éthique IFSI 04-02-2013 - ifsi du chu de nice 2012-2015

Download Report

Transcript éthique IFSI 04-02-2013 - ifsi du chu de nice 2012-2015

Réflexions sur les questions éthiques
autour de la fin de vie
Christian Dageville
Réanimation néonatale, Hôpitaux Pédiatriques de Nice
Espace Ethique Azuréen
1

Suicidez-vous jeune, vous
profiterez de la mort
Pierre Desproges
2
« Affaire V. Humbert » + ADMD (2002) ; 1ère commission Léonetti (2004) ;
loi Leonetti (2005) ; 2ème commission Léonetti (2008) ; mission Sicard (2012) ;
3 questions au CNCE (2013) ;
nouvelle loi ?
2 parties :
Point de vue d'un
soignant
- les 2 attitudes soignantes face à la mort
- le « rapport Sicard »
3
Préambule : quelque"s définitions
La morale : prescrit des règles générales / consensuelles pour bien agir
domaine des certitudes
Exemple : nul n'a le droit de disposer de la vie d'autrui
L'éthique : travail d'élaboration - situation concrète  que décider / que faire ?
 ce que nous avons la volonté de faire
 ce que nous avons le droit faire
Le choix de la
moins mauvaise solution
 ce que nous avons le devoir faire
 ce que nous allons faire
domaine du doute
Le dilemme éthique : 4 caractères
 des principes contradictoires
 des principes égaux en valeur
 aucune bonne décision ne s’impose
Oppose souvent :
le respect de la morale/ de la loi
et la responsabilité face au patient
le légal / le légitime
le bien / le bon
 décision que l’équipe considère comme la moins mauvaise
4
1ère partie : les 2 attitudes soignantes face à la mort
Face à la fin de vie de la personne malade,
le soignant peut :
accepter la mort
de la personne malade
 Accepter la mort non inéluctable ?
 Lutter contre la souffrance
au risque d’abréger la vie ?
être l'auxiliaire de la mort
de la personne malade
 Aider la personne malade
à se donner la mort ?
 Donner la mort à la personne malade
qui le demande ?
 Donner la mort à la personne malade
hors d’état d’exprimer sa volonté ?
5
1ère partie : les 2 attitudes soignantes face à la mort
Accepter la mort
 Accepter la mort non inéluctable ?
 Lutter contre la souffrance au risque d’abréger la vie ?
Être l'auxiliaire de la mort
 Aider la personne malade à se donner la mort ?
 Donner la mort à la personne malade qui le demande ?
 Donner la mort à la personne malade hors d’état d’exprimer sa volonté ?
6
Cas clinique : accepter la mort non inéluctable
Madame S.
92 ans
transférée aux urgences de l’hôpital : elle refuse de s’alimenter depuis plusieurs jours ;
elle semble assez cohérente dans ses propos.
Tentative de pose de perfusion pour réhydratation : échec
« Laissez moi mourir, assassins »
Une nouvelle tentative de perfusion serait-elle légitime ?
7
Cas clinique : accepter la mort non inéluctable
Fleur.
3 ans
noyade en piscine
en réanimation pédiatrique ; lésions cérébrales massives
avenir probable : perte complète de toute vie autonome et de toute vie relationnelle
Question de l'équipe : « A quoi sert cette réanimation ? »
Interrompre les traitements qui la maintiennent en vie serait-il légitime ?
8
1ère partie : les 2 attitudes soignantes face à la mort
 Accepter la mort non inéluctable
= renoncer aux traitements curatifs
qui permettraient de retarder la survenue de la mort
9
10
1ère partie : les 2 attitudes soignantes face à la mort
Accepter la mort
 Accepter la mort non inéluctable ?
 Lutter contre la souffrance au risque d’abréger la vie ?
Être l'auxiliaire de la mort
 Aider la personne malade à se donner la mort ?
 Donner la mort à la personne malade qui le demande ?
 Donner la mort à la personne malade hors d’état d’exprimer sa volonté ?
11
Cas clinique : Lutter contre la souffrance au risque d’abréger la vie
Monsieur H.
58 ans
Cancer pulmonaire en phase terminale
Semble très gêné pour respirer ; angoissé ++ ; souffre
 il faudrait augmenter la morphine (au risque d’entraîner un arrêt respiratoire)
« aidez moi ; je n’en peux plus »
Augmenter la morphine pour abolir la sensation d’étouffement,
au risque d’abréger la vie, cela serait-il légitime ?
12
1ère partie : les 2 attitudes soignantes face à la mort
 Lutter contre la souffrance au risque d’abréger la vie
= renforcer les traitements de la souffrance quelqu'en soient les conséquences
parce que la souffrance est trop importante (médicaments à double effet)
13
La mort …
est la conséquence
d’un manque de savoir-vivre

