ce qu’éprouvent les grands-parents »

Catherine Le Grand-Sébille : Socio-anthropologue,
Maître de conférences, Faculté de médecine, Lille 2

Sociologie des Grands-Parents
La sociologie de la grand-parentalité a connu en France,
grâce aux deux sociologues Claudine Attias-Donfut et
Martine Segalen une croissance et une fécondité
inégalées dans les autres pays francophones.
Depuis une vingtaine d’années, elles étudient un fait
démographique majeur, celui de l’allongement de la vie
et de la multiplication contemporaine des grandsparents, refusant de les laisser dans l’ombre.
Il y a près de 13 millions de grands-parents en France, on
ignore combien d’entre eux ont un petit enfant
gravement malade ou décédé.

Rôles et fonctions
Les
grands-parents
ont
des
fonctions
symboliques essentielles et exercent aussi un
rôle concret. Comme le dit M.F. Fuchs ce sont
des « relieurs » et des « transmetteurs » :
continuité familiale, inscription temporelle,
véhicules des valeurs familiales, garantie de
l’existence de l’histoire, témoignage de la mort
des générations plus âgées, légitimation du
parent auquel l’aïeul à passer le relais pour
devenir parent à son tour…

L’éternelle question de la « place »
• La récurrente question de la « bonne » place
est ainsi précisée par J-P Dommergues : « Le
rôle des grands-parents est d’être disponible
mais sans prendre la place des parents et en
sachant revenir au second plan quand les
parents sont présents. Ce jeu d’acteur de la
relation fait alterner un travail d’avant-scène
puis d’estompe en coulisse mais avec une
permanence affective qui garantit aux grandsparents de ne pas être des intermittents du
spectacle de la vie familiale… ».

• L’entreprise morale et normative
de
la
médecine
et
de
la
psychologie est ici perceptible, tant
le modelage spatial et relationnel
exigé
du
grand-parent
est
complexe
et
représente
probablement
un
défi
hors
d’atteinte.

Des dynamiques historiques
• Les processus politiques et sociaux que
sont la professionnalisation du soin, la
médicalisation, la technicisation et
l’institutionnalisation de la naissance et
de la mort, nous sont maintenant bien
connus
grâce
aux
travaux
des
historiens et des sociologues.

La disqualification des
savoirs familiaux


Il existe des tendances lourdes
qui caractérisent depuis la fin du
XIXe siècle, la disqualification puis
la mise à l’écart des savoirs
profanes sur la maladie et la mort
des enfants, et des soins familiaux
qui leur étaient afférents.

Une représentation de la
famille atomisée
De fait, les familles, longtemps tenues
éloignées des services de maternité et de
pédiatrie, trouvent depuis quelques
dizaines d’années, la possibilité d’y
entrer. Ce problème est structurel et
n’est pas lié à la seule volonté des
acteurs. Cette exclusion de la famille
élargie,
notamment,
est
une
caractéristique de notre médecine, à la
différence de celle d’autres pays.

Les parents de l’enfant sont les
interlocuteurs
privilégiés
et
souvent
uniques
des
professionnels, ce qui complique la
communication sur la santé du
bébé, entre parents et grandsparents.

Les liens « forts » n’excluent pas
les tensions et conflits
• Claudine Attias-Donfut et Martine Segalen qui
ont beaucoup travaillé sur les solidarités
familiales exercées par les grands-parents,
mettent aussi en lumière que ces liens
intenses sont tissés parfois de difficultés qui
vont de la tension passagère à la rancœur ou
au conflit. Elles rappellent que si les grandsparents, de par leur simple présence, offrent
un formidable socle identitaire à leurs petitsenfants, leurs relations n’échappent pas à la
complexité des liens interindividuels.

• Nous ne nions pas l’existence de
tels conflits au sein des familles,
dans le contexte de notre étude
qui donne la « part belle » aux
grands-parents, sans taire les
peines et les regrets qui teintent
de tristesse certains témoignages,
en cas de disputes.

Notre étude
«

Être le grand-parent d’un enfant
gravement malade aujourd’hui en
Suisse, au Québec et en France »
Réalisée en France grâce
l’association Soleil AFELT.

à

La population concernée
• Nombre de Grands-parents rencontrés:
France : 35, Québec : 24, Suisse : 21
• Petits-enfants décédés
France: 4, Québec : 6, Suisse : 2
• Âge des petits-enfants : 1 jour à 17 ans
• Pathologies concernées: cancers, maladies orphelines,
grande prématurité.
• Milieux sociaux, urbains / ruraux variés
• Soignants rencontrés médecins et professionnels
paramédicaux, sociaux, psychologues:
France : 18, Québec : 6, Suisse 5

Constats
Ils sont des aidants précieux pour
chacun, sur le chemin périlleux qui
suit le décès du bébé, mais des
aidants mal connus et peu
reconnus. L’aide qu’ils apportent
sera utile dans la traversée du
deuil de toute la famille.

Différences culturelles à l’hôpital dans l’accueil
des grands-parents

• Il apparaît que les différences sont plus marquées entre les
services hospitaliers parfois au sein du même hôpital, qu’entre
les pays.
• Quelques grandes tendances sociologiques cependant pour les
trois pays :
 Des grands-parents proches, en France, des deux
générations
plus jeunes.
 Un souci d’indépendance des enfants semblent plus
marqué en Suisse qu’en France.
 Des « figures » puissantes de grands-mères au Québec,
constituées historiquement comme telles, devant les
absences prolongées des hommes.

• Les soignants nous disent souvent que
grâce à cette enquête, et avant même
d’en connaître les résultats, ils ont été
plus attentifs aux grands-parents.

Mal connus, peu reconnus

• Les grands-parents sont encore trop souvent
les oubliés de la réflexion sur les proches de
l’enfant malade. Les associations aussi n’ont
pas toujours pensé à eux.
« On aurait aimé rencontrer quelqu’un, mais on ne savait pas
où taper... Je crois qu’on aurait aimé rencontrer des gens qui
ont vécu des grandes souffrances, pour pouvoir être
écoutés ». (GM)

Mal connus, peu reconnus
«

Y a des choses pour les parents, y a rien pour les
grands parents ! » (G-M)

« Parler à l’hôpital avec d’autres grands-parents, ça m’a
beaucoup aidé » (G-P)

• Quand on se soucie de les écouter, les grands-

parents ont en effet, beaucoup à dire.

Quelques uns des points récurrents dans
les témoignages des grands-parents

• Ils indiquent tous l’injustice de voir la
maladie grave et la mort frapper les plus
jeunes, quand la logique générationnelle
voudrait que ce soient eux qui soient victimes.
« Maman l’arrière grand-mère disait : « C’était
pas à Julie de partir, c’était à moi » (G-M)

Des grands-pères qui se
révèlent
• Apparemment moins présents, appartenant à des
générations peu loquaces, on retrouve des
grands-pères qui pleurent leur petit-enfant, qui
soutiennent leur fils ou leur fille de manière tout
aussi importante, plusieurs possédant de réels
savoir-être qui n’est pas souvent exprimé face aux
soignants.

La double souffrance
• Ils et elles disent tous combien leur statut
dans la famille les amène à souffrir « deux
fois », pour l’enfant et le petit-enfant.
« Finalement les grands-parents souffrent presque deux
fois : on souffre pour notre enfant et on souffre pour
notre petit enfant. Et voir sa fille souffrir, sa fille triste,
sa fille maigrir, c’est épouvantable. Et de la voir pas
toujours soutenue par son mari, j’ai trouvé que c’était
très difficile »(G-M)

L’intensité de leur deuil
« Nous croyons qu’il ne faut pas sous-estimer le rôle et la
douleur vécus par les grands-parents des familles
endeuillées. D’ailleurs, les expériences les plus appréciées
par les grands-parents au moment du décès étaient leur
inclusion dans les derniers moments où ils eurent la chance
de prendre leur petit-enfant dans leur bras avant de le
quitter, où ils étaient présents pendant les discussions avec
les médecins et infirmières ».
dans Le deuil des grands-parents.
Enquête par questionnaire postal auprès de 21 grands-parents
Sophie Lessard, M.D., Claude Cyr M.D.
Département de pédiatrie, Faculté de médecine et des sciences de la santé,
Université de Sherbrooke, Canada

Malgré l’intensité de leur peine, les
grands-parents apportent un soutien
d’ordre relationnel, affectif, matériel. Il
est aussi spirituel

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents

La garde des autres enfants
« J’ai pris ma retraite et pendant plusieurs
semaines, je me suis occupé des grandes
(sœurs) afin qu’elles ne se sentent pas
abandonnées » (GP)

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents
• La préparation des repas pour les parents du
bébé et ses frères et sœurs.

• Le maintien des fêtes familiales
« Les fêtes de famille on a toujours continué.
Mais, elles sont quand même très dures.... je
crois que, si on arrêtait, ce serait encore plus
dur... » (G-M)

Quelques éléments d’analyse

• Les grands-parents contribuent à la stabilité
intergénérationnelle tout au long de la vie
familiale.
• Beaucoup d’entre eux ont su organiser les
rituels funéraires, réunir une communauté
plus large que la seule famille, notamment
dans les villages. Ils rendent très souvent
visite à la sépulture
de l’enfant et
l’entretiennent en étant vigilants aux souhaits
des parents.

Les besoins des grands-parents
• Le besoin d’être considérés comme faisant partie de la
famille.
• Le besoin de sentir qu’ils ne dérangent pas.
• Le besoin de poser des questions et, pour certains
d’être seuls avec les soignants.
• Le besoin de pouvoir exprimer leurs inquiétudes et leur
peine.
• Le besoin d’un accueil chaleureux dans un moment
difficile.
 Peu de différences en matière de besoins des
grands-parents d’un pays à l’autre.

Conclusion
Grands-parents et arrières grands-parents ont toute leur
place dans la construction d’une mémoire générationnelle et
d’une vie familiale auxquelles les soignants et les parents
contribuent positivement quand ils favorisent la rencontre et
l’évocation , sans juger les places, les rôles, la distance
bonne ou mauvaise, mais en reconnaissant l’importance de
la filiation.
« Les grands-parents sont importants parce qu’ils
sont les parents des parents » F. Dolto


Slide 8

« Ce qu’éprouvent les grands-parents »

Catherine Le Grand-Sébille : Socio-anthropologue,
Maître de conférences, Faculté de médecine, Lille 2

Sociologie des Grands-Parents
La sociologie de la grand-parentalité a connu en France,
grâce aux deux sociologues Claudine Attias-Donfut et
Martine Segalen une croissance et une fécondité
inégalées dans les autres pays francophones.
Depuis une vingtaine d’années, elles étudient un fait
démographique majeur, celui de l’allongement de la vie
et de la multiplication contemporaine des grandsparents, refusant de les laisser dans l’ombre.
Il y a près de 13 millions de grands-parents en France, on
ignore combien d’entre eux ont un petit enfant
gravement malade ou décédé.

Rôles et fonctions
Les
grands-parents
ont
des
fonctions
symboliques essentielles et exercent aussi un
rôle concret. Comme le dit M.F. Fuchs ce sont
des « relieurs » et des « transmetteurs » :
continuité familiale, inscription temporelle,
véhicules des valeurs familiales, garantie de
l’existence de l’histoire, témoignage de la mort
des générations plus âgées, légitimation du
parent auquel l’aïeul à passer le relais pour
devenir parent à son tour…

L’éternelle question de la « place »
• La récurrente question de la « bonne » place
est ainsi précisée par J-P Dommergues : « Le
rôle des grands-parents est d’être disponible
mais sans prendre la place des parents et en
sachant revenir au second plan quand les
parents sont présents. Ce jeu d’acteur de la
relation fait alterner un travail d’avant-scène
puis d’estompe en coulisse mais avec une
permanence affective qui garantit aux grandsparents de ne pas être des intermittents du
spectacle de la vie familiale… ».

• L’entreprise morale et normative
de
la
médecine
et
de
la
psychologie est ici perceptible, tant
le modelage spatial et relationnel
exigé
du
grand-parent
est
complexe
et
représente
probablement
un
défi
hors
d’atteinte.

Des dynamiques historiques
• Les processus politiques et sociaux que
sont la professionnalisation du soin, la
médicalisation, la technicisation et
l’institutionnalisation de la naissance et
de la mort, nous sont maintenant bien
connus
grâce
aux
travaux
des
historiens et des sociologues.

La disqualification des
savoirs familiaux


Il existe des tendances lourdes
qui caractérisent depuis la fin du
XIXe siècle, la disqualification puis
la mise à l’écart des savoirs
profanes sur la maladie et la mort
des enfants, et des soins familiaux
qui leur étaient afférents.

Une représentation de la
famille atomisée
De fait, les familles, longtemps tenues
éloignées des services de maternité et de
pédiatrie, trouvent depuis quelques
dizaines d’années, la possibilité d’y
entrer. Ce problème est structurel et
n’est pas lié à la seule volonté des
acteurs. Cette exclusion de la famille
élargie,
notamment,
est
une
caractéristique de notre médecine, à la
différence de celle d’autres pays.

Les parents de l’enfant sont les
interlocuteurs
privilégiés
et
souvent
uniques
des
professionnels, ce qui complique la
communication sur la santé du
bébé, entre parents et grandsparents.

Les liens « forts » n’excluent pas
les tensions et conflits
• Claudine Attias-Donfut et Martine Segalen qui
ont beaucoup travaillé sur les solidarités
familiales exercées par les grands-parents,
mettent aussi en lumière que ces liens
intenses sont tissés parfois de difficultés qui
vont de la tension passagère à la rancœur ou
au conflit. Elles rappellent que si les grandsparents, de par leur simple présence, offrent
un formidable socle identitaire à leurs petitsenfants, leurs relations n’échappent pas à la
complexité des liens interindividuels.

• Nous ne nions pas l’existence de
tels conflits au sein des familles,
dans le contexte de notre étude
qui donne la « part belle » aux
grands-parents, sans taire les
peines et les regrets qui teintent
de tristesse certains témoignages,
en cas de disputes.

Notre étude
«

Être le grand-parent d’un enfant
gravement malade aujourd’hui en
Suisse, au Québec et en France »
Réalisée en France grâce
l’association Soleil AFELT.

à

La population concernée
• Nombre de Grands-parents rencontrés:
France : 35, Québec : 24, Suisse : 21
• Petits-enfants décédés
France: 4, Québec : 6, Suisse : 2
• Âge des petits-enfants : 1 jour à 17 ans
• Pathologies concernées: cancers, maladies orphelines,
grande prématurité.
• Milieux sociaux, urbains / ruraux variés
• Soignants rencontrés médecins et professionnels
paramédicaux, sociaux, psychologues:
France : 18, Québec : 6, Suisse 5

Constats
Ils sont des aidants précieux pour
chacun, sur le chemin périlleux qui
suit le décès du bébé, mais des
aidants mal connus et peu
reconnus. L’aide qu’ils apportent
sera utile dans la traversée du
deuil de toute la famille.

Différences culturelles à l’hôpital dans l’accueil
des grands-parents

• Il apparaît que les différences sont plus marquées entre les
services hospitaliers parfois au sein du même hôpital, qu’entre
les pays.
• Quelques grandes tendances sociologiques cependant pour les
trois pays :
 Des grands-parents proches, en France, des deux
générations
plus jeunes.
 Un souci d’indépendance des enfants semblent plus
marqué en Suisse qu’en France.
 Des « figures » puissantes de grands-mères au Québec,
constituées historiquement comme telles, devant les
absences prolongées des hommes.

• Les soignants nous disent souvent que
grâce à cette enquête, et avant même
d’en connaître les résultats, ils ont été
plus attentifs aux grands-parents.

Mal connus, peu reconnus

• Les grands-parents sont encore trop souvent
les oubliés de la réflexion sur les proches de
l’enfant malade. Les associations aussi n’ont
pas toujours pensé à eux.
« On aurait aimé rencontrer quelqu’un, mais on ne savait pas
où taper... Je crois qu’on aurait aimé rencontrer des gens qui
ont vécu des grandes souffrances, pour pouvoir être
écoutés ». (GM)

Mal connus, peu reconnus
«

Y a des choses pour les parents, y a rien pour les
grands parents ! » (G-M)

« Parler à l’hôpital avec d’autres grands-parents, ça m’a
beaucoup aidé » (G-P)

• Quand on se soucie de les écouter, les grands-

parents ont en effet, beaucoup à dire.

Quelques uns des points récurrents dans
les témoignages des grands-parents

• Ils indiquent tous l’injustice de voir la
maladie grave et la mort frapper les plus
jeunes, quand la logique générationnelle
voudrait que ce soient eux qui soient victimes.
« Maman l’arrière grand-mère disait : « C’était
pas à Julie de partir, c’était à moi » (G-M)

Des grands-pères qui se
révèlent
• Apparemment moins présents, appartenant à des
générations peu loquaces, on retrouve des
grands-pères qui pleurent leur petit-enfant, qui
soutiennent leur fils ou leur fille de manière tout
aussi importante, plusieurs possédant de réels
savoir-être qui n’est pas souvent exprimé face aux
soignants.

La double souffrance
• Ils et elles disent tous combien leur statut
dans la famille les amène à souffrir « deux
fois », pour l’enfant et le petit-enfant.
« Finalement les grands-parents souffrent presque deux
fois : on souffre pour notre enfant et on souffre pour
notre petit enfant. Et voir sa fille souffrir, sa fille triste,
sa fille maigrir, c’est épouvantable. Et de la voir pas
toujours soutenue par son mari, j’ai trouvé que c’était
très difficile »(G-M)

L’intensité de leur deuil
« Nous croyons qu’il ne faut pas sous-estimer le rôle et la
douleur vécus par les grands-parents des familles
endeuillées. D’ailleurs, les expériences les plus appréciées
par les grands-parents au moment du décès étaient leur
inclusion dans les derniers moments où ils eurent la chance
de prendre leur petit-enfant dans leur bras avant de le
quitter, où ils étaient présents pendant les discussions avec
les médecins et infirmières ».
dans Le deuil des grands-parents.
Enquête par questionnaire postal auprès de 21 grands-parents
Sophie Lessard, M.D., Claude Cyr M.D.
Département de pédiatrie, Faculté de médecine et des sciences de la santé,
Université de Sherbrooke, Canada

Malgré l’intensité de leur peine, les
grands-parents apportent un soutien
d’ordre relationnel, affectif, matériel. Il
est aussi spirituel

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents

La garde des autres enfants
« J’ai pris ma retraite et pendant plusieurs
semaines, je me suis occupé des grandes
(sœurs) afin qu’elles ne se sentent pas
abandonnées » (GP)

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents
• La préparation des repas pour les parents du
bébé et ses frères et sœurs.

• Le maintien des fêtes familiales
« Les fêtes de famille on a toujours continué.
Mais, elles sont quand même très dures.... je
crois que, si on arrêtait, ce serait encore plus
dur... » (G-M)

Quelques éléments d’analyse

• Les grands-parents contribuent à la stabilité
intergénérationnelle tout au long de la vie
familiale.
• Beaucoup d’entre eux ont su organiser les
rituels funéraires, réunir une communauté
plus large que la seule famille, notamment
dans les villages. Ils rendent très souvent
visite à la sépulture
de l’enfant et
l’entretiennent en étant vigilants aux souhaits
des parents.

Les besoins des grands-parents
• Le besoin d’être considérés comme faisant partie de la
famille.
• Le besoin de sentir qu’ils ne dérangent pas.
• Le besoin de poser des questions et, pour certains
d’être seuls avec les soignants.
• Le besoin de pouvoir exprimer leurs inquiétudes et leur
peine.
• Le besoin d’un accueil chaleureux dans un moment
difficile.
 Peu de différences en matière de besoins des
grands-parents d’un pays à l’autre.

Conclusion
Grands-parents et arrières grands-parents ont toute leur
place dans la construction d’une mémoire générationnelle et
d’une vie familiale auxquelles les soignants et les parents
contribuent positivement quand ils favorisent la rencontre et
l’évocation , sans juger les places, les rôles, la distance
bonne ou mauvaise, mais en reconnaissant l’importance de
la filiation.
« Les grands-parents sont importants parce qu’ils
sont les parents des parents » F. Dolto


Slide 9

« Ce qu’éprouvent les grands-parents »

Catherine Le Grand-Sébille : Socio-anthropologue,
Maître de conférences, Faculté de médecine, Lille 2

Sociologie des Grands-Parents
La sociologie de la grand-parentalité a connu en France,
grâce aux deux sociologues Claudine Attias-Donfut et
Martine Segalen une croissance et une fécondité
inégalées dans les autres pays francophones.
Depuis une vingtaine d’années, elles étudient un fait
démographique majeur, celui de l’allongement de la vie
et de la multiplication contemporaine des grandsparents, refusant de les laisser dans l’ombre.
Il y a près de 13 millions de grands-parents en France, on
ignore combien d’entre eux ont un petit enfant
gravement malade ou décédé.

Rôles et fonctions
Les
grands-parents
ont
des
fonctions
symboliques essentielles et exercent aussi un
rôle concret. Comme le dit M.F. Fuchs ce sont
des « relieurs » et des « transmetteurs » :
continuité familiale, inscription temporelle,
véhicules des valeurs familiales, garantie de
l’existence de l’histoire, témoignage de la mort
des générations plus âgées, légitimation du
parent auquel l’aïeul à passer le relais pour
devenir parent à son tour…

L’éternelle question de la « place »
• La récurrente question de la « bonne » place
est ainsi précisée par J-P Dommergues : « Le
rôle des grands-parents est d’être disponible
mais sans prendre la place des parents et en
sachant revenir au second plan quand les
parents sont présents. Ce jeu d’acteur de la
relation fait alterner un travail d’avant-scène
puis d’estompe en coulisse mais avec une
permanence affective qui garantit aux grandsparents de ne pas être des intermittents du
spectacle de la vie familiale… ».

• L’entreprise morale et normative
de
la
médecine
et
de
la
psychologie est ici perceptible, tant
le modelage spatial et relationnel
exigé
du
grand-parent
est
complexe
et
représente
probablement
un
défi
hors
d’atteinte.

Des dynamiques historiques
• Les processus politiques et sociaux que
sont la professionnalisation du soin, la
médicalisation, la technicisation et
l’institutionnalisation de la naissance et
de la mort, nous sont maintenant bien
connus
grâce
aux
travaux
des
historiens et des sociologues.

La disqualification des
savoirs familiaux


Il existe des tendances lourdes
qui caractérisent depuis la fin du
XIXe siècle, la disqualification puis
la mise à l’écart des savoirs
profanes sur la maladie et la mort
des enfants, et des soins familiaux
qui leur étaient afférents.

Une représentation de la
famille atomisée
De fait, les familles, longtemps tenues
éloignées des services de maternité et de
pédiatrie, trouvent depuis quelques
dizaines d’années, la possibilité d’y
entrer. Ce problème est structurel et
n’est pas lié à la seule volonté des
acteurs. Cette exclusion de la famille
élargie,
notamment,
est
une
caractéristique de notre médecine, à la
différence de celle d’autres pays.

Les parents de l’enfant sont les
interlocuteurs
privilégiés
et
souvent
uniques
des
professionnels, ce qui complique la
communication sur la santé du
bébé, entre parents et grandsparents.

Les liens « forts » n’excluent pas
les tensions et conflits
• Claudine Attias-Donfut et Martine Segalen qui
ont beaucoup travaillé sur les solidarités
familiales exercées par les grands-parents,
mettent aussi en lumière que ces liens
intenses sont tissés parfois de difficultés qui
vont de la tension passagère à la rancœur ou
au conflit. Elles rappellent que si les grandsparents, de par leur simple présence, offrent
un formidable socle identitaire à leurs petitsenfants, leurs relations n’échappent pas à la
complexité des liens interindividuels.

• Nous ne nions pas l’existence de
tels conflits au sein des familles,
dans le contexte de notre étude
qui donne la « part belle » aux
grands-parents, sans taire les
peines et les regrets qui teintent
de tristesse certains témoignages,
en cas de disputes.

Notre étude
«

Être le grand-parent d’un enfant
gravement malade aujourd’hui en
Suisse, au Québec et en France »
Réalisée en France grâce
l’association Soleil AFELT.

à

La population concernée
• Nombre de Grands-parents rencontrés:
France : 35, Québec : 24, Suisse : 21
• Petits-enfants décédés
France: 4, Québec : 6, Suisse : 2
• Âge des petits-enfants : 1 jour à 17 ans
• Pathologies concernées: cancers, maladies orphelines,
grande prématurité.
• Milieux sociaux, urbains / ruraux variés
• Soignants rencontrés médecins et professionnels
paramédicaux, sociaux, psychologues:
France : 18, Québec : 6, Suisse 5

Constats
Ils sont des aidants précieux pour
chacun, sur le chemin périlleux qui
suit le décès du bébé, mais des
aidants mal connus et peu
reconnus. L’aide qu’ils apportent
sera utile dans la traversée du
deuil de toute la famille.

Différences culturelles à l’hôpital dans l’accueil
des grands-parents

• Il apparaît que les différences sont plus marquées entre les
services hospitaliers parfois au sein du même hôpital, qu’entre
les pays.
• Quelques grandes tendances sociologiques cependant pour les
trois pays :
 Des grands-parents proches, en France, des deux
générations
plus jeunes.
 Un souci d’indépendance des enfants semblent plus
marqué en Suisse qu’en France.
 Des « figures » puissantes de grands-mères au Québec,
constituées historiquement comme telles, devant les
absences prolongées des hommes.

• Les soignants nous disent souvent que
grâce à cette enquête, et avant même
d’en connaître les résultats, ils ont été
plus attentifs aux grands-parents.

Mal connus, peu reconnus

• Les grands-parents sont encore trop souvent
les oubliés de la réflexion sur les proches de
l’enfant malade. Les associations aussi n’ont
pas toujours pensé à eux.
« On aurait aimé rencontrer quelqu’un, mais on ne savait pas
où taper... Je crois qu’on aurait aimé rencontrer des gens qui
ont vécu des grandes souffrances, pour pouvoir être
écoutés ». (GM)

Mal connus, peu reconnus
«

Y a des choses pour les parents, y a rien pour les
grands parents ! » (G-M)

« Parler à l’hôpital avec d’autres grands-parents, ça m’a
beaucoup aidé » (G-P)

• Quand on se soucie de les écouter, les grands-

parents ont en effet, beaucoup à dire.

Quelques uns des points récurrents dans
les témoignages des grands-parents

• Ils indiquent tous l’injustice de voir la
maladie grave et la mort frapper les plus
jeunes, quand la logique générationnelle
voudrait que ce soient eux qui soient victimes.
« Maman l’arrière grand-mère disait : « C’était
pas à Julie de partir, c’était à moi » (G-M)

Des grands-pères qui se
révèlent
• Apparemment moins présents, appartenant à des
générations peu loquaces, on retrouve des
grands-pères qui pleurent leur petit-enfant, qui
soutiennent leur fils ou leur fille de manière tout
aussi importante, plusieurs possédant de réels
savoir-être qui n’est pas souvent exprimé face aux
soignants.

