Avancées, tendances et perspectives Février 2014

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Transcript Avancées, tendances et perspectives Février 2014

Micro et Nanotechnologies : Avancées, tendances et perspectives
Février 2014
Procédés et
Dispositifs amont
Editorial
NanoConstruction
5
7 Nano-objets : synthèse, mise en forme, assemblage et propriétés physiques
Lithographies alternatives par auto assemblage
Microscopies
Références
Nanotechnologies Bio-inspirées
25 Ingénierie ADN
Ingénierie des peptides et des protéines
Matériaux intelligents bio-inspirés qui s’adaptent aux changements environnementaux
Références
Electronique Moléculaire
NEMS
45 48 52 58 61 Propriétés mécaniques des nanomatériaux
Nanomécanique bio-inspirée
Phénomène de synchronisation dans les NEMS auto-oscillants
Références
NanoElectronique
65 66 67 69 71 75 80 82 83 84 86 CMOS ultime
Composants à base de carbone
Mémoires non-volatiles
Modélisation
Nanocircuits / Nanoarchitectures
Références
Grands Gaps
89 93 96 105 109 Matériau massif - Epitaxie – Dopage
Technologie / Composants
Systèmes / applications
Références
Matériaux et composants pour l'Optique
111 115 118 120 121 121 124 Nanosources semi-conductrices
Métamatériaux
Plasmonique
Optomécanique
Photonique silicium
Références
Spintronique & NanoMagnétisme
127 Physique du spin
Interactions chirales dans les couches ultraminces : skyrmions et parois de Néel
Dynamique de spin à l'échelle nanométrique et magnonique
Spin caloritronique
Mémoires magnétiques
Références
Observatoire des Micro et NanoTechnologies
29 32 37 39 41 Molécules
Méthodes d'organisation douces. Fabrication, assemblage et caractérisation
Graphène et nanotubes de carbone
Références
Technologies de
l'Information et de
la Communication
11 15 16 23 131 133 134 135 139 142 Avancées, tendances et perspectives – Février 2014 |
1
Micro et Nanotechnologies : Avancées, tendances et perspectives
Février 2014
Electronique Organique
145 149 153 154 156 161 165 168 Architectures
Technologies d’encapsulation par couche mince
Electroluminescence organique
PV Organique & hybride
Transistors organiques
Bioélectronique organique
Références
Energie
Energie
173 177 188 195 199 Batteries & Piles à combustible
Photovoltaïque
Thermoélectricité & Récupération d'énergie
Références
Sciences de la Vie
Micro & Nano Systèmes pour la Biolgie
La microfluidique pour le diagnostic en cancérologie
Les techniques d'analyse à l'échelle de la cellule unique
Contrôle de la morphologie cellulaire pour l’identification de gènes mécano-sensibles
Microscope par champ évanescent "co-planaire" : les avantages d’utiliser l’évanescence
côté excitation et émission
Références
Micro & Nano Médecine
Nanoparticules, nanomatériaux : effets sur la santé et
l'environnement
Systèmes complexes in vitro : vers une meilleure prédictivité des effets pulmonaires
des nanoparticules ?
Bilan final et conclusions de l’action conjointe européenne NANOGENOTOX
Essais d’écotoxicité pour la caractérisation des dangers des nanoparticules : quelles
limites, quelles avancées, quels besoins ?
Surveillance des effets des nanomatériaux sur la santé chez l’Homme - place aux
indicateurs biologiques
Références
Observatoire des Micro et NanoTechnologies
207 211 216 218 220 223 Intérêt des nanoparticules pour améliorer les performances de la radiothérapie
Les nanoparticules radioactives pour l’imagerie et la thérapie
Emergence des nanoparticules de polymères de coordination poreux en nanomédecine
Micro-tomographie d’impédance électrique in vivo : une nouvelle modalité d’imagerie
médicale ?
Des bulles de CO2 pour conférer de nouvelles propriétés à des systèmes de délivrance.
Electrochimiothérapie antitumorale et récents développements technologiques autour de
l’électroporation des cellules
L’apport des substrats nano et microstructurés pour la médecine régénératrice
Graphène versus nanotubes de carbone en nanomédecine
Références
Index
203 227 228 231 232 236 237 239 241 245 249 253 254 257 258 261 263
Avancées, tendances et perspectives – Février 2014 |
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NanoConstruction
périodique de la permittivité diélectrique19. Cette
organisation provoque la formation d’une bande
interdite photonique, interdisant à la lumière de se
propager dans une certaine gamme d’énergie et pour
certaines directions. Le très fort champ électrique local
à proximité des nanostructures métalliques est alors
exploité pour accroitre l’amplification optique du
matériau à gain. Les pertes intrinsèques des métaux
aux fréquences optiques peuvent ainsi être compensées
et conduire dans certains cas à un effet laser.
métallique serait diffusée dans toutes les directions. La
simulation de la réponse optique active montre que
l’émission laser est obtenue par transfert d’énergie
stimulée des molécules émettrices aux plasmons, avec
un renforcement du taux d’émission spontané des
luminophores pouvant atteindre un facteur 200 du fait
des fortes densités locales d’états optiques.
La réalisation à grande échelle de telles structures
photoniques plasmoniques permettant d’obtenir des
dispositifs est toutefois requise pour diverses
applications.
Ceci
nécessite
des
techniques
d’élaboration possédant une résolution suffisante et à
bas coût. Exploitant la technique de lithographie par
auto-organisation
de
nanosphères
en
réseaux
hexagonaux bidimensionnels, un système couplant
cristal photonique et nanostructures plasmoniques a été
réalisé à partir d’un réseau de sphères de polystyrène
dopé par des luminophores et recouvertes d’une
coquille d’argent sur la partie supérieure20. La
modification du spectre de fluorescence ainsi que la
distribution spatiale de l’émission a pu être attribuée au
couplage des modes de Bloch du cristal photonique
avec les cavités plasmoniques constituées par les
hémisphères d’argent.
Dans
ces
différents
travaux,
le
contrôle
et
l’amplification du comportement émissif résulte
d’architectures hybrides permettant de combiner
différentes
fonctionnalités
(photoluminescence,
plasmonique, cristal photonique) au sein d’un même
dispositif.
 Analyse "in operando" des nanoparticules
catalytiques à l'échelle de la particule
unique
Fabienne Gauffre
Figure 4 : (a) Spectres d’émission pour des structures à base de
réseaux de nanoparticules plasmoniques (Ag, Au) ou non (Ti,
Ti02) et une énergie de pompe de 0,43 mJ.cm-2. b) Schéma de
principe du transfert d’énergie du milieu amplificateur à
4 niveaux aux plasmons en réseau des nanoparticules.
Extrait avec la permission de Nature Nanotechnology 8, 506 (2013).
Copyright 2013 Macmillan Publishers Ltd.
La démonstration a été faite pour un réseau de
nanoparticules plasmoniques d’argent ou d’or entourées
de molécules émettrices (IR-140) dispersées dans du
polyuréthane constituant le milieu amplificateur
(Figure 4). Ce système présente une émission
directionnelle dont l’angle de divergence est inférieur à
1,5° (et la largeur spectrale inférieure à 1,3 nm). Cette
très faible dispersion de l’émission est la preuve du
comportement en réseau des plasmons, sans quoi
l’émission générée autour de chaque nanoparticule
Observatoire des Micro et NanoTechnologies
Les nanoparticules sont d'une importance fondamentale
en catalyse industrielle, pour l’énergie et l’automobile.
Les énormes progrès réalisés en termes d'homogénéité
morphologique dans les synthèses de nanoparticules
ont permis d'avancer dans la compréhension des effets
de taille et de structure sur les réactions catalytiques.
Les mesures réalisées restent cependant des mesures
moyennées sur un grand nombre de particules. Depuis
peu, des méthodes de microscopie in operando et à
l'échelle de la particule unique permettent d'observer
des processus chimiques individuels au plus près des
nanoparticules.
Des techniques simples mais performantes
La microscopie de fluorescence à super résolution
permet de dépasser la "limite de diffraction" en
observant des évènements fluorescents individuels et
temporaires. Ainsi, pour l'étude des processus
catalytiques, des réactions catalytiques sont conçues
pour générer un composé fluorescent pour lequel sont
observées au cours du temps l'apparition et la diffusion
loin du site de production (Figure 5).
Le traitement mathématique de l'image permet de
remonter à la source de fluorescence (le site de la
réaction) avec une précision de l'ordre du nanomètre.
L'utilisation d'un microscope à champ large standard
permet d'observer simultanément l'activité catalytique
d'un grand nombre de particules21,22.
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13
NanoConstruction
effectuée sur des cellules tests qui montre que l'on peut
avoir une bonne sensibilité à l'échelle microscopique. La
sensibilité est particulièrement bonne (~0,2) dans la
gamme de pH 6-8, là encore avec une résolution submicrométrique.
Figure 8 : Accélération des cinétiques d’auto-assemblages par des
recuits solvo-thermiques.
Extrait avec la permission de Nano Letters 13, 5117 (2013).