Pierre Dac
14
14
1ère partie : les 2 attitudes soignantes face à la mort
Accepter la mort
Les 5 principes
de la loi Léonetti
 Accepter la mort non inéluctable ?
 Lutter contre la souffrance au risque d’abréger la vie ?
Être l'auxiliaire de la mort
 Aider la personne malade à se donner la mort ?
 Donner la mort à la personne malade qui le demande ?
 Donner la mort à la personne malade hors d’état d’exprimer sa volonté ?
15
1ère partie : les 2 attitudes soignantes face à la mort
 Accepter la mort non inéluctable ? Lutter contre la souffrance au risque d’abréger la vie ?
La loi Léonetti (1)
Renoncer à un traitement curatif
est autorisé
- si le patient le demande ou
- si retarder la mort = acharnement
l'obstination déraisonnable
est condamnable
Nous ne retarderons pas votre mort contre votre volonté
au-delà du raisonnable
La mort est acceptée :
elle survient du fait de la maladie
16
1ère partie : les 2 attitudes soignantes face à la mort
 Accepter la mort non inéluctable ? Lutter contre la souffrance au risque d’abréger la vie ?
La loi Léonetti (2)
Augmenter les traitements de la souffrance quelques soient les conséquences
est autorisé si la souffrance du patient l’impose
en fin de vie, qualité de vie > quantité de vie
Quoiqu’il arrive, nous ne vous laisserons pas souffrir
La mort est acceptée :
elle survient du fait des traitements contre la souffrance rebelle
17
1ère partie : les 2 attitudes soignantes face à la mort
 Accepter la mort non inéluctable ? Lutter contre la souffrance au risque d’abréger la vie ?
La loi Léonetti (3)
Renoncement aux soins curatifs

Soins palliatifs obligatoires
Nous ne vous abandonnerons pas, nous vous accompagnerons
Soins palliatifs
= un seul objectif : le confort du patient, malgré sa maladie
= on prend soin du malade (≠ traiter la maladie)
18
1ère partie : les 2 attitudes soignantes face à la mort
 Accepter la mort non inéluctable ? Lutter contre la souffrance au risque d’abréger la vie ?
La loi Léonetti (4)
Si le patient adulte peut exprimer sa volonté 
C’est le patient qui décide
Nous ne déciderons pas
à votre place
Si le patient, adulte, est incapable d’exprimer sa volonté
Si le patient est mineur
Nous réfléchirons
avec d'autres
1- réflexion avec les proches
2- réflexion avec l’équipe
→
les directives anticipées
la personne de confiance
la famille
les parents
3- c’est le médecin responsable qui décide
19
1ère partie : les 2 attitudes soignantes face à la mort
 Accepter la mort non inéluctable ? Lutter contre la souffrance au risque d’abréger la vie ?
La loi Léonetti (5)
Rien ne doit être clandestin 
- tout doit être dit au patient ; à sa famille
- tout doit être écrit dans le dossier
Nous ne ferons rien en secret
20
1ère partie : les 2 attitudes soignantes face à la mort
 Accepter la mort non inéluctable ? Lutter contre la souffrance au risque d’abréger la vie ?
La loi Léonetti en pratique
Voir rapport Sicard
21
22
1ère partie : les 2 attitudes soignantes face à la mort
Accepter la mort
 Accepter la mort non inéluctable ?
 Lutter contre la souffrance au risque d’abréger la vie ?
Être l'auxiliaire de la mort
 Aider la personne malade à se donner la mort ?
 Donner la mort à la personne malade qui le demande ?
 Donner la mort à la personne malade hors d’état d’exprimer sa volonté ?
23
Cas clinique : aider la personne malade à se donner la mort
Madame Y.
45 ans
Maladie neurologique dégénérative incurable
Actuellement, motricité des bras encore présente + autonomie alimentaire
« je ne veux pas connaître ma déchéance ;
je veux me donner la mort avant ; aidez moi »
Aider Mme Y. à se donner elle-même la mort serait-il légitime ?
24
1ère partie : les 2 attitudes soignantes face à la mort
 Aider la personne malade à se donner la mort ?
= aide au suicide :
- La personne est atteinte d’une maladie grave et incurable ;
- elle veut mettre fin à ses jours ;
- un tiers (soignant) lui fournit une assistance technique ;
- l’acte est exécuté par la personne (produit per os)
En France, l'aide au suicide :
est illégale ; pas de consensus sur sa légitimité
- Actuellement aide au suicide dans 2 cantons de la Suisse
dans 3 états USA (Orégon/Montana/Washington) ;
- Concerne moins de 0,5% des décès.
25
1ère partie : les 2 attitudes soignantes face à la mort
Accepter la mort
 Accepter la mort non inéluctable ?
 Lutter contre la souffrance au risque d’abréger la vie ?
Être l'auxiliaire de la mort
 Aider la personne malade à se donner la mort ?
 Donner la mort à la personne malade qui le demande ?
 Donner la mort à la personne malade hors d’état d’exprimer sa volonté ?
26
Cas clinique : donner la mort à la personne malade qui le demande
Vincent Humbert ; 20 ans
Accident en 2000 : tétraplégie + cécité + mutisme
communique avec son pouce droit
En 2002 Vincent Humbert demande à plusieurs reprises
à sa mère et aux médecins une euthanasie
Donner la mort à Vincent Humbert, qui en fait la demande, était-il légitime ?
27
1ère partie : les 2 attitudes soignantes face à la mort
 Donner la mort à la personne qui le demande ?
= euthanasie :
- personne gravement malade
- un acte volontaire
- un moyen médical
- une demande de la personne
En France l'euthanasie
est illégale ; profonde divergence sur sa légitimité
- Possible en Hollande, Belgique, Luxembourg
- En France pas de condamnation récente
demande < 2% des décès ; réalisation < 0,3 % des décès
28