La double souffrance
• Ils et elles disent tous combien leur statut
dans la famille les amène à souffrir « deux
fois », pour l’enfant et le petit-enfant.
« Finalement les grands-parents souffrent presque deux
fois : on souffre pour notre enfant et on souffre pour
notre petit enfant. Et voir sa fille souffrir, sa fille triste,
sa fille maigrir, c’est épouvantable. Et de la voir pas
toujours soutenue par son mari, j’ai trouvé que c’était
très difficile »(G-M)

L’intensité de leur deuil
« Nous croyons qu’il ne faut pas sous-estimer le rôle et la
douleur vécus par les grands-parents des familles
endeuillées. D’ailleurs, les expériences les plus appréciées
par les grands-parents au moment du décès étaient leur
inclusion dans les derniers moments où ils eurent la chance
de prendre leur petit-enfant dans leur bras avant de le
quitter, où ils étaient présents pendant les discussions avec
les médecins et infirmières ».
dans Le deuil des grands-parents.
Enquête par questionnaire postal auprès de 21 grands-parents
Sophie Lessard, M.D., Claude Cyr M.D.
Département de pédiatrie, Faculté de médecine et des sciences de la santé,
Université de Sherbrooke, Canada

Malgré l’intensité de leur peine, les
grands-parents apportent un soutien
d’ordre relationnel, affectif, matériel. Il
est aussi spirituel

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents

La garde des autres enfants
« J’ai pris ma retraite et pendant plusieurs
semaines, je me suis occupé des grandes
(sœurs) afin qu’elles ne se sentent pas
abandonnées » (GP)

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents
• La préparation des repas pour les parents du
bébé et ses frères et sœurs.

• Le maintien des fêtes familiales
« Les fêtes de famille on a toujours continué.
Mais, elles sont quand même très dures.... je
crois que, si on arrêtait, ce serait encore plus
dur... » (G-M)

Quelques éléments d’analyse

• Les grands-parents contribuent à la stabilité
intergénérationnelle tout au long de la vie
familiale.
• Beaucoup d’entre eux ont su organiser les
rituels funéraires, réunir une communauté
plus large que la seule famille, notamment
dans les villages. Ils rendent très souvent
visite à la sépulture
de l’enfant et
l’entretiennent en étant vigilants aux souhaits
des parents.

Les besoins des grands-parents
• Le besoin d’être considérés comme faisant partie de la
famille.
• Le besoin de sentir qu’ils ne dérangent pas.
• Le besoin de poser des questions et, pour certains
d’être seuls avec les soignants.
• Le besoin de pouvoir exprimer leurs inquiétudes et leur
peine.
• Le besoin d’un accueil chaleureux dans un moment
difficile.
 Peu de différences en matière de besoins des
grands-parents d’un pays à l’autre.

Conclusion
Grands-parents et arrières grands-parents ont toute leur
place dans la construction d’une mémoire générationnelle et
d’une vie familiale auxquelles les soignants et les parents
contribuent positivement quand ils favorisent la rencontre et
l’évocation , sans juger les places, les rôles, la distance
bonne ou mauvaise, mais en reconnaissant l’importance de
la filiation.
« Les grands-parents sont importants parce qu’ils
sont les parents des parents » F. Dolto


Slide 10

« Ce qu’éprouvent les grands-parents »

Catherine Le Grand-Sébille : Socio-anthropologue,
Maître de conférences, Faculté de médecine, Lille 2

Sociologie des Grands-Parents
La sociologie de la grand-parentalité a connu en France,
grâce aux deux sociologues Claudine Attias-Donfut et
Martine Segalen une croissance et une fécondité
inégalées dans les autres pays francophones.
Depuis une vingtaine d’années, elles étudient un fait
démographique majeur, celui de l’allongement de la vie
et de la multiplication contemporaine des grandsparents, refusant de les laisser dans l’ombre.
Il y a près de 13 millions de grands-parents en France, on
ignore combien d’entre eux ont un petit enfant
gravement malade ou décédé.

Rôles et fonctions
Les
grands-parents
ont
des
fonctions
symboliques essentielles et exercent aussi un
rôle concret. Comme le dit M.F. Fuchs ce sont
des « relieurs » et des « transmetteurs » :
continuité familiale, inscription temporelle,
véhicules des valeurs familiales, garantie de
l’existence de l’histoire, témoignage de la mort
des générations plus âgées, légitimation du
parent auquel l’aïeul à passer le relais pour
devenir parent à son tour…

L’éternelle question de la « place »
• La récurrente question de la « bonne » place
est ainsi précisée par J-P Dommergues : « Le
rôle des grands-parents est d’être disponible
mais sans prendre la place des parents et en
sachant revenir au second plan quand les
parents sont présents. Ce jeu d’acteur de la
relation fait alterner un travail d’avant-scène
puis d’estompe en coulisse mais avec une
permanence affective qui garantit aux grandsparents de ne pas être des intermittents du
spectacle de la vie familiale… ».

• L’entreprise morale et normative
de
la
médecine
et
de
la
psychologie est ici perceptible, tant
le modelage spatial et relationnel
exigé
du
grand-parent
est
complexe
et
représente
probablement
un
défi
hors
d’atteinte.

Des dynamiques historiques
• Les processus politiques et sociaux que
sont la professionnalisation du soin, la
médicalisation, la technicisation et
l’institutionnalisation de la naissance et
de la mort, nous sont maintenant bien
connus
grâce
aux
travaux
des
historiens et des sociologues.

La disqualification des
savoirs familiaux


Il existe des tendances lourdes
qui caractérisent depuis la fin du
XIXe siècle, la disqualification puis
la mise à l’écart des savoirs
profanes sur la maladie et la mort
des enfants, et des soins familiaux
qui leur étaient afférents.

Une représentation de la
famille atomisée
De fait, les familles, longtemps tenues
éloignées des services de maternité et de
pédiatrie, trouvent depuis quelques
dizaines d’années, la possibilité d’y
entrer. Ce problème est structurel et
n’est pas lié à la seule volonté des
acteurs. Cette exclusion de la famille
élargie,
notamment,
est
une
caractéristique de notre médecine, à la
différence de celle d’autres pays.

Les parents de l’enfant sont les
interlocuteurs
privilégiés
et
souvent
uniques
des
professionnels, ce qui complique la
communication sur la santé du
bébé, entre parents et grandsparents.

Les liens « forts » n’excluent pas
les tensions et conflits
• Claudine Attias-Donfut et Martine Segalen qui
ont beaucoup travaillé sur les solidarités
familiales exercées par les grands-parents,
mettent aussi en lumière que ces liens
intenses sont tissés parfois de difficultés qui
vont de la tension passagère à la rancœur ou
au conflit. Elles rappellent que si les grandsparents, de par leur simple présence, offrent
un formidable socle identitaire à leurs petitsenfants, leurs relations n’échappent pas à la
complexité des liens interindividuels.

• Nous ne nions pas l’existence de
tels conflits au sein des familles,
dans le contexte de notre étude
qui donne la « part belle » aux
grands-parents, sans taire les
peines et les regrets qui teintent
de tristesse certains témoignages,
en cas de disputes.

Notre étude
«

Être le grand-parent d’un enfant
gravement malade aujourd’hui en
Suisse, au Québec et en France »
Réalisée en France grâce
l’association Soleil AFELT.

à

La population concernée
• Nombre de Grands-parents rencontrés:
France : 35, Québec : 24, Suisse : 21
• Petits-enfants décédés
France: 4, Québec : 6, Suisse : 2
• Âge des petits-enfants : 1 jour à 17 ans
• Pathologies concernées: cancers, maladies orphelines,
grande prématurité.
• Milieux sociaux, urbains / ruraux variés
• Soignants rencontrés médecins et professionnels
paramédicaux, sociaux, psychologues:
France : 18, Québec : 6, Suisse 5

Constats
Ils sont des aidants précieux pour
chacun, sur le chemin périlleux qui
suit le décès du bébé, mais des
aidants mal connus et peu
reconnus. L’aide qu’ils apportent
sera utile dans la traversée du
deuil de toute la famille.

Différences culturelles à l’hôpital dans l’accueil
des grands-parents

• Il apparaît que les différences sont plus marquées entre les
services hospitaliers parfois au sein du même hôpital, qu’entre
les pays.
• Quelques grandes tendances sociologiques cependant pour les
trois pays :
 Des grands-parents proches, en France, des deux
générations
plus jeunes.
 Un souci d’indépendance des enfants semblent plus
marqué en Suisse qu’en France.
 Des « figures » puissantes de grands-mères au Québec,
constituées historiquement comme telles, devant les
absences prolongées des hommes.

• Les soignants nous disent souvent que
grâce à cette enquête, et avant même
d’en connaître les résultats, ils ont été
plus attentifs aux grands-parents.

Mal connus, peu reconnus

• Les grands-parents sont encore trop souvent
les oubliés de la réflexion sur les proches de
l’enfant malade. Les associations aussi n’ont
pas toujours pensé à eux.
« On aurait aimé rencontrer quelqu’un, mais on ne savait pas
où taper... Je crois qu’on aurait aimé rencontrer des gens qui
ont vécu des grandes souffrances, pour pouvoir être
écoutés ». (GM)

Mal connus, peu reconnus
«

Y a des choses pour les parents, y a rien pour les
grands parents ! » (G-M)

« Parler à l’hôpital avec d’autres grands-parents, ça m’a
beaucoup aidé » (G-P)

• Quand on se soucie de les écouter, les grands-

parents ont en effet, beaucoup à dire.

Quelques uns des points récurrents dans
les témoignages des grands-parents

• Ils indiquent tous l’injustice de voir la
maladie grave et la mort frapper les plus
jeunes, quand la logique générationnelle
voudrait que ce soient eux qui soient victimes.
« Maman l’arrière grand-mère disait : « C’était
pas à Julie de partir, c’était à moi » (G-M)

Des grands-pères qui se
révèlent
• Apparemment moins présents, appartenant à des
générations peu loquaces, on retrouve des
grands-pères qui pleurent leur petit-enfant, qui
soutiennent leur fils ou leur fille de manière tout
aussi importante, plusieurs possédant de réels
savoir-être qui n’est pas souvent exprimé face aux
soignants.

La double souffrance
• Ils et elles disent tous combien leur statut
dans la famille les amène à souffrir « deux
fois », pour l’enfant et le petit-enfant.
« Finalement les grands-parents souffrent presque deux
fois : on souffre pour notre enfant et on souffre pour
notre petit enfant. Et voir sa fille souffrir, sa fille triste,
sa fille maigrir, c’est épouvantable. Et de la voir pas
toujours soutenue par son mari, j’ai trouvé que c’était
très difficile »(G-M)

L’intensité de leur deuil
« Nous croyons qu’il ne faut pas sous-estimer le rôle et la
douleur vécus par les grands-parents des familles
endeuillées. D’ailleurs, les expériences les plus appréciées
par les grands-parents au moment du décès étaient leur
inclusion dans les derniers moments où ils eurent la chance
de prendre leur petit-enfant dans leur bras avant de le
quitter, où ils étaient présents pendant les discussions avec
les médecins et infirmières ».
dans Le deuil des grands-parents.
Enquête par questionnaire postal auprès de 21 grands-parents
Sophie Lessard, M.D., Claude Cyr M.D.
Département de pédiatrie, Faculté de médecine et des sciences de la santé,
Université de Sherbrooke, Canada

Malgré l’intensité de leur peine, les
grands-parents apportent un soutien
d’ordre relationnel, affectif, matériel. Il
est aussi spirituel

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents

La garde des autres enfants
« J’ai pris ma retraite et pendant plusieurs
semaines, je me suis occupé des grandes
(sœurs) afin qu’elles ne se sentent pas
abandonnées » (GP)

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents
• La préparation des repas pour les parents du
bébé et ses frères et sœurs.

• Le maintien des fêtes familiales
« Les fêtes de famille on a toujours continué.
Mais, elles sont quand même très dures.... je
crois que, si on arrêtait, ce serait encore plus
dur... » (G-M)

Quelques éléments d’analyse

• Les grands-parents contribuent à la stabilité
intergénérationnelle tout au long de la vie
familiale.
• Beaucoup d’entre eux ont su organiser les
rituels funéraires, réunir une communauté
plus large que la seule famille, notamment
dans les villages. Ils rendent très souvent
visite à la sépulture
de l’enfant et
l’entretiennent en étant vigilants aux souhaits
des parents.

Les besoins des grands-parents
• Le besoin d’être considérés comme faisant partie de la
famille.
• Le besoin de sentir qu’ils ne dérangent pas.
• Le besoin de poser des questions et, pour certains
d’être seuls avec les soignants.
• Le besoin de pouvoir exprimer leurs inquiétudes et leur
peine.
• Le besoin d’un accueil chaleureux dans un moment
difficile.
 Peu de différences en matière de besoins des
grands-parents d’un pays à l’autre.

Conclusion
Grands-parents et arrières grands-parents ont toute leur
place dans la construction d’une mémoire générationnelle et
d’une vie familiale auxquelles les soignants et les parents
contribuent positivement quand ils favorisent la rencontre et
l’évocation , sans juger les places, les rôles, la distance
bonne ou mauvaise, mais en reconnaissant l’importance de
la filiation.
« Les grands-parents sont importants parce qu’ils
sont les parents des parents » F. Dolto


Slide 11

« Ce qu’éprouvent les grands-parents »

Catherine Le Grand-Sébille : Socio-anthropologue,
Maître de conférences, Faculté de médecine, Lille 2

Sociologie des Grands-Parents
La sociologie de la grand-parentalité a connu en France,
grâce aux deux sociologues Claudine Attias-Donfut et
Martine Segalen une croissance et une fécondité
inégalées dans les autres pays francophones.
Depuis une vingtaine d’années, elles étudient un fait
démographique majeur, celui de l’allongement de la vie
et de la multiplication contemporaine des grandsparents, refusant de les laisser dans l’ombre.
Il y a près de 13 millions de grands-parents en France, on
ignore combien d’entre eux ont un petit enfant
gravement malade ou décédé.

Rôles et fonctions
Les
grands-parents
ont
des
fonctions
symboliques essentielles et exercent aussi un
rôle concret. Comme le dit M.F. Fuchs ce sont
des « relieurs » et des « transmetteurs » :
continuité familiale, inscription temporelle,
véhicules des valeurs familiales, garantie de
l’existence de l’histoire, témoignage de la mort
des générations plus âgées, légitimation du
parent auquel l’aïeul à passer le relais pour
devenir parent à son tour…

L’éternelle question de la « place »
• La récurrente question de la « bonne » place
est ainsi précisée par J-P Dommergues : « Le
rôle des grands-parents est d’être disponible
mais sans prendre la place des parents et en
sachant revenir au second plan quand les
parents sont présents. Ce jeu d’acteur de la
relation fait alterner un travail d’avant-scène
puis d’estompe en coulisse mais avec une
permanence affective qui garantit aux grandsparents de ne pas être des intermittents du
spectacle de la vie familiale… ».

• L’entreprise morale et normative
de
la
médecine
et
de
la
psychologie est ici perceptible, tant
le modelage spatial et relationnel
exigé
du
grand-parent
est
complexe
et
représente
probablement
un
défi
hors
d’atteinte.

Des dynamiques historiques
• Les processus politiques et sociaux que
sont la professionnalisation du soin, la
médicalisation, la technicisation et
l’institutionnalisation de la naissance et
de la mort, nous sont maintenant bien
connus
grâce
aux
travaux
des
historiens et des sociologues.

La disqualification des
savoirs familiaux


Il existe des tendances lourdes
qui caractérisent depuis la fin du
XIXe siècle, la disqualification puis
la mise à l’écart des savoirs
profanes sur la maladie et la mort
des enfants, et des soins familiaux
qui leur étaient afférents.

Une représentation de la
famille atomisée
De fait, les familles, longtemps tenues
éloignées des services de maternité et de
pédiatrie, trouvent depuis quelques
dizaines d’années, la possibilité d’y
entrer. Ce problème est structurel et
n’est pas lié à la seule volonté des
acteurs. Cette exclusion de la famille
élargie,
notamment,
est
une
caractéristique de notre médecine, à la
différence de celle d’autres pays.

Les parents de l’enfant sont les
interlocuteurs
privilégiés
et
souvent
uniques
des
professionnels, ce qui complique la
communication sur la santé du
bébé, entre parents et grandsparents.

Les liens « forts » n’excluent pas
les tensions et conflits
• Claudine Attias-Donfut et Martine Segalen qui
ont beaucoup travaillé sur les solidarités
familiales exercées par les grands-parents,
mettent aussi en lumière que ces liens
intenses sont tissés parfois de difficultés qui
vont de la tension passagère à la rancœur ou
au conflit. Elles rappellent que si les grandsparents, de par leur simple présence, offrent
un formidable socle identitaire à leurs petitsenfants, leurs relations n’échappent pas à la
complexité des liens interindividuels.

• Nous ne nions pas l’existence de
tels conflits au sein des familles,
dans le contexte de notre étude
qui donne la « part belle » aux
grands-parents, sans taire les
peines et les regrets qui teintent
de tristesse certains témoignages,
en cas de disputes.

Notre étude
«

Être le grand-parent d’un enfant
gravement malade aujourd’hui en
Suisse, au Québec et en France »
Réalisée en France grâce
l’association Soleil AFELT.

à

La population concernée
• Nombre de Grands-parents rencontrés:
France : 35, Québec : 24, Suisse : 21
• Petits-enfants décédés
France: 4, Québec : 6, Suisse : 2
• Âge des petits-enfants : 1 jour à 17 ans
• Pathologies concernées: cancers, maladies orphelines,
grande prématurité.
• Milieux sociaux, urbains / ruraux variés
• Soignants rencontrés médecins et professionnels
paramédicaux, sociaux, psychologues:
France : 18, Québec : 6, Suisse 5

Constats
Ils sont des aidants précieux pour
chacun, sur le chemin périlleux qui
suit le décès du bébé, mais des
aidants mal connus et peu
reconnus. L’aide qu’ils apportent
sera utile dans la traversée du
deuil de toute la famille.

Différences culturelles à l’hôpital dans l’accueil
des grands-parents

• Il apparaît que les différences sont plus marquées entre les
services hospitaliers parfois au sein du même hôpital, qu’entre
les pays.
• Quelques grandes tendances sociologiques cependant pour les
trois pays :
 Des grands-parents proches, en France, des deux
générations
plus jeunes.
 Un souci d’indépendance des enfants semblent plus
marqué en Suisse qu’en France.
 Des « figures » puissantes de grands-mères au Québec,
constituées historiquement comme telles, devant les
absences prolongées des hommes.

• Les soignants nous disent souvent que
grâce à cette enquête, et avant même
d’en connaître les résultats, ils ont été
plus attentifs aux grands-parents.

Mal connus, peu reconnus

• Les grands-parents sont encore trop souvent
les oubliés de la réflexion sur les proches de
l’enfant malade. Les associations aussi n’ont
pas toujours pensé à eux.
« On aurait aimé rencontrer quelqu’un, mais on ne savait pas
où taper... Je crois qu’on aurait aimé rencontrer des gens qui
ont vécu des grandes souffrances, pour pouvoir être
écoutés ». (GM)

Mal connus, peu reconnus
«

Y a des choses pour les parents, y a rien pour les
grands parents ! » (G-M)

« Parler à l’hôpital avec d’autres grands-parents, ça m’a
beaucoup aidé » (G-P)

• Quand on se soucie de les écouter, les grands-

parents ont en effet, beaucoup à dire.

Quelques uns des points récurrents dans
les témoignages des grands-parents

• Ils indiquent tous l’injustice de voir la
maladie grave et la mort frapper les plus
jeunes, quand la logique générationnelle
voudrait que ce soient eux qui soient victimes.
« Maman l’arrière grand-mère disait : « C’était
pas à Julie de partir, c’était à moi » (G-M)

Des grands-pères qui se
révèlent
• Apparemment moins présents, appartenant à des
générations peu loquaces, on retrouve des
grands-pères qui pleurent leur petit-enfant, qui
soutiennent leur fils ou leur fille de manière tout
aussi importante, plusieurs possédant de réels
savoir-être qui n’est pas souvent exprimé face aux
soignants.

La double souffrance
• Ils et elles disent tous combien leur statut
dans la famille les amène à souffrir « deux
fois », pour l’enfant et le petit-enfant.
« Finalement les grands-parents souffrent presque deux
fois : on souffre pour notre enfant et on souffre pour
notre petit enfant. Et voir sa fille souffrir, sa fille triste,
sa fille maigrir, c’est épouvantable. Et de la voir pas
toujours soutenue par son mari, j’ai trouvé que c’était
très difficile »(G-M)

L’intensité de leur deuil
« Nous croyons qu’il ne faut pas sous-estimer le rôle et la
douleur vécus par les grands-parents des familles
endeuillées. D’ailleurs, les expériences les plus appréciées
par les grands-parents au moment du décès étaient leur
inclusion dans les derniers moments où ils eurent la chance
de prendre leur petit-enfant dans leur bras avant de le
quitter, où ils étaient présents pendant les discussions avec
les médecins et infirmières ».
dans Le deuil des grands-parents.
Enquête par questionnaire postal auprès de 21 grands-parents
Sophie Lessard, M.D., Claude Cyr M.D.
Département de pédiatrie, Faculté de médecine et des sciences de la santé,
Université de Sherbrooke, Canada

Malgré l’intensité de leur peine, les
grands-parents apportent un soutien
d’ordre relationnel, affectif, matériel. Il
est aussi spirituel

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents

La garde des autres enfants
« J’ai pris ma retraite et pendant plusieurs
semaines, je me suis occupé des grandes
(sœurs) afin qu’elles ne se sentent pas
abandonnées » (GP)

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents
• La préparation des repas pour les parents du
bébé et ses frères et sœurs.

• Le maintien des fêtes familiales
« Les fêtes de famille on a toujours continué.
Mais, elles sont quand même très dures.... je
crois que, si on arrêtait, ce serait encore plus
dur... » (G-M)

Quelques éléments d’analyse

• Les grands-parents contribuent à la stabilité
intergénérationnelle tout au long de la vie
familiale.
• Beaucoup d’entre eux ont su organiser les
rituels funéraires, réunir une communauté
plus large que la seule famille, notamment
dans les villages. Ils rendent très souvent
visite à la sépulture
de l’enfant et
l’entretiennent en étant vigilants aux souhaits
des parents.

Les besoins des grands-parents
• Le besoin d’être considérés comme faisant partie de la
famille.
• Le besoin de sentir qu’ils ne dérangent pas.
• Le besoin de poser des questions et, pour certains
d’être seuls avec les soignants.
• Le besoin de pouvoir exprimer leurs inquiétudes et leur
peine.
• Le besoin d’un accueil chaleureux dans un moment
difficile.
 Peu de différences en matière de besoins des
grands-parents d’un pays à l’autre.

Conclusion
Grands-parents et arrières grands-parents ont toute leur
place dans la construction d’une mémoire générationnelle et
d’une vie familiale auxquelles les soignants et les parents
contribuent positivement quand ils favorisent la rencontre et
l’évocation , sans juger les places, les rôles, la distance
bonne ou mauvaise, mais en reconnaissant l’importance de
la filiation.
« Les grands-parents sont importants parce qu’ils
sont les parents des parents » F. Dolto


Slide 12

« Ce qu’éprouvent les grands-parents »

Catherine Le Grand-Sébille : Socio-anthropologue,
Maître de conférences, Faculté de médecine, Lille 2

Sociologie des Grands-Parents
La sociologie de la grand-parentalité a connu en France,
grâce aux deux sociologues Claudine Attias-Donfut et
Martine Segalen une croissance et une fécondité
inégalées dans les autres pays francophones.
Depuis une vingtaine d’années, elles étudient un fait
démographique majeur, celui de l’allongement de la vie
et de la multiplication contemporaine des grandsparents, refusant de les laisser dans l’ombre.
Il y a près de 13 millions de grands-parents en France, on
ignore combien d’entre eux ont un petit enfant
gravement malade ou décédé.

Rôles et fonctions
Les
grands-parents
ont
des
fonctions
symboliques essentielles et exercent aussi un
rôle concret. Comme le dit M.F. Fuchs ce sont
des « relieurs » et des « transmetteurs » :
continuité familiale, inscription temporelle,
véhicules des valeurs familiales, garantie de
l’existence de l’histoire, témoignage de la mort
des générations plus âgées, légitimation du
parent auquel l’aïeul à passer le relais pour
devenir parent à son tour…

L’éternelle question de la « place »
• La récurrente question de la « bonne » place
est ainsi précisée par J-P Dommergues : « Le
rôle des grands-parents est d’être disponible
mais sans prendre la place des parents et en
sachant revenir au second plan quand les
parents sont présents. Ce jeu d’acteur de la
relation fait alterner un travail d’avant-scène
puis d’estompe en coulisse mais avec une
permanence affective qui garantit aux grandsparents de ne pas être des intermittents du
spectacle de la vie familiale… ».

• L’entreprise morale et normative
de
la
médecine
et
de
la
psychologie est ici perceptible, tant
le modelage spatial et relationnel
exigé
du
grand-parent
est
complexe
et
représente
probablement
un
défi
hors
d’atteinte.

Des dynamiques historiques
• Les processus politiques et sociaux que
sont la professionnalisation du soin, la
médicalisation, la technicisation et
l’institutionnalisation de la naissance et
de la mort, nous sont maintenant bien
connus
grâce
aux
travaux
des
historiens et des sociologues.

La disqualification des
savoirs familiaux


Il existe des tendances lourdes
qui caractérisent depuis la fin du
XIXe siècle, la disqualification puis
la mise à l’écart des savoirs
profanes sur la maladie et la mort
des enfants, et des soins familiaux
qui leur étaient afférents.

Une représentation de la
famille atomisée
De fait, les familles, longtemps tenues
éloignées des services de maternité et de
pédiatrie, trouvent depuis quelques
dizaines d’années, la possibilité d’y
entrer. Ce problème est structurel et
n’est pas lié à la seule volonté des
acteurs. Cette exclusion de la famille
élargie,
notamment,
est
une
caractéristique de notre médecine, à la
différence de celle d’autres pays.

Les parents de l’enfant sont les
interlocuteurs
privilégiés
et
souvent
uniques
des
professionnels, ce qui complique la
communication sur la santé du
bébé, entre parents et grandsparents.

Les liens « forts » n’excluent pas
les tensions et conflits
• Claudine Attias-Donfut et Martine Segalen qui
ont beaucoup travaillé sur les solidarités
familiales exercées par les grands-parents,
mettent aussi en lumière que ces liens
intenses sont tissés parfois de difficultés qui
vont de la tension passagère à la rancœur ou
au conflit. Elles rappellent que si les grandsparents, de par leur simple présence, offrent
un formidable socle identitaire à leurs petitsenfants, leurs relations n’échappent pas à la
complexité des liens interindividuels.

• Nous ne nions pas l’existence de
tels conflits au sein des familles,
dans le contexte de notre étude
qui donne la « part belle » aux
grands-parents, sans taire les
peines et les regrets qui teintent
de tristesse certains témoignages,
en cas de disputes.

Notre étude
«

Être le grand-parent d’un enfant
gravement malade aujourd’hui en
Suisse, au Québec et en France »
Réalisée en France grâce
l’association Soleil AFELT.

à

La population concernée
• Nombre de Grands-parents rencontrés:
France : 35, Québec : 24, Suisse : 21
• Petits-enfants décédés
France: 4, Québec : 6, Suisse : 2
• Âge des petits-enfants : 1 jour à 17 ans
• Pathologies concernées: cancers, maladies orphelines,
grande prématurité.
• Milieux sociaux, urbains / ruraux variés
• Soignants rencontrés médecins et professionnels
paramédicaux, sociaux, psychologues:
France : 18, Québec : 6, Suisse 5

Constats
Ils sont des aidants précieux pour
chacun, sur le chemin périlleux qui
suit le décès du bébé, mais des
aidants mal connus et peu
reconnus. L’aide qu’ils apportent
sera utile dans la traversée du
deuil de toute la famille.

