Περὶ τοῦ ὀρνιθίου Traité du poulet La scène : Un poulet au bord d'une route.
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Transcript Περὶ τοῦ ὀρνιθίου Traité du poulet La scène : Un poulet au bord d'une route.
Περὶ τοῦ ὀρνιθίου
Traité du
poulet
La scène :
Un poulet au bord d'une route. Il la traverse.
La question :
Pourquoi le poulet a-t-il traversé la route ?
Réponses antiques.
LE SPHINX
À toi de le dire.
HOMÈRE (VIIIe siècle)
Divin poulet, toi l’étranger, qui donc es-tu ?
Quel pays as-tu quitté pour venir sur nos bords ?
Qui t'a donné le jour ? Prends garde à ne pas déguiser la vérité.
Si tu me parais mériter mon affection, je te conduirai
dans ma demeure et te ferai les présents de l'hospitalité.
Je suis le roi de ces terres ; et j'y suis honoré comme tel,
car j'ai fait construire et cette route et d’autres nombreuses.
Ta beauté, ton air courageux, me font connaître
que tu es fort au-dessus de ceux de ton espèce.
Tu es sans doute un grand roi décoré du sceptre
ou un habile guerrier de basse-cour.
Mais, de grâce, ne diffère plus à me faire connaître ton origine.
SAPPHO (630-580)
Pour le goût de tes lèvres, la douceur de ta peau...
ANAXIMANDRE (610-546)
Il a traversé la route
conformément à la nature de l’univers, illimité,
et parce que ce dernier est muable en ses parties.
PYTHAGORE (580-495)
Il a traversé la route
parce que la traverse est la ligne la plus courte
reliant un point à un autre.
HÉRACLITE (544-480)
Le poulet ne traverse jamais deux fois la même route.
PARMÉNIDE (540-450)
Il traverse : telle est l’apparence ; mais fie-toi à la raison,
et ne te dit-elle pas que l’un et l’autre côtés de la route
sont identiques, la terre étant ronde ?
PÉRICLÈS (495-429)
Il court là un grand danger ; c’est le signe divin
qu’il nous faut reconstruire les Longs Murs.
PROTAGORAS (490-420)
Moyennant quelques drachmes,
je vous révélerai ma profonde pensée :
l'homme est la mesure du poulet,
de son mouvement et de son repos.
HÉRODOTE (484-420)
Les Égyptiens représentaient qu’un poulet traversant
une route était signe de sa maturité et de sa fécondité
future, avec une assurance aussi grande que celle avec
laquelle le coq, qu’on donne chez nous pour attribut à
Arès et à Héraklès, et dont on voit l'œil et la crête
dessinés en petits signes sur les monuments sacrés, était
vu par eux comme symbole de la vigilance.
ZÉNON D'ÉLÉE (480-420)
Pour rattraper la tortue, mais ni elle ni lui
ne pourront jamais atteindre l'autre côté.
SOCRATE (470-399)
Criton, nous sommes redevables d'un coq à Asclépios !
(Phédon 118a)
SOCRATE (bis)
L'espèce volatile est seule à partager avec
l'espèce humaine le lot d'avoir deux pieds.
(Le Politique 266e)
SOCRATE (ter)
Tu dis que le poulet a traversé la route, mais qu'entends-tu au juste par poulet ? Et qu'est-ce qu'une
route ? Est-il seulement possible de la traverser ? J'avoue ma perplexité, mais je suis sûr que tu
m'éclaireras, toi qui sais tout du gallinacé, alors que je sais seulement que je ne sais rien de cette
volaille, ni d'ailleurs du canard, de l'ibis et de tout ce qui porte plume, poil, écaille ou quelque
apparence que ce soit. Mais par le chien, j'y songe ! Si le poulet ne fait pas de secret pour toi, t'y
connais-tu seulement en fait de voies, routes et chemins ? J'aperçois Théodromon qui revient de la
palestre. Il est expert ès infrastructures — c'est du moins ce qu'on prétend... Heureux présage : les
dieux nous l'envoient. Sans doute veulent-ils que nous débattions de ce poulet qui, je te l'avoue,
dépasse mon entendement. N'est-ce pas le moment opportun d'en parler ?
CRITON
Assurément, Socrate.
HERMOGÈNE
Les dieux parlent par ta bouche.
CRITOBULE
Vraiment, tu es inspiré.
ALCIBIADE
Comment ne pas t'approuver, cher maître ?
PHÉDON
Tu sais que je te suivrai jusqu'au bout, Socrate !