Copyright 2013 ACS.
Il a par exemple été montré que la cinétique d’autoassemblage peut être accélérée par des moyens
complémentaires en combinant le traitement sous
solvant (connu pour la faible défectivité induite mais
nécessitant des temps très longs) avec le recuit
thermique37 (Figure 8). Ce procédé donne ainsi accès à
des morphologies différentes par le contrôle fin des
temps et températures de recuits, pour des temps
d’assemblage inférieurs à la minute.
Figure 7 : Image de cellule avant (i) et après (ii-iii) incubation
avec les nanoparticules. L'image (i) montre l'auto-fluorescence
du système avec des temps de vie de fluorescence inférieur à
3 ns. Les images (ii) et (iii) sont obtenues avec deux solutions
tampons de pH différent, pH 4,87(i) et pH 8,14 (iii). L'échelle
(barre blanche) représente 10 µm.
Extrait avec la permission de ACS Nano 7, 6387 (2013). Copyright
2013 ACS.
Une autre application est la détection d'espèces
(oxygène, CO2, mercure, molécules biologiques …) qui
a fait l’objet d’un récent article de revue32 où sont
exposés une multitude de systèmes différents. Cette
approche a d’ailleurs été présentée à plusieurs reprises
dans les revues de veille de l'OMNT (voir par exemple
[33]).
Au niveau des applications, ce sont surtout la biologie
et la médecine qui sont visées, mais des applications
dans le domaine de la microfluidique sont à envisager,
notamment avec la mise en évidence de gradients de
température dans des écoulements34.
Lithographies alternatives par
auto assemblage
Raluca Tiron
Ces dernières années, l’auto-assemblage des CoPolymères à Bloc (CPB) est de plus en plus considéré
comme une solution alternative aux technologies de
lithographie actuelles utilisées en microélectronique.
Apres la parution d’articles essentiellement issus du
monde académique au cours des 15 dernières années,
la tendance change en 2013 avec des contributions
provenant de grands consortiums et même directement
publiées par les "end-user" du domaine, comme
Toshiba35,36. Cette effervescence se traduit par des
avancées majeures. Un effort particulier a été consenti
dans l’optimisation des procédés afin de les rendre
compatibles avec le milieu industriel.
Observatoire des Micro et NanoTechnologies
Figure 9 : Illustrations et images SEM (Scanning Electron
Microscopy) correspondantes de plusieurs nanostructures
obtenues à partir de CPB autoassemblés.
Extrait avec la permission de Scientific Reports 3, 3190 (2013).
Creative Commons License.
Un deuxième axe de recherche consolidé en 2013 porte
sur des systèmes complexes à base de mélanges de
CPBs (hétéro ou homopolymères). S. Park et coll. ont
ainsi validé l’accès à des structures complexes par
l’utilisation d’un mélange de deux CPBs38 (Figure 9) :
cette méthode a notamment permis de générer des
nano-anneaux
de
Ge2Sb2Te5,
utilisés
en
Avancées, tendances et perspectives – Février 2014 |
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Electronique Moléculaire
De plus, les états de phonons du nanotube sont discrets
à basse température, et l’énergie séparant les états
excités des phonons longitudinaux étant comparable à
l’énergie liée aux sauts de magnétisation du Tb(Pc)2, la
conductance intrinsèque du nanotube est corrélée avec
les changements d’état de spin du complexe de terbium
greffé sur la surface du nanotube. Ainsi, lorsque le
complexe de Tb(Pc)2 est greffé en surface, l’application
de champs externes perpendiculaires spécifiques
entraîne quatre sauts de conductance qui ne sont pas
observés lorsque ces champs sont appliqués suivant
l’axe longitudinal du résonateur que constitue le
nanotube de carbone.
Ce couplage entre le complexe et le nanotube est
attribué à la conservation du moment angulaire total,
conservation qui force la rotation de l’architecture
organique lorsque le terbium subit un changement
d’état magnétique. Puis, ces mouvements du complexe
sont transmis au nanotube via une déformation
longitudinale de sa surface. Cette dernière déformation
mécanique affecte les états énergétiques des phonons
longitudinaux au sein du nanotube.
Les auteurs ont ainsi montré qu'une variation de spin
peut être utilisée comme un déclencheur de
mouvements quantiques (modifications des phonons)
au sein d'un composant.
Calculateur à nanotube de carbone
Un cran supplémentaire dans la "complexité" des
circuits à base de transistors à nanotubes de carbone
(CNTFET) vient d'être démontré par l'équipe de
P. Wong à l’Université Stanford (USA)46 avec la
réalisation avec des transistors à nanotubes de carbone
d'une petite (1 bit) unité de calcul (CPU) complète,
fonctionnelle, programmable et exécutant un jeu
d'instruction de base (MIPS). L'intérêt de ce travail est
de montrer comment, malgré les défauts des
transistors à effet de champ (CNTFET : manque de
reproductibilité, etc…) l'utilisation judicieuse des
technologies disponibles (dans ce travail, croissance de
nanotube alignés sur quartz, transfert par tampon,
élimination des nanotubes métalliques par effet Joule)
permet de s'affranchir de ces "imperfections" pour
réaliser un circuit de calcul avec un rendement de
fabrication
correct
(80-90%)
et
complètement
compatible CMOS.
 Propriétés optiques et optoélectroniques
Nanotubes de carbone
La spectroscopie optique et la photophysique des
nanostructures carbonées, notamment des nanotubes
de carbone, demeure un axe de recherche très actif. En
témoignent quatre publications très récentes qui
décrivent des améliorations notables des propriétés
d’émissions de nanotubes semi-conducteurs47,48,49,50.
Cette photophysique est dominée par les états
d'excitons, dont les énergies de liaison sont
considérables. Ainsi, toute application dans des
dispositifs opto-électroniques ou en optique quantique
nécessite une compréhension détaillée de la dynamique
excitonique. Il s’agit d’un problème unidimensionnel
complexe.
Des études à basse température sur des nanotubes
individuels "ultrapropres" suspendus, obtenus par dépôt
chimique en phase vapeur (CVD) ont montré des
spectres d’émission très étroits et des déclins de
luminescence (de l’ordre de la nanoseconde) nettement
plus longs que les valeurs observées jusqu’alors (au
maximum une centaine de picosecondes)47,48. Ces
valeurs, proches des prédictions théoriques pour un
nanotube "intrinsèque", suggèrent que le rendement
quantique de luminescence est grandement amélioré
par rapport à l’état de l’art. Ces résultats ouvrent la
voie à des applications des nanotubes de carbone en
optique quantique.
Figure 61: Modification chimique d’un nanotube par ajout de
défauts sp3.
Extrait avec la permission de Nature Chemistry 5, 840 (2013).
Copyright 2013 Macmillan Publishers Ltd.
A noter également la nette amélioration du rendement
quantique
d’émission,
cette
fois
en
traitant
chimiquement des nanotubes de carbone à l’aide
d’ozone49 ou de sels d’aryles diazonium50. Dans les
deux cas, des défauts sp3 (qui brisent la nature
délocalisée des électrons ) sont formés dans le
squelette carboné sp2 du nanotube. Ceci a pour effet de
créer des états localisés brillants, à plus basse énergie
que celle des photons émis par les tubes non traités.
Cette approche systématique permet de fonctionnaliser
de grandes quantités de nanotubes. En sélectionnant
des réactifs adaptés, il est même envisageable de
réaliser une ingénierie chimique des propriétés
d’émission des nanotubes de carbone.
Graphène
Figure 60 : Architecture du calculateur à CNTFET (les parties
grises sont en CMOS) et image MEB du CPU à CNTFET.
Extrait avec la permission de Nature 501, 526 (2013). Copyright
2013 Macmillan Publishers Ltd.
Observatoire des Micro et NanoTechnologies
Des études originales des propriétés optiques et
optoélectroniques du graphène, (par spectroscopie
d’absorption
ou
spectroscopie
Raman)
sont
régulièrement publiées, ce qui illustre l’intérêt de ce
système, au-delà du "raz de marée" des années 2005Avancées, tendances et perspectives – Février 2014 |
55
Electronique Moléculaire
2010. Un nombre croissant de publications porte sur
des systèmes hybrides à base de graphène : en effet,
le graphène, en tant que système purement
bidimensionnel, semi-métallique mais quasi-transparent
sur l’ensemble du spectre optique, est un candidat idéal
pour la nano-optoélectronique.
La question du transfert d’énergie entre un film de
molécules fluorescentes (Rhodamine 6G) et un feuillet
de graphène a été abordée par le groupe de
F. Koppens à l’ICFO (Espagne)51. L’efficacité de
transfert d’énergie est déterminée grâce à des mesures
du déclin de fluorescence. En déposant des films
minces transparents (oxyde de titane), il est possible
de faire varier la distance entre le film de molécules et
le feuillet de graphène. Dans ces conditions, le taux de
transfert d’énergie décroît comme l’inverse de la
puissance quatrième de la distance de séparation. Cette
loi d’échelle est caractéristique d’un système donneuraccepteur "point-plan". Le transfert est particulièrement
efficace, puisque environ 99% de l’énergie est
transférée vers le graphène lorsque les molécules sont
situées à 5 nm de celui-ci. Ce phénomène est
intéressant en soi, mais, comme il peut difficilement
être évité, il sera aussi un obstacle important pour
l’étude et le contrôle d’autres phénomènes aux
interfaces, comme par exemple le transfert de charge.