Différences culturelles à l’hôpital dans l’accueil
des grands-parents

• Il apparaît que les différences sont plus marquées entre les
services hospitaliers parfois au sein du même hôpital, qu’entre
les pays.
• Quelques grandes tendances sociologiques cependant pour les
trois pays :
 Des grands-parents proches, en France, des deux
générations
plus jeunes.
 Un souci d’indépendance des enfants semblent plus
marqué en Suisse qu’en France.
 Des « figures » puissantes de grands-mères au Québec,
constituées historiquement comme telles, devant les
absences prolongées des hommes.

• Les soignants nous disent souvent que
grâce à cette enquête, et avant même
d’en connaître les résultats, ils ont été
plus attentifs aux grands-parents.

Mal connus, peu reconnus

• Les grands-parents sont encore trop souvent
les oubliés de la réflexion sur les proches de
l’enfant malade. Les associations aussi n’ont
pas toujours pensé à eux.
« On aurait aimé rencontrer quelqu’un, mais on ne savait pas
où taper... Je crois qu’on aurait aimé rencontrer des gens qui
ont vécu des grandes souffrances, pour pouvoir être
écoutés ». (GM)

Mal connus, peu reconnus
«

Y a des choses pour les parents, y a rien pour les
grands parents ! » (G-M)

« Parler à l’hôpital avec d’autres grands-parents, ça m’a
beaucoup aidé » (G-P)

• Quand on se soucie de les écouter, les grands-

parents ont en effet, beaucoup à dire.

Quelques uns des points récurrents dans
les témoignages des grands-parents

• Ils indiquent tous l’injustice de voir la
maladie grave et la mort frapper les plus
jeunes, quand la logique générationnelle
voudrait que ce soient eux qui soient victimes.
« Maman l’arrière grand-mère disait : « C’était
pas à Julie de partir, c’était à moi » (G-M)

Des grands-pères qui se
révèlent
• Apparemment moins présents, appartenant à des
générations peu loquaces, on retrouve des
grands-pères qui pleurent leur petit-enfant, qui
soutiennent leur fils ou leur fille de manière tout
aussi importante, plusieurs possédant de réels
savoir-être qui n’est pas souvent exprimé face aux
soignants.

La double souffrance
• Ils et elles disent tous combien leur statut
dans la famille les amène à souffrir « deux
fois », pour l’enfant et le petit-enfant.
« Finalement les grands-parents souffrent presque deux
fois : on souffre pour notre enfant et on souffre pour
notre petit enfant. Et voir sa fille souffrir, sa fille triste,
sa fille maigrir, c’est épouvantable. Et de la voir pas
toujours soutenue par son mari, j’ai trouvé que c’était
très difficile »(G-M)

L’intensité de leur deuil
« Nous croyons qu’il ne faut pas sous-estimer le rôle et la
douleur vécus par les grands-parents des familles
endeuillées. D’ailleurs, les expériences les plus appréciées
par les grands-parents au moment du décès étaient leur
inclusion dans les derniers moments où ils eurent la chance
de prendre leur petit-enfant dans leur bras avant de le
quitter, où ils étaient présents pendant les discussions avec
les médecins et infirmières ».
dans Le deuil des grands-parents.
Enquête par questionnaire postal auprès de 21 grands-parents
Sophie Lessard, M.D., Claude Cyr M.D.
Département de pédiatrie, Faculté de médecine et des sciences de la santé,
Université de Sherbrooke, Canada

Malgré l’intensité de leur peine, les
grands-parents apportent un soutien
d’ordre relationnel, affectif, matériel. Il
est aussi spirituel

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents

La garde des autres enfants
« J’ai pris ma retraite et pendant plusieurs
semaines, je me suis occupé des grandes
(sœurs) afin qu’elles ne se sentent pas
abandonnées » (GP)

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents
• La préparation des repas pour les parents du
bébé et ses frères et sœurs.

• Le maintien des fêtes familiales
« Les fêtes de famille on a toujours continué.
Mais, elles sont quand même très dures.... je
crois que, si on arrêtait, ce serait encore plus
dur... » (G-M)

Quelques éléments d’analyse

• Les grands-parents contribuent à la stabilité
intergénérationnelle tout au long de la vie
familiale.
• Beaucoup d’entre eux ont su organiser les
rituels funéraires, réunir une communauté
plus large que la seule famille, notamment
dans les villages. Ils rendent très souvent
visite à la sépulture
de l’enfant et
l’entretiennent en étant vigilants aux souhaits
des parents.

Les besoins des grands-parents
• Le besoin d’être considérés comme faisant partie de la
famille.
• Le besoin de sentir qu’ils ne dérangent pas.
• Le besoin de poser des questions et, pour certains
d’être seuls avec les soignants.
• Le besoin de pouvoir exprimer leurs inquiétudes et leur
peine.
• Le besoin d’un accueil chaleureux dans un moment
difficile.
 Peu de différences en matière de besoins des
grands-parents d’un pays à l’autre.

Conclusion
Grands-parents et arrières grands-parents ont toute leur
place dans la construction d’une mémoire générationnelle et
d’une vie familiale auxquelles les soignants et les parents
contribuent positivement quand ils favorisent la rencontre et
l’évocation , sans juger les places, les rôles, la distance
bonne ou mauvaise, mais en reconnaissant l’importance de
la filiation.
« Les grands-parents sont importants parce qu’ils
sont les parents des parents » F. Dolto


Slide 13

« Ce qu’éprouvent les grands-parents »

Catherine Le Grand-Sébille : Socio-anthropologue,
Maître de conférences, Faculté de médecine, Lille 2

Sociologie des Grands-Parents
La sociologie de la grand-parentalité a connu en France,
grâce aux deux sociologues Claudine Attias-Donfut et
Martine Segalen une croissance et une fécondité
inégalées dans les autres pays francophones.
Depuis une vingtaine d’années, elles étudient un fait
démographique majeur, celui de l’allongement de la vie
et de la multiplication contemporaine des grandsparents, refusant de les laisser dans l’ombre.
Il y a près de 13 millions de grands-parents en France, on
ignore combien d’entre eux ont un petit enfant
gravement malade ou décédé.

Rôles et fonctions
Les
grands-parents
ont
des
fonctions
symboliques essentielles et exercent aussi un
rôle concret. Comme le dit M.F. Fuchs ce sont
des « relieurs » et des « transmetteurs » :
continuité familiale, inscription temporelle,
véhicules des valeurs familiales, garantie de
l’existence de l’histoire, témoignage de la mort
des générations plus âgées, légitimation du
parent auquel l’aïeul à passer le relais pour
devenir parent à son tour…

L’éternelle question de la « place »
• La récurrente question de la « bonne » place
est ainsi précisée par J-P Dommergues : « Le
rôle des grands-parents est d’être disponible
mais sans prendre la place des parents et en
sachant revenir au second plan quand les
parents sont présents. Ce jeu d’acteur de la
relation fait alterner un travail d’avant-scène
puis d’estompe en coulisse mais avec une
permanence affective qui garantit aux grandsparents de ne pas être des intermittents du
spectacle de la vie familiale… ».

• L’entreprise morale et normative
de
la
médecine
et
de
la
psychologie est ici perceptible, tant
le modelage spatial et relationnel
exigé
du
grand-parent
est
complexe
et
représente
probablement
un
défi
hors
d’atteinte.

Des dynamiques historiques
• Les processus politiques et sociaux que
sont la professionnalisation du soin, la
médicalisation, la technicisation et
l’institutionnalisation de la naissance et
de la mort, nous sont maintenant bien
connus
grâce
aux
travaux
des
historiens et des sociologues.

La disqualification des
savoirs familiaux


Il existe des tendances lourdes
qui caractérisent depuis la fin du
XIXe siècle, la disqualification puis
la mise à l’écart des savoirs
profanes sur la maladie et la mort
des enfants, et des soins familiaux
qui leur étaient afférents.

Une représentation de la
famille atomisée
De fait, les familles, longtemps tenues
éloignées des services de maternité et de
pédiatrie, trouvent depuis quelques
dizaines d’années, la possibilité d’y
entrer. Ce problème est structurel et
n’est pas lié à la seule volonté des
acteurs. Cette exclusion de la famille
élargie,
notamment,
est
une
caractéristique de notre médecine, à la
différence de celle d’autres pays.

Les parents de l’enfant sont les
interlocuteurs
privilégiés
et
souvent
uniques
des
professionnels, ce qui complique la
communication sur la santé du
bébé, entre parents et grandsparents.

Les liens « forts » n’excluent pas
les tensions et conflits
• Claudine Attias-Donfut et Martine Segalen qui
ont beaucoup travaillé sur les solidarités
familiales exercées par les grands-parents,
mettent aussi en lumière que ces liens
intenses sont tissés parfois de difficultés qui
vont de la tension passagère à la rancœur ou
au conflit. Elles rappellent que si les grandsparents, de par leur simple présence, offrent
un formidable socle identitaire à leurs petitsenfants, leurs relations n’échappent pas à la
complexité des liens interindividuels.

• Nous ne nions pas l’existence de
tels conflits au sein des familles,
dans le contexte de notre étude
qui donne la « part belle » aux
grands-parents, sans taire les
peines et les regrets qui teintent
de tristesse certains témoignages,
en cas de disputes.

Notre étude
«

Être le grand-parent d’un enfant
gravement malade aujourd’hui en
Suisse, au Québec et en France »
Réalisée en France grâce
l’association Soleil AFELT.

à

La population concernée
• Nombre de Grands-parents rencontrés:
France : 35, Québec : 24, Suisse : 21
• Petits-enfants décédés
France: 4, Québec : 6, Suisse : 2
• Âge des petits-enfants : 1 jour à 17 ans
• Pathologies concernées: cancers, maladies orphelines,
grande prématurité.
• Milieux sociaux, urbains / ruraux variés
• Soignants rencontrés médecins et professionnels
paramédicaux, sociaux, psychologues:
France : 18, Québec : 6, Suisse 5

Constats
Ils sont des aidants précieux pour
chacun, sur le chemin périlleux qui
suit le décès du bébé, mais des
aidants mal connus et peu
reconnus. L’aide qu’ils apportent
sera utile dans la traversée du
deuil de toute la famille.

Différences culturelles à l’hôpital dans l’accueil
des grands-parents

• Il apparaît que les différences sont plus marquées entre les
services hospitaliers parfois au sein du même hôpital, qu’entre
les pays.
• Quelques grandes tendances sociologiques cependant pour les
trois pays :
 Des grands-parents proches, en France, des deux
générations
plus jeunes.
 Un souci d’indépendance des enfants semblent plus
marqué en Suisse qu’en France.
 Des « figures » puissantes de grands-mères au Québec,
constituées historiquement comme telles, devant les
absences prolongées des hommes.

• Les soignants nous disent souvent que
grâce à cette enquête, et avant même
d’en connaître les résultats, ils ont été
plus attentifs aux grands-parents.

Mal connus, peu reconnus

• Les grands-parents sont encore trop souvent
les oubliés de la réflexion sur les proches de
l’enfant malade. Les associations aussi n’ont
pas toujours pensé à eux.
« On aurait aimé rencontrer quelqu’un, mais on ne savait pas
où taper... Je crois qu’on aurait aimé rencontrer des gens qui
ont vécu des grandes souffrances, pour pouvoir être
écoutés ». (GM)

Mal connus, peu reconnus
«

Y a des choses pour les parents, y a rien pour les
grands parents ! » (G-M)

« Parler à l’hôpital avec d’autres grands-parents, ça m’a
beaucoup aidé » (G-P)

• Quand on se soucie de les écouter, les grands-

parents ont en effet, beaucoup à dire.

Quelques uns des points récurrents dans
les témoignages des grands-parents

• Ils indiquent tous l’injustice de voir la
maladie grave et la mort frapper les plus
jeunes, quand la logique générationnelle
voudrait que ce soient eux qui soient victimes.
« Maman l’arrière grand-mère disait : « C’était
pas à Julie de partir, c’était à moi » (G-M)

Des grands-pères qui se
révèlent
• Apparemment moins présents, appartenant à des
générations peu loquaces, on retrouve des
grands-pères qui pleurent leur petit-enfant, qui
soutiennent leur fils ou leur fille de manière tout
aussi importante, plusieurs possédant de réels
savoir-être qui n’est pas souvent exprimé face aux
soignants.

La double souffrance
• Ils et elles disent tous combien leur statut
dans la famille les amène à souffrir « deux
fois », pour l’enfant et le petit-enfant.
« Finalement les grands-parents souffrent presque deux
fois : on souffre pour notre enfant et on souffre pour
notre petit enfant. Et voir sa fille souffrir, sa fille triste,
sa fille maigrir, c’est épouvantable. Et de la voir pas
toujours soutenue par son mari, j’ai trouvé que c’était
très difficile »(G-M)

L’intensité de leur deuil
« Nous croyons qu’il ne faut pas sous-estimer le rôle et la
douleur vécus par les grands-parents des familles
endeuillées. D’ailleurs, les expériences les plus appréciées
par les grands-parents au moment du décès étaient leur
inclusion dans les derniers moments où ils eurent la chance
de prendre leur petit-enfant dans leur bras avant de le
quitter, où ils étaient présents pendant les discussions avec
les médecins et infirmières ».
dans Le deuil des grands-parents.
Enquête par questionnaire postal auprès de 21 grands-parents
Sophie Lessard, M.D., Claude Cyr M.D.
Département de pédiatrie, Faculté de médecine et des sciences de la santé,
Université de Sherbrooke, Canada

Malgré l’intensité de leur peine, les
grands-parents apportent un soutien
d’ordre relationnel, affectif, matériel. Il
est aussi spirituel

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents

La garde des autres enfants
« J’ai pris ma retraite et pendant plusieurs
semaines, je me suis occupé des grandes
(sœurs) afin qu’elles ne se sentent pas
abandonnées » (GP)

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents
• La préparation des repas pour les parents du
bébé et ses frères et sœurs.

• Le maintien des fêtes familiales
« Les fêtes de famille on a toujours continué.
Mais, elles sont quand même très dures.... je
crois que, si on arrêtait, ce serait encore plus
dur... » (G-M)

Quelques éléments d’analyse

• Les grands-parents contribuent à la stabilité
intergénérationnelle tout au long de la vie
familiale.
• Beaucoup d’entre eux ont su organiser les
rituels funéraires, réunir une communauté
plus large que la seule famille, notamment
dans les villages. Ils rendent très souvent
visite à la sépulture
de l’enfant et
l’entretiennent en étant vigilants aux souhaits
des parents.

Les besoins des grands-parents
• Le besoin d’être considérés comme faisant partie de la
famille.
• Le besoin de sentir qu’ils ne dérangent pas.
• Le besoin de poser des questions et, pour certains
d’être seuls avec les soignants.
• Le besoin de pouvoir exprimer leurs inquiétudes et leur
peine.
• Le besoin d’un accueil chaleureux dans un moment
difficile.
 Peu de différences en matière de besoins des
grands-parents d’un pays à l’autre.

Conclusion
Grands-parents et arrières grands-parents ont toute leur
place dans la construction d’une mémoire générationnelle et
d’une vie familiale auxquelles les soignants et les parents
contribuent positivement quand ils favorisent la rencontre et
l’évocation , sans juger les places, les rôles, la distance
bonne ou mauvaise, mais en reconnaissant l’importance de
la filiation.
« Les grands-parents sont importants parce qu’ils
sont les parents des parents » F. Dolto


Slide 14

« Ce qu’éprouvent les grands-parents »

Catherine Le Grand-Sébille : Socio-anthropologue,
Maître de conférences, Faculté de médecine, Lille 2

Sociologie des Grands-Parents
La sociologie de la grand-parentalité a connu en France,
grâce aux deux sociologues Claudine Attias-Donfut et
Martine Segalen une croissance et une fécondité
inégalées dans les autres pays francophones.
Depuis une vingtaine d’années, elles étudient un fait
démographique majeur, celui de l’allongement de la vie
et de la multiplication contemporaine des grandsparents, refusant de les laisser dans l’ombre.
Il y a près de 13 millions de grands-parents en France, on
ignore combien d’entre eux ont un petit enfant
gravement malade ou décédé.

Rôles et fonctions
Les
grands-parents
ont
des
fonctions
symboliques essentielles et exercent aussi un
rôle concret. Comme le dit M.F. Fuchs ce sont
des « relieurs » et des « transmetteurs » :
continuité familiale, inscription temporelle,
véhicules des valeurs familiales, garantie de
l’existence de l’histoire, témoignage de la mort
des générations plus âgées, légitimation du
parent auquel l’aïeul à passer le relais pour
devenir parent à son tour…

L’éternelle question de la « place »
• La récurrente question de la « bonne » place
est ainsi précisée par J-P Dommergues : « Le
rôle des grands-parents est d’être disponible
mais sans prendre la place des parents et en
sachant revenir au second plan quand les
parents sont présents. Ce jeu d’acteur de la
relation fait alterner un travail d’avant-scène
puis d’estompe en coulisse mais avec une
permanence affective qui garantit aux grandsparents de ne pas être des intermittents du
spectacle de la vie familiale… ».

• L’entreprise morale et normative
de
la
médecine
et
de
la
psychologie est ici perceptible, tant
le modelage spatial et relationnel
exigé
du
grand-parent
est
complexe
et
représente
probablement
un
défi
hors
d’atteinte.

Des dynamiques historiques
• Les processus politiques et sociaux que
sont la professionnalisation du soin, la
médicalisation, la technicisation et
l’institutionnalisation de la naissance et
de la mort, nous sont maintenant bien
connus
grâce
aux
travaux
des
historiens et des sociologues.

La disqualification des
savoirs familiaux


Il existe des tendances lourdes
qui caractérisent depuis la fin du
XIXe siècle, la disqualification puis
la mise à l’écart des savoirs
profanes sur la maladie et la mort
des enfants, et des soins familiaux
qui leur étaient afférents.

Une représentation de la
famille atomisée
De fait, les familles, longtemps tenues
éloignées des services de maternité et de
pédiatrie, trouvent depuis quelques
dizaines d’années, la possibilité d’y
entrer. Ce problème est structurel et
n’est pas lié à la seule volonté des
acteurs. Cette exclusion de la famille
élargie,
notamment,
est
une
caractéristique de notre médecine, à la
différence de celle d’autres pays.

Les parents de l’enfant sont les
interlocuteurs
privilégiés
et
souvent
uniques
des
professionnels, ce qui complique la
communication sur la santé du
bébé, entre parents et grandsparents.

Les liens « forts » n’excluent pas
les tensions et conflits
• Claudine Attias-Donfut et Martine Segalen qui
ont beaucoup travaillé sur les solidarités
familiales exercées par les grands-parents,
mettent aussi en lumière que ces liens
intenses sont tissés parfois de difficultés qui
vont de la tension passagère à la rancœur ou
au conflit. Elles rappellent que si les grandsparents, de par leur simple présence, offrent
un formidable socle identitaire à leurs petitsenfants, leurs relations n’échappent pas à la
complexité des liens interindividuels.

• Nous ne nions pas l’existence de
tels conflits au sein des familles,
dans le contexte de notre étude
qui donne la « part belle » aux
grands-parents, sans taire les
peines et les regrets qui teintent
de tristesse certains témoignages,
en cas de disputes.

Notre étude
«

Être le grand-parent d’un enfant
gravement malade aujourd’hui en
Suisse, au Québec et en France »
Réalisée en France grâce
l’association Soleil AFELT.

à

La population concernée
• Nombre de Grands-parents rencontrés:
France : 35, Québec : 24, Suisse : 21
• Petits-enfants décédés
France: 4, Québec : 6, Suisse : 2
• Âge des petits-enfants : 1 jour à 17 ans
• Pathologies concernées: cancers, maladies orphelines,
grande prématurité.
• Milieux sociaux, urbains / ruraux variés
• Soignants rencontrés médecins et professionnels
paramédicaux, sociaux, psychologues:
France : 18, Québec : 6, Suisse 5

Constats
Ils sont des aidants précieux pour
chacun, sur le chemin périlleux qui
suit le décès du bébé, mais des
aidants mal connus et peu
reconnus. L’aide qu’ils apportent
sera utile dans la traversée du
deuil de toute la famille.

Différences culturelles à l’hôpital dans l’accueil
des grands-parents

• Il apparaît que les différences sont plus marquées entre les
services hospitaliers parfois au sein du même hôpital, qu’entre
les pays.
• Quelques grandes tendances sociologiques cependant pour les
trois pays :
 Des grands-parents proches, en France, des deux
générations
plus jeunes.
 Un souci d’indépendance des enfants semblent plus
marqué en Suisse qu’en France.
 Des « figures » puissantes de grands-mères au Québec,
constituées historiquement comme telles, devant les
absences prolongées des hommes.

• Les soignants nous disent souvent que
grâce à cette enquête, et avant même
d’en connaître les résultats, ils ont été
plus attentifs aux grands-parents.

Mal connus, peu reconnus

• Les grands-parents sont encore trop souvent
les oubliés de la réflexion sur les proches de
l’enfant malade. Les associations aussi n’ont
pas toujours pensé à eux.
« On aurait aimé rencontrer quelqu’un, mais on ne savait pas
où taper... Je crois qu’on aurait aimé rencontrer des gens qui
ont vécu des grandes souffrances, pour pouvoir être
écoutés ». (GM)

Mal connus, peu reconnus
«

Y a des choses pour les parents, y a rien pour les
grands parents ! » (G-M)

« Parler à l’hôpital avec d’autres grands-parents, ça m’a
beaucoup aidé » (G-P)

• Quand on se soucie de les écouter, les grands-

parents ont en effet, beaucoup à dire.

Quelques uns des points récurrents dans
les témoignages des grands-parents

• Ils indiquent tous l’injustice de voir la
maladie grave et la mort frapper les plus
jeunes, quand la logique générationnelle
voudrait que ce soient eux qui soient victimes.
« Maman l’arrière grand-mère disait : « C’était
pas à Julie de partir, c’était à moi » (G-M)

Des grands-pères qui se
révèlent
• Apparemment moins présents, appartenant à des
générations peu loquaces, on retrouve des
grands-pères qui pleurent leur petit-enfant, qui
soutiennent leur fils ou leur fille de manière tout
aussi importante, plusieurs possédant de réels
savoir-être qui n’est pas souvent exprimé face aux
soignants.

La double souffrance
• Ils et elles disent tous combien leur statut
dans la famille les amène à souffrir « deux
fois », pour l’enfant et le petit-enfant.
« Finalement les grands-parents souffrent presque deux
fois : on souffre pour notre enfant et on souffre pour
notre petit enfant. Et voir sa fille souffrir, sa fille triste,
sa fille maigrir, c’est épouvantable. Et de la voir pas
toujours soutenue par son mari, j’ai trouvé que c’était
très difficile »(G-M)

L’intensité de leur deuil
« Nous croyons qu’il ne faut pas sous-estimer le rôle et la
douleur vécus par les grands-parents des familles
endeuillées. D’ailleurs, les expériences les plus appréciées
par les grands-parents au moment du décès étaient leur
inclusion dans les derniers moments où ils eurent la chance
de prendre leur petit-enfant dans leur bras avant de le
quitter, où ils étaient présents pendant les discussions avec
les médecins et infirmières ».
dans Le deuil des grands-parents.
Enquête par questionnaire postal auprès de 21 grands-parents
Sophie Lessard, M.D., Claude Cyr M.D.
Département de pédiatrie, Faculté de médecine et des sciences de la santé,
Université de Sherbrooke, Canada

Malgré l’intensité de leur peine, les
grands-parents apportent un soutien
d’ordre relationnel, affectif, matériel. Il
est aussi spirituel

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents

La garde des autres enfants
« J’ai pris ma retraite et pendant plusieurs
semaines, je me suis occupé des grandes
(sœurs) afin qu’elles ne se sentent pas
abandonnées » (GP)

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents
• La préparation des repas pour les parents du
bébé et ses frères et sœurs.

• Le maintien des fêtes familiales
« Les fêtes de famille on a toujours continué.
Mais, elles sont quand même très dures.... je
crois que, si on arrêtait, ce serait encore plus
dur... » (G-M)

Quelques éléments d’analyse

• Les grands-parents contribuent à la stabilité
intergénérationnelle tout au long de la vie
familiale.
• Beaucoup d’entre eux ont su organiser les
rituels funéraires, réunir une communauté
plus large que la seule famille, notamment
dans les villages. Ils rendent très souvent
visite à la sépulture
de l’enfant et
l’entretiennent en étant vigilants aux souhaits
des parents.

Les besoins des grands-parents
• Le besoin d’être considérés comme faisant partie de la
famille.
• Le besoin de sentir qu’ils ne dérangent pas.
• Le besoin de poser des questions et, pour certains
d’être seuls avec les soignants.
• Le besoin de pouvoir exprimer leurs inquiétudes et leur
peine.
• Le besoin d’un accueil chaleureux dans un moment
difficile.
 Peu de différences en matière de besoins des
grands-parents d’un pays à l’autre.

Conclusion
Grands-parents et arrières grands-parents ont toute leur
place dans la construction d’une mémoire générationnelle et
d’une vie familiale auxquelles les soignants et les parents
contribuent positivement quand ils favorisent la rencontre et
l’évocation , sans juger les places, les rôles, la distance
bonne ou mauvaise, mais en reconnaissant l’importance de
la filiation.
« Les grands-parents sont importants parce qu’ils
sont les parents des parents » F. Dolto


Slide 15

« Ce qu’éprouvent les grands-parents »

Catherine Le Grand-Sébille : Socio-anthropologue,
Maître de conférences, Faculté de médecine, Lille 2

Sociologie des Grands-Parents
La sociologie de la grand-parentalité a connu en France,
grâce aux deux sociologues Claudine Attias-Donfut et
Martine Segalen une croissance et une fécondité
inégalées dans les autres pays francophones.
Depuis une vingtaine d’années, elles étudient un fait
démographique majeur, celui de l’allongement de la vie
et de la multiplication contemporaine des grandsparents, refusant de les laisser dans l’ombre.
Il y a près de 13 millions de grands-parents en France, on
ignore combien d’entre eux ont un petit enfant
gravement malade ou décédé.

Rôles et fonctions
Les
grands-parents
ont
des
fonctions
symboliques essentielles et exercent aussi un
rôle concret. Comme le dit M.F. Fuchs ce sont
des « relieurs » et des « transmetteurs » :
continuité familiale, inscription temporelle,
véhicules des valeurs familiales, garantie de
l’existence de l’histoire, témoignage de la mort
des générations plus âgées, légitimation du
parent auquel l’aïeul à passer le relais pour
devenir parent à son tour…

L’éternelle question de la « place »
• La récurrente question de la « bonne » place
est ainsi précisée par J-P Dommergues : « Le
rôle des grands-parents est d’être disponible
mais sans prendre la place des parents et en
sachant revenir au second plan quand les
parents sont présents. Ce jeu d’acteur de la
relation fait alterner un travail d’avant-scène
puis d’estompe en coulisse mais avec une
permanence affective qui garantit aux grandsparents de ne pas être des intermittents du
spectacle de la vie familiale… ».

• L’entreprise morale et normative
de
la
médecine
et
de
la
psychologie est ici perceptible, tant
le modelage spatial et relationnel
exigé
du
grand-parent
est
complexe
et
représente
probablement
un
défi
hors
d’atteinte.

Des dynamiques historiques
• Les processus politiques et sociaux que
sont la professionnalisation du soin, la
médicalisation, la technicisation et
l’institutionnalisation de la naissance et
de la mort, nous sont maintenant bien
connus
grâce
aux
travaux
des
historiens et des sociologues.

La disqualification des
savoirs familiaux


Il existe des tendances lourdes
qui caractérisent depuis la fin du
XIXe siècle, la disqualification puis
la mise à l’écart des savoirs
profanes sur la maladie et la mort
des enfants, et des soins familiaux
qui leur étaient afférents.