Trois heures plus tard…
[…] Amis de la sagesse et sages amis, nous n'avons pas résolu l'aporie du poulet, tant s'en faut : il
faudrait être téméraire pour prétendre le contraire. Reste qu'à l'imprévu et aux poulets, les dieux
livrent passage et que ce n'est pas en vain que nous avons dialogué. Si nous ne savons toujours pas
ce qui a conduit ce gallinacé à se prendre pour Hermès, vivant dieu des voyageurs et des voleurs,
nous avons progressé tant l'esprit se bonifie par la philosophie, la pensée avec autrui qu'est le
dialogue et le dialogue avec soi-même qu'est la pensée. Ne savons-nous pas enfin ce que sont un
poulet, une route, et dans quelle mesure l'un, plumé ou déplumé, peut traverser l'autre, avec ou
sans obstacle, et ceci, sans voler mais en s'appuyant sur ses seuls ergots, par lesquels sa bipédie se
distingue spécifiquement de l'humain — même s'il subsiste entre nous d'importantes divergences
sur la nature du poulet en soi et de son mouvement... Ce n'est pas là une mince avancée !
Retrouvons-nous demain pour en dialoguer.
XANTHIPPE (430-?)
Socrate, si toi et ton poulet,
vous vous obstinez à passer route et nuit
dehors, tu verras demain
de quel bois je me chauffe !
THUCYDIDE (460-400)
La raison en était moins la pénurie de poules que le manque de ressources. En
effet, c'est par suite de la disette de ravitaillement que les poulets emmenèrent une
armée peu considérable et qui ne comportait que les troupes qu'ils pouvaient
entretenir en combattant, même quand arrivés là-bas ils furent victorieux. Car il
est évident qu'ils le furent ; autrement ils n'auraient pu traverser les routes à
découvert et en petits effectifs, parfois réduits à l’unité. Mais ils paraissent n'avoir
pas utilisé toutes leurs forces et s'être adonnés, faute de vivres, au brigandage.
Comme ils étaient dispersés, les autres volatiles leur résistèrent d'autant mieux
pendant dix ans et purent tenir tête à la partie de la basse-cour qu'on laissait à tour
de rôle pour faire le siège. S'ils eussent disposé d'un ravitaillement abondant, s'ils
eussent pu rester groupés et mener sans arrêt la guerre, sans s'adonner au
brigandage, ils auraient pu facilement être victorieux dans le combat, puisqu'ils
n'opposaient aux adversaires que les troupes présentes dans les fermes. En
choisissant de traverser les routes pour chercher leurs graines, ils formèrent au
contraire des expéditions, en réalité inférieures à ce qu'on en a dit et à la
renommée qui leur a été faite par les poètes.
HIPPOCRATE (460-370)
À cause d'un excès de sécrétion de son pancréas.
ARISTOPHANE (445-385)
Euelpidès
Pourquoi, malheureux, sautillé-je de haut en bas ?
Je me tue à chercher ainsi mon chemin de côté et d'autre.
Je me suis fié, pour mon malheur, à cette corneille,
Qui m'a fait parcourir deux mille stades de chemin.
N'est-il pas juste, assurément, que, avec mon désir d'aller aux corbeaux
Et mes préparatifs achevés, je trouve enfin la route ?
En effet, ô vous, hommes qui assistez à cet entretien,
Moi qui suis d'une tribu et d'une famille honorables,
Citoyen comme mes concitoyens, sans en être chassé par personne,
Je prends des deux pieds mon vol loin de ma patrie,
Non point par haine pour cette ville qui n'est pas seulement grande
Et heureusement douée par la nature, mais où tous dépensent leur avoir.
En effet, les Athéniens chantent toute leur vie l'air des procès.
Voilà pourquoi j’ai entrepris ce voyage,
Errant à la recherche d'un lieu tranquille,
Où je pourrais m’établir et séjourner.
PLATON (427-347)
Pour son bien : le poulet a traversé la route par le désir
de l’Idée du Bien qu’il contemplait de l’autre côté.
DIOGÈNE LE CYNIQUE (412-323)
Si ce bipède est déplumé, c'est l'homme de Platon.
ARISTOTE (384-322)
C'est dans sa nature, comme le prouvent les poulets
d'Athènes, de Crète, de Stagire et les poulets de l'Indus
écrasés sur la route par les éléphants d'Alexandre. Car le
poulet actualise sa puissance de traverser la route.
DÉMOSTHÈNE (384-322)
Même si ce poulet est un émissaire,
s’il franchit là la frontière macédonienne,
c’est un traître et doit être puni comme traître,
s’il revient jamais de chez Philippe
avant que Philippe ne s’annonce à nos portes.
PYRRHON (360-275)
Quelle route ? Quel poulet ?
Et rien ne prouve que ce poulet,
dont nous ignorons tout, ait traversé la route,
qui n'existe peut-être pas, pour un but inconnu :
autant suspendre notre jugement.
ÉPICURE (342-270)
Il cherchait le grain avec mesure, Ménécée.
Qui le lui reprochera ?
ARCHIMÈDE (287-212)
Tout poulet picorant devant une route subit
de la part de cette route une poussée ascendante
et verticale d'intensité égale au poids
des grains avalés...
Περὶ τοῦ ὀρνιθίου
RECENSUIT, EMENDAVIT NOTASQUE ADDIDIT
NEC MINUS SEPTEM AUCTORES ADJUNXIT
ROMANUS REMUS AQUARIUS
AQUARUM SEXTIARUM
TYPIS ACADEMICIS
MMXI