Enfin, ces résultats permettent d’envisager la
réalisation de "règles moléculaires" à base de
graphène, pour sonder des distances nanométriques
dans des environnements plus complexes.
Ce thème est assez actif et plusieurs groupes (IPCMS
Strasbourg, Université Columbia, Université de
Hambourg, Université de Stuttgart,…) étudient le
transfert d’énergie entre un objet fluorescent individuel
(boîte quantique, centre NV dans le diamant,…) et les
systèmes graphitiques (graphène, nanotubes, carbone
amorphe,…)
de gaz dans des pores de graphène en tenant compte
du développement d’interactions faibles, par exemple
de type van der Waals, entre les molécules de gaz et
les pores, en fonction de la taille et de la géométrie du
pore. Des modèles diffusionnels classiques décrivant le
passage de molécules dans un pore ont été décrits dans
la littérature54, la possibilité de mesure expérimentale
devrait permettre la validation, même partielle, de ces
modèles.
 Le silicène, cousin du graphène
Peu après la découverte du graphène et la confirmation
de ses propriétés exceptionnelles, de nombreux
théoriciens se sont intéressés au silicène, l’équivalent
du graphène pour le silicium55,56,57. Il a été montré que
le silicène aurait une stabilité intrinsèque et
présenterait des propriétés électroniques analogues à
celles du graphène. Si la synthèse de silicène s’avérait
possible du point de vue expérimental, les applications
en nanoélectronique seraient évidemment presque
immédiates puisqu’il s’agirait d’une technologie à base
de silicium.
La synthèse du silicène a été mise en évidence, pour la
première fois, par de récentes expériences, menées en
étroite collaboration entre deux laboratoires français,
ISMO (Université Paris Sud) et CINaM (AixMarseille Université). Les dépôts de silicium sur des
surfaces d’argent orientées montrent une structure de
silicium bidimensionnelle sous forme de nids d’abeilles
comme celle du graphène58,59,60.
 Applications mécaniques
Filtrage et détection de gaz grâce à un film de
graphène
Au chapitre des applications analytiques potentielles du
graphène dans le domaine de la détection ou du
séquençage, les travaux du groupe de S. Bunch52
contribuent à la mise au point de méthodes fiables
permettant d’ouvrir des pores dans du graphène de
manière contrôlée via la fabrication de cavités taillées
dans une couche de SiO2, recouvertes par exfoliation de
mono et bi-feuillet de graphène. La fermeture des
cavités par le ou les feuillets durant l’exfoliation est
effectuée sous pression de divers gaz tels que H2, CO2,
Ar, N2 ou CH4. Une fois les structures exposées à la
pression atmosphérique, l’étanchéité de la cavité
provoque son gonflement et la déformation du ou des
feuillets de graphène qui est observable par AFM. Des
pores de tailles spécifiques sont ouverts dans les
feuillets et la diffusion des gaz au travers des pores est
fonction de leur taille. La pression interne est reliée soit
à la déflection de la surface, soit à sa fréquence de
résonance mécanique.
La méthode est intéressante et la démonstration du
concept est attrayante pour une mise en œuvre
relativement simple. Un deuxième article examinant le
problème sous un aspect théorique mérite d’être
signalé53. Cet article affine la modélisation du passage
56
| Avancées, tendances et perspectives – Février 2014
Figure 62 : Feuillet de silicène sur Ag(111).
Extrait avec la permission de Applied Physics Letters 97, 223109
(2010). Copyright 2013 APS.
Peu après cette découverte, plus d’une vingtaine de
groupes à travers le monde ont commencé à travailler
sur le silicène confirmant cette nouvelle structure
cristallographique de silicium. C’est ainsi que la
croissance du silicène sur d’autres substrats (Ir61,
ZrB262 et Au63) a été rapportée. Cependant la question
de sa structure électronique reste ouverte. En effet des
études très récentes publiées en 2013 montrent
l’existence d’un couplage entre la structure électronique
de silicène et celle du substrat64. Le principal enjeu à
l’heure actuelle est de synthétiser le silicène sur des
substrats isolants afin d’accéder à sa structure
intrinsèque avec comme perspective ultérieure de
l'intégrer dans de futurs dispositifs micro-électronique.
Se pose également la question de la stabilité du
silicène, bien moindre a priori que celle du graphène, et
qui pourrait limiter les possibles applications.
Observatoire des Micro et NanoTechnologies
Matériaux et composants pour l'Optique
Enfin, il est à noter l’utilisation de métasurfaces pour
coupler efficacement des ondes propagatives à des
ondes de surface52 ainsi que la publication d’un article
de revue assez complet53. Pour que le domaine des
métasurfaces continue de se développer et passe de la
preuve de concept aux applications, des travaux tant
théoriques qu’expérimentaux sont encore nécessaires.
Pour réaliser de véritables surfaces fonctionnelles, un
point clé qui sera très certainement abordé ces
prochaines années est d’inclure des possibilités de
modulation et de switching à l’aide de matériaux à
changement de phase, de cristaux liquides ou de
matériaux non-linéaires.
Plasmonique
Thierry Taliercio
La recherche en plasmonique est essentiellement basée
sur l’utilisation de l’or et de l’argent. Ces métaux nobles
remarquables sont cependant limités par certaines de
leurs propriétés intrinsèques, limitant ainsi les
applications potentielles.
Figure 129 : Image de microscopie électronique en transmission
(TEM) basse résolution (a), de TEM haute résolution (c) et figure
de diffraction électronique (e) de nanocristaux amorphes de
GeTe. (b), (d), (f) Même chose pour des nanocristaux cristallins
de GeTe.
Extrait avec la permission de Physical Review Letters 111, 037401
(2013). Copyright 2013 APS.
En effet, l’extrême réactivité de la surface d’Ag dégrade
ses propriétés optiques, alors que l’Au, incompatible
avec la microélectronique, voit ses pertes intrinsèques
120
| Avancées, tendances et perspectives – Février 2014
augmenter dans le visible. Depuis quelques années,
plusieurs alternatives sont explorées pour contourner
ces limitations, l’idée principale étant de faire de
l’ingénierie du métal ou de sa permittivité en adaptant
sa fréquence plasma via la densité de porteurs. Pour
adapter la fréquence plasma, deux approches sont
envisagées : doper fortement un semi-conducteur ou
un oxyde ; diminuer la densité d’électrons dans un
métal. Ces nouvelles approches ouvrent de nouvelles
perspectives d’applications en plasmonique comme les
matériaux hyperboliques ou les
métamatériaux
accordables.
L’activité de recherche dans ce domaine s’est
suffisamment densifiée ces dernières années pour que
plusieurs groupes de renommée internationale s’y
intéressent. On peut notamment mettre en avant un
article de revue54 ou les sessions et oraux dédiés lors
des conférences internationales. L’année 2013 n’aura
pas vu d’avancée significative dans ce domaine, mais
une augmentation non négligeable du nombre
d’articles. On peut considérer que l’ingénierie des
métaux est un domaine émergent.
Parmi les résultats les plus spectaculaires, notons les
nanoparticules de métaux de transition GeTe55, dont le
caractère métallique disparaît en même temps que la
phase cristalline (Figure 129), et les nanofils de Si
dopés56, dont il est possible de contrôler les résonances
plasmoniques en ajustant le dopage (Figure 130). La
propriété mise en évidence dans ces deux exemples est
la contrôlabilité des propriétés optiques des résonateurs
plasmoniques.
Figure 130 : (a) Image de microscopie électronique à balayage
(SEM) de nano-colonne de Si dopé après révélation de la zone
dopée par attaque chimique (zone colorée). (b) Spectre
d’absorption des nano-colonnes de Si partiellement dopées pour
des rapports longueur sur section, L/D, différents. La figure
insérée correspond à la variation de la fréquence plasma en
fonction de L/D.
Extrait avec la permission de Angewandte Chemie International
Edition 52, 8079 (2013). Copyright 2013 Wiley-VCH.
Observatoire des Micro et NanoTechnologies
Matériaux et composants pour l'Optique
D’autres résultats prometteurs ont été obtenus,
notamment des matériaux très fortement dopés (InAs,
ZnO, InGaBiAs) compatible avec la microélectronique,
dont la fréquence plasma approche le proche
infrarouge, d’autres métaux de transition (VaO2, 2HTaSe2), des nanoparticules de CuS ou CuSe (1<<2)
permettant d’obtenir des résonances plasmoniques
allant du visible à l’infrarouge et enfin les nitrures
métalliques
pour
les
applications
plasmoniques
couvrant l’UV et le visible. Les propriétés optiques de
ces nouveaux métaux ouvrent de nouveaux champs
d’applications potentiels en plasmonique (dispositifs à
plasmons localisés ou propagatifs, matériaux à indice
négatif,
métamatériaux
ajustable,
matériaux
hyperbolique,
etc.),
et
rendent
ces
nouvelles
fonctionnalités
technologiquement
viables.