Une représentation de la
famille atomisée
De fait, les familles, longtemps tenues
éloignées des services de maternité et de
pédiatrie, trouvent depuis quelques
dizaines d’années, la possibilité d’y
entrer. Ce problème est structurel et
n’est pas lié à la seule volonté des
acteurs. Cette exclusion de la famille
élargie,
notamment,
est
une
caractéristique de notre médecine, à la
différence de celle d’autres pays.

Les parents de l’enfant sont les
interlocuteurs
privilégiés
et
souvent
uniques
des
professionnels, ce qui complique la
communication sur la santé du
bébé, entre parents et grandsparents.

Les liens « forts » n’excluent pas
les tensions et conflits
• Claudine Attias-Donfut et Martine Segalen qui
ont beaucoup travaillé sur les solidarités
familiales exercées par les grands-parents,
mettent aussi en lumière que ces liens
intenses sont tissés parfois de difficultés qui
vont de la tension passagère à la rancœur ou
au conflit. Elles rappellent que si les grandsparents, de par leur simple présence, offrent
un formidable socle identitaire à leurs petitsenfants, leurs relations n’échappent pas à la
complexité des liens interindividuels.

• Nous ne nions pas l’existence de
tels conflits au sein des familles,
dans le contexte de notre étude
qui donne la « part belle » aux
grands-parents, sans taire les
peines et les regrets qui teintent
de tristesse certains témoignages,
en cas de disputes.

Notre étude
«

Être le grand-parent d’un enfant
gravement malade aujourd’hui en
Suisse, au Québec et en France »
Réalisée en France grâce
l’association Soleil AFELT.

à

La population concernée
• Nombre de Grands-parents rencontrés:
France : 35, Québec : 24, Suisse : 21
• Petits-enfants décédés
France: 4, Québec : 6, Suisse : 2
• Âge des petits-enfants : 1 jour à 17 ans
• Pathologies concernées: cancers, maladies orphelines,
grande prématurité.
• Milieux sociaux, urbains / ruraux variés
• Soignants rencontrés médecins et professionnels
paramédicaux, sociaux, psychologues:
France : 18, Québec : 6, Suisse 5

Constats
Ils sont des aidants précieux pour
chacun, sur le chemin périlleux qui
suit le décès du bébé, mais des
aidants mal connus et peu
reconnus. L’aide qu’ils apportent
sera utile dans la traversée du
deuil de toute la famille.

Différences culturelles à l’hôpital dans l’accueil
des grands-parents

• Il apparaît que les différences sont plus marquées entre les
services hospitaliers parfois au sein du même hôpital, qu’entre
les pays.
• Quelques grandes tendances sociologiques cependant pour les
trois pays :
 Des grands-parents proches, en France, des deux
générations
plus jeunes.
 Un souci d’indépendance des enfants semblent plus
marqué en Suisse qu’en France.
 Des « figures » puissantes de grands-mères au Québec,
constituées historiquement comme telles, devant les
absences prolongées des hommes.

• Les soignants nous disent souvent que
grâce à cette enquête, et avant même
d’en connaître les résultats, ils ont été
plus attentifs aux grands-parents.

Mal connus, peu reconnus

• Les grands-parents sont encore trop souvent
les oubliés de la réflexion sur les proches de
l’enfant malade. Les associations aussi n’ont
pas toujours pensé à eux.
« On aurait aimé rencontrer quelqu’un, mais on ne savait pas
où taper... Je crois qu’on aurait aimé rencontrer des gens qui
ont vécu des grandes souffrances, pour pouvoir être
écoutés ». (GM)

Mal connus, peu reconnus
«

Y a des choses pour les parents, y a rien pour les
grands parents ! » (G-M)

« Parler à l’hôpital avec d’autres grands-parents, ça m’a
beaucoup aidé » (G-P)

• Quand on se soucie de les écouter, les grands-

parents ont en effet, beaucoup à dire.

Quelques uns des points récurrents dans
les témoignages des grands-parents

• Ils indiquent tous l’injustice de voir la
maladie grave et la mort frapper les plus
jeunes, quand la logique générationnelle
voudrait que ce soient eux qui soient victimes.
« Maman l’arrière grand-mère disait : « C’était
pas à Julie de partir, c’était à moi » (G-M)

Des grands-pères qui se
révèlent
• Apparemment moins présents, appartenant à des
générations peu loquaces, on retrouve des
grands-pères qui pleurent leur petit-enfant, qui
soutiennent leur fils ou leur fille de manière tout
aussi importante, plusieurs possédant de réels
savoir-être qui n’est pas souvent exprimé face aux
soignants.

La double souffrance
• Ils et elles disent tous combien leur statut
dans la famille les amène à souffrir « deux
fois », pour l’enfant et le petit-enfant.
« Finalement les grands-parents souffrent presque deux
fois : on souffre pour notre enfant et on souffre pour
notre petit enfant. Et voir sa fille souffrir, sa fille triste,
sa fille maigrir, c’est épouvantable. Et de la voir pas
toujours soutenue par son mari, j’ai trouvé que c’était
très difficile »(G-M)

L’intensité de leur deuil
« Nous croyons qu’il ne faut pas sous-estimer le rôle et la
douleur vécus par les grands-parents des familles
endeuillées. D’ailleurs, les expériences les plus appréciées
par les grands-parents au moment du décès étaient leur
inclusion dans les derniers moments où ils eurent la chance
de prendre leur petit-enfant dans leur bras avant de le
quitter, où ils étaient présents pendant les discussions avec
les médecins et infirmières ».
dans Le deuil des grands-parents.
Enquête par questionnaire postal auprès de 21 grands-parents
Sophie Lessard, M.D., Claude Cyr M.D.
Département de pédiatrie, Faculté de médecine et des sciences de la santé,
Université de Sherbrooke, Canada

Malgré l’intensité de leur peine, les
grands-parents apportent un soutien
d’ordre relationnel, affectif, matériel. Il
est aussi spirituel

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents

La garde des autres enfants
« J’ai pris ma retraite et pendant plusieurs
semaines, je me suis occupé des grandes
(sœurs) afin qu’elles ne se sentent pas
abandonnées » (GP)

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents
• La préparation des repas pour les parents du
bébé et ses frères et sœurs.

• Le maintien des fêtes familiales
« Les fêtes de famille on a toujours continué.
Mais, elles sont quand même très dures.... je
crois que, si on arrêtait, ce serait encore plus
dur... » (G-M)

Quelques éléments d’analyse

• Les grands-parents contribuent à la stabilité
intergénérationnelle tout au long de la vie
familiale.
• Beaucoup d’entre eux ont su organiser les
rituels funéraires, réunir une communauté
plus large que la seule famille, notamment
dans les villages. Ils rendent très souvent
visite à la sépulture
de l’enfant et
l’entretiennent en étant vigilants aux souhaits
des parents.

Les besoins des grands-parents
• Le besoin d’être considérés comme faisant partie de la
famille.
• Le besoin de sentir qu’ils ne dérangent pas.
• Le besoin de poser des questions et, pour certains
d’être seuls avec les soignants.
• Le besoin de pouvoir exprimer leurs inquiétudes et leur
peine.
• Le besoin d’un accueil chaleureux dans un moment
difficile.
 Peu de différences en matière de besoins des
grands-parents d’un pays à l’autre.

Conclusion
Grands-parents et arrières grands-parents ont toute leur
place dans la construction d’une mémoire générationnelle et
d’une vie familiale auxquelles les soignants et les parents
contribuent positivement quand ils favorisent la rencontre et
l’évocation , sans juger les places, les rôles, la distance
bonne ou mauvaise, mais en reconnaissant l’importance de
la filiation.
« Les grands-parents sont importants parce qu’ils
sont les parents des parents » F. Dolto


Slide 16

« Ce qu’éprouvent les grands-parents »

Catherine Le Grand-Sébille : Socio-anthropologue,
Maître de conférences, Faculté de médecine, Lille 2

Sociologie des Grands-Parents
La sociologie de la grand-parentalité a connu en France,
grâce aux deux sociologues Claudine Attias-Donfut et
Martine Segalen une croissance et une fécondité
inégalées dans les autres pays francophones.
Depuis une vingtaine d’années, elles étudient un fait
démographique majeur, celui de l’allongement de la vie
et de la multiplication contemporaine des grandsparents, refusant de les laisser dans l’ombre.
Il y a près de 13 millions de grands-parents en France, on
ignore combien d’entre eux ont un petit enfant
gravement malade ou décédé.

Rôles et fonctions
Les
grands-parents
ont
des
fonctions
symboliques essentielles et exercent aussi un
rôle concret. Comme le dit M.F. Fuchs ce sont
des « relieurs » et des « transmetteurs » :
continuité familiale, inscription temporelle,
véhicules des valeurs familiales, garantie de
l’existence de l’histoire, témoignage de la mort
des générations plus âgées, légitimation du
parent auquel l’aïeul à passer le relais pour
devenir parent à son tour…

L’éternelle question de la « place »
• La récurrente question de la « bonne » place
est ainsi précisée par J-P Dommergues : « Le
rôle des grands-parents est d’être disponible
mais sans prendre la place des parents et en
sachant revenir au second plan quand les
parents sont présents. Ce jeu d’acteur de la
relation fait alterner un travail d’avant-scène
puis d’estompe en coulisse mais avec une
permanence affective qui garantit aux grandsparents de ne pas être des intermittents du
spectacle de la vie familiale… ».

• L’entreprise morale et normative
de
la
médecine
et
de
la
psychologie est ici perceptible, tant
le modelage spatial et relationnel
exigé
du
grand-parent
est
complexe
et
représente
probablement
un
défi
hors
d’atteinte.

Des dynamiques historiques
• Les processus politiques et sociaux que
sont la professionnalisation du soin, la
médicalisation, la technicisation et
l’institutionnalisation de la naissance et
de la mort, nous sont maintenant bien
connus
grâce
aux
travaux
des
historiens et des sociologues.

La disqualification des
savoirs familiaux


Il existe des tendances lourdes
qui caractérisent depuis la fin du
XIXe siècle, la disqualification puis
la mise à l’écart des savoirs
profanes sur la maladie et la mort
des enfants, et des soins familiaux
qui leur étaient afférents.

Une représentation de la
famille atomisée
De fait, les familles, longtemps tenues
éloignées des services de maternité et de
pédiatrie, trouvent depuis quelques
dizaines d’années, la possibilité d’y
entrer. Ce problème est structurel et
n’est pas lié à la seule volonté des
acteurs. Cette exclusion de la famille
élargie,
notamment,
est
une
caractéristique de notre médecine, à la
différence de celle d’autres pays.

Les parents de l’enfant sont les
interlocuteurs
privilégiés
et
souvent
uniques
des
professionnels, ce qui complique la
communication sur la santé du
bébé, entre parents et grandsparents.

Les liens « forts » n’excluent pas
les tensions et conflits
• Claudine Attias-Donfut et Martine Segalen qui
ont beaucoup travaillé sur les solidarités
familiales exercées par les grands-parents,
mettent aussi en lumière que ces liens
intenses sont tissés parfois de difficultés qui
vont de la tension passagère à la rancœur ou
au conflit. Elles rappellent que si les grandsparents, de par leur simple présence, offrent
un formidable socle identitaire à leurs petitsenfants, leurs relations n’échappent pas à la
complexité des liens interindividuels.

• Nous ne nions pas l’existence de
tels conflits au sein des familles,
dans le contexte de notre étude
qui donne la « part belle » aux
grands-parents, sans taire les
peines et les regrets qui teintent
de tristesse certains témoignages,
en cas de disputes.

Notre étude
«

Être le grand-parent d’un enfant
gravement malade aujourd’hui en
Suisse, au Québec et en France »
Réalisée en France grâce
l’association Soleil AFELT.

à

La population concernée
• Nombre de Grands-parents rencontrés:
France : 35, Québec : 24, Suisse : 21
• Petits-enfants décédés
France: 4, Québec : 6, Suisse : 2
• Âge des petits-enfants : 1 jour à 17 ans
• Pathologies concernées: cancers, maladies orphelines,
grande prématurité.
• Milieux sociaux, urbains / ruraux variés
• Soignants rencontrés médecins et professionnels
paramédicaux, sociaux, psychologues:
France : 18, Québec : 6, Suisse 5

Constats
Ils sont des aidants précieux pour
chacun, sur le chemin périlleux qui
suit le décès du bébé, mais des
aidants mal connus et peu
reconnus. L’aide qu’ils apportent
sera utile dans la traversée du
deuil de toute la famille.

Différences culturelles à l’hôpital dans l’accueil
des grands-parents

• Il apparaît que les différences sont plus marquées entre les
services hospitaliers parfois au sein du même hôpital, qu’entre
les pays.
• Quelques grandes tendances sociologiques cependant pour les
trois pays :
 Des grands-parents proches, en France, des deux
générations
plus jeunes.
 Un souci d’indépendance des enfants semblent plus
marqué en Suisse qu’en France.
 Des « figures » puissantes de grands-mères au Québec,
constituées historiquement comme telles, devant les
absences prolongées des hommes.

• Les soignants nous disent souvent que
grâce à cette enquête, et avant même
d’en connaître les résultats, ils ont été
plus attentifs aux grands-parents.

Mal connus, peu reconnus

• Les grands-parents sont encore trop souvent
les oubliés de la réflexion sur les proches de
l’enfant malade. Les associations aussi n’ont
pas toujours pensé à eux.
« On aurait aimé rencontrer quelqu’un, mais on ne savait pas
où taper... Je crois qu’on aurait aimé rencontrer des gens qui
ont vécu des grandes souffrances, pour pouvoir être
écoutés ». (GM)

Mal connus, peu reconnus
«

Y a des choses pour les parents, y a rien pour les
grands parents ! » (G-M)

« Parler à l’hôpital avec d’autres grands-parents, ça m’a
beaucoup aidé » (G-P)

• Quand on se soucie de les écouter, les grands-

parents ont en effet, beaucoup à dire.

Quelques uns des points récurrents dans
les témoignages des grands-parents

• Ils indiquent tous l’injustice de voir la
maladie grave et la mort frapper les plus
jeunes, quand la logique générationnelle
voudrait que ce soient eux qui soient victimes.
« Maman l’arrière grand-mère disait : « C’était
pas à Julie de partir, c’était à moi » (G-M)

Des grands-pères qui se
révèlent
• Apparemment moins présents, appartenant à des
générations peu loquaces, on retrouve des
grands-pères qui pleurent leur petit-enfant, qui
soutiennent leur fils ou leur fille de manière tout
aussi importante, plusieurs possédant de réels
savoir-être qui n’est pas souvent exprimé face aux
soignants.

La double souffrance
• Ils et elles disent tous combien leur statut
dans la famille les amène à souffrir « deux
fois », pour l’enfant et le petit-enfant.
« Finalement les grands-parents souffrent presque deux
fois : on souffre pour notre enfant et on souffre pour
notre petit enfant. Et voir sa fille souffrir, sa fille triste,
sa fille maigrir, c’est épouvantable. Et de la voir pas
toujours soutenue par son mari, j’ai trouvé que c’était
très difficile »(G-M)

L’intensité de leur deuil
« Nous croyons qu’il ne faut pas sous-estimer le rôle et la
douleur vécus par les grands-parents des familles
endeuillées. D’ailleurs, les expériences les plus appréciées
par les grands-parents au moment du décès étaient leur
inclusion dans les derniers moments où ils eurent la chance
de prendre leur petit-enfant dans leur bras avant de le
quitter, où ils étaient présents pendant les discussions avec
les médecins et infirmières ».
dans Le deuil des grands-parents.
Enquête par questionnaire postal auprès de 21 grands-parents
Sophie Lessard, M.D., Claude Cyr M.D.
Département de pédiatrie, Faculté de médecine et des sciences de la santé,
Université de Sherbrooke, Canada

Malgré l’intensité de leur peine, les
grands-parents apportent un soutien
d’ordre relationnel, affectif, matériel. Il
est aussi spirituel

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents

La garde des autres enfants
« J’ai pris ma retraite et pendant plusieurs
semaines, je me suis occupé des grandes
(sœurs) afin qu’elles ne se sentent pas
abandonnées » (GP)

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents
• La préparation des repas pour les parents du
bébé et ses frères et sœurs.

• Le maintien des fêtes familiales
« Les fêtes de famille on a toujours continué.
Mais, elles sont quand même très dures.... je
crois que, si on arrêtait, ce serait encore plus
dur... » (G-M)

Quelques éléments d’analyse

• Les grands-parents contribuent à la stabilité
intergénérationnelle tout au long de la vie
familiale.
• Beaucoup d’entre eux ont su organiser les
rituels funéraires, réunir une communauté
plus large que la seule famille, notamment
dans les villages. Ils rendent très souvent
visite à la sépulture
de l’enfant et
l’entretiennent en étant vigilants aux souhaits
des parents.

Les besoins des grands-parents
• Le besoin d’être considérés comme faisant partie de la
famille.
• Le besoin de sentir qu’ils ne dérangent pas.
• Le besoin de poser des questions et, pour certains
d’être seuls avec les soignants.
• Le besoin de pouvoir exprimer leurs inquiétudes et leur
peine.
• Le besoin d’un accueil chaleureux dans un moment
difficile.
 Peu de différences en matière de besoins des
grands-parents d’un pays à l’autre.

Conclusion
Grands-parents et arrières grands-parents ont toute leur
place dans la construction d’une mémoire générationnelle et
d’une vie familiale auxquelles les soignants et les parents
contribuent positivement quand ils favorisent la rencontre et
l’évocation , sans juger les places, les rôles, la distance
bonne ou mauvaise, mais en reconnaissant l’importance de
la filiation.
« Les grands-parents sont importants parce qu’ils
sont les parents des parents » F. Dolto


Slide 17

« Ce qu’éprouvent les grands-parents »

Catherine Le Grand-Sébille : Socio-anthropologue,
Maître de conférences, Faculté de médecine, Lille 2

Sociologie des Grands-Parents
La sociologie de la grand-parentalité a connu en France,
grâce aux deux sociologues Claudine Attias-Donfut et
Martine Segalen une croissance et une fécondité
inégalées dans les autres pays francophones.
Depuis une vingtaine d’années, elles étudient un fait
démographique majeur, celui de l’allongement de la vie
et de la multiplication contemporaine des grandsparents, refusant de les laisser dans l’ombre.
Il y a près de 13 millions de grands-parents en France, on
ignore combien d’entre eux ont un petit enfant
gravement malade ou décédé.

Rôles et fonctions
Les
grands-parents
ont
des
fonctions
symboliques essentielles et exercent aussi un
rôle concret. Comme le dit M.F. Fuchs ce sont
des « relieurs » et des « transmetteurs » :
continuité familiale, inscription temporelle,
véhicules des valeurs familiales, garantie de
l’existence de l’histoire, témoignage de la mort
des générations plus âgées, légitimation du
parent auquel l’aïeul à passer le relais pour
devenir parent à son tour…

L’éternelle question de la « place »
• La récurrente question de la « bonne » place
est ainsi précisée par J-P Dommergues : « Le
rôle des grands-parents est d’être disponible
mais sans prendre la place des parents et en
sachant revenir au second plan quand les
parents sont présents. Ce jeu d’acteur de la
relation fait alterner un travail d’avant-scène
puis d’estompe en coulisse mais avec une
permanence affective qui garantit aux grandsparents de ne pas être des intermittents du
spectacle de la vie familiale… ».

• L’entreprise morale et normative
de
la
médecine
et
de
la
psychologie est ici perceptible, tant
le modelage spatial et relationnel
exigé
du
grand-parent
est
complexe
et
représente
probablement
un
défi
hors
d’atteinte.

Des dynamiques historiques
• Les processus politiques et sociaux que
sont la professionnalisation du soin, la
médicalisation, la technicisation et
l’institutionnalisation de la naissance et
de la mort, nous sont maintenant bien
connus
grâce
aux
travaux
des
historiens et des sociologues.

La disqualification des
savoirs familiaux


Il existe des tendances lourdes
qui caractérisent depuis la fin du
XIXe siècle, la disqualification puis
la mise à l’écart des savoirs
profanes sur la maladie et la mort
des enfants, et des soins familiaux
qui leur étaient afférents.

Une représentation de la
famille atomisée
De fait, les familles, longtemps tenues
éloignées des services de maternité et de
pédiatrie, trouvent depuis quelques
dizaines d’années, la possibilité d’y
entrer. Ce problème est structurel et
n’est pas lié à la seule volonté des
acteurs. Cette exclusion de la famille
élargie,
notamment,
est
une
caractéristique de notre médecine, à la
différence de celle d’autres pays.

Les parents de l’enfant sont les
interlocuteurs
privilégiés
et
souvent
uniques
des
professionnels, ce qui complique la
communication sur la santé du
bébé, entre parents et grandsparents.

Les liens « forts » n’excluent pas
les tensions et conflits
• Claudine Attias-Donfut et Martine Segalen qui
ont beaucoup travaillé sur les solidarités
familiales exercées par les grands-parents,
mettent aussi en lumière que ces liens
intenses sont tissés parfois de difficultés qui
vont de la tension passagère à la rancœur ou
au conflit. Elles rappellent que si les grandsparents, de par leur simple présence, offrent
un formidable socle identitaire à leurs petitsenfants, leurs relations n’échappent pas à la
complexité des liens interindividuels.

• Nous ne nions pas l’existence de
tels conflits au sein des familles,
dans le contexte de notre étude
qui donne la « part belle » aux
grands-parents, sans taire les
peines et les regrets qui teintent
de tristesse certains témoignages,
en cas de disputes.

Notre étude
«

Être le grand-parent d’un enfant
gravement malade aujourd’hui en
Suisse, au Québec et en France »
Réalisée en France grâce
l’association Soleil AFELT.

à

La population concernée
• Nombre de Grands-parents rencontrés:
France : 35, Québec : 24, Suisse : 21
• Petits-enfants décédés
France: 4, Québec : 6, Suisse : 2
• Âge des petits-enfants : 1 jour à 17 ans
• Pathologies concernées: cancers, maladies orphelines,
grande prématurité.
• Milieux sociaux, urbains / ruraux variés
• Soignants rencontrés médecins et professionnels
paramédicaux, sociaux, psychologues:
France : 18, Québec : 6, Suisse 5

Constats
Ils sont des aidants précieux pour
chacun, sur le chemin périlleux qui
suit le décès du bébé, mais des
aidants mal connus et peu
reconnus. L’aide qu’ils apportent
sera utile dans la traversée du
deuil de toute la famille.

Différences culturelles à l’hôpital dans l’accueil
des grands-parents

• Il apparaît que les différences sont plus marquées entre les
services hospitaliers parfois au sein du même hôpital, qu’entre
les pays.
• Quelques grandes tendances sociologiques cependant pour les
trois pays :
 Des grands-parents proches, en France, des deux
générations
plus jeunes.
 Un souci d’indépendance des enfants semblent plus
marqué en Suisse qu’en France.
 Des « figures » puissantes de grands-mères au Québec,
constituées historiquement comme telles, devant les
absences prolongées des hommes.

• Les soignants nous disent souvent que
grâce à cette enquête, et avant même
d’en connaître les résultats, ils ont été
plus attentifs aux grands-parents.

Mal connus, peu reconnus

• Les grands-parents sont encore trop souvent
les oubliés de la réflexion sur les proches de
l’enfant malade. Les associations aussi n’ont
pas toujours pensé à eux.
« On aurait aimé rencontrer quelqu’un, mais on ne savait pas
où taper... Je crois qu’on aurait aimé rencontrer des gens qui
ont vécu des grandes souffrances, pour pouvoir être
écoutés ». (GM)

Mal connus, peu reconnus
«

Y a des choses pour les parents, y a rien pour les
grands parents ! » (G-M)

« Parler à l’hôpital avec d’autres grands-parents, ça m’a
beaucoup aidé » (G-P)

• Quand on se soucie de les écouter, les grands-

parents ont en effet, beaucoup à dire.

Quelques uns des points récurrents dans
les témoignages des grands-parents

• Ils indiquent tous l’injustice de voir la
maladie grave et la mort frapper les plus
jeunes, quand la logique générationnelle
voudrait que ce soient eux qui soient victimes.
« Maman l’arrière grand-mère disait : « C’était
pas à Julie de partir, c’était à moi » (G-M)

Des grands-pères qui se
révèlent
• Apparemment moins présents, appartenant à des
générations peu loquaces, on retrouve des
grands-pères qui pleurent leur petit-enfant, qui
soutiennent leur fils ou leur fille de manière tout
aussi importante, plusieurs possédant de réels
savoir-être qui n’est pas souvent exprimé face aux
soignants.

La double souffrance
• Ils et elles disent tous combien leur statut
dans la famille les amène à souffrir « deux
fois », pour l’enfant et le petit-enfant.
« Finalement les grands-parents souffrent presque deux
fois : on souffre pour notre enfant et on souffre pour
notre petit enfant. Et voir sa fille souffrir, sa fille triste,
sa fille maigrir, c’est épouvantable. Et de la voir pas
toujours soutenue par son mari, j’ai trouvé que c’était
très difficile »(G-M)

L’intensité de leur deuil
« Nous croyons qu’il ne faut pas sous-estimer le rôle et la
douleur vécus par les grands-parents des familles
endeuillées. D’ailleurs, les expériences les plus appréciées
par les grands-parents au moment du décès étaient leur
inclusion dans les derniers moments où ils eurent la chance
de prendre leur petit-enfant dans leur bras avant de le
quitter, où ils étaient présents pendant les discussions avec
les médecins et infirmières ».
dans Le deuil des grands-parents.
Enquête par questionnaire postal auprès de 21 grands-parents
Sophie Lessard, M.D., Claude Cyr M.D.
Département de pédiatrie, Faculté de médecine et des sciences de la santé,
Université de Sherbrooke, Canada

Malgré l’intensité de leur peine, les
grands-parents apportent un soutien
d’ordre relationnel, affectif, matériel. Il
est aussi spirituel

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents

La garde des autres enfants
« J’ai pris ma retraite et pendant plusieurs
semaines, je me suis occupé des grandes
(sœurs) afin qu’elles ne se sentent pas
abandonnées » (GP)

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents
• La préparation des repas pour les parents du
bébé et ses frères et sœurs.

• Le maintien des fêtes familiales
« Les fêtes de famille on a toujours continué.
Mais, elles sont quand même très dures.... je
crois que, si on arrêtait, ce serait encore plus
dur... » (G-M)

Quelques éléments d’analyse

• Les grands-parents contribuent à la stabilité
intergénérationnelle tout au long de la vie
familiale.
• Beaucoup d’entre eux ont su organiser les
rituels funéraires, réunir une communauté
plus large que la seule famille, notamment
dans les villages. Ils rendent très souvent
visite à la sépulture
de l’enfant et
l’entretiennent en étant vigilants aux souhaits
des parents.

Les besoins des grands-parents
• Le besoin d’être considérés comme faisant partie de la
famille.
• Le besoin de sentir qu’ils ne dérangent pas.
• Le besoin de poser des questions et, pour certains
d’être seuls avec les soignants.
• Le besoin de pouvoir exprimer leurs inquiétudes et leur
peine.
• Le besoin d’un accueil chaleureux dans un moment
difficile.
 Peu de différences en matière de besoins des
grands-parents d’un pays à l’autre.