La mort,
ce sont les droits de l’homme
qui s’effacent devant
les droits de l’asticot
Pierre Desproges
29
1ère partie : les 2 attitudes soignantes face à la mort
Accepter la mort
 Accepter la mort non inéluctable ?
 Lutter contre la souffrance au risque d’abréger la vie ?
Être l'auxiliaire de la mort
 Aider la personne malade à se donner la mort ?
 Donner la mort à la personne malade qui le demande ?
 Donner la mort à la personne malade hors d’état d’exprimer sa volonté ?
30
Cas clinique : Donner la mort à la personne malade hors d’état d’exprimer sa volonté
Ethan.
Nouveau-né ; J8 de vie
Accident pendant l’accouchement ; arrêt de l’oxygénation cérébrale
Réanimation intensive ; autonomie acquise dès le 4ème jour mais ne tète pas
douleurs liées à l’hypertonie : sédation – antalgie efficace
bilan : destructions cérébrales massives  handicap lourd dans l’avenir
Parents + équipe : « le mieux serait que sa vie s’arrête là »
Un acte euthanasique pour Ethan (qui ne le demande pas) serait-il légitime ?
cet acte euthanasique = augmentation des doses de sédation pour obtenir la mort
31
1ère partie : les 2 attitudes soignantes face à la mort
 Donner la mort à la personne malade hors d’état d’exprimer sa volonté ?
= sédation terminale ; concerne la personne définitivement incapable de relation
En France, la sédation terminale est illégale ;
profonde divergence sur sa légitimité
Transgression de la loi revendiquée par certains médecins en France
- euthanasie "douce" par renforcement de la sédation
- la personne malade a perdu ses capacités relationnelles
- acte considéré comme exceptionnel
- doit être envisagé collégialement
- doit être inscrit dans le dossier
- ne constitue pas une remise en cause de l’interdit légal
32
33
2ème partie : le « rapport Sicard »
Penser solidairement la fin de vie
RAPPORT
A
FRANCOIS HOLLANDE
PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE FRANCAISE
COMMISSION DE REFLEXION
SUR
LA FIN DE VIE EN FRANCE
18 décembre 2012
34
2ème partie : le « rapport Sicard »
Un constat
 Des plaintes / des peurs :
les médecins se désintéressent de la fin de vie
35
2ème partie : le « rapport Sicard »
Un constat
"Nous ne retarderons pas votre mort contre votre volonté / au-delà du raisonnable"
trop d'acharnement
"Quoiqu’il arrive, nous ne vous laisserons pas souffrir"
trop de souffrance mal calmée en fin de vie
"Nous ne vous abandonnerons pas, nous vous accompagnerons"
Soins palliatifs déficients
"Nous ne déciderons pas à votre place / Nous réfléchirons avec d'autres"
pas assez d’information ; pas assez d’écoute ; pas assez de collégialité
"Nous ne ferons rien en secret"
Peur des décisions clandestines
36
2ème partie : le « rapport Sicard »
Un constat (suite)
 Un consensus impossible
entre partisans et adversaires de la légalisation de l’euthanasie
Contre
Pour
 les plus vulnérables ne seraient plus protégés a priori
 droit à mourir dans la dignité
 obligation pour le médecin (clause de conscience ?)
 droit à une mort sans souffrance
 renforcement du pouvoir médical
 Droit à maîtriser sa propre mort
 regard négatif sur la dépendance / le vieillissement