Ces
nouveaux matériaux sont en cours de développement
et nécessiteront des études plus poussées de leurs
propriétés structurales, électriques et optiques. En
fonction de leurs propriétés physiques, il sera possible
de mieux cibler les applications potentielles.
matériaux classiquement employés pour la réalisation
de lasers à semi-conducteurs pouvait conduire à la
réalisation de microcavités à très fort confinement561.
Des coefficients de couplage record ont également été
rapportés par le groupe de M. Nomura à l'Université
de Tokyo (Japon)62. Enfin, les premières tentatives de
démonstrations de capteurs de très faibles masses ont
permis d'élargir le spectre d'applications potentielles de
ces composants optomécaniques, avec notamment un
article reporté par le groupe d'O. Painter à Caltech,
en association avec l'Université de Rochester,
reportant un accéléromètre affichant des performances
comparables à celles des meilleurs composants MEMS
aujourd'hui disponibles63.
Optomécanique
Sarah Benchabane
Depuis l'émergence de l’optomécanique, les activités
relatives à la physique fondamentale (intrication, états
comprimés, etc.) constituent un courant majeur
d'investigation de la thématique (voir l'article de revue
très complet paru en mars dernier sur arXiv.org écrit
par trois des principaux acteurs de la discipline
(M. Aspelmeyer
à
Vienne
(Autriche),
T.J. Kippenberg à l'EPFL (Suisse) et F. Marquardt à
Erlangen en Allemagne)57. Cette année 2013 a
néanmoins
confirmé
une
tendance
récente
à
l'exploitation de ces systèmes pour des applications aux
technologies de l'information et de la communication ou
aux capteurs. L'optomécanique se positionne ainsi
désormais à l'intersection de plusieurs champs
disciplinaires qui s’étendent de la mécanique quantique
aux NEMS en passant par l'optoélectronique. Une série
d'articles
parus
sous
le
chapeau
'Focus
on
Optomechanics' dans New Journal of Physics entre
septembre 2012 et avril 201358 dresse un tableau assez
représentatif de ces orientations naissantes.
L'Université Cornell, en association à l’Universida de
Estadual de Campinas et à l'Institut Kavli (Cornell
for
Nanoscale
Science),
s'est
particulièrement
distinguée avec une démonstration expérimentale de la
possibilité
de
synchroniser
deux
oscillateurs
optomécaniques, ouvrant ainsi des perspectives
intéressantes quant à la réalisation de réseaux denses
et d'oscillateurs59 commandables.
Le groupe de H. Tang s'est illustré par la
démonstration de plateformes intégrant guides d'ondes
optiques,
cavités
photoniques
et
actionnement
mécanique permettant l'obtention de couplages
optomécaniques élevés associés à de fortes amplitudes
de vibration60 (Figure 131). Le niveau d'intégration
atteint permet d'envisager des applications concrètes
en photonique micro-onde. La notion de coefficient de
couplage optomécanique s'est elle-même également
trouvée au centre d'un intérêt grandissant. Les travaux
du Centro Atómico Bariloche en Argentine et de
l'Institut des Nanosciences de Paris ont permis de
montrer que l'utilisation de technologies et de
Observatoire des Micro et NanoTechnologies
Figure 131 : Images MEB des différents éléments constitutifs d'un
résonateur opto-électro-mécanique sur membrane de silicium. Un
guide optique permet d'assurer l'injection de la lumière dans une
cavité photonique (en rose). L'actionnement électrostatique est
assuré par un système capacitif (en vert).
Extrait avec la permission de Applied Physics Letters 101, 221116
(2012). Copyright 2012 AIP.
Ces différents travaux montrent une volonté croissante
d'élargir les prérogatives initiales de l'optomécanique à
la réalisation de dispositifs pour la photonique. La
conception de composants présentant de forts
coefficients de couplage, assurés par un confinement
conjoint des modes optiques et acoustiques, et
reposant sur une intégration complète des voies
d'excitation et de détection des deux types d'ondes,
s'annoncent comme des enjeux majeurs pour les
années à venir.
Photonique silicium
 Photonique silicium
Laurent Vivien
La photonique silicium a connu encore cette année une
évolution importante avec des démonstrations autour
de la filière technologique, de l’intégration, des
composants optiques et optoélectroniques et de
l’hybridation du silicium avec des matériaux actifs. Les
applications vont des télécommunications optiques avec
le développement de récepteurs optiques intégrés avec
son électronique de commande, aux communications
intra-puces dans les circuits intégrés. Les tendances
Avancées, tendances et perspectives – Février 2014 |
121
Energie
réalisation d’un système pleinement fonctionnel. Des
céramiques ou des vitrocéramiques à base de soufre
permettent en revanche d’atteindre d’excellentes
valeurs de conductivité ionique, mais leur mauvaise
stabilité chimique et les difficultés de mise en œuvre
laissent difficilement envisager leur utilisation pour des
applications à grande échelle (Figure 182)15.
Il est à noter que, bien que le rayon ionique de Na+ soit
nettement plus grand que celui de Li+, il est possible
d’envisager une amélioration de la cinétique de
diffusion des ions Na+ par rapport au lithium par le
choix de structures hôtes adaptées. Par ailleurs,
l’objectif d’une conductivité ionique élevée pour ces
électrolytes inorganiques ne doit pas faire oublier celui
de
leur
nécessaire
compatibilité
chimique
et
électrochimique avec les matériaux d’électrode et des
bonnes propriétés des interfaces générées, dans les
conditions d’utilisation envisagées.
Pour
conclure,
les
dispositifs
de
stockage
électrochimique au sodium semblent très prometteurs
pour des applications essentiellement stationnaires. De
nombreuses études sont actuellement menées sur les
constituants actifs (électrodes et électrolytes) et font
émerger des candidats potentiellement intéressants.
Néanmoins, la réalisation de systèmes complets
performants assurant une bonne synergie entre les
différents constituants nécessitera encore de nombreux
efforts.
 L’accumulateur lithium-soufre
Céline Barchasz
Introduction
L’accumulateur lithium-soufre (Li-S) a vu le jour dans
les années 60, mais n’en reste pas moins intensivement
étudié à l’heure actuelle16. La technologie Li-S présente
en effet de nombreux avantages, tels que la capacité
de stockage massique du soufre, très importante
(1675 mAh/gS), ainsi que l’abondance, le faible coût et
la non-toxicité du soufre élémentaire. En revanche, ce
système, bien que très prometteur, n’est pas
commercialisé à l’heure actuelle, en raison de ses
limitations notables et des performances pratiques bien
en-deçà des attentes. Le soufre réagit avec le lithium
selon
la
réaction
suivante :
16Li + S8  8Li2S,
mécanisme de décharge qui entraine la formation
d’intermédiaires polysulfures de lithium (Li2Sn 2n8)
solubles dans l’électrolyte. Ainsi, les principales
problématiques de l’accumulateur Li-S sont la faible
capacité de décharge pratique (soufre et Li2S isolants),
la faible cyclabilité et l’autodécharge des cellules Li-S
(dissolution de la matière active), ainsi que les
problèmes de sécurité liés à l’utilisation d’une électrode
négative de lithium métal.
mise en œuvre de ces matériaux permet d’améliorer
l’utilisation du soufre (jusqu’à 1500 mAh/gS), tout en
offrant des densités de courant importantes (jusqu’à
2C). Le soufre peut également être confiné au sein de
nanotubes de carbone27, ou bien sous forme de
matériaux cœur-coquille, la coquille pouvant être
carbonée28,29,30, inorganique31,32 ou polymère33,34.
L’ensemble de ces stratégies permet le confinement du
soufre à l’électrode positive, retardant la diffusion des
polysulfures de lithium dans l’électrolyte et vers
l’électrode négative. Cela rend également possible le
contact intime entre le soufre (isolant) et le carbone. En
revanche, certains papiers s’accordent à dire que la
diffusion des polysulfures de lithium est seulement
ralentie et non supprimée35. Par conséquent, d’autres
équipes s’orientent plutôt vers l’optimisation de la
composition d’électrolyte ou de la géométrie des
cellules.
L’utilisation d’électrolytes conventionnels à base de
carbonates étant incompatible avec l’électrode de
soufre36, la plupart des travaux actuels portent sur
l’utilisation de solvants éthers (linéaires ou cycliques).
De plus, la matière active se dissolvant dans
l’électrolyte au cours de la décharge, la composition
d’électrolyte joue un rôle important sur les performances électrochimiques : 1) la quantité d’électrolyte37, de
même que la concentration en sel de lithium38,39,
permettent de moduler l’utilisation du soufre et la
diffusion des polysulfures dans l’électrolyte, 2) il est
également possible de moduler la dissolution de la
matière active dans l’électrolyte par l’utilisation
d’additifs. Par exemple, l’utilisation de P2S5 permet
d’augmenter la solubilité des composés Li2S2 et Li2S
dans l’électrolyte, et d’empêcher leur précipitation à
l’électrode négative40, tandis que l’utilisation de liquides
ioniques permet au contraire de limiter la solubilité des
espèces dans l’électrolyte41,42.