Conclusion
Grands-parents et arrières grands-parents ont toute leur
place dans la construction d’une mémoire générationnelle et
d’une vie familiale auxquelles les soignants et les parents
contribuent positivement quand ils favorisent la rencontre et
l’évocation , sans juger les places, les rôles, la distance
bonne ou mauvaise, mais en reconnaissant l’importance de
la filiation.
« Les grands-parents sont importants parce qu’ils
sont les parents des parents » F. Dolto


Slide 18

« Ce qu’éprouvent les grands-parents »

Catherine Le Grand-Sébille : Socio-anthropologue,
Maître de conférences, Faculté de médecine, Lille 2

Sociologie des Grands-Parents
La sociologie de la grand-parentalité a connu en France,
grâce aux deux sociologues Claudine Attias-Donfut et
Martine Segalen une croissance et une fécondité
inégalées dans les autres pays francophones.
Depuis une vingtaine d’années, elles étudient un fait
démographique majeur, celui de l’allongement de la vie
et de la multiplication contemporaine des grandsparents, refusant de les laisser dans l’ombre.
Il y a près de 13 millions de grands-parents en France, on
ignore combien d’entre eux ont un petit enfant
gravement malade ou décédé.

Rôles et fonctions
Les
grands-parents
ont
des
fonctions
symboliques essentielles et exercent aussi un
rôle concret. Comme le dit M.F. Fuchs ce sont
des « relieurs » et des « transmetteurs » :
continuité familiale, inscription temporelle,
véhicules des valeurs familiales, garantie de
l’existence de l’histoire, témoignage de la mort
des générations plus âgées, légitimation du
parent auquel l’aïeul à passer le relais pour
devenir parent à son tour…

L’éternelle question de la « place »
• La récurrente question de la « bonne » place
est ainsi précisée par J-P Dommergues : « Le
rôle des grands-parents est d’être disponible
mais sans prendre la place des parents et en
sachant revenir au second plan quand les
parents sont présents. Ce jeu d’acteur de la
relation fait alterner un travail d’avant-scène
puis d’estompe en coulisse mais avec une
permanence affective qui garantit aux grandsparents de ne pas être des intermittents du
spectacle de la vie familiale… ».

• L’entreprise morale et normative
de
la
médecine
et
de
la
psychologie est ici perceptible, tant
le modelage spatial et relationnel
exigé
du
grand-parent
est
complexe
et
représente
probablement
un
défi
hors
d’atteinte.

Des dynamiques historiques
• Les processus politiques et sociaux que
sont la professionnalisation du soin, la
médicalisation, la technicisation et
l’institutionnalisation de la naissance et
de la mort, nous sont maintenant bien
connus
grâce
aux
travaux
des
historiens et des sociologues.

La disqualification des
savoirs familiaux


Il existe des tendances lourdes
qui caractérisent depuis la fin du
XIXe siècle, la disqualification puis
la mise à l’écart des savoirs
profanes sur la maladie et la mort
des enfants, et des soins familiaux
qui leur étaient afférents.

Une représentation de la
famille atomisée
De fait, les familles, longtemps tenues
éloignées des services de maternité et de
pédiatrie, trouvent depuis quelques
dizaines d’années, la possibilité d’y
entrer. Ce problème est structurel et
n’est pas lié à la seule volonté des
acteurs. Cette exclusion de la famille
élargie,
notamment,
est
une
caractéristique de notre médecine, à la
différence de celle d’autres pays.

Les parents de l’enfant sont les
interlocuteurs
privilégiés
et
souvent
uniques
des
professionnels, ce qui complique la
communication sur la santé du
bébé, entre parents et grandsparents.

Les liens « forts » n’excluent pas
les tensions et conflits
• Claudine Attias-Donfut et Martine Segalen qui
ont beaucoup travaillé sur les solidarités
familiales exercées par les grands-parents,
mettent aussi en lumière que ces liens
intenses sont tissés parfois de difficultés qui
vont de la tension passagère à la rancœur ou
au conflit. Elles rappellent que si les grandsparents, de par leur simple présence, offrent
un formidable socle identitaire à leurs petitsenfants, leurs relations n’échappent pas à la
complexité des liens interindividuels.

• Nous ne nions pas l’existence de
tels conflits au sein des familles,
dans le contexte de notre étude
qui donne la « part belle » aux
grands-parents, sans taire les
peines et les regrets qui teintent
de tristesse certains témoignages,
en cas de disputes.

Notre étude
«

Être le grand-parent d’un enfant
gravement malade aujourd’hui en
Suisse, au Québec et en France »
Réalisée en France grâce
l’association Soleil AFELT.

à

La population concernée
• Nombre de Grands-parents rencontrés:
France : 35, Québec : 24, Suisse : 21
• Petits-enfants décédés
France: 4, Québec : 6, Suisse : 2
• Âge des petits-enfants : 1 jour à 17 ans
• Pathologies concernées: cancers, maladies orphelines,
grande prématurité.
• Milieux sociaux, urbains / ruraux variés
• Soignants rencontrés médecins et professionnels
paramédicaux, sociaux, psychologues:
France : 18, Québec : 6, Suisse 5

Constats
Ils sont des aidants précieux pour
chacun, sur le chemin périlleux qui
suit le décès du bébé, mais des
aidants mal connus et peu
reconnus. L’aide qu’ils apportent
sera utile dans la traversée du
deuil de toute la famille.

Différences culturelles à l’hôpital dans l’accueil
des grands-parents

• Il apparaît que les différences sont plus marquées entre les
services hospitaliers parfois au sein du même hôpital, qu’entre
les pays.
• Quelques grandes tendances sociologiques cependant pour les
trois pays :
 Des grands-parents proches, en France, des deux
générations
plus jeunes.
 Un souci d’indépendance des enfants semblent plus
marqué en Suisse qu’en France.
 Des « figures » puissantes de grands-mères au Québec,
constituées historiquement comme telles, devant les
absences prolongées des hommes.

• Les soignants nous disent souvent que
grâce à cette enquête, et avant même
d’en connaître les résultats, ils ont été
plus attentifs aux grands-parents.

Mal connus, peu reconnus

• Les grands-parents sont encore trop souvent
les oubliés de la réflexion sur les proches de
l’enfant malade. Les associations aussi n’ont
pas toujours pensé à eux.
« On aurait aimé rencontrer quelqu’un, mais on ne savait pas
où taper... Je crois qu’on aurait aimé rencontrer des gens qui
ont vécu des grandes souffrances, pour pouvoir être
écoutés ». (GM)

Mal connus, peu reconnus
«

Y a des choses pour les parents, y a rien pour les
grands parents ! » (G-M)

« Parler à l’hôpital avec d’autres grands-parents, ça m’a
beaucoup aidé » (G-P)

• Quand on se soucie de les écouter, les grands-

parents ont en effet, beaucoup à dire.

Quelques uns des points récurrents dans
les témoignages des grands-parents

• Ils indiquent tous l’injustice de voir la
maladie grave et la mort frapper les plus
jeunes, quand la logique générationnelle
voudrait que ce soient eux qui soient victimes.
« Maman l’arrière grand-mère disait : « C’était
pas à Julie de partir, c’était à moi » (G-M)

Des grands-pères qui se
révèlent
• Apparemment moins présents, appartenant à des
générations peu loquaces, on retrouve des
grands-pères qui pleurent leur petit-enfant, qui
soutiennent leur fils ou leur fille de manière tout
aussi importante, plusieurs possédant de réels
savoir-être qui n’est pas souvent exprimé face aux
soignants.

La double souffrance
• Ils et elles disent tous combien leur statut
dans la famille les amène à souffrir « deux
fois », pour l’enfant et le petit-enfant.
« Finalement les grands-parents souffrent presque deux
fois : on souffre pour notre enfant et on souffre pour
notre petit enfant. Et voir sa fille souffrir, sa fille triste,
sa fille maigrir, c’est épouvantable. Et de la voir pas
toujours soutenue par son mari, j’ai trouvé que c’était
très difficile »(G-M)

L’intensité de leur deuil
« Nous croyons qu’il ne faut pas sous-estimer le rôle et la
douleur vécus par les grands-parents des familles
endeuillées. D’ailleurs, les expériences les plus appréciées
par les grands-parents au moment du décès étaient leur
inclusion dans les derniers moments où ils eurent la chance
de prendre leur petit-enfant dans leur bras avant de le
quitter, où ils étaient présents pendant les discussions avec
les médecins et infirmières ».
dans Le deuil des grands-parents.
Enquête par questionnaire postal auprès de 21 grands-parents
Sophie Lessard, M.D., Claude Cyr M.D.
Département de pédiatrie, Faculté de médecine et des sciences de la santé,
Université de Sherbrooke, Canada

Malgré l’intensité de leur peine, les
grands-parents apportent un soutien
d’ordre relationnel, affectif, matériel. Il
est aussi spirituel

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents

La garde des autres enfants
« J’ai pris ma retraite et pendant plusieurs
semaines, je me suis occupé des grandes
(sœurs) afin qu’elles ne se sentent pas
abandonnées » (GP)

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents
• La préparation des repas pour les parents du
bébé et ses frères et sœurs.

• Le maintien des fêtes familiales
« Les fêtes de famille on a toujours continué.
Mais, elles sont quand même très dures.... je
crois que, si on arrêtait, ce serait encore plus
dur... » (G-M)

Quelques éléments d’analyse

• Les grands-parents contribuent à la stabilité
intergénérationnelle tout au long de la vie
familiale.
• Beaucoup d’entre eux ont su organiser les
rituels funéraires, réunir une communauté
plus large que la seule famille, notamment
dans les villages. Ils rendent très souvent
visite à la sépulture
de l’enfant et
l’entretiennent en étant vigilants aux souhaits
des parents.

Les besoins des grands-parents
• Le besoin d’être considérés comme faisant partie de la
famille.
• Le besoin de sentir qu’ils ne dérangent pas.
• Le besoin de poser des questions et, pour certains
d’être seuls avec les soignants.
• Le besoin de pouvoir exprimer leurs inquiétudes et leur
peine.
• Le besoin d’un accueil chaleureux dans un moment
difficile.
 Peu de différences en matière de besoins des
grands-parents d’un pays à l’autre.

Conclusion
Grands-parents et arrières grands-parents ont toute leur
place dans la construction d’une mémoire générationnelle et
d’une vie familiale auxquelles les soignants et les parents
contribuent positivement quand ils favorisent la rencontre et
l’évocation , sans juger les places, les rôles, la distance
bonne ou mauvaise, mais en reconnaissant l’importance de
la filiation.
« Les grands-parents sont importants parce qu’ils
sont les parents des parents » F. Dolto


Slide 19

« Ce qu’éprouvent les grands-parents »

Catherine Le Grand-Sébille : Socio-anthropologue,
Maître de conférences, Faculté de médecine, Lille 2

Sociologie des Grands-Parents
La sociologie de la grand-parentalité a connu en France,
grâce aux deux sociologues Claudine Attias-Donfut et
Martine Segalen une croissance et une fécondité
inégalées dans les autres pays francophones.
Depuis une vingtaine d’années, elles étudient un fait
démographique majeur, celui de l’allongement de la vie
et de la multiplication contemporaine des grandsparents, refusant de les laisser dans l’ombre.
Il y a près de 13 millions de grands-parents en France, on
ignore combien d’entre eux ont un petit enfant
gravement malade ou décédé.

Rôles et fonctions
Les
grands-parents
ont
des
fonctions
symboliques essentielles et exercent aussi un
rôle concret. Comme le dit M.F. Fuchs ce sont
des « relieurs » et des « transmetteurs » :
continuité familiale, inscription temporelle,
véhicules des valeurs familiales, garantie de
l’existence de l’histoire, témoignage de la mort
des générations plus âgées, légitimation du
parent auquel l’aïeul à passer le relais pour
devenir parent à son tour…

L’éternelle question de la « place »
• La récurrente question de la « bonne » place
est ainsi précisée par J-P Dommergues : « Le
rôle des grands-parents est d’être disponible
mais sans prendre la place des parents et en
sachant revenir au second plan quand les
parents sont présents. Ce jeu d’acteur de la
relation fait alterner un travail d’avant-scène
puis d’estompe en coulisse mais avec une
permanence affective qui garantit aux grandsparents de ne pas être des intermittents du
spectacle de la vie familiale… ».

• L’entreprise morale et normative
de
la
médecine
et
de
la
psychologie est ici perceptible, tant
le modelage spatial et relationnel
exigé
du
grand-parent
est
complexe
et
représente
probablement
un
défi
hors
d’atteinte.

Des dynamiques historiques
• Les processus politiques et sociaux que
sont la professionnalisation du soin, la
médicalisation, la technicisation et
l’institutionnalisation de la naissance et
de la mort, nous sont maintenant bien
connus
grâce
aux
travaux
des
historiens et des sociologues.

La disqualification des
savoirs familiaux


Il existe des tendances lourdes
qui caractérisent depuis la fin du
XIXe siècle, la disqualification puis
la mise à l’écart des savoirs
profanes sur la maladie et la mort
des enfants, et des soins familiaux
qui leur étaient afférents.

Une représentation de la
famille atomisée
De fait, les familles, longtemps tenues
éloignées des services de maternité et de
pédiatrie, trouvent depuis quelques
dizaines d’années, la possibilité d’y
entrer. Ce problème est structurel et
n’est pas lié à la seule volonté des
acteurs. Cette exclusion de la famille
élargie,
notamment,
est
une
caractéristique de notre médecine, à la
différence de celle d’autres pays.

Les parents de l’enfant sont les
interlocuteurs
privilégiés
et
souvent
uniques
des
professionnels, ce qui complique la
communication sur la santé du
bébé, entre parents et grandsparents.

Les liens « forts » n’excluent pas
les tensions et conflits
• Claudine Attias-Donfut et Martine Segalen qui
ont beaucoup travaillé sur les solidarités
familiales exercées par les grands-parents,
mettent aussi en lumière que ces liens
intenses sont tissés parfois de difficultés qui
vont de la tension passagère à la rancœur ou
au conflit. Elles rappellent que si les grandsparents, de par leur simple présence, offrent
un formidable socle identitaire à leurs petitsenfants, leurs relations n’échappent pas à la
complexité des liens interindividuels.

• Nous ne nions pas l’existence de
tels conflits au sein des familles,
dans le contexte de notre étude
qui donne la « part belle » aux
grands-parents, sans taire les
peines et les regrets qui teintent
de tristesse certains témoignages,
en cas de disputes.

Notre étude
«

Être le grand-parent d’un enfant
gravement malade aujourd’hui en
Suisse, au Québec et en France »
Réalisée en France grâce
l’association Soleil AFELT.

à

La population concernée
• Nombre de Grands-parents rencontrés:
France : 35, Québec : 24, Suisse : 21
• Petits-enfants décédés
France: 4, Québec : 6, Suisse : 2
• Âge des petits-enfants : 1 jour à 17 ans
• Pathologies concernées: cancers, maladies orphelines,
grande prématurité.
• Milieux sociaux, urbains / ruraux variés
• Soignants rencontrés médecins et professionnels
paramédicaux, sociaux, psychologues:
France : 18, Québec : 6, Suisse 5

Constats
Ils sont des aidants précieux pour
chacun, sur le chemin périlleux qui
suit le décès du bébé, mais des
aidants mal connus et peu
reconnus. L’aide qu’ils apportent
sera utile dans la traversée du
deuil de toute la famille.

Différences culturelles à l’hôpital dans l’accueil
des grands-parents

• Il apparaît que les différences sont plus marquées entre les
services hospitaliers parfois au sein du même hôpital, qu’entre
les pays.
• Quelques grandes tendances sociologiques cependant pour les
trois pays :
 Des grands-parents proches, en France, des deux
générations
plus jeunes.
 Un souci d’indépendance des enfants semblent plus
marqué en Suisse qu’en France.
 Des « figures » puissantes de grands-mères au Québec,
constituées historiquement comme telles, devant les
absences prolongées des hommes.

• Les soignants nous disent souvent que
grâce à cette enquête, et avant même
d’en connaître les résultats, ils ont été
plus attentifs aux grands-parents.

Mal connus, peu reconnus

• Les grands-parents sont encore trop souvent
les oubliés de la réflexion sur les proches de
l’enfant malade. Les associations aussi n’ont
pas toujours pensé à eux.
« On aurait aimé rencontrer quelqu’un, mais on ne savait pas
où taper... Je crois qu’on aurait aimé rencontrer des gens qui
ont vécu des grandes souffrances, pour pouvoir être
écoutés ». (GM)

Mal connus, peu reconnus
«

Y a des choses pour les parents, y a rien pour les
grands parents ! » (G-M)

« Parler à l’hôpital avec d’autres grands-parents, ça m’a
beaucoup aidé » (G-P)

• Quand on se soucie de les écouter, les grands-

parents ont en effet, beaucoup à dire.

Quelques uns des points récurrents dans
les témoignages des grands-parents

• Ils indiquent tous l’injustice de voir la
maladie grave et la mort frapper les plus
jeunes, quand la logique générationnelle
voudrait que ce soient eux qui soient victimes.
« Maman l’arrière grand-mère disait : « C’était
pas à Julie de partir, c’était à moi » (G-M)

Des grands-pères qui se
révèlent
• Apparemment moins présents, appartenant à des
générations peu loquaces, on retrouve des
grands-pères qui pleurent leur petit-enfant, qui
soutiennent leur fils ou leur fille de manière tout
aussi importante, plusieurs possédant de réels
savoir-être qui n’est pas souvent exprimé face aux
soignants.

La double souffrance
• Ils et elles disent tous combien leur statut
dans la famille les amène à souffrir « deux
fois », pour l’enfant et le petit-enfant.
« Finalement les grands-parents souffrent presque deux
fois : on souffre pour notre enfant et on souffre pour
notre petit enfant. Et voir sa fille souffrir, sa fille triste,
sa fille maigrir, c’est épouvantable. Et de la voir pas
toujours soutenue par son mari, j’ai trouvé que c’était
très difficile »(G-M)

L’intensité de leur deuil
« Nous croyons qu’il ne faut pas sous-estimer le rôle et la
douleur vécus par les grands-parents des familles
endeuillées. D’ailleurs, les expériences les plus appréciées
par les grands-parents au moment du décès étaient leur
inclusion dans les derniers moments où ils eurent la chance
de prendre leur petit-enfant dans leur bras avant de le
quitter, où ils étaient présents pendant les discussions avec
les médecins et infirmières ».
dans Le deuil des grands-parents.
Enquête par questionnaire postal auprès de 21 grands-parents
Sophie Lessard, M.D., Claude Cyr M.D.
Département de pédiatrie, Faculté de médecine et des sciences de la santé,
Université de Sherbrooke, Canada

Malgré l’intensité de leur peine, les
grands-parents apportent un soutien
d’ordre relationnel, affectif, matériel. Il
est aussi spirituel

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents

La garde des autres enfants
« J’ai pris ma retraite et pendant plusieurs
semaines, je me suis occupé des grandes
(sœurs) afin qu’elles ne se sentent pas
abandonnées » (GP)

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents
• La préparation des repas pour les parents du
bébé et ses frères et sœurs.

• Le maintien des fêtes familiales
« Les fêtes de famille on a toujours continué.
Mais, elles sont quand même très dures.... je
crois que, si on arrêtait, ce serait encore plus
dur... » (G-M)

Quelques éléments d’analyse

• Les grands-parents contribuent à la stabilité
intergénérationnelle tout au long de la vie
familiale.
• Beaucoup d’entre eux ont su organiser les
rituels funéraires, réunir une communauté
plus large que la seule famille, notamment
dans les villages. Ils rendent très souvent
visite à la sépulture
de l’enfant et
l’entretiennent en étant vigilants aux souhaits
des parents.

Les besoins des grands-parents
• Le besoin d’être considérés comme faisant partie de la
famille.
• Le besoin de sentir qu’ils ne dérangent pas.
• Le besoin de poser des questions et, pour certains
d’être seuls avec les soignants.
• Le besoin de pouvoir exprimer leurs inquiétudes et leur
peine.
• Le besoin d’un accueil chaleureux dans un moment
difficile.
 Peu de différences en matière de besoins des
grands-parents d’un pays à l’autre.

Conclusion
Grands-parents et arrières grands-parents ont toute leur
place dans la construction d’une mémoire générationnelle et
d’une vie familiale auxquelles les soignants et les parents
contribuent positivement quand ils favorisent la rencontre et
l’évocation , sans juger les places, les rôles, la distance
bonne ou mauvaise, mais en reconnaissant l’importance de
la filiation.
« Les grands-parents sont importants parce qu’ils
sont les parents des parents » F. Dolto


Slide 20

« Ce qu’éprouvent les grands-parents »

Catherine Le Grand-Sébille : Socio-anthropologue,
Maître de conférences, Faculté de médecine, Lille 2

Sociologie des Grands-Parents
La sociologie de la grand-parentalité a connu en France,
grâce aux deux sociologues Claudine Attias-Donfut et
Martine Segalen une croissance et une fécondité
inégalées dans les autres pays francophones.
Depuis une vingtaine d’années, elles étudient un fait
démographique majeur, celui de l’allongement de la vie
et de la multiplication contemporaine des grandsparents, refusant de les laisser dans l’ombre.
Il y a près de 13 millions de grands-parents en France, on
ignore combien d’entre eux ont un petit enfant
gravement malade ou décédé.

Rôles et fonctions
Les
grands-parents
ont
des
fonctions
symboliques essentielles et exercent aussi un
rôle concret. Comme le dit M.F. Fuchs ce sont
des « relieurs » et des « transmetteurs » :
continuité familiale, inscription temporelle,
véhicules des valeurs familiales, garantie de
l’existence de l’histoire, témoignage de la mort
des générations plus âgées, légitimation du
parent auquel l’aïeul à passer le relais pour
devenir parent à son tour…

L’éternelle question de la « place »
• La récurrente question de la « bonne » place
est ainsi précisée par J-P Dommergues : « Le
rôle des grands-parents est d’être disponible
mais sans prendre la place des parents et en
sachant revenir au second plan quand les
parents sont présents. Ce jeu d’acteur de la
relation fait alterner un travail d’avant-scène
puis d’estompe en coulisse mais avec une
permanence affective qui garantit aux grandsparents de ne pas être des intermittents du
spectacle de la vie familiale… ».

• L’entreprise morale et normative
de
la
médecine
et
de
la
psychologie est ici perceptible, tant
le modelage spatial et relationnel
exigé
du
grand-parent
est
complexe
et
représente
probablement
un
défi
hors
d’atteinte.

Des dynamiques historiques
• Les processus politiques et sociaux que
sont la professionnalisation du soin, la
médicalisation, la technicisation et
l’institutionnalisation de la naissance et
de la mort, nous sont maintenant bien
connus
grâce
aux
travaux
des
historiens et des sociologues.

La disqualification des
savoirs familiaux


Il existe des tendances lourdes
qui caractérisent depuis la fin du
XIXe siècle, la disqualification puis
la mise à l’écart des savoirs
profanes sur la maladie et la mort
des enfants, et des soins familiaux
qui leur étaient afférents.

Une représentation de la
famille atomisée
De fait, les familles, longtemps tenues
éloignées des services de maternité et de
pédiatrie, trouvent depuis quelques
dizaines d’années, la possibilité d’y
entrer. Ce problème est structurel et
n’est pas lié à la seule volonté des
acteurs. Cette exclusion de la famille
élargie,
notamment,
est
une
caractéristique de notre médecine, à la
différence de celle d’autres pays.

Les parents de l’enfant sont les
interlocuteurs
privilégiés
et
souvent
uniques
des
professionnels, ce qui complique la
communication sur la santé du
bébé, entre parents et grandsparents.

Les liens « forts » n’excluent pas
les tensions et conflits
• Claudine Attias-Donfut et Martine Segalen qui
ont beaucoup travaillé sur les solidarités
familiales exercées par les grands-parents,
mettent aussi en lumière que ces liens
intenses sont tissés parfois de difficultés qui
vont de la tension passagère à la rancœur ou
au conflit. Elles rappellent que si les grandsparents, de par leur simple présence, offrent
un formidable socle identitaire à leurs petitsenfants, leurs relations n’échappent pas à la
complexité des liens interindividuels.

• Nous ne nions pas l’existence de
tels conflits au sein des familles,
dans le contexte de notre étude
qui donne la « part belle » aux
grands-parents, sans taire les
peines et les regrets qui teintent
de tristesse certains témoignages,
en cas de disputes.

Notre étude
«

Être le grand-parent d’un enfant
gravement malade aujourd’hui en
Suisse, au Québec et en France »
Réalisée en France grâce
l’association Soleil AFELT.

à

La population concernée
• Nombre de Grands-parents rencontrés:
France : 35, Québec : 24, Suisse : 21
• Petits-enfants décédés
France: 4, Québec : 6, Suisse : 2
• Âge des petits-enfants : 1 jour à 17 ans
• Pathologies concernées: cancers, maladies orphelines,
grande prématurité.
• Milieux sociaux, urbains / ruraux variés
• Soignants rencontrés médecins et professionnels
paramédicaux, sociaux, psychologues:
France : 18, Québec : 6, Suisse 5

Constats
Ils sont des aidants précieux pour
chacun, sur le chemin périlleux qui
suit le décès du bébé, mais des
aidants mal connus et peu
reconnus. L’aide qu’ils apportent
sera utile dans la traversée du
deuil de toute la famille.

Différences culturelles à l’hôpital dans l’accueil
des grands-parents

• Il apparaît que les différences sont plus marquées entre les
services hospitaliers parfois au sein du même hôpital, qu’entre
les pays.
• Quelques grandes tendances sociologiques cependant pour les
trois pays :
 Des grands-parents proches, en France, des deux
générations
plus jeunes.
 Un souci d’indépendance des enfants semblent plus
marqué en Suisse qu’en France.
 Des « figures » puissantes de grands-mères au Québec,
constituées historiquement comme telles, devant les
absences prolongées des hommes.

• Les soignants nous disent souvent que
grâce à cette enquête, et avant même
d’en connaître les résultats, ils ont été
plus attentifs aux grands-parents.

Mal connus, peu reconnus

• Les grands-parents sont encore trop souvent
les oubliés de la réflexion sur les proches de
l’enfant malade. Les associations aussi n’ont
pas toujours pensé à eux.
« On aurait aimé rencontrer quelqu’un, mais on ne savait pas
où taper... Je crois qu’on aurait aimé rencontrer des gens qui
ont vécu des grandes souffrances, pour pouvoir être
écoutés ». (GM)

Mal connus, peu reconnus
«

Y a des choses pour les parents, y a rien pour les
grands parents ! » (G-M)

« Parler à l’hôpital avec d’autres grands-parents, ça m’a
beaucoup aidé » (G-P)

• Quand on se soucie de les écouter, les grands-

parents ont en effet, beaucoup à dire.

Quelques uns des points récurrents dans
les témoignages des grands-parents

• Ils indiquent tous l’injustice de voir la
maladie grave et la mort frapper les plus
jeunes, quand la logique générationnelle
voudrait que ce soient eux qui soient victimes.
« Maman l’arrière grand-mère disait : « C’était
pas à Julie de partir, c’était à moi » (G-M)

Des grands-pères qui se
révèlent
• Apparemment moins présents, appartenant à des
générations peu loquaces, on retrouve des
grands-pères qui pleurent leur petit-enfant, qui
soutiennent leur fils ou leur fille de manière tout
aussi importante, plusieurs possédant de réels
savoir-être qui n’est pas souvent exprimé face aux
soignants.

La double souffrance
• Ils et elles disent tous combien leur statut
dans la famille les amène à souffrir « deux
fois », pour l’enfant et le petit-enfant.
« Finalement les grands-parents souffrent presque deux
fois : on souffre pour notre enfant et on souffre pour
notre petit enfant. Et voir sa fille souffrir, sa fille triste,
sa fille maigrir, c’est épouvantable. Et de la voir pas
toujours soutenue par son mari, j’ai trouvé que c’était
très difficile »(G-M)

L’intensité de leur deuil
« Nous croyons qu’il ne faut pas sous-estimer le rôle et la
douleur vécus par les grands-parents des familles
endeuillées. D’ailleurs, les expériences les plus appréciées
par les grands-parents au moment du décès étaient leur
inclusion dans les derniers moments où ils eurent la chance
de prendre leur petit-enfant dans leur bras avant de le
quitter, où ils étaient présents pendant les discussions avec
les médecins et infirmières ».
dans Le deuil des grands-parents.
Enquête par questionnaire postal auprès de 21 grands-parents
Sophie Lessard, M.D., Claude Cyr M.D.
Département de pédiatrie, Faculté de médecine et des sciences de la santé,
Université de Sherbrooke, Canada

Malgré l’intensité de leur peine, les
grands-parents apportent un soutien
d’ordre relationnel, affectif, matériel. Il
est aussi spirituel

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents

La garde des autres enfants
« J’ai pris ma retraite et pendant plusieurs
semaines, je me suis occupé des grandes
(sœurs) afin qu’elles ne se sentent pas
abandonnées » (GP)

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents
• La préparation des repas pour les parents du
bébé et ses frères et sœurs.

• Le maintien des fêtes familiales
« Les fêtes de famille on a toujours continué.
Mais, elles sont quand même très dures.... je
crois que, si on arrêtait, ce serait encore plus
dur... » (G-M)

Quelques éléments d’analyse

• Les grands-parents contribuent à la stabilité
intergénérationnelle tout au long de la vie
familiale.
• Beaucoup d’entre eux ont su organiser les
rituels funéraires, réunir une communauté
plus large que la seule famille, notamment
dans les villages. Ils rendent très souvent
visite à la sépulture
de l’enfant et
l’entretiennent en étant vigilants aux souhaits
des parents.

Les besoins des grands-parents
• Le besoin d’être considérés comme faisant partie de la
famille.
• Le besoin de sentir qu’ils ne dérangent pas.
• Le besoin de poser des questions et, pour certains
d’être seuls avec les soignants.
• Le besoin de pouvoir exprimer leurs inquiétudes et leur
peine.
• Le besoin d’un accueil chaleureux dans un moment
difficile.
 Peu de différences en matière de besoins des
grands-parents d’un pays à l’autre.

Conclusion
Grands-parents et arrières grands-parents ont toute leur
place dans la construction d’une mémoire générationnelle et
d’une vie familiale auxquelles les soignants et les parents
contribuent positivement quand ils favorisent la rencontre et
l’évocation , sans juger les places, les rôles, la distance
bonne ou mauvaise, mais en reconnaissant l’importance de
la filiation.
« Les grands-parents sont importants parce qu’ils
sont les parents des parents » F. Dolto


Slide 21

« Ce qu’éprouvent les grands-parents »

Catherine Le Grand-Sébille : Socio-anthropologue,
Maître de conférences, Faculté de médecine, Lille 2

Sociologie des Grands-Parents
La sociologie de la grand-parentalité a connu en France,
grâce aux deux sociologues Claudine Attias-Donfut et
Martine Segalen une croissance et une fécondité
inégalées dans les autres pays francophones.
Depuis une vingtaine d’années, elles étudient un fait
démographique majeur, celui de l’allongement de la vie
et de la multiplication contemporaine des grandsparents, refusant de les laisser dans l’ombre.
Il y a près de 13 millions de grands-parents en France, on
ignore combien d’entre eux ont un petit enfant
gravement malade ou décédé.

Rôles et fonctions
Les
grands-parents
ont
des
fonctions
symboliques essentielles et exercent aussi un
rôle concret. Comme le dit M.F. Fuchs ce sont
des « relieurs » et des « transmetteurs » :
continuité familiale, inscription temporelle,
véhicules des valeurs familiales, garantie de
l’existence de l’histoire, témoignage de la mort
des générations plus âgées, légitimation du
parent auquel l’aïeul à passer le relais pour
devenir parent à son tour…

L’éternelle question de la « place »
• La récurrente question de la « bonne » place
est ainsi précisée par J-P Dommergues : « Le
rôle des grands-parents est d’être disponible
mais sans prendre la place des parents et en
sachant revenir au second plan quand les
parents sont présents. Ce jeu d’acteur de la
relation fait alterner un travail d’avant-scène
puis d’estompe en coulisse mais avec une
permanence affective qui garantit aux grandsparents de ne pas être des intermittents du
spectacle de la vie familiale… ».

• L’entreprise morale et normative
de
la
médecine
et
de
la
psychologie est ici perceptible, tant
le modelage spatial et relationnel
exigé
du
grand-parent
est
complexe
et
représente
probablement
un
défi
hors
d’atteinte.

Des dynamiques historiques
• Les processus politiques et sociaux que
sont la professionnalisation du soin, la
médicalisation, la technicisation et
l’institutionnalisation de la naissance et
de la mort, nous sont maintenant bien
connus
grâce
aux
travaux
des
historiens et des sociologues.

La disqualification des
savoirs familiaux


Il existe des tendances lourdes
qui caractérisent depuis la fin du
XIXe siècle, la disqualification puis
la mise à l’écart des savoirs
profanes sur la maladie et la mort
des enfants, et des soins familiaux
qui leur étaient afférents.

Une représentation de la
famille atomisée
De fait, les familles, longtemps tenues
éloignées des services de maternité et de
pédiatrie, trouvent depuis quelques
dizaines d’années, la possibilité d’y
entrer. Ce problème est structurel et
n’est pas lié à la seule volonté des
acteurs. Cette exclusion de la famille
élargie,
notamment,
est
une
caractéristique de notre médecine, à la
différence de celle d’autres pays.

Les parents de l’enfant sont les
interlocuteurs
privilégiés
et
souvent
uniques
des
professionnels, ce qui complique la
communication sur la santé du
bébé, entre parents et grandsparents.

Les liens « forts » n’excluent pas
les tensions et conflits
• Claudine Attias-Donfut et Martine Segalen qui
ont beaucoup travaillé sur les solidarités
familiales exercées par les grands-parents,
mettent aussi en lumière que ces liens
intenses sont tissés parfois de difficultés qui
vont de la tension passagère à la rancœur ou
au conflit. Elles rappellent que si les grandsparents, de par leur simple présence, offrent
un formidable socle identitaire à leurs petitsenfants, leurs relations n’échappent pas à la
complexité des liens interindividuels.

• Nous ne nions pas l’existence de
tels conflits au sein des familles,
dans le contexte de notre étude
qui donne la « part belle » aux
grands-parents, sans taire les
peines et les regrets qui teintent
de tristesse certains témoignages,
en cas de disputes.

Notre étude
«

Être le grand-parent d’un enfant
gravement malade aujourd’hui en
Suisse, au Québec et en France »
Réalisée en France grâce
l’association Soleil AFELT.

à

La population concernée
• Nombre de Grands-parents rencontrés:
France : 35, Québec : 24, Suisse : 21
• Petits-enfants décédés
France: 4, Québec : 6, Suisse : 2
• Âge des petits-enfants : 1 jour à 17 ans
• Pathologies concernées: cancers, maladies orphelines,
grande prématurité.
• Milieux sociaux, urbains / ruraux variés
• Soignants rencontrés médecins et professionnels
paramédicaux, sociaux, psychologues:
France : 18, Québec : 6, Suisse 5

Constats
Ils sont des aidants précieux pour
chacun, sur le chemin périlleux qui
suit le décès du bébé, mais des
aidants mal connus et peu
reconnus. L’aide qu’ils apportent
sera utile dans la traversée du
deuil de toute la famille.

Différences culturelles à l’hôpital dans l’accueil
des grands-parents

• Il apparaît que les différences sont plus marquées entre les
services hospitaliers parfois au sein du même hôpital, qu’entre
les pays.
• Quelques grandes tendances sociologiques cependant pour les
trois pays :
 Des grands-parents proches, en France, des deux
générations
plus jeunes.
 Un souci d’indépendance des enfants semblent plus
marqué en Suisse qu’en France.
 Des « figures » puissantes de grands-mères au Québec,
constituées historiquement comme telles, devant les
absences prolongées des hommes.

• Les soignants nous disent souvent que
grâce à cette enquête, et avant même
d’en connaître les résultats, ils ont été
plus attentifs aux grands-parents.

Mal connus, peu reconnus

• Les grands-parents sont encore trop souvent
les oubliés de la réflexion sur les proches de
l’enfant malade. Les associations aussi n’ont
pas toujours pensé à eux.
« On aurait aimé rencontrer quelqu’un, mais on ne savait pas
où taper... Je crois qu’on aurait aimé rencontrer des gens qui
ont vécu des grandes souffrances, pour pouvoir être
écoutés ». (GM)

Mal connus, peu reconnus
«

Y a des choses pour les parents, y a rien pour les
grands parents ! » (G-M)

« Parler à l’hôpital avec d’autres grands-parents, ça m’a
beaucoup aidé » (G-P)

• Quand on se soucie de les écouter, les grands-

parents ont en effet, beaucoup à dire.

Quelques uns des points récurrents dans
les témoignages des grands-parents

• Ils indiquent tous l’injustice de voir la
maladie grave et la mort frapper les plus
jeunes, quand la logique générationnelle
voudrait que ce soient eux qui soient victimes.
« Maman l’arrière grand-mère disait : « C’était
pas à Julie de partir, c’était à moi » (G-M)

Des grands-pères qui se
révèlent
• Apparemment moins présents, appartenant à des
générations peu loquaces, on retrouve des
grands-pères qui pleurent leur petit-enfant, qui
soutiennent leur fils ou leur fille de manière tout
aussi importante, plusieurs possédant de réels
savoir-être qui n’est pas souvent exprimé face aux
soignants.

La double souffrance
• Ils et elles disent tous combien leur statut
dans la famille les amène à souffrir « deux
fois », pour l’enfant et le petit-enfant.
« Finalement les grands-parents souffrent presque deux
fois : on souffre pour notre enfant et on souffre pour
notre petit enfant. Et voir sa fille souffrir, sa fille triste,
sa fille maigrir, c’est épouvantable. Et de la voir pas
toujours soutenue par son mari, j’ai trouvé que c’était
très difficile »(G-M)

L’intensité de leur deuil
« Nous croyons qu’il ne faut pas sous-estimer le rôle et la
douleur vécus par les grands-parents des familles
endeuillées. D’ailleurs, les expériences les plus appréciées
par les grands-parents au moment du décès étaient leur
inclusion dans les derniers moments où ils eurent la chance
de prendre leur petit-enfant dans leur bras avant de le
quitter, où ils étaient présents pendant les discussions avec
les médecins et infirmières ».
dans Le deuil des grands-parents.
Enquête par questionnaire postal auprès de 21 grands-parents
Sophie Lessard, M.D., Claude Cyr M.D.
Département de pédiatrie, Faculté de médecine et des sciences de la santé,
Université de Sherbrooke, Canada

Malgré l’intensité de leur peine, les
grands-parents apportent un soutien
d’ordre relationnel, affectif, matériel. Il
est aussi spirituel

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents

La garde des autres enfants
« J’ai pris ma retraite et pendant plusieurs
semaines, je me suis occupé des grandes
(sœurs) afin qu’elles ne se sentent pas
abandonnées » (GP)

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents
• La préparation des repas pour les parents du
bébé et ses frères et sœurs.

• Le maintien des fêtes familiales
« Les fêtes de famille on a toujours continué.
Mais, elles sont quand même très dures.... je
crois que, si on arrêtait, ce serait encore plus
dur... » (G-M)

Quelques éléments d’analyse

• Les grands-parents contribuent à la stabilité
intergénérationnelle tout au long de la vie
familiale.
• Beaucoup d’entre eux ont su organiser les
rituels funéraires, réunir une communauté
plus large que la seule famille, notamment
dans les villages. Ils rendent très souvent
visite à la sépulture
de l’enfant et
l’entretiennent en étant vigilants aux souhaits
des parents.

Les besoins des grands-parents
• Le besoin d’être considérés comme faisant partie de la
famille.
• Le besoin de sentir qu’ils ne dérangent pas.
• Le besoin de poser des questions et, pour certains
d’être seuls avec les soignants.
• Le besoin de pouvoir exprimer leurs inquiétudes et leur
peine.
• Le besoin d’un accueil chaleureux dans un moment
difficile.
 Peu de différences en matière de besoins des
grands-parents d’un pays à l’autre.

Conclusion
Grands-parents et arrières grands-parents ont toute leur
place dans la construction d’une mémoire générationnelle et
d’une vie familiale auxquelles les soignants et les parents
contribuent positivement quand ils favorisent la rencontre et
l’évocation , sans juger les places, les rôles, la distance
bonne ou mauvaise, mais en reconnaissant l’importance de
la filiation.
« Les grands-parents sont importants parce qu’ils
sont les parents des parents » F. Dolto


Slide 22

« Ce qu’éprouvent les grands-parents »

Catherine Le Grand-Sébille : Socio-anthropologue,
Maître de conférences, Faculté de médecine, Lille 2

Sociologie des Grands-Parents
La sociologie de la grand-parentalité a connu en France,
grâce aux deux sociologues Claudine Attias-Donfut et
Martine Segalen une croissance et une fécondité
inégalées dans les autres pays francophones.
Depuis une vingtaine d’années, elles étudient un fait
démographique majeur, celui de l’allongement de la vie
et de la multiplication contemporaine des grandsparents, refusant de les laisser dans l’ombre.
Il y a près de 13 millions de grands-parents en France, on
ignore combien d’entre eux ont un petit enfant
gravement malade ou décédé.

Rôles et fonctions
Les
grands-parents
ont
des
fonctions
symboliques essentielles et exercent aussi un
rôle concret. Comme le dit M.F. Fuchs ce sont
des « relieurs » et des « transmetteurs » :
continuité familiale, inscription temporelle,
véhicules des valeurs familiales, garantie de
l’existence de l’histoire, témoignage de la mort
des générations plus âgées, légitimation du
parent auquel l’aïeul à passer le relais pour
devenir parent à son tour…

L’éternelle question de la « place »
• La récurrente question de la « bonne » place
est ainsi précisée par J-P Dommergues : « Le
rôle des grands-parents est d’être disponible
mais sans prendre la place des parents et en
sachant revenir au second plan quand les
parents sont présents. Ce jeu d’acteur de la
relation fait alterner un travail d’avant-scène
puis d’estompe en coulisse mais avec une
permanence affective qui garantit aux grandsparents de ne pas être des intermittents du
spectacle de la vie familiale… ».

• L’entreprise morale et normative
de
la
médecine
et
de
la
psychologie est ici perceptible, tant
le modelage spatial et relationnel
exigé
du
grand-parent
est
complexe
et
représente
probablement
un
défi
hors
d’atteinte.

Des dynamiques historiques
• Les processus politiques et sociaux que
sont la professionnalisation du soin, la
médicalisation, la technicisation et
l’institutionnalisation de la naissance et
de la mort, nous sont maintenant bien
connus
grâce
aux
travaux
des
historiens et des sociologues.

La disqualification des
savoirs familiaux


Il existe des tendances lourdes
qui caractérisent depuis la fin du
XIXe siècle, la disqualification puis
la mise à l’écart des savoirs
profanes sur la maladie et la mort
des enfants, et des soins familiaux
qui leur étaient afférents.

Une représentation de la
famille atomisée
De fait, les familles, longtemps tenues
éloignées des services de maternité et de
pédiatrie, trouvent depuis quelques
dizaines d’années, la possibilité d’y
entrer. Ce problème est structurel et
n’est pas lié à la seule volonté des
acteurs. Cette exclusion de la famille
élargie,
notamment,
est
une
caractéristique de notre médecine, à la
différence de celle d’autres pays.

Les parents de l’enfant sont les
interlocuteurs
privilégiés
et
souvent
uniques
des
professionnels, ce qui complique la
communication sur la santé du
bébé, entre parents et grandsparents.

Les liens « forts » n’excluent pas
les tensions et conflits
• Claudine Attias-Donfut et Martine Segalen qui
ont beaucoup travaillé sur les solidarités
familiales exercées par les grands-parents,
mettent aussi en lumière que ces liens
intenses sont tissés parfois de difficultés qui
vont de la tension passagère à la rancœur ou
au conflit. Elles rappellent que si les grandsparents, de par leur simple présence, offrent
un formidable socle identitaire à leurs petitsenfants, leurs relations n’échappent pas à la
complexité des liens interindividuels.

• Nous ne nions pas l’existence de
tels conflits au sein des familles,
dans le contexte de notre étude
qui donne la « part belle » aux
grands-parents, sans taire les
peines et les regrets qui teintent
de tristesse certains témoignages,
en cas de disputes.

Notre étude
«

Être le grand-parent d’un enfant
gravement malade aujourd’hui en
Suisse, au Québec et en France »
Réalisée en France grâce
l’association Soleil AFELT.

à

La population concernée
• Nombre de Grands-parents rencontrés:
France : 35, Québec : 24, Suisse : 21
• Petits-enfants décédés
France: 4, Québec : 6, Suisse : 2
• Âge des petits-enfants : 1 jour à 17 ans
• Pathologies concernées: cancers, maladies orphelines,
grande prématurité.
• Milieux sociaux, urbains / ruraux variés
• Soignants rencontrés médecins et professionnels
paramédicaux, sociaux, psychologues:
France : 18, Québec : 6, Suisse 5

Constats
Ils sont des aidants précieux pour
chacun, sur le chemin périlleux qui
suit le décès du bébé, mais des
aidants mal connus et peu
reconnus. L’aide qu’ils apportent
sera utile dans la traversée du
deuil de toute la famille.

Différences culturelles à l’hôpital dans l’accueil
des grands-parents

• Il apparaît que les différences sont plus marquées entre les
services hospitaliers parfois au sein du même hôpital, qu’entre
les pays.
• Quelques grandes tendances sociologiques cependant pour les
trois pays :
 Des grands-parents proches, en France, des deux
générations
plus jeunes.
 Un souci d’indépendance des enfants semblent plus
marqué en Suisse qu’en France.
 Des « figures » puissantes de grands-mères au Québec,
constituées historiquement comme telles, devant les
absences prolongées des hommes.

• Les soignants nous disent souvent que
grâce à cette enquête, et avant même
d’en connaître les résultats, ils ont été
plus attentifs aux grands-parents.

Mal connus, peu reconnus

• Les grands-parents sont encore trop souvent
les oubliés de la réflexion sur les proches de
l’enfant malade. Les associations aussi n’ont
pas toujours pensé à eux.
« On aurait aimé rencontrer quelqu’un, mais on ne savait pas
où taper... Je crois qu’on aurait aimé rencontrer des gens qui
ont vécu des grandes souffrances, pour pouvoir être
écoutés ». (GM)

Mal connus, peu reconnus
«

Y a des choses pour les parents, y a rien pour les
grands parents ! » (G-M)

« Parler à l’hôpital avec d’autres grands-parents, ça m’a
beaucoup aidé » (G-P)

• Quand on se soucie de les écouter, les grands-

parents ont en effet, beaucoup à dire.

Quelques uns des points récurrents dans
les témoignages des grands-parents

• Ils indiquent tous l’injustice de voir la
maladie grave et la mort frapper les plus
jeunes, quand la logique générationnelle
voudrait que ce soient eux qui soient victimes.
« Maman l’arrière grand-mère disait : « C’était
pas à Julie de partir, c’était à moi » (G-M)

Des grands-pères qui se
révèlent
• Apparemment moins présents, appartenant à des
générations peu loquaces, on retrouve des
grands-pères qui pleurent leur petit-enfant, qui
soutiennent leur fils ou leur fille de manière tout
aussi importante, plusieurs possédant de réels
savoir-être qui n’est pas souvent exprimé face aux
soignants.

La double souffrance
• Ils et elles disent tous combien leur statut
dans la famille les amène à souffrir « deux
fois », pour l’enfant et le petit-enfant.
« Finalement les grands-parents souffrent presque deux
fois : on souffre pour notre enfant et on souffre pour
notre petit enfant. Et voir sa fille souffrir, sa fille triste,
sa fille maigrir, c’est épouvantable. Et de la voir pas
toujours soutenue par son mari, j’ai trouvé que c’était
très difficile »(G-M)

L’intensité de leur deuil
« Nous croyons qu’il ne faut pas sous-estimer le rôle et la
douleur vécus par les grands-parents des familles
endeuillées. D’ailleurs, les expériences les plus appréciées
par les grands-parents au moment du décès étaient leur
inclusion dans les derniers moments où ils eurent la chance
de prendre leur petit-enfant dans leur bras avant de le
quitter, où ils étaient présents pendant les discussions avec
les médecins et infirmières ».
dans Le deuil des grands-parents.
Enquête par questionnaire postal auprès de 21 grands-parents
Sophie Lessard, M.D., Claude Cyr M.D.
Département de pédiatrie, Faculté de médecine et des sciences de la santé,
Université de Sherbrooke, Canada

Malgré l’intensité de leur peine, les
grands-parents apportent un soutien
d’ordre relationnel, affectif, matériel. Il
est aussi spirituel

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents

La garde des autres enfants
« J’ai pris ma retraite et pendant plusieurs
semaines, je me suis occupé des grandes
(sœurs) afin qu’elles ne se sentent pas
abandonnées » (GP)

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents
• La préparation des repas pour les parents du
bébé et ses frères et sœurs.

• Le maintien des fêtes familiales
« Les fêtes de famille on a toujours continué.
Mais, elles sont quand même très dures.... je
crois que, si on arrêtait, ce serait encore plus
dur... » (G-M)

Quelques éléments d’analyse

• Les grands-parents contribuent à la stabilité
intergénérationnelle tout au long de la vie
familiale.
• Beaucoup d’entre eux ont su organiser les
rituels funéraires, réunir une communauté
plus large que la seule famille, notamment
dans les villages. Ils rendent très souvent
visite à la sépulture
de l’enfant et
l’entretiennent en étant vigilants aux souhaits
des parents.

Les besoins des grands-parents
• Le besoin d’être considérés comme faisant partie de la
famille.
• Le besoin de sentir qu’ils ne dérangent pas.
• Le besoin de poser des questions et, pour certains
d’être seuls avec les soignants.
• Le besoin de pouvoir exprimer leurs inquiétudes et leur
peine.
• Le besoin d’un accueil chaleureux dans un moment
difficile.
 Peu de différences en matière de besoins des
grands-parents d’un pays à l’autre.

Conclusion
Grands-parents et arrières grands-parents ont toute leur
place dans la construction d’une mémoire générationnelle et
d’une vie familiale auxquelles les soignants et les parents
contribuent positivement quand ils favorisent la rencontre et
l’évocation , sans juger les places, les rôles, la distance
bonne ou mauvaise, mais en reconnaissant l’importance de
la filiation.
« Les grands-parents sont importants parce qu’ils
sont les parents des parents » F. Dolto


Slide 23

« Ce qu’éprouvent les grands-parents »

Catherine Le Grand-Sébille : Socio-anthropologue,
Maître de conférences, Faculté de médecine, Lille 2

Sociologie des Grands-Parents
La sociologie de la grand-parentalité a connu en France,
grâce aux deux sociologues Claudine Attias-Donfut et
Martine Segalen une croissance et une fécondité
inégalées dans les autres pays francophones.
Depuis une vingtaine d’années, elles étudient un fait
démographique majeur, celui de l’allongement de la vie
et de la multiplication contemporaine des grandsparents, refusant de les laisser dans l’ombre.
Il y a près de 13 millions de grands-parents en France, on
ignore combien d’entre eux ont un petit enfant
gravement malade ou décédé.

Rôles et fonctions
Les
grands-parents
ont
des
fonctions
symboliques essentielles et exercent aussi un
rôle concret. Comme le dit M.F. Fuchs ce sont
des « relieurs » et des « transmetteurs » :
continuité familiale, inscription temporelle,
véhicules des valeurs familiales, garantie de
l’existence de l’histoire, témoignage de la mort
des générations plus âgées, légitimation du
parent auquel l’aïeul à passer le relais pour
devenir parent à son tour…

L’éternelle question de la « place »
• La récurrente question de la « bonne » place
est ainsi précisée par J-P Dommergues : « Le
rôle des grands-parents est d’être disponible
mais sans prendre la place des parents et en
sachant revenir au second plan quand les
parents sont présents. Ce jeu d’acteur de la
relation fait alterner un travail d’avant-scène
puis d’estompe en coulisse mais avec une
permanence affective qui garantit aux grandsparents de ne pas être des intermittents du
spectacle de la vie familiale… ».

• L’entreprise morale et normative
de
la
médecine
et
de
la
psychologie est ici perceptible, tant
le modelage spatial et relationnel
exigé
du
grand-parent
est
complexe
et
représente
probablement
un
défi
hors
d’atteinte.

Des dynamiques historiques
• Les processus politiques et sociaux que
sont la professionnalisation du soin, la
médicalisation, la technicisation et
l’institutionnalisation de la naissance et
de la mort, nous sont maintenant bien
connus
grâce
aux
travaux
des
historiens et des sociologues.

La disqualification des
savoirs familiaux


Il existe des tendances lourdes
qui caractérisent depuis la fin du
XIXe siècle, la disqualification puis
la mise à l’écart des savoirs
profanes sur la maladie et la mort
des enfants, et des soins familiaux
qui leur étaient afférents.

Une représentation de la
famille atomisée
De fait, les familles, longtemps tenues
éloignées des services de maternité et de
pédiatrie, trouvent depuis quelques
dizaines d’années, la possibilité d’y
entrer. Ce problème est structurel et
n’est pas lié à la seule volonté des
acteurs. Cette exclusion de la famille
élargie,
notamment,
est
une
caractéristique de notre médecine, à la
différence de celle d’autres pays.

Les parents de l’enfant sont les
interlocuteurs
privilégiés
et
souvent
uniques
des
professionnels, ce qui complique la
communication sur la santé du
bébé, entre parents et grandsparents.

Les liens « forts » n’excluent pas
les tensions et conflits
• Claudine Attias-Donfut et Martine Segalen qui
ont beaucoup travaillé sur les solidarités
familiales exercées par les grands-parents,
mettent aussi en lumière que ces liens
intenses sont tissés parfois de difficultés qui
vont de la tension passagère à la rancœur ou
au conflit. Elles rappellent que si les grandsparents, de par leur simple présence, offrent
un formidable socle identitaire à leurs petitsenfants, leurs relations n’échappent pas à la
complexité des liens interindividuels.

• Nous ne nions pas l’existence de
tels conflits au sein des familles,
dans le contexte de notre étude
qui donne la « part belle » aux
grands-parents, sans taire les
peines et les regrets qui teintent
de tristesse certains témoignages,
en cas de disputes.

Notre étude
«

Être le grand-parent d’un enfant
gravement malade aujourd’hui en
Suisse, au Québec et en France »
Réalisée en France grâce
l’association Soleil AFELT.

à

La population concernée
• Nombre de Grands-parents rencontrés:
France : 35, Québec : 24, Suisse : 21
• Petits-enfants décédés
France: 4, Québec : 6, Suisse : 2
• Âge des petits-enfants : 1 jour à 17 ans
• Pathologies concernées: cancers, maladies orphelines,
grande prématurité.
• Milieux sociaux, urbains / ruraux variés
• Soignants rencontrés médecins et professionnels
paramédicaux, sociaux, psychologues:
France : 18, Québec : 6, Suisse 5

Constats
Ils sont des aidants précieux pour
chacun, sur le chemin périlleux qui
suit le décès du bébé, mais des
aidants mal connus et peu
reconnus. L’aide qu’ils apportent
sera utile dans la traversée du
deuil de toute la famille.