Etat de l’art
Pour pallier ces handicaps, l’une des stratégies consiste
à optimiser les matériaux d’électrode positive :
encapsulation de la matière active, texturation de
l’électrode positive17,18, utilisation de polymères
fonctionnels19,20,21.
Différents composites carbone/soufre sont rapportés,
notamment à base de graphène22,23, ou via l’infiltration
de soufre au sein de carbones mésoporeux24,25,26. La
Observatoire des Micro et NanoTechnologies
Figure 183 : (haut) Schéma de principe d’un accumulateur Li-S
impliquant une intercouche de carbone empêchant la diffusion des
polysulfures de lithium vers l’électrode négative. (bas) Schéma de
principe de la cellule Li-S développée par S.S. Zhang et al.
proposant l’utilisation d’un papier poreux de soufre.
Extrait avec la permission de (haut) Chemical Communications 48,
8817 (2012). Copyright 2012 RSC. (bas) Journal of Power Sources 211,
169 (2012). Copyright 2012 Elsevier.
Avancées, tendances et perspectives – Février 2014 |
179
Energie
de zinc (MG8) et un colorant organique (Y123) comme
cosensibilisateurs123.
morphologie, la stœchiométrie et la cristallinité du
matériau.
Les cellules Grätzel à électrolyte solide ont émergé
récemment comme des solutions viables où l'électrolyte
liquide est remplacé par un solide pouvant efficacement
transporter les "trous" tel que le dérivé de triarylamine
2,2’,7,7’-tetrakis(N,N-di-p-methoxyphenylamine)-9,9’spirobifluorene (spiro-MeOTAD) ou le poly-triarylamine
(PTAA). En plus d’une réduction des risques de fuites
associées aux électrolytes liquides, les besoins en
matériaux sont moindre grâce à une épaisseur des
cellules réduite. Finalement, ils offrent aussi une voie
viable vers une plus haute efficacité puisque la tension
des cellules solaires peut être réglée en ajustant le
HOMO du matériau transporteur de trous.
Récemment, Kim et al. ont utilisé un nouveau pigment
fait de pérovskite hybride organique-inorganique, le
CH3NH3PbI3 déposé en solution pour atteindre une
efficacité surprenante de 9,7 % avec un électrode de
TiO2 mésoporeux et le spiro-MeOTAD (Figure 197)124.
Par la suite, Lee et al. ont démontré qu'il était possible
d’utiliser une mixture d’halogènes dans la pérovskite
CH3NH3PbI3-xClx et remplacer la photoanode de TiO2 par
Al2O3 pour obtenir un plus haut photovoltage et une
efficacité de 10,9%.
Figure 198 : Courbe J-V de la cellule Grätzel championne
sensibilisée à la pérovskite présentant une efficacité record de
15% à AM1.5G.
Extrait avec la permission de Nature 499, 316 (2013). Copyright
2013 Macmillan Publishers Ltd.
En conclusion, la sensibilisation des cellules Grätzel à
partir de la pérovskite de méthylamonium plomb iodure
représente une avancée scientifique et technologique
majeure. En effet, en améliorant seulement l'absorption
des couches minces l’efficacité devrait atteindre les 1820%. Pour un matériau peu coûteux et facile à
synthétiser à très basse température (< 100oC), ces
résultats sont extrêmement encourageants.
 Cellules solaires à concentration :
promesses tenues pour les cellules III-V à
4 jonctions
Figure 197 : a) Photo MEB d’une cellule Grätzel sensibilisée avec la
pérovskite CH3NH3PbI3 b) Structure cristalline ABX3 de la
pérovskite CH3NH3PbI3 où A = CH3NH3I, B = Pb et X = I et/ou Cl.
Extrait avec la permission de (a) Nature 499, 316 (2013). (b) Nature
501, 395 (2013). Copyright 2013 Macmillan Publishers Ltd.
Récemment, Burschka125 et al. ont publié une
technique séquentielle de dépôt de la pérovskite basée
premièrement sur le dépôt de PbI2 en solution sur
l’anode mésoporeuse de TiO2 puis sa transformation en
pérovskite de CH3NH3PbI3 par simple immersion de
l’électrode dans une solution de CH3NH3I3. L'utilisation
de cette nouvelle procédure a permis d’atteindre une
efficacité record de 15% (14,1% certifié) et une
meilleure reproductibilité. Enfin, Liu126 et al. ont
également démontré plus de 15% d’efficacité pour une
cellules planaire fabriqué en co-évaporant sous vide le
PbCl2 et CH3NH3I sans utiliser d’oxyde mésoporeux. Ce
dernier résultat sous-entend que l’efficacité de ces
cellules est fortement dépendante de la morphologie du
film de pérovskite formé.
Finalement, les récentes études d’absorption et
photoluminescence transitoire publiées par les groupes
de M. Grätzel à l'EPFL (Suisse) et de H. Snaith à
l'Université d'Oxford (UK) comportent des différences
significatives au niveau des longueurs de diffusion des
électrons et trous (100-1000 nm), de la constante de
diffusion et de la durée de vie pour la pérovskite mixte
ou simple127,128. Il est émis l’hypothèse que ces
paramètres et leurs effets sur l'efficacité dépendent de
manière significative de la technique de dépôt, la
190
| Avancées, tendances et perspectives – Février 2014
Alain Dollet
Les cellules multi-jonctions à base d'éléments III-V de
la famille de GaAs sont depuis plus de 10 ans le moteur
du développement des technologies de conversion
photovoltaïque sous concentration (CPV). D'un point de
vue théorique, le spectre solaire peut d'autant plus
efficacement être utilisé par une cellule photovoltaïque
que le nombre de jonctions qui la constituent est
important. Un nombre infini de jonctions permettrait
ainsi d'atteindre, sous forte concentration, une
efficacité de conversion de l'ordre de 86%129. En
pratique, compte-tenu de leur complexité, les cellules
multi-jonctions
commercialisées
aujourd'hui
ne
possèdent pas plus de 3 jonctions.
Début 2013, les cellules triple-jonction détenaient
toujours le record mondial d'efficacité de conversion
établi en octobre 2012 par la compagnie américaine
Solar Junction qui avait développé une cellule
monolithique en GaInNAs/GaAs/GaInP présentant un
rendement de conversion de 44% sous concentration
de 947 soleils130. Mais l'année 2013 a été marquée par
une succession de records d'efficacité de cellules
solaires III-V à 3, 4 voire 5 jonctions. En juin 2013, le
record mondial d'efficacité était repris par la cellule
solaire
triple
jonction
monolithique
en
InGaAs/GaAs/InGaP (Figure 199) développée par
l'entreprise japonaise Sharp qui affichait 44,4% de
rendement sous concentration de 302 soleils131.
Sharp annonçait d'ailleurs deux mois plus tôt un record
mondial de rendement de conversion de 37,9% pour
Observatoire des Micro et NanoTechnologies
Energie
une cellule triple jonction de cette même famille sous
flux solaire non concentré (1 soleil)132, mais la
compagnie américaine Spectrolab, filiale de Boeing,
dévoilait le 18 novembre un rendement de conversion
de 38,8%133. Cette dernière annonce peu documentée
fait suite au communiqué de presse de Spectrolab en
date du 9 avril134 annonçant un rendement de 37,8%
obtenu
avec
une
cellule
à
5 jonctions
sans
concentration (information NREL135) ; il est très
probable qu'il s'agisse d'une cellule de même type dans
les deux cas.
La clef de la réussite tient en partie aux technologies
Smart-cut137 et Smart-Stacking138 de Soitec qui ont
été utilisées pour transférer et assembler parfaitement
les 2 paires de jonctions tandem qui présentent des
désaccords de maille incompatibles avec une croissance
épitaxiale avec peu de défauts cristallins. Compte-tenu
de cet avantage considérable, il est fort probable que la
nouvelle génération de cellules "Smart Cell" de Soitec
atteigne le seuil de rendement de conversion
"mythique" de 50% à l'horizon 2015 ou 2016. Si la
Smart Cell parvient à confirmer la durabilité de ses
performances, elle procurera un avantage considérable
à la technologie Soitec, l'entreprise souhaitant la
destiner exclusivement à sa propre production de
modules qui sont déjà parmi les plus efficaces au
monde en utilisant des cellules du marché à 40% de
rendement au maximum139.
 Cellules PV silicium cristallin et intégration
Yannick Veschetti & Thibaut Desrues
Avancées sur le développement des procédés
cellules sur silicium cristallin
Figure 199 : Structure de la cellule triple jonction record de
Sharp (à gauche). Illustration de l'optimisation de l'interface
électrodes-cellule (à droite).
Extrait avec la permission de (http://www.sharpworld.com/corporate/news/130614.html). Copyright 2013 Sharp.