Différences culturelles à l’hôpital dans l’accueil
des grands-parents

• Il apparaît que les différences sont plus marquées entre les
services hospitaliers parfois au sein du même hôpital, qu’entre
les pays.
• Quelques grandes tendances sociologiques cependant pour les
trois pays :
 Des grands-parents proches, en France, des deux
générations
plus jeunes.
 Un souci d’indépendance des enfants semblent plus
marqué en Suisse qu’en France.
 Des « figures » puissantes de grands-mères au Québec,
constituées historiquement comme telles, devant les
absences prolongées des hommes.

• Les soignants nous disent souvent que
grâce à cette enquête, et avant même
d’en connaître les résultats, ils ont été
plus attentifs aux grands-parents.

Mal connus, peu reconnus

• Les grands-parents sont encore trop souvent
les oubliés de la réflexion sur les proches de
l’enfant malade. Les associations aussi n’ont
pas toujours pensé à eux.
« On aurait aimé rencontrer quelqu’un, mais on ne savait pas
où taper... Je crois qu’on aurait aimé rencontrer des gens qui
ont vécu des grandes souffrances, pour pouvoir être
écoutés ». (GM)

Mal connus, peu reconnus
«

Y a des choses pour les parents, y a rien pour les
grands parents ! » (G-M)

« Parler à l’hôpital avec d’autres grands-parents, ça m’a
beaucoup aidé » (G-P)

• Quand on se soucie de les écouter, les grands-

parents ont en effet, beaucoup à dire.

Quelques uns des points récurrents dans
les témoignages des grands-parents

• Ils indiquent tous l’injustice de voir la
maladie grave et la mort frapper les plus
jeunes, quand la logique générationnelle
voudrait que ce soient eux qui soient victimes.
« Maman l’arrière grand-mère disait : « C’était
pas à Julie de partir, c’était à moi » (G-M)

Des grands-pères qui se
révèlent
• Apparemment moins présents, appartenant à des
générations peu loquaces, on retrouve des
grands-pères qui pleurent leur petit-enfant, qui
soutiennent leur fils ou leur fille de manière tout
aussi importante, plusieurs possédant de réels
savoir-être qui n’est pas souvent exprimé face aux
soignants.

La double souffrance
• Ils et elles disent tous combien leur statut
dans la famille les amène à souffrir « deux
fois », pour l’enfant et le petit-enfant.
« Finalement les grands-parents souffrent presque deux
fois : on souffre pour notre enfant et on souffre pour
notre petit enfant. Et voir sa fille souffrir, sa fille triste,
sa fille maigrir, c’est épouvantable. Et de la voir pas
toujours soutenue par son mari, j’ai trouvé que c’était
très difficile »(G-M)

L’intensité de leur deuil
« Nous croyons qu’il ne faut pas sous-estimer le rôle et la
douleur vécus par les grands-parents des familles
endeuillées. D’ailleurs, les expériences les plus appréciées
par les grands-parents au moment du décès étaient leur
inclusion dans les derniers moments où ils eurent la chance
de prendre leur petit-enfant dans leur bras avant de le
quitter, où ils étaient présents pendant les discussions avec
les médecins et infirmières ».
dans Le deuil des grands-parents.
Enquête par questionnaire postal auprès de 21 grands-parents
Sophie Lessard, M.D., Claude Cyr M.D.
Département de pédiatrie, Faculté de médecine et des sciences de la santé,
Université de Sherbrooke, Canada

Malgré l’intensité de leur peine, les
grands-parents apportent un soutien
d’ordre relationnel, affectif, matériel. Il
est aussi spirituel

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents

La garde des autres enfants
« J’ai pris ma retraite et pendant plusieurs
semaines, je me suis occupé des grandes
(sœurs) afin qu’elles ne se sentent pas
abandonnées » (GP)

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents
• La préparation des repas pour les parents du
bébé et ses frères et sœurs.

• Le maintien des fêtes familiales
« Les fêtes de famille on a toujours continué.
Mais, elles sont quand même très dures.... je
crois que, si on arrêtait, ce serait encore plus
dur... » (G-M)

Quelques éléments d’analyse

• Les grands-parents contribuent à la stabilité
intergénérationnelle tout au long de la vie
familiale.
• Beaucoup d’entre eux ont su organiser les
rituels funéraires, réunir une communauté
plus large que la seule famille, notamment
dans les villages. Ils rendent très souvent
visite à la sépulture
de l’enfant et
l’entretiennent en étant vigilants aux souhaits
des parents.

Les besoins des grands-parents
• Le besoin d’être considérés comme faisant partie de la
famille.
• Le besoin de sentir qu’ils ne dérangent pas.
• Le besoin de poser des questions et, pour certains
d’être seuls avec les soignants.
• Le besoin de pouvoir exprimer leurs inquiétudes et leur
peine.
• Le besoin d’un accueil chaleureux dans un moment
difficile.
 Peu de différences en matière de besoins des
grands-parents d’un pays à l’autre.

Conclusion
Grands-parents et arrières grands-parents ont toute leur
place dans la construction d’une mémoire générationnelle et
d’une vie familiale auxquelles les soignants et les parents
contribuent positivement quand ils favorisent la rencontre et
l’évocation , sans juger les places, les rôles, la distance
bonne ou mauvaise, mais en reconnaissant l’importance de
la filiation.
« Les grands-parents sont importants parce qu’ils
sont les parents des parents » F. Dolto


Slide 24

« Ce qu’éprouvent les grands-parents »

Catherine Le Grand-Sébille : Socio-anthropologue,
Maître de conférences, Faculté de médecine, Lille 2

Sociologie des Grands-Parents
La sociologie de la grand-parentalité a connu en France,
grâce aux deux sociologues Claudine Attias-Donfut et
Martine Segalen une croissance et une fécondité
inégalées dans les autres pays francophones.
Depuis une vingtaine d’années, elles étudient un fait
démographique majeur, celui de l’allongement de la vie
et de la multiplication contemporaine des grandsparents, refusant de les laisser dans l’ombre.
Il y a près de 13 millions de grands-parents en France, on
ignore combien d’entre eux ont un petit enfant
gravement malade ou décédé.

Rôles et fonctions
Les
grands-parents
ont
des
fonctions
symboliques essentielles et exercent aussi un
rôle concret. Comme le dit M.F. Fuchs ce sont
des « relieurs » et des « transmetteurs » :
continuité familiale, inscription temporelle,
véhicules des valeurs familiales, garantie de
l’existence de l’histoire, témoignage de la mort
des générations plus âgées, légitimation du
parent auquel l’aïeul à passer le relais pour
devenir parent à son tour…

L’éternelle question de la « place »
• La récurrente question de la « bonne » place
est ainsi précisée par J-P Dommergues : « Le
rôle des grands-parents est d’être disponible
mais sans prendre la place des parents et en
sachant revenir au second plan quand les
parents sont présents. Ce jeu d’acteur de la
relation fait alterner un travail d’avant-scène
puis d’estompe en coulisse mais avec une
permanence affective qui garantit aux grandsparents de ne pas être des intermittents du
spectacle de la vie familiale… ».

• L’entreprise morale et normative
de
la
médecine
et
de
la
psychologie est ici perceptible, tant
le modelage spatial et relationnel
exigé
du
grand-parent
est
complexe
et
représente
probablement
un
défi
hors
d’atteinte.

Des dynamiques historiques
• Les processus politiques et sociaux que
sont la professionnalisation du soin, la
médicalisation, la technicisation et
l’institutionnalisation de la naissance et
de la mort, nous sont maintenant bien
connus
grâce
aux
travaux
des
historiens et des sociologues.

La disqualification des
savoirs familiaux


Il existe des tendances lourdes
qui caractérisent depuis la fin du
XIXe siècle, la disqualification puis
la mise à l’écart des savoirs
profanes sur la maladie et la mort
des enfants, et des soins familiaux
qui leur étaient afférents.

Une représentation de la
famille atomisée
De fait, les familles, longtemps tenues
éloignées des services de maternité et de
pédiatrie, trouvent depuis quelques
dizaines d’années, la possibilité d’y
entrer. Ce problème est structurel et
n’est pas lié à la seule volonté des
acteurs. Cette exclusion de la famille
élargie,
notamment,
est
une
caractéristique de notre médecine, à la
différence de celle d’autres pays.

Les parents de l’enfant sont les
interlocuteurs
privilégiés
et
souvent
uniques
des
professionnels, ce qui complique la
communication sur la santé du
bébé, entre parents et grandsparents.

Les liens « forts » n’excluent pas
les tensions et conflits
• Claudine Attias-Donfut et Martine Segalen qui
ont beaucoup travaillé sur les solidarités
familiales exercées par les grands-parents,
mettent aussi en lumière que ces liens
intenses sont tissés parfois de difficultés qui
vont de la tension passagère à la rancœur ou
au conflit. Elles rappellent que si les grandsparents, de par leur simple présence, offrent
un formidable socle identitaire à leurs petitsenfants, leurs relations n’échappent pas à la
complexité des liens interindividuels.

• Nous ne nions pas l’existence de
tels conflits au sein des familles,
dans le contexte de notre étude
qui donne la « part belle » aux
grands-parents, sans taire les
peines et les regrets qui teintent
de tristesse certains témoignages,
en cas de disputes.

Notre étude
«

Être le grand-parent d’un enfant
gravement malade aujourd’hui en
Suisse, au Québec et en France »
Réalisée en France grâce
l’association Soleil AFELT.

à

La population concernée
• Nombre de Grands-parents rencontrés:
France : 35, Québec : 24, Suisse : 21
• Petits-enfants décédés
France: 4, Québec : 6, Suisse : 2
• Âge des petits-enfants : 1 jour à 17 ans
• Pathologies concernées: cancers, maladies orphelines,
grande prématurité.
• Milieux sociaux, urbains / ruraux variés
• Soignants rencontrés médecins et professionnels
paramédicaux, sociaux, psychologues:
France : 18, Québec : 6, Suisse 5

Constats
Ils sont des aidants précieux pour
chacun, sur le chemin périlleux qui
suit le décès du bébé, mais des
aidants mal connus et peu
reconnus. L’aide qu’ils apportent
sera utile dans la traversée du
deuil de toute la famille.

Différences culturelles à l’hôpital dans l’accueil
des grands-parents

• Il apparaît que les différences sont plus marquées entre les
services hospitaliers parfois au sein du même hôpital, qu’entre
les pays.
• Quelques grandes tendances sociologiques cependant pour les
trois pays :
 Des grands-parents proches, en France, des deux
générations
plus jeunes.
 Un souci d’indépendance des enfants semblent plus
marqué en Suisse qu’en France.
 Des « figures » puissantes de grands-mères au Québec,
constituées historiquement comme telles, devant les
absences prolongées des hommes.

• Les soignants nous disent souvent que
grâce à cette enquête, et avant même
d’en connaître les résultats, ils ont été
plus attentifs aux grands-parents.

Mal connus, peu reconnus

• Les grands-parents sont encore trop souvent
les oubliés de la réflexion sur les proches de
l’enfant malade. Les associations aussi n’ont
pas toujours pensé à eux.
« On aurait aimé rencontrer quelqu’un, mais on ne savait pas
où taper... Je crois qu’on aurait aimé rencontrer des gens qui
ont vécu des grandes souffrances, pour pouvoir être
écoutés ». (GM)

Mal connus, peu reconnus
«

Y a des choses pour les parents, y a rien pour les
grands parents ! » (G-M)

« Parler à l’hôpital avec d’autres grands-parents, ça m’a
beaucoup aidé » (G-P)

• Quand on se soucie de les écouter, les grands-

parents ont en effet, beaucoup à dire.

Quelques uns des points récurrents dans
les témoignages des grands-parents

• Ils indiquent tous l’injustice de voir la
maladie grave et la mort frapper les plus
jeunes, quand la logique générationnelle
voudrait que ce soient eux qui soient victimes.
« Maman l’arrière grand-mère disait : « C’était
pas à Julie de partir, c’était à moi » (G-M)

Des grands-pères qui se
révèlent
• Apparemment moins présents, appartenant à des
générations peu loquaces, on retrouve des
grands-pères qui pleurent leur petit-enfant, qui
soutiennent leur fils ou leur fille de manière tout
aussi importante, plusieurs possédant de réels
savoir-être qui n’est pas souvent exprimé face aux
soignants.

La double souffrance
• Ils et elles disent tous combien leur statut
dans la famille les amène à souffrir « deux
fois », pour l’enfant et le petit-enfant.
« Finalement les grands-parents souffrent presque deux
fois : on souffre pour notre enfant et on souffre pour
notre petit enfant. Et voir sa fille souffrir, sa fille triste,
sa fille maigrir, c’est épouvantable. Et de la voir pas
toujours soutenue par son mari, j’ai trouvé que c’était
très difficile »(G-M)

L’intensité de leur deuil
« Nous croyons qu’il ne faut pas sous-estimer le rôle et la
douleur vécus par les grands-parents des familles
endeuillées. D’ailleurs, les expériences les plus appréciées
par les grands-parents au moment du décès étaient leur
inclusion dans les derniers moments où ils eurent la chance
de prendre leur petit-enfant dans leur bras avant de le
quitter, où ils étaient présents pendant les discussions avec
les médecins et infirmières ».
dans Le deuil des grands-parents.
Enquête par questionnaire postal auprès de 21 grands-parents
Sophie Lessard, M.D., Claude Cyr M.D.
Département de pédiatrie, Faculté de médecine et des sciences de la santé,
Université de Sherbrooke, Canada

Malgré l’intensité de leur peine, les
grands-parents apportent un soutien
d’ordre relationnel, affectif, matériel. Il
est aussi spirituel

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents

La garde des autres enfants
« J’ai pris ma retraite et pendant plusieurs
semaines, je me suis occupé des grandes
(sœurs) afin qu’elles ne se sentent pas
abandonnées » (GP)

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents
• La préparation des repas pour les parents du
bébé et ses frères et sœurs.

• Le maintien des fêtes familiales
« Les fêtes de famille on a toujours continué.
Mais, elles sont quand même très dures.... je
crois que, si on arrêtait, ce serait encore plus
dur... » (G-M)

Quelques éléments d’analyse

• Les grands-parents contribuent à la stabilité
intergénérationnelle tout au long de la vie
familiale.
• Beaucoup d’entre eux ont su organiser les
rituels funéraires, réunir une communauté
plus large que la seule famille, notamment
dans les villages. Ils rendent très souvent
visite à la sépulture
de l’enfant et
l’entretiennent en étant vigilants aux souhaits
des parents.

Les besoins des grands-parents
• Le besoin d’être considérés comme faisant partie de la
famille.
• Le besoin de sentir qu’ils ne dérangent pas.
• Le besoin de poser des questions et, pour certains
d’être seuls avec les soignants.
• Le besoin de pouvoir exprimer leurs inquiétudes et leur
peine.
• Le besoin d’un accueil chaleureux dans un moment
difficile.
 Peu de différences en matière de besoins des
grands-parents d’un pays à l’autre.

Conclusion
Grands-parents et arrières grands-parents ont toute leur
place dans la construction d’une mémoire générationnelle et
d’une vie familiale auxquelles les soignants et les parents
contribuent positivement quand ils favorisent la rencontre et
l’évocation , sans juger les places, les rôles, la distance
bonne ou mauvaise, mais en reconnaissant l’importance de
la filiation.
« Les grands-parents sont importants parce qu’ils
sont les parents des parents » F. Dolto


Slide 25

« Ce qu’éprouvent les grands-parents »

Catherine Le Grand-Sébille : Socio-anthropologue,
Maître de conférences, Faculté de médecine, Lille 2

Sociologie des Grands-Parents
La sociologie de la grand-parentalité a connu en France,
grâce aux deux sociologues Claudine Attias-Donfut et
Martine Segalen une croissance et une fécondité
inégalées dans les autres pays francophones.
Depuis une vingtaine d’années, elles étudient un fait
démographique majeur, celui de l’allongement de la vie
et de la multiplication contemporaine des grandsparents, refusant de les laisser dans l’ombre.
Il y a près de 13 millions de grands-parents en France, on
ignore combien d’entre eux ont un petit enfant
gravement malade ou décédé.

Rôles et fonctions
Les
grands-parents
ont
des
fonctions
symboliques essentielles et exercent aussi un
rôle concret. Comme le dit M.F. Fuchs ce sont
des « relieurs » et des « transmetteurs » :
continuité familiale, inscription temporelle,
véhicules des valeurs familiales, garantie de
l’existence de l’histoire, témoignage de la mort
des générations plus âgées, légitimation du
parent auquel l’aïeul à passer le relais pour
devenir parent à son tour…

L’éternelle question de la « place »
• La récurrente question de la « bonne » place
est ainsi précisée par J-P Dommergues : « Le
rôle des grands-parents est d’être disponible
mais sans prendre la place des parents et en
sachant revenir au second plan quand les
parents sont présents. Ce jeu d’acteur de la
relation fait alterner un travail d’avant-scène
puis d’estompe en coulisse mais avec une
permanence affective qui garantit aux grandsparents de ne pas être des intermittents du
spectacle de la vie familiale… ».

• L’entreprise morale et normative
de
la
médecine
et
de
la
psychologie est ici perceptible, tant
le modelage spatial et relationnel
exigé
du
grand-parent
est
complexe
et
représente
probablement
un
défi
hors
d’atteinte.

Des dynamiques historiques
• Les processus politiques et sociaux que
sont la professionnalisation du soin, la
médicalisation, la technicisation et
l’institutionnalisation de la naissance et
de la mort, nous sont maintenant bien
connus
grâce
aux
travaux
des
historiens et des sociologues.

La disqualification des
savoirs familiaux


Il existe des tendances lourdes
qui caractérisent depuis la fin du
XIXe siècle, la disqualification puis
la mise à l’écart des savoirs
profanes sur la maladie et la mort
des enfants, et des soins familiaux
qui leur étaient afférents.

Une représentation de la
famille atomisée
De fait, les familles, longtemps tenues
éloignées des services de maternité et de
pédiatrie, trouvent depuis quelques
dizaines d’années, la possibilité d’y
entrer. Ce problème est structurel et
n’est pas lié à la seule volonté des
acteurs. Cette exclusion de la famille
élargie,
notamment,
est
une
caractéristique de notre médecine, à la
différence de celle d’autres pays.

Les parents de l’enfant sont les
interlocuteurs
privilégiés
et
souvent
uniques
des
professionnels, ce qui complique la
communication sur la santé du
bébé, entre parents et grandsparents.

Les liens « forts » n’excluent pas
les tensions et conflits
• Claudine Attias-Donfut et Martine Segalen qui
ont beaucoup travaillé sur les solidarités
familiales exercées par les grands-parents,
mettent aussi en lumière que ces liens
intenses sont tissés parfois de difficultés qui
vont de la tension passagère à la rancœur ou
au conflit. Elles rappellent que si les grandsparents, de par leur simple présence, offrent
un formidable socle identitaire à leurs petitsenfants, leurs relations n’échappent pas à la
complexité des liens interindividuels.

• Nous ne nions pas l’existence de
tels conflits au sein des familles,
dans le contexte de notre étude
qui donne la « part belle » aux
grands-parents, sans taire les
peines et les regrets qui teintent
de tristesse certains témoignages,
en cas de disputes.

Notre étude
«

Être le grand-parent d’un enfant
gravement malade aujourd’hui en
Suisse, au Québec et en France »
Réalisée en France grâce
l’association Soleil AFELT.

à

La population concernée
• Nombre de Grands-parents rencontrés:
France : 35, Québec : 24, Suisse : 21
• Petits-enfants décédés
France: 4, Québec : 6, Suisse : 2
• Âge des petits-enfants : 1 jour à 17 ans
• Pathologies concernées: cancers, maladies orphelines,
grande prématurité.
• Milieux sociaux, urbains / ruraux variés
• Soignants rencontrés médecins et professionnels
paramédicaux, sociaux, psychologues:
France : 18, Québec : 6, Suisse 5

Constats
Ils sont des aidants précieux pour
chacun, sur le chemin périlleux qui
suit le décès du bébé, mais des
aidants mal connus et peu
reconnus. L’aide qu’ils apportent
sera utile dans la traversée du
deuil de toute la famille.

Différences culturelles à l’hôpital dans l’accueil
des grands-parents

• Il apparaît que les différences sont plus marquées entre les
services hospitaliers parfois au sein du même hôpital, qu’entre
les pays.
• Quelques grandes tendances sociologiques cependant pour les
trois pays :
 Des grands-parents proches, en France, des deux
générations
plus jeunes.
 Un souci d’indépendance des enfants semblent plus
marqué en Suisse qu’en France.
 Des « figures » puissantes de grands-mères au Québec,
constituées historiquement comme telles, devant les
absences prolongées des hommes.

• Les soignants nous disent souvent que
grâce à cette enquête, et avant même
d’en connaître les résultats, ils ont été
plus attentifs aux grands-parents.

Mal connus, peu reconnus

• Les grands-parents sont encore trop souvent
les oubliés de la réflexion sur les proches de
l’enfant malade. Les associations aussi n’ont
pas toujours pensé à eux.
« On aurait aimé rencontrer quelqu’un, mais on ne savait pas
où taper... Je crois qu’on aurait aimé rencontrer des gens qui
ont vécu des grandes souffrances, pour pouvoir être
écoutés ». (GM)

Mal connus, peu reconnus
«

Y a des choses pour les parents, y a rien pour les
grands parents ! » (G-M)

« Parler à l’hôpital avec d’autres grands-parents, ça m’a
beaucoup aidé » (G-P)

• Quand on se soucie de les écouter, les grands-

parents ont en effet, beaucoup à dire.

Quelques uns des points récurrents dans
les témoignages des grands-parents

• Ils indiquent tous l’injustice de voir la
maladie grave et la mort frapper les plus
jeunes, quand la logique générationnelle
voudrait que ce soient eux qui soient victimes.
« Maman l’arrière grand-mère disait : « C’était
pas à Julie de partir, c’était à moi » (G-M)

Des grands-pères qui se
révèlent
• Apparemment moins présents, appartenant à des
générations peu loquaces, on retrouve des
grands-pères qui pleurent leur petit-enfant, qui
soutiennent leur fils ou leur fille de manière tout
aussi importante, plusieurs possédant de réels
savoir-être qui n’est pas souvent exprimé face aux
soignants.

La double souffrance
• Ils et elles disent tous combien leur statut
dans la famille les amène à souffrir « deux
fois », pour l’enfant et le petit-enfant.
« Finalement les grands-parents souffrent presque deux
fois : on souffre pour notre enfant et on souffre pour
notre petit enfant. Et voir sa fille souffrir, sa fille triste,
sa fille maigrir, c’est épouvantable. Et de la voir pas
toujours soutenue par son mari, j’ai trouvé que c’était
très difficile »(G-M)

L’intensité de leur deuil
« Nous croyons qu’il ne faut pas sous-estimer le rôle et la
douleur vécus par les grands-parents des familles
endeuillées. D’ailleurs, les expériences les plus appréciées
par les grands-parents au moment du décès étaient leur
inclusion dans les derniers moments où ils eurent la chance
de prendre leur petit-enfant dans leur bras avant de le
quitter, où ils étaient présents pendant les discussions avec
les médecins et infirmières ».
dans Le deuil des grands-parents.
Enquête par questionnaire postal auprès de 21 grands-parents
Sophie Lessard, M.D., Claude Cyr M.D.
Département de pédiatrie, Faculté de médecine et des sciences de la santé,
Université de Sherbrooke, Canada

Malgré l’intensité de leur peine, les
grands-parents apportent un soutien
d’ordre relationnel, affectif, matériel. Il
est aussi spirituel

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents

La garde des autres enfants
« J’ai pris ma retraite et pendant plusieurs
semaines, je me suis occupé des grandes
(sœurs) afin qu’elles ne se sentent pas
abandonnées » (GP)

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents
• La préparation des repas pour les parents du
bébé et ses frères et sœurs.

• Le maintien des fêtes familiales
« Les fêtes de famille on a toujours continué.
Mais, elles sont quand même très dures.... je
crois que, si on arrêtait, ce serait encore plus
dur... » (G-M)

Quelques éléments d’analyse

• Les grands-parents contribuent à la stabilité
intergénérationnelle tout au long de la vie
familiale.
• Beaucoup d’entre eux ont su organiser les
rituels funéraires, réunir une communauté
plus large que la seule famille, notamment
dans les villages. Ils rendent très souvent
visite à la sépulture
de l’enfant et
l’entretiennent en étant vigilants aux souhaits
des parents.

Les besoins des grands-parents
• Le besoin d’être considérés comme faisant partie de la
famille.
• Le besoin de sentir qu’ils ne dérangent pas.
• Le besoin de poser des questions et, pour certains
d’être seuls avec les soignants.
• Le besoin de pouvoir exprimer leurs inquiétudes et leur
peine.
• Le besoin d’un accueil chaleureux dans un moment
difficile.
 Peu de différences en matière de besoins des
grands-parents d’un pays à l’autre.

Conclusion
Grands-parents et arrières grands-parents ont toute leur
place dans la construction d’une mémoire générationnelle et
d’une vie familiale auxquelles les soignants et les parents
contribuent positivement quand ils favorisent la rencontre et
l’évocation , sans juger les places, les rôles, la distance
bonne ou mauvaise, mais en reconnaissant l’importance de
la filiation.
« Les grands-parents sont importants parce qu’ils
sont les parents des parents » F. Dolto


Slide 26

« Ce qu’éprouvent les grands-parents »

Catherine Le Grand-Sébille : Socio-anthropologue,
Maître de conférences, Faculté de médecine, Lille 2

Sociologie des Grands-Parents
La sociologie de la grand-parentalité a connu en France,
grâce aux deux sociologues Claudine Attias-Donfut et
Martine Segalen une croissance et une fécondité
inégalées dans les autres pays francophones.
Depuis une vingtaine d’années, elles étudient un fait
démographique majeur, celui de l’allongement de la vie
et de la multiplication contemporaine des grandsparents, refusant de les laisser dans l’ombre.
Il y a près de 13 millions de grands-parents en France, on
ignore combien d’entre eux ont un petit enfant
gravement malade ou décédé.

Rôles et fonctions
Les
grands-parents
ont
des
fonctions
symboliques essentielles et exercent aussi un
rôle concret. Comme le dit M.F. Fuchs ce sont
des « relieurs » et des « transmetteurs » :
continuité familiale, inscription temporelle,
véhicules des valeurs familiales, garantie de
l’existence de l’histoire, témoignage de la mort
des générations plus âgées, légitimation du
parent auquel l’aïeul à passer le relais pour
devenir parent à son tour…

L’éternelle question de la « place »
• La récurrente question de la « bonne » place
est ainsi précisée par J-P Dommergues : « Le
rôle des grands-parents est d’être disponible
mais sans prendre la place des parents et en
sachant revenir au second plan quand les
parents sont présents. Ce jeu d’acteur de la
relation fait alterner un travail d’avant-scène
puis d’estompe en coulisse mais avec une
permanence affective qui garantit aux grandsparents de ne pas être des intermittents du
spectacle de la vie familiale… ».

• L’entreprise morale et normative
de
la
médecine
et
de
la
psychologie est ici perceptible, tant
le modelage spatial et relationnel
exigé
du
grand-parent
est
complexe
et
représente
probablement
un
défi
hors
d’atteinte.

Des dynamiques historiques
• Les processus politiques et sociaux que
sont la professionnalisation du soin, la
médicalisation, la technicisation et
l’institutionnalisation de la naissance et
de la mort, nous sont maintenant bien
connus
grâce
aux
travaux
des
historiens et des sociologues.

La disqualification des
savoirs familiaux


Il existe des tendances lourdes
qui caractérisent depuis la fin du
XIXe siècle, la disqualification puis
la mise à l’écart des savoirs
profanes sur la maladie et la mort
des enfants, et des soins familiaux
qui leur étaient afférents.