C'est néanmoins une nouvelle génération de cellules
III-V à 4 jonctions développée par la société française
Soitec (en partenariat avec le CEA - Leti, l'ISE
Fraunhofer de Fribourg et le Helmholtz Centre for
Environmental Research (UFZ) de Berlin) qui est
devenue la plus efficace au monde avec un rendement
de 44,7% sous une concentration de 297 soleils136.
Cette cellule est composée d'un empilement de
4 jonctions à base de semi-conducteurs III-V obtenu
après transfert et collage de 2 paires de 2 doublejonctions InGaP/GaAs et InGaAsP/InGaAs synthétisées
séparément par croissance en accord de maille,
l'ensemble permettant une utilisation particulièrement
efficace du spectre solaire comme suggéré par la
courbe d'efficacité quantique de la cellule (Figure 200).
Figure 200 : Efficacité quantique externe de la nouvelle cellule 4
jonctions de Soitec.
Extrait avec la permission de
http://www.ise.fraunhofer.de/en/press-and-media/pdfs-zupresseinfos-englisch/2013/press-release-world-record-solar-cellwith-44-7-efficiency.pdf. Copyright 2013 Soitec, CEA-Leti, UFZ &
ISE Fraunhofer.
Observatoire des Micro et NanoTechnologies
Quatre grandes familles de technologies cellules sur
silicium cristallin sont désormais étudiées par la
communauté
internationale.
L’évolution
de
la
technologie classique homojonction sur silicium type p
et la technologie homojonction sur silicium de type n
sont considérées comme plus compatibles à court
terme avec les lignes existantes et devraient donc être
implémentées dans les années à venir. La technologie à
hétérojonction a-Si :H/c-Si et la technologie IBC
(Interdigitated
Back
Contact)
sont
davantage
considérées comme des ruptures technologiques avec
des potentiels de rendement supérieurs. Panasonic et
SunPower industrialisent d’ores et déjà ces deux
technologies mais de nouveaux acteurs devraient
apparaitre prochainement avec des approches un peu
différentes (Silevo, KANEKA, AUO,…).
Les valeurs de rendement cellules pour ces différentes
technologies et à stade de maturité variable sont
présentées dans le Tableau 2. Le descriptif de chaque
architecture de cellule est donné Figure 201.
Figure 201 : Descriptif des différentes technologies de cellules.
Avancées, tendances et perspectives – Février 2014 |
191
Micro & Nano Médecine
d’action : (i) des nanoparticules de numéro atomique Z
élevé qui renforcent l'effet photoélectrique, augmentant
ainsi l'efficacité de radiothérapie conventionnelle, (ii) le
rayonnement X qui déclenche la libération du
médicament des nanoparticules par destruction de la
coquille du nano-objet8 et, (iii) des nanoparticules
dopées avec des lanthanides et des molécules photoactivables (photosensibilisateur) pouvant générer un
effet photodynamique9 ; une fois irradiées par des
rayons X, ces nanoparticules agissent comme des
nanoscintillateurs et émettent des photons capables
d’activer le photosensibilisateur, ce qui génère des
espèces réactives de l’oxygène (ERO) comme l'oxygène
singulet. Ces nanoparticules combinent donc à la fois la
thérapie photodynamique (ERO) et la radiothérapie
améliorée (Z élevé).
traitement de surface par saturation avec des atomes
d'hydrogène pour faciliter l’émission d’électrons11.
Des premiers essais in vitro effectués au laboratoire de
Cancérologie Expérimentale du CEA - DSV (équipe de
S. Chevillard)12 sur des cellules tumorales humaines
du rein résistantes aux radiations, ont montré que
l'exposition
à
des
nanodiamants
augmentait
significativement la toxicité cellulaire sous irradiation
par rapport à des cellules non exposées.
L’utilisation des nanoparticules pour améliorer les
performances de la radiothérapie est également une
réalité clinique puisqu’un essai de phase I (à l’Institut
Curie) évalue actuellement le NBTXR3 (nanoparticule à
base d’hafnium), produit par Nanobiotix, chez des
patients atteints d’un sarcome des tissus mous et
l’autorisation pour une évaluation de ce même agent
dans les cancers ORL vient d’être accordée par l’Agence
Nationale de Sécurité du Médicament et des Produits de
Santé.
L'arrivée de cette nouvelle génération de traitements
très prometteurs, utilisant les propriétés physiques de
nanoparticules à la toxicité bien étudiée, va
probablement modifier significativement l'approche de
la radiothérapie en cancérologie dans les années à
venir.
Les nanoparticules
radioactives pour l’imagerie
et la thérapie
Figure 227 : Réduction du volume d’une tumeur mammaire chez
la souris. Une irradiation à 30 Gy, 250 kVp et une injection
intraveineuse de 1,35 g/kg de nanoparticules d’or (2 nm) ont été
utilisées dans ce cas.
Extrait avec la permission de Physics in Medicine and Biology 49,
309 (2004). Copyright 2004 IOP.
Pour permettre cet effet radiosensibilisant, la propriété
des nanoparticules la plus importante est leur densité
électronique très élevée qui leur confère une capacité
d'absorption des radiations ionisantes supérieure à celle
des
tissus
biologiques,
conduisant
ainsi
au
renforcement de l'effet photoélectrique. L'absorption
des radiations va induire l'émission d'électrons à la
surface des nanoparticules qui vont réagir avec les
molécules environnantes pour générer des radicaux
libres particulièrement réactifs. A forte concentration,
ces radicaux libres induisent la mort cellulaire.
L’hypothèse est que dans la cellule cible, le transfert
d'électrons entre la surface des nanoparticules, les
molécules d'eau et le dioxygène, est à l'origine des
radicaux libres. Cette approche permet d'augmenter la
toxicité induite autour des nanoparticules sous
irradiation. Dans cet objectif, les nanoparticules de
diamant, aussi appelées nanodiamants, sont tout
particulièrement intéressantes car elles possèdent les
propriétés physiques exceptionnelles du diamant tout
en étant pour l'organisme10 : leur densité très élevée
en atomes de carbone leur confère une capacité
d'absorption des radiations supérieure à celle des tissus
biologiques. Par ailleurs, ces nanodiamants sont peu
onéreux car uniquement constitués de carbone, et
synthétisables à grande échelle. Au CEA - LIST, pour
optimiser la génération de ces radicaux libres sous
irradiation, l’équipe de J.C. Arnault effectue un
228
| Avancées, tendances et perspectives – Février 2014
Stéphane Roux
Le potentiel des nanoparticules multifonctionnelles pour
l’imagerie et la thérapie laisse entrevoir des avancées
prometteuses dans le domaine du diagnostic et de la
thérapie et en particulier de la thérapie guidée par
imagerie13,14. Des exemples de plus en plus nombreux
montrent qu’en adaptant la composition, la forme et la
taille des nanoparticules multifonctionnelles, il est
possible d’induire à distance l’effet thérapeutique
lorsque le suivi par imagerie médicale met en évidence
une biodistribution adaptée pour la réussite du
traitement15.
Parmi
les
nombreuses
techniques
d’imagerie
médicale,
l’imagerie
par
résonance
magnétique (IRM) semble s’imposer pour la thérapie
guidée par imagerie car elle permet d’acquérir
relativement rapidement des images contrastées dont
l’interprétation est facilitée par une excellente
résolution16. Ainsi, dans le cadre de l’éradication d’une
tumeur solide cancéreuse, l’effet thérapeutique des
nanoparticules peut être activé par un stimulus
physique externe qui peut correspondre à un faisceau
de photons X, γ (radiothérapie), du visible (thérapie
photodynamique) ou du proche infrarouge (thérapie
photothermique), à un faisceau de neutrons (thérapie
par capture de neutrons), à un faisceau d’ions
(hadronthérapie),
à
un
champ
magnétique
(hyperthermie magnétique), etc.. Ce processus se met
en place lorsque la teneur en agents thérapeutiques
déterminée par IRM est élevée dans la tumeur (pour
une destruction efficace) et la plus faible possible dans
les tissus sains environnants (afin de limiter les effets
secondaires délétères). L’efficacité à court et moyen
terme d’un traitement commandé à distance requiert
donc le contrôle de la biodistribution qui doit être
Observatoire des Micro et NanoTechnologies
Micro & Nano Médecine
d’imagerie fait l’objet d’attention particulière comme
l’illustre, en France, le soutien aux projets IMAPPI (IRM
et TEP couplées en imagerie pré-clinique) et LILI
(système hybride de tomographie et d'imagerie par
résonance magnétique) par le programme EquipEx, car
elle permettrait de profiter de l’excellente résolution de
l’IRM et de l’extrême sensibilité de la TEP pour une
meilleure
évaluation de
la
biodistribution
des
nanoparticules34.
Figure 231 : Fusion d’images in vivo acquises par TEP et IRM de
souris portant des tumeurs xénogreffées HT-29 1 h après injection
de nanoparticules d’oxyde de fer fonctionnalisées par des chélates
de gallium-68 (68Ga-NOTA) 68Ga-NOTA-OA-IONP. La flèche rouge
indique la position de la tumeur.