Une représentation de la
famille atomisée
De fait, les familles, longtemps tenues
éloignées des services de maternité et de
pédiatrie, trouvent depuis quelques
dizaines d’années, la possibilité d’y
entrer. Ce problème est structurel et
n’est pas lié à la seule volonté des
acteurs. Cette exclusion de la famille
élargie,
notamment,
est
une
caractéristique de notre médecine, à la
différence de celle d’autres pays.

Les parents de l’enfant sont les
interlocuteurs
privilégiés
et
souvent
uniques
des
professionnels, ce qui complique la
communication sur la santé du
bébé, entre parents et grandsparents.

Les liens « forts » n’excluent pas
les tensions et conflits
• Claudine Attias-Donfut et Martine Segalen qui
ont beaucoup travaillé sur les solidarités
familiales exercées par les grands-parents,
mettent aussi en lumière que ces liens
intenses sont tissés parfois de difficultés qui
vont de la tension passagère à la rancœur ou
au conflit. Elles rappellent que si les grandsparents, de par leur simple présence, offrent
un formidable socle identitaire à leurs petitsenfants, leurs relations n’échappent pas à la
complexité des liens interindividuels.

• Nous ne nions pas l’existence de
tels conflits au sein des familles,
dans le contexte de notre étude
qui donne la « part belle » aux
grands-parents, sans taire les
peines et les regrets qui teintent
de tristesse certains témoignages,
en cas de disputes.

Notre étude
«

Être le grand-parent d’un enfant
gravement malade aujourd’hui en
Suisse, au Québec et en France »
Réalisée en France grâce
l’association Soleil AFELT.

à

La population concernée
• Nombre de Grands-parents rencontrés:
France : 35, Québec : 24, Suisse : 21
• Petits-enfants décédés
France: 4, Québec : 6, Suisse : 2
• Âge des petits-enfants : 1 jour à 17 ans
• Pathologies concernées: cancers, maladies orphelines,
grande prématurité.
• Milieux sociaux, urbains / ruraux variés
• Soignants rencontrés médecins et professionnels
paramédicaux, sociaux, psychologues:
France : 18, Québec : 6, Suisse 5

Constats
Ils sont des aidants précieux pour
chacun, sur le chemin périlleux qui
suit le décès du bébé, mais des
aidants mal connus et peu
reconnus. L’aide qu’ils apportent
sera utile dans la traversée du
deuil de toute la famille.

Différences culturelles à l’hôpital dans l’accueil
des grands-parents

• Il apparaît que les différences sont plus marquées entre les
services hospitaliers parfois au sein du même hôpital, qu’entre
les pays.
• Quelques grandes tendances sociologiques cependant pour les
trois pays :
 Des grands-parents proches, en France, des deux
générations
plus jeunes.
 Un souci d’indépendance des enfants semblent plus
marqué en Suisse qu’en France.
 Des « figures » puissantes de grands-mères au Québec,
constituées historiquement comme telles, devant les
absences prolongées des hommes.

• Les soignants nous disent souvent que
grâce à cette enquête, et avant même
d’en connaître les résultats, ils ont été
plus attentifs aux grands-parents.

Mal connus, peu reconnus

• Les grands-parents sont encore trop souvent
les oubliés de la réflexion sur les proches de
l’enfant malade. Les associations aussi n’ont
pas toujours pensé à eux.
« On aurait aimé rencontrer quelqu’un, mais on ne savait pas
où taper... Je crois qu’on aurait aimé rencontrer des gens qui
ont vécu des grandes souffrances, pour pouvoir être
écoutés ». (GM)

Mal connus, peu reconnus
«

Y a des choses pour les parents, y a rien pour les
grands parents ! » (G-M)

« Parler à l’hôpital avec d’autres grands-parents, ça m’a
beaucoup aidé » (G-P)

• Quand on se soucie de les écouter, les grands-

parents ont en effet, beaucoup à dire.

Quelques uns des points récurrents dans
les témoignages des grands-parents

• Ils indiquent tous l’injustice de voir la
maladie grave et la mort frapper les plus
jeunes, quand la logique générationnelle
voudrait que ce soient eux qui soient victimes.
« Maman l’arrière grand-mère disait : « C’était
pas à Julie de partir, c’était à moi » (G-M)

Des grands-pères qui se
révèlent
• Apparemment moins présents, appartenant à des
générations peu loquaces, on retrouve des
grands-pères qui pleurent leur petit-enfant, qui
soutiennent leur fils ou leur fille de manière tout
aussi importante, plusieurs possédant de réels
savoir-être qui n’est pas souvent exprimé face aux
soignants.

La double souffrance
• Ils et elles disent tous combien leur statut
dans la famille les amène à souffrir « deux
fois », pour l’enfant et le petit-enfant.
« Finalement les grands-parents souffrent presque deux
fois : on souffre pour notre enfant et on souffre pour
notre petit enfant. Et voir sa fille souffrir, sa fille triste,
sa fille maigrir, c’est épouvantable. Et de la voir pas
toujours soutenue par son mari, j’ai trouvé que c’était
très difficile »(G-M)

L’intensité de leur deuil
« Nous croyons qu’il ne faut pas sous-estimer le rôle et la
douleur vécus par les grands-parents des familles
endeuillées. D’ailleurs, les expériences les plus appréciées
par les grands-parents au moment du décès étaient leur
inclusion dans les derniers moments où ils eurent la chance
de prendre leur petit-enfant dans leur bras avant de le
quitter, où ils étaient présents pendant les discussions avec
les médecins et infirmières ».
dans Le deuil des grands-parents.
Enquête par questionnaire postal auprès de 21 grands-parents
Sophie Lessard, M.D., Claude Cyr M.D.
Département de pédiatrie, Faculté de médecine et des sciences de la santé,
Université de Sherbrooke, Canada

Malgré l’intensité de leur peine, les
grands-parents apportent un soutien
d’ordre relationnel, affectif, matériel. Il
est aussi spirituel

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents

La garde des autres enfants
« J’ai pris ma retraite et pendant plusieurs
semaines, je me suis occupé des grandes
(sœurs) afin qu’elles ne se sentent pas
abandonnées » (GP)

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents
• La préparation des repas pour les parents du
bébé et ses frères et sœurs.

• Le maintien des fêtes familiales
« Les fêtes de famille on a toujours continué.
Mais, elles sont quand même très dures.... je
crois que, si on arrêtait, ce serait encore plus
dur... » (G-M)

Quelques éléments d’analyse

• Les grands-parents contribuent à la stabilité
intergénérationnelle tout au long de la vie
familiale.
• Beaucoup d’entre eux ont su organiser les
rituels funéraires, réunir une communauté
plus large que la seule famille, notamment
dans les villages. Ils rendent très souvent
visite à la sépulture
de l’enfant et
l’entretiennent en étant vigilants aux souhaits
des parents.

Les besoins des grands-parents
• Le besoin d’être considérés comme faisant partie de la
famille.
• Le besoin de sentir qu’ils ne dérangent pas.
• Le besoin de poser des questions et, pour certains
d’être seuls avec les soignants.
• Le besoin de pouvoir exprimer leurs inquiétudes et leur
peine.
• Le besoin d’un accueil chaleureux dans un moment
difficile.
 Peu de différences en matière de besoins des
grands-parents d’un pays à l’autre.

Conclusion
Grands-parents et arrières grands-parents ont toute leur
place dans la construction d’une mémoire générationnelle et
d’une vie familiale auxquelles les soignants et les parents
contribuent positivement quand ils favorisent la rencontre et
l’évocation , sans juger les places, les rôles, la distance
bonne ou mauvaise, mais en reconnaissant l’importance de
la filiation.
« Les grands-parents sont importants parce qu’ils
sont les parents des parents » F. Dolto


Slide 27

« Ce qu’éprouvent les grands-parents »

Catherine Le Grand-Sébille : Socio-anthropologue,
Maître de conférences, Faculté de médecine, Lille 2

Sociologie des Grands-Parents
La sociologie de la grand-parentalité a connu en France,
grâce aux deux sociologues Claudine Attias-Donfut et
Martine Segalen une croissance et une fécondité
inégalées dans les autres pays francophones.
Depuis une vingtaine d’années, elles étudient un fait
démographique majeur, celui de l’allongement de la vie
et de la multiplication contemporaine des grandsparents, refusant de les laisser dans l’ombre.
Il y a près de 13 millions de grands-parents en France, on
ignore combien d’entre eux ont un petit enfant
gravement malade ou décédé.

Rôles et fonctions
Les
grands-parents
ont
des
fonctions
symboliques essentielles et exercent aussi un
rôle concret. Comme le dit M.F. Fuchs ce sont
des « relieurs » et des « transmetteurs » :
continuité familiale, inscription temporelle,
véhicules des valeurs familiales, garantie de
l’existence de l’histoire, témoignage de la mort
des générations plus âgées, légitimation du
parent auquel l’aïeul à passer le relais pour
devenir parent à son tour…

L’éternelle question de la « place »
• La récurrente question de la « bonne » place
est ainsi précisée par J-P Dommergues : « Le
rôle des grands-parents est d’être disponible
mais sans prendre la place des parents et en
sachant revenir au second plan quand les
parents sont présents. Ce jeu d’acteur de la
relation fait alterner un travail d’avant-scène
puis d’estompe en coulisse mais avec une
permanence affective qui garantit aux grandsparents de ne pas être des intermittents du
spectacle de la vie familiale… ».

• L’entreprise morale et normative
de
la
médecine
et
de
la
psychologie est ici perceptible, tant
le modelage spatial et relationnel
exigé
du
grand-parent
est
complexe
et
représente
probablement
un
défi
hors
d’atteinte.

Des dynamiques historiques
• Les processus politiques et sociaux que
sont la professionnalisation du soin, la
médicalisation, la technicisation et
l’institutionnalisation de la naissance et
de la mort, nous sont maintenant bien
connus
grâce
aux
travaux
des
historiens et des sociologues.

La disqualification des
savoirs familiaux


Il existe des tendances lourdes
qui caractérisent depuis la fin du
XIXe siècle, la disqualification puis
la mise à l’écart des savoirs
profanes sur la maladie et la mort
des enfants, et des soins familiaux
qui leur étaient afférents.

Une représentation de la
famille atomisée
De fait, les familles, longtemps tenues
éloignées des services de maternité et de
pédiatrie, trouvent depuis quelques
dizaines d’années, la possibilité d’y
entrer. Ce problème est structurel et
n’est pas lié à la seule volonté des
acteurs. Cette exclusion de la famille
élargie,
notamment,
est
une
caractéristique de notre médecine, à la
différence de celle d’autres pays.

Les parents de l’enfant sont les
interlocuteurs
privilégiés
et
souvent
uniques
des
professionnels, ce qui complique la
communication sur la santé du
bébé, entre parents et grandsparents.

Les liens « forts » n’excluent pas
les tensions et conflits
• Claudine Attias-Donfut et Martine Segalen qui
ont beaucoup travaillé sur les solidarités
familiales exercées par les grands-parents,
mettent aussi en lumière que ces liens
intenses sont tissés parfois de difficultés qui
vont de la tension passagère à la rancœur ou
au conflit. Elles rappellent que si les grandsparents, de par leur simple présence, offrent
un formidable socle identitaire à leurs petitsenfants, leurs relations n’échappent pas à la
complexité des liens interindividuels.

• Nous ne nions pas l’existence de
tels conflits au sein des familles,
dans le contexte de notre étude
qui donne la « part belle » aux
grands-parents, sans taire les
peines et les regrets qui teintent
de tristesse certains témoignages,
en cas de disputes.

Notre étude
«

Être le grand-parent d’un enfant
gravement malade aujourd’hui en
Suisse, au Québec et en France »
Réalisée en France grâce
l’association Soleil AFELT.

à

La population concernée
• Nombre de Grands-parents rencontrés:
France : 35, Québec : 24, Suisse : 21
• Petits-enfants décédés
France: 4, Québec : 6, Suisse : 2
• Âge des petits-enfants : 1 jour à 17 ans
• Pathologies concernées: cancers, maladies orphelines,
grande prématurité.
• Milieux sociaux, urbains / ruraux variés
• Soignants rencontrés médecins et professionnels
paramédicaux, sociaux, psychologues:
France : 18, Québec : 6, Suisse 5

Constats
Ils sont des aidants précieux pour
chacun, sur le chemin périlleux qui
suit le décès du bébé, mais des
aidants mal connus et peu
reconnus. L’aide qu’ils apportent
sera utile dans la traversée du
deuil de toute la famille.

Différences culturelles à l’hôpital dans l’accueil
des grands-parents

• Il apparaît que les différences sont plus marquées entre les
services hospitaliers parfois au sein du même hôpital, qu’entre
les pays.
• Quelques grandes tendances sociologiques cependant pour les
trois pays :
 Des grands-parents proches, en France, des deux
générations
plus jeunes.
 Un souci d’indépendance des enfants semblent plus
marqué en Suisse qu’en France.
 Des « figures » puissantes de grands-mères au Québec,
constituées historiquement comme telles, devant les
absences prolongées des hommes.

• Les soignants nous disent souvent que
grâce à cette enquête, et avant même
d’en connaître les résultats, ils ont été
plus attentifs aux grands-parents.

Mal connus, peu reconnus

• Les grands-parents sont encore trop souvent
les oubliés de la réflexion sur les proches de
l’enfant malade. Les associations aussi n’ont
pas toujours pensé à eux.
« On aurait aimé rencontrer quelqu’un, mais on ne savait pas
où taper... Je crois qu’on aurait aimé rencontrer des gens qui
ont vécu des grandes souffrances, pour pouvoir être
écoutés ». (GM)

Mal connus, peu reconnus
«

Y a des choses pour les parents, y a rien pour les
grands parents ! » (G-M)

« Parler à l’hôpital avec d’autres grands-parents, ça m’a
beaucoup aidé » (G-P)

• Quand on se soucie de les écouter, les grands-

parents ont en effet, beaucoup à dire.

Quelques uns des points récurrents dans
les témoignages des grands-parents

• Ils indiquent tous l’injustice de voir la
maladie grave et la mort frapper les plus
jeunes, quand la logique générationnelle
voudrait que ce soient eux qui soient victimes.
« Maman l’arrière grand-mère disait : « C’était
pas à Julie de partir, c’était à moi » (G-M)

Des grands-pères qui se
révèlent
• Apparemment moins présents, appartenant à des
générations peu loquaces, on retrouve des
grands-pères qui pleurent leur petit-enfant, qui
soutiennent leur fils ou leur fille de manière tout
aussi importante, plusieurs possédant de réels
savoir-être qui n’est pas souvent exprimé face aux
soignants.

La double souffrance
• Ils et elles disent tous combien leur statut
dans la famille les amène à souffrir « deux
fois », pour l’enfant et le petit-enfant.
« Finalement les grands-parents souffrent presque deux
fois : on souffre pour notre enfant et on souffre pour
notre petit enfant. Et voir sa fille souffrir, sa fille triste,
sa fille maigrir, c’est épouvantable. Et de la voir pas
toujours soutenue par son mari, j’ai trouvé que c’était
très difficile »(G-M)

L’intensité de leur deuil
« Nous croyons qu’il ne faut pas sous-estimer le rôle et la
douleur vécus par les grands-parents des familles
endeuillées. D’ailleurs, les expériences les plus appréciées
par les grands-parents au moment du décès étaient leur
inclusion dans les derniers moments où ils eurent la chance
de prendre leur petit-enfant dans leur bras avant de le
quitter, où ils étaient présents pendant les discussions avec
les médecins et infirmières ».
dans Le deuil des grands-parents.
Enquête par questionnaire postal auprès de 21 grands-parents
Sophie Lessard, M.D., Claude Cyr M.D.
Département de pédiatrie, Faculté de médecine et des sciences de la santé,
Université de Sherbrooke, Canada

Malgré l’intensité de leur peine, les
grands-parents apportent un soutien
d’ordre relationnel, affectif, matériel. Il
est aussi spirituel

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents

La garde des autres enfants
« J’ai pris ma retraite et pendant plusieurs
semaines, je me suis occupé des grandes
(sœurs) afin qu’elles ne se sentent pas
abandonnées » (GP)

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents
• La préparation des repas pour les parents du
bébé et ses frères et sœurs.

• Le maintien des fêtes familiales
« Les fêtes de famille on a toujours continué.
Mais, elles sont quand même très dures.... je
crois que, si on arrêtait, ce serait encore plus
dur... » (G-M)

Quelques éléments d’analyse

• Les grands-parents contribuent à la stabilité
intergénérationnelle tout au long de la vie
familiale.
• Beaucoup d’entre eux ont su organiser les
rituels funéraires, réunir une communauté
plus large que la seule famille, notamment
dans les villages. Ils rendent très souvent
visite à la sépulture
de l’enfant et
l’entretiennent en étant vigilants aux souhaits
des parents.

Les besoins des grands-parents
• Le besoin d’être considérés comme faisant partie de la
famille.
• Le besoin de sentir qu’ils ne dérangent pas.
• Le besoin de poser des questions et, pour certains
d’être seuls avec les soignants.
• Le besoin de pouvoir exprimer leurs inquiétudes et leur
peine.
• Le besoin d’un accueil chaleureux dans un moment
difficile.
 Peu de différences en matière de besoins des
grands-parents d’un pays à l’autre.

Conclusion
Grands-parents et arrières grands-parents ont toute leur
place dans la construction d’une mémoire générationnelle et
d’une vie familiale auxquelles les soignants et les parents
contribuent positivement quand ils favorisent la rencontre et
l’évocation , sans juger les places, les rôles, la distance
bonne ou mauvaise, mais en reconnaissant l’importance de
la filiation.
« Les grands-parents sont importants parce qu’ils
sont les parents des parents » F. Dolto


Slide 28

« Ce qu’éprouvent les grands-parents »

Catherine Le Grand-Sébille : Socio-anthropologue,
Maître de conférences, Faculté de médecine, Lille 2

Sociologie des Grands-Parents
La sociologie de la grand-parentalité a connu en France,
grâce aux deux sociologues Claudine Attias-Donfut et
Martine Segalen une croissance et une fécondité
inégalées dans les autres pays francophones.
Depuis une vingtaine d’années, elles étudient un fait
démographique majeur, celui de l’allongement de la vie
et de la multiplication contemporaine des grandsparents, refusant de les laisser dans l’ombre.
Il y a près de 13 millions de grands-parents en France, on
ignore combien d’entre eux ont un petit enfant
gravement malade ou décédé.

Rôles et fonctions
Les
grands-parents
ont
des
fonctions
symboliques essentielles et exercent aussi un
rôle concret. Comme le dit M.F. Fuchs ce sont
des « relieurs » et des « transmetteurs » :
continuité familiale, inscription temporelle,
véhicules des valeurs familiales, garantie de
l’existence de l’histoire, témoignage de la mort
des générations plus âgées, légitimation du
parent auquel l’aïeul à passer le relais pour
devenir parent à son tour…

L’éternelle question de la « place »
• La récurrente question de la « bonne » place
est ainsi précisée par J-P Dommergues : « Le
rôle des grands-parents est d’être disponible
mais sans prendre la place des parents et en
sachant revenir au second plan quand les
parents sont présents. Ce jeu d’acteur de la
relation fait alterner un travail d’avant-scène
puis d’estompe en coulisse mais avec une
permanence affective qui garantit aux grandsparents de ne pas être des intermittents du
spectacle de la vie familiale… ».

• L’entreprise morale et normative
de
la
médecine
et
de
la
psychologie est ici perceptible, tant
le modelage spatial et relationnel
exigé
du
grand-parent
est
complexe
et
représente
probablement
un
défi
hors
d’atteinte.

Des dynamiques historiques
• Les processus politiques et sociaux que
sont la professionnalisation du soin, la
médicalisation, la technicisation et
l’institutionnalisation de la naissance et
de la mort, nous sont maintenant bien
connus
grâce
aux
travaux
des
historiens et des sociologues.

La disqualification des
savoirs familiaux


Il existe des tendances lourdes
qui caractérisent depuis la fin du
XIXe siècle, la disqualification puis
la mise à l’écart des savoirs
profanes sur la maladie et la mort
des enfants, et des soins familiaux
qui leur étaient afférents.

Une représentation de la
famille atomisée
De fait, les familles, longtemps tenues
éloignées des services de maternité et de
pédiatrie, trouvent depuis quelques
dizaines d’années, la possibilité d’y
entrer. Ce problème est structurel et
n’est pas lié à la seule volonté des
acteurs. Cette exclusion de la famille
élargie,
notamment,
est
une
caractéristique de notre médecine, à la
différence de celle d’autres pays.

Les parents de l’enfant sont les
interlocuteurs
privilégiés
et
souvent
uniques
des
professionnels, ce qui complique la
communication sur la santé du
bébé, entre parents et grandsparents.

Les liens « forts » n’excluent pas
les tensions et conflits
• Claudine Attias-Donfut et Martine Segalen qui
ont beaucoup travaillé sur les solidarités
familiales exercées par les grands-parents,
mettent aussi en lumière que ces liens
intenses sont tissés parfois de difficultés qui
vont de la tension passagère à la rancœur ou
au conflit. Elles rappellent que si les grandsparents, de par leur simple présence, offrent
un formidable socle identitaire à leurs petitsenfants, leurs relations n’échappent pas à la
complexité des liens interindividuels.

• Nous ne nions pas l’existence de
tels conflits au sein des familles,
dans le contexte de notre étude
qui donne la « part belle » aux
grands-parents, sans taire les
peines et les regrets qui teintent
de tristesse certains témoignages,
en cas de disputes.

Notre étude
«

Être le grand-parent d’un enfant
gravement malade aujourd’hui en
Suisse, au Québec et en France »
Réalisée en France grâce
l’association Soleil AFELT.

à

La population concernée
• Nombre de Grands-parents rencontrés:
France : 35, Québec : 24, Suisse : 21
• Petits-enfants décédés
France: 4, Québec : 6, Suisse : 2
• Âge des petits-enfants : 1 jour à 17 ans
• Pathologies concernées: cancers, maladies orphelines,
grande prématurité.
• Milieux sociaux, urbains / ruraux variés
• Soignants rencontrés médecins et professionnels
paramédicaux, sociaux, psychologues:
France : 18, Québec : 6, Suisse 5

Constats
Ils sont des aidants précieux pour
chacun, sur le chemin périlleux qui
suit le décès du bébé, mais des
aidants mal connus et peu
reconnus. L’aide qu’ils apportent
sera utile dans la traversée du
deuil de toute la famille.

Différences culturelles à l’hôpital dans l’accueil
des grands-parents

• Il apparaît que les différences sont plus marquées entre les
services hospitaliers parfois au sein du même hôpital, qu’entre
les pays.
• Quelques grandes tendances sociologiques cependant pour les
trois pays :
 Des grands-parents proches, en France, des deux
générations
plus jeunes.
 Un souci d’indépendance des enfants semblent plus
marqué en Suisse qu’en France.
 Des « figures » puissantes de grands-mères au Québec,
constituées historiquement comme telles, devant les
absences prolongées des hommes.

• Les soignants nous disent souvent que
grâce à cette enquête, et avant même
d’en connaître les résultats, ils ont été
plus attentifs aux grands-parents.

Mal connus, peu reconnus

• Les grands-parents sont encore trop souvent
les oubliés de la réflexion sur les proches de
l’enfant malade. Les associations aussi n’ont
pas toujours pensé à eux.
« On aurait aimé rencontrer quelqu’un, mais on ne savait pas
où taper... Je crois qu’on aurait aimé rencontrer des gens qui
ont vécu des grandes souffrances, pour pouvoir être
écoutés ». (GM)

Mal connus, peu reconnus
«

Y a des choses pour les parents, y a rien pour les
grands parents ! » (G-M)

« Parler à l’hôpital avec d’autres grands-parents, ça m’a
beaucoup aidé » (G-P)

• Quand on se soucie de les écouter, les grands-

parents ont en effet, beaucoup à dire.

Quelques uns des points récurrents dans
les témoignages des grands-parents

• Ils indiquent tous l’injustice de voir la
maladie grave et la mort frapper les plus
jeunes, quand la logique générationnelle
voudrait que ce soient eux qui soient victimes.
« Maman l’arrière grand-mère disait : « C’était
pas à Julie de partir, c’était à moi » (G-M)

Des grands-pères qui se
révèlent
• Apparemment moins présents, appartenant à des
générations peu loquaces, on retrouve des
grands-pères qui pleurent leur petit-enfant, qui
soutiennent leur fils ou leur fille de manière tout
aussi importante, plusieurs possédant de réels
savoir-être qui n’est pas souvent exprimé face aux
soignants.

La double souffrance
• Ils et elles disent tous combien leur statut
dans la famille les amène à souffrir « deux
fois », pour l’enfant et le petit-enfant.
« Finalement les grands-parents souffrent presque deux
fois : on souffre pour notre enfant et on souffre pour
notre petit enfant. Et voir sa fille souffrir, sa fille triste,
sa fille maigrir, c’est épouvantable. Et de la voir pas
toujours soutenue par son mari, j’ai trouvé que c’était
très difficile »(G-M)

L’intensité de leur deuil
« Nous croyons qu’il ne faut pas sous-estimer le rôle et la
douleur vécus par les grands-parents des familles
endeuillées. D’ailleurs, les expériences les plus appréciées
par les grands-parents au moment du décès étaient leur
inclusion dans les derniers moments où ils eurent la chance
de prendre leur petit-enfant dans leur bras avant de le
quitter, où ils étaient présents pendant les discussions avec
les médecins et infirmières ».
dans Le deuil des grands-parents.
Enquête par questionnaire postal auprès de 21 grands-parents
Sophie Lessard, M.D., Claude Cyr M.D.
Département de pédiatrie, Faculté de médecine et des sciences de la santé,
Université de Sherbrooke, Canada

Malgré l’intensité de leur peine, les
grands-parents apportent un soutien
d’ordre relationnel, affectif, matériel. Il
est aussi spirituel

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents

La garde des autres enfants
« J’ai pris ma retraite et pendant plusieurs
semaines, je me suis occupé des grandes
(sœurs) afin qu’elles ne se sentent pas
abandonnées » (GP)

Les multiples soutiens qu’apportent
les grands-parents
• La préparation des repas pour les parents du
bébé et ses frères et sœurs.

• Le maintien des fêtes familiales
« Les fêtes de famille on a toujours continué.
Mais, elles sont quand même très dures.... je
crois que, si on arrêtait, ce serait encore plus
dur... » (G-M)

Quelques éléments d’analyse

• Les grands-parents contribuent à la stabilité
intergénérationnelle tout au long de la vie
familiale.
• Beaucoup d’entre eux ont su organiser les
rituels funéraires, réunir une communauté
plus large que la seule famille, notamment
dans les villages. Ils rendent très souvent
visite à la sépulture
de l’enfant et
l’entretiennent en étant vigilants aux souhaits
des parents.

Les besoins des grands-parents
• Le besoin d’être considérés comme faisant partie de la
famille.
• Le besoin de sentir qu’ils ne dérangent pas.
• Le besoin de poser des questions et, pour certains
d’être seuls avec les soignants.
• Le besoin de pouvoir exprimer leurs inquiétudes et leur
peine.
• Le besoin d’un accueil chaleureux dans un moment
difficile.
 Peu de différences en matière de besoins des
grands-parents d’un pays à l’autre.

Conclusion
Grands-parents et arrières grands-parents ont toute leur
place dans la construction d’une mémoire générationnelle et
d’une vie familiale auxquelles les soignants et les parents
contribuent positivement quand ils favorisent la rencontre et
l’évocation , sans juger les places, les rôles, la distance
bonne ou mauvaise, mais en reconnaissant l’importance de
la filiation.
« Les grands-parents sont importants parce qu’ils
sont les parents des parents » F. Dolto