Extrait avec la permission de Biomaterials 34, 8114 (2013). Copyright
2013 Elsevier.
Si, jusqu’à présent, la plupart des nanoparticules
radioactives ont été développées pour étudier leur
biodistribution avec une grande précision, il existe des
exemples d’application thérapeutique qui s’inspirent de
la curiethérapie. Cette dernière consiste à introduire
dans la tumeur un matériau radioactif dont le
rayonnement est capable d’induire la mort des cellules
cancéreuses. C.S. Cutler et al. ont montré que les
nanoparticules d’or radioactives administrées par voie
intratumorale
étaient
capables
de
contrôler
efficacement la croissance d’une tumeur25.
Malgré les contraintes induites par le caractère ionisant
de leur rayonnement, les nanoparticules radioactives
présentent des atouts extrêmement attrayants pour
l’étude de la biodistribution des nanoparticules, un
préalable incontournable avant d’envisager leur
application biomédicale et pour la curiethérapie.
L’intérêt pour ce type de nanoparticules se trouve
renforcé par les développements actuels qui visent à
mettre au point des machines capables d’imager le
même animal par IRM et TEP. Ces différentes
perspectives
devraient
en
retour
conduire
à
l’émergence de stratégies plus efficaces et plus sûres
pour produire des nanoparticules radioactives. Parmi
les pistes explorées, celle proposée par D.W. Kim et al.
(Chonbuk National University Medical School,
Corée) est très élégante. Elle consiste à marquer in
vivo les nanoparticules retenues dans une tumeur
solide par une entité moléculaire radioactive (marquée
au fluor-18) injectée 24 h après l’administration des
nanoparticules. Afin que le marquage soit spécifique, la
réaction de couplage repose sur une réaction de chimie
bio-orthogonale35.
Observatoire des Micro et NanoTechnologies
Emergence des nanoparticules
de polymères de coordination
poreux en nanomédecine
Yannick Guari & Jérôme Long
Le nom bleu de Prusse (BP) est l’une des nombreuses
appellations données au plus ancien des polymères de
coordination
poreux
découvert
fortuitement
en
Allemagne au début du XVIIIème siècle. Ce composé
non-stœchiométrique
de
formule
générale
A1-xFe[Fe(CN)6]1-(x/4)nH2O (A étant un cation alcalin,
n = 14-16) présente une structure tridimensionnelle
poreuse formée par l'enchainement de ponts Fe(II)-CNFe(III). En s'appuyant sur la flexibilité de la chimie de
coordination, il est aisé de moduler la nature des
cations métalliques pour obtenir des analogues du BP.
A l’origine utilisé comme pigment pour teinter les
uniformes de l’armée prussienne, ce qui lui a valu son
nom le plus usité, le BP est maintenant l'unique produit
approuvé par la Food & Drug Administration aux USA36
avec autorisation de mise sur le marché temporaire en
France sous le nom de Radiogardase@37 pour le
traitement de personnes contaminées suite à une
exposition au césium ou thallium radioactif. Au début
des années 2000, de nombreuses études ayant pour
thème la synthèse de nanoparticules de bleu de Prusse
ou de ses analogues38 se sont développées ouvrant un
champ applicatif beaucoup plus vaste pour ces
composés notamment en nanomédecine.
 Le bleu de Prusse comme agent de
contraste IRM
Le groupe de S.D. Huang de l'Université d'État de
Kent (Etats-Unis), très actif dans ce domaine, est à
l’origine de plusieurs brevets 39,40,41 et publications
s’intéressant au potentiel de nanoparticules de BP ou de
certains de ces analogues comme agents de contraste
en Imagerie par Résonance Magnétique (IRM)42,43. Il a
été ainsi été montré que des nanoparticules de BP
stabilisées par des ligands citrates présentent un temps
de relaxation longitudinal T1 en IRM. Ceci est
directement lié à un mécanisme par sphère interne
s'explique
vraisemblablement
par
l'échange
de
molécules d'eau directement coordinées aux ions
ferriques du fait de la non-stœchiométrie du BP. La
valeur de la relaxivité longitudinale r1 est d’un ordre
de grandeur inférieur par rapport aux traditionnels
complexes macrocycliques de gadolinium, mais cette
difficulté se traduisant par un contraste moins élevé,
peut être compensée par des concentrations en agent
de contraste supérieures au vu de la non-toxicité des
nanoparticules de BP démontrée par des tests de
cytotoxicité in vitro42,43.
 Vers d'autres types d'applications
médicales innovantes
Les propriétés optiques du BP peuvent également être
mises à profit pour des applications biomédicales. Le
potentiel des nanoparticules BP comme agent de photoablation thermique a par ailleurs été mis en évidence
par le groupe de X. Yue de l’Institut de Technologie
de Harbin (Chine)44.
Avancées, tendances et perspectives – Février 2014 |
231
Nanoparticules, nanomatériaux : effets sur la santé et l'environnement
caractérisation de la dispersion résultante, et utiliser le
type cellulaire le plus sensible et pertinent en fonction
de l’exposition humaine prévisible.
Le test du micronucleus in vitro sur cellules de
mammifères peut être réalisé conformément à la ligne
directrice l'OCDE 48716, mais avec des cellules cibles
autres que celles préconisées d’une façon standard.
Toutefois, l'internalisation de particules dans les cellules
du système d'essai choisi doit être démontrée afin de
s’assurer de la pertinence de résultats négatifs. Le test
du micronoyau in vivo sur érythrocytes de mammifère
(ligne directrice OCDE 47417) peut être utilisé, mais une
nouvelle fois, l’exposition de l’organe cible étudié doit
être démontrée. D'autres tests in vivo pourraient être
applicables pour l’étude de la génotoxicité de NMs
comme par exemple le test du micronoyau in vivo sur
poumon ou sur le côlon qui peuvent être des organes
cibles.
D’après les résultats scientifiques préliminaires, les NMs
étudiés dans le cadre de NANOGENOTOX n'ont pas
montré de forte génotoxicité in vitro et in vivo, ni dans
les cellules cibles exposées après gavage (côlon), ni
après instillation (poumon), ni in vitro sur les modèles
3D de peau humaine reconstruite. Cependant, dans
plusieurs cas, certains effets génotoxiques ont été
détectés in vitro et in vivo même aux doses les plus
faibles testées. Des études de confirmation devraient
être réalisées afin de pouvoir conclure définitivement.
Les travaux conduits dans le cadre de NANOGENOTOX
viennent renforcer d’autres initiatives internationales,
notamment les travaux de caractérisation du comité
technique sur les nanotechnologies de l’Organisation
internationale de normalisation (ISO TC22918). Les
résultats générés devraient compléter l'important
travail mené par les membres du groupe de travail de
l'OCDE sur les nanomatériaux manufacturés ; travail
amené à se poursuivre au cours des années à venir, en
particulier par le biais du Programme de parrainage
pour les essais des nanomatériaux manufacturés. En
outre, à partir de ces résultats, un travail de réflexion
sur l’adaptation des lignes directrices de l’OCDE pour
les tests de génotoxicité in vitro et in vivo a été initié
lors de la réunion qui s’est déroulée à Ottawa les 18 et
19 novembre 2013.
Essais d’écotoxicité pour la
caractérisation des dangers des
nanoparticules :
quelles limites, quelles avancées,
quels besoins ?
Nicolas Manier
La caractérisation du danger des nanoparticules et
nanomatériaux manufacturés vis-à-vis des organismes
vivants est un élément indispensable à l’évaluation des
risques pour l’environnement de ces substances
émergentes. La plupart des essais utilisés dans un
contexte réglementaire pour caractériser l’écotoxicité
des substances chimiques a été développée puis validée
sur la base des connaissances acquises sur des
substances dites "conventionnelles", et le plus souvent,
solubles dans l’eau. Parmi ces essais, les protocoles
décrits par les lignes directrices de l’OCDE sont
Observatoire des Micro et NanoTechnologies
couramment utilisés à des fins réglementaires depuis la
mise en place du principe d’acceptation mutuelle des
données. Cependant, la grande variété et la complexité
des nanoparticules, ainsi que la publication de résultats
contradictoires ont fait émerger un certain nombre de
questions quant à l’adéquation de ces protocoles d’essai
pour
la
caractérisation
de
l’écotoxicité
des
nanoparticules et nanomatériaux.
Dans ce contexte, l’OCDE avait mis en place, dès 2006,
plusieurs groupes de travail au sein de la "Working
Party of Manufactured Nanomaterials" (WPMN). Ces
groupes de travail ont entre autres pour objectif de
discuter de l’adéquation des lignes directrices de l’OCDE
décrivant les protocoles d’essai d’écotoxicité. En 2009,
l’applicabilité de l’ensemble des essais OCDE existants
pour la caractérisation des dangers des nanoparticules
a fait l’objet d’une revue19. D’une façon générale,
même si l’ensemble des experts s’accordaient à dire
que, pour le choix des organismes d’essai ou encore
pour le choix des critères d’effets suivis (mortalité,
croissance, reproduction), les bioessais disponibles pour
l’évaluation
de
l’écotoxicité
des
substances
"conventionnelles"
étaient
applicables
aux
problématiques liées aux nanomatériaux ; certains
aspects méthodologiques se sont, au contraire, révélés
limitants pour pouvoir obtenir des données d’écotoxicité
fiables et reproductibles. La fin de l’année 2012 et
l’année 2013, ont été marquées par la publication de
plusieurs travaux et l’organisation de différents
workshop et symposium20,21,22 abordant spécifiquement
ces questions.
R.D. Handy et al.23,24 sont revenus sur les connaissances et l’expérience acquises ces cinq dernières
années en ce qui concerne l’utilisation des essais
standardisés (aquatiques, sédimentaires et terrestres)
pour la caractérisation des dangers des nanoparticules.
Ils rapportent notamment dans ces revues les
limitations concernant la préparation des suspensions
de nanoparticules pour les essais d’écotoxicité. Le
manque de consensus et d’harmonisation des
protocoles limitent la comparaison des résultats
d’écotoxicité obtenus jusqu’à aujourd’hui, quel que soit
le compartiment étudié (aquatique, sédimentaire ou
terrestre). Au cours de l’année 2012, les groupes de
travail de la WPMN de l’OCDE ont publié un document
intitulé "Guidance notes on sample preparation and
dosimetry for the safety testing of manufactured
nanomaterials"25. Ce guide est une première base
documentaire listant et décrivant les principales
procédures existantes. Néanmoins, il ne fournit pas,
pour le moment, de procédure précise pour la
préparation des nanoparticules. Dans leur revue, Handy
et al.23 discutent des avantages et des inconvénients de
chacune des méthodes de préparation recensées dans
la littérature et mettent en avant l’urgence et la
nécessité de proposer un ou plusieurs protocoles
harmonisés pour la réalisation des essais d’écotoxicité.
Ces auteurs identifient également la difficulté à
maintenir une exposition constante durant les essais
sur les organismes aquatiques. Ils mettent également
en avant les limites concernant la caractérisation des
nanoparticules pendant la phase d’exposition des
organismes et notamment la nécessité de définir les
paramètres à suivre, les techniques à utiliser et la
fréquence à appliquer.
D’autre part, ils mentionnent, plus spécifiquement pour
les essais aquatiques tels que l’essai d’inhibition de la
croissance des microalgues d’eau douce ou l’inhibition
Avancées, tendances et perspectives – Février 2014 |
257
Nanoparticules, nanomatériaux : effets sur la santé et l'environnement
de
la
mobilité
harmonisation :
des
microcrustacés,
la
non-
 des
procédures
d’exposition
(agitation
ou
renouvellement des milieux), facteur fondamental
pouvant
influencer
le
comportement
des
nanoparticules et l’exposition des organismes au
cours des essais ;
 des procédures d’éclairage (source, intensité et
photopériode), pouvant avoir une influence majeure
dans le cas de l’étude de l’écotoxicité de
nanoparticules
ayant
des
propriétés
photocatalytiques ;
 des procédures de comptage des cellules lors de la
réalisation de l’essai d’inhibition de la croissance des
microalgues d’eau douce.
Concernant
les
essais
d’écotoxicité
pour
les
compartiments sédimentaire et terrestre, une fois de
plus ce sont les protocoles de préparation des
suspensions de nanoparticules et d’inclusion des
nanoparticules dans les matrices d’essais (voie liquide,
voie sèche ou pulvérisation en surface) qui ont été
identifiés comme pouvant avoir une influence majeure
sur le résultat de l’essai. D’autre part, ces auteurs
mettent également en avant la grande difficulté à
caractériser les nanoparticules dans les matrices solides
(i.e. sol naturel ou artificiel) et par conséquent à
déterminer de façon précise quelle est l’exposition des
organismes au cours de l’essai et quels paramètres
(nombre de particules, surface spécifique, état
d’agglomération, …) sont responsables des effets
observés.
Ces questionnements ont été confortés par plusieurs
travaux récemment publiés qui avaient pour objet de
quantifier et définir les limites des conditions jugées
comme pouvant avoir une influence majeure sur le
résultat des essais d’écotoxicité. Ainsi, H. Ma et al.26
(US
Environmental
Protection
Agency)
et
I. Amiano et al.27 (Tecnalia, Espagne) ont clairement
montré que la toxicité aigüe de certaines nanoparticules
de TiO2 photoactives pouvait être exacerbée lorsque
l’expérience avait été conduite sous certaines
conditions d’éclairage (rayonnements solaires et UVA
notamment). Ils suggèrent l’importance de définir de
façon précise les conditions d’éclairage lors de la
réalisation du test d’inhibition de la mobilité des
daphnies pour lequel la ligne directrice OCDE 20228
recommande l’application d’une photopériode de
16 heures d’éclairage et 8 heures d’obscurité, sans pour
autant définir avec précision les conditions d’éclairage,
et laisse également à l’expérimentateur le choix de
réaliser ou non l’essai à l’obscurité complète. Plus
récemment, I. Römer et al.29 (Université de
Birmingham, 2013) ont publié une étude abordant la
question de l’influence de la dureté du milieu d’essai
sur le comportement des nanoparticules durant la
phase d’exposition des organismes et sur le résultat
d’écotoxicité obtenu. Ils montrent notamment que pour
l’essai d’inhibition de la mobilité des daphnies 28,
l’utilisation de milieux ayant une dureté plus faible
influençait de façon significative l’exposition des
organismes et le résultat. Ils mettent en avant
l’importance de définir un ou plusieurs milieux types
pour la caractérisation des dangers pour le milieu
aquatique des nanoparticules. Ce constat est d’autant
plus important que les protocoles actuels admettent
une certaine souplesse en ce qui concerne la
composition et la dureté du milieu pour cet essai.
258
| Avancées, tendances et perspectives – Février 2014
Enfin, K. Hund-Rinke et al.30 (Institut Fraunhofer,
2012) ont quant à eux étudié l’influence du mode de
préparation et d’inclusion des nanoparticules pour la
réalisation de l’essai d’inhibition de la reproduction des
vers de terre en considérant le protocole de la ligne
directrice OCDE 22231 et discutent des limites des
différents modes de préparation envisageables. Ils
suggèrent notamment que pour cet essai, l’inclusion
par voie solide en utilisant du sol comme vecteur serait
le protocole le plus adéquat en comparaison avec une
inclusion par voie liquide.
Malgré ces résultats récents, les études comparatives
permettant de définir les limites des protocoles d’essais
utilisés dans un cadre réglementaire pour la
caractérisation des dangers des nanoparticules restent
limitées. Il apparaît nécessaire de poursuivre les
travaux
dans
ce
domaine
afin
de
disposer
d’informations
pour
améliorer
les
protocoles
standardisés et les lignes directrices existants ou pour
rédiger de nouvelles lignes directrices qui prennent en
compte
la
spécificité
des nanomatériaux.
Les
conclusions apportées lors de la réunion des experts de
l’OCDE qui s’est tenue à Berlin début 2013 vont dans ce
sens. Plusieurs projets d’amendement ou d’élaboration
de nouveaux documents-guides ou de nouvelles lignes
directrices (concernant la préparation des suspensions
pour la réalisation des essais, notamment) ont été
proposés à l’OCDE et seront étudiés prochainement.
Surveillance des effets des
nanomatériaux sur la santé chez
l’Homme - place aux indicateurs
biologiques
Irina Guseva-Canu
Dotés de propriétés physico-chimiques nouvelles liées à
leur petite taille, les nanomatériaux connaissent un
développement industriel important. Parallèlement à
cet essor, des interrogations sur les risques potentiels
pour la santé humaine liés à une exposition aux
nanomatériaux se font jour. En effet, de très
nombreuses études toxicologiques évoquent une
dangerosité particulière des nanomatériaux qui sont
susceptibles de traverser les barrières biologiques de
l’organisme et d’engendrer des effets pulmonaires mais
également
cardiovasculaires,
neurologiques,
immunitaires, etc. L’induction d’inflammation, de stress
oxydant, la génotoxicité, la formation de couronnes de
protéines (il s’agit de l’effet « cheval de Troie ») sont
autant de mécanismes physiopathologiques déjà
documentés. Il n’existe que très peu de données
épidémiologiques portant sur les nanomatériaux mais
un parallèle peut être établi entre la problématique des
nanomatériaux et celle de la pollution atmosphérique
particulaire. En effet, il est désormais admis que la
morbidité et la mortalité respiratoire et cardiovasculaire sont affectées de façon causale par une
exposition à la pollution atmosphérique particulaire ; la
fraction ultrafine semble avoir un rôle central dans les
effets sanitaires observés.
Si l’on possède un relatif recul sur les effets de la
pollution atmosphérique, étudiée dans plusieurs
populations depuis de nombreuses années, les
mécanismes d’action physiopathologique sont encore
Observatoire des Micro et NanoTechnologies