37
2ème partie : le « rapport Sicard »
Des propositions / la mort acceptée
Renforcer le dispositif «directives anticipées» ?
- 1er document standardisé (proposé par le médecin traitant)
- 2ème document spécifique ( proposé en cas de maladie grave)
- Le médecin devrait motiver son refus de se conformer à ces directives.
1ère question posée par
le président de la république
au Comité National Consultatif d'Éthique
38
2ème partie : le « rapport Sicard »
Des propositions / les soins palliatifs
 Renforcer / élargir la notion de soins palliatifs ?
- intégrer La notion de SP précocement dans la démarche de soins ;
Soins palliatifs
en fin de vie
Soigner =
soins curatifs tant qu’ils sont raisonnables
+ soins de confort dès le début de la maladie
- réorienter certains crédits (associations) ;
- soins à domicile ;
- congé solidarité familiale
39
2ème partie : le « rapport Sicard »
Des propositions / Donner la mort ?
L’assistance au suicide ?
si demande maintenue malgré efforts pour trouver une alternative ,
 L’euthanasie ?
Son autorisation n’est pas souhaitable, mais…
2ème question posée par
le président de la république
au Comité National Consultatif d'Éthique
40
2ème partie : le « rapport Sicard »
Des propositions / une ambiguïté ?
 La sédation terminale
/
la sédation en phase terminale ?
Pour accélérer la mort
Pour lutter contre la souffrance
au risque d’abréger la vie
=
=
Donner la mort
Accepter la mort
La sédation
terminale
= "exception d'euthanasie" ?
3ème question
posée par
le président de la république
au Comité National Consultatif d'Éthique
Pour la personne malade en agonie / pour la personne malade coupée du monde ?
 L'agonie qui se prolonge peut perdre son sens ? Quel sens peut avoir une survie sans relation véritable ?
 Parfois "laisser mourir" peut être cruel ?
 Acte euthanasique par sollicitude ?
 Sédation terminale ≠ euthanasie "à froid" par un acte d'exécution ?
41
Je préfère
le vin d’ici
à l’au-delà !
Francis Blanche
42
Conclusion
"Sommes-nous libres de choisir notre mort ?"
1 – La personne malade a le droit d’exiger
que les soignants prennent la mort au sérieux
médicaliser / humaniser la mort (?)
2 – La personne malade a le droit d’exiger
que les soignants renoncent à prolonger sa survie
Il faut solliciter et respecter les directives anticipées
3 – La personne malade a le droit d'exiger
que les soignants lui prodigue des soins de confort
il faut associer les soins de confort aux soins curatifs dès le début de la prise en charge
4 – La personne malade ne peut pas revendiquer
un droit à l’euthanasie : ce n'est pas un droit liberté
Droit suicide assisté ?
43
Conclusion
"Sommes-nous libres de choisir notre mort ?"
TROIS REPERES POUR LES SOIGNANTS
RESPONSABILITE
FACE AU PATIENT
RESPECT DU CADRE
MORAL / LEGAL
éthique de responsabilité
éthique de conviction
SAGESSE PRATIQUE
(Paul Ricœur)
«…inventer les conduites qui réponde le mieux
à l’exigence de sollicitude
en trahissant le moins possible la règle »
44
Conclusion
"Sommes-nous libres de choisir notre mort ?"
Et n’allez pas confondre et l’effet et la cause,
La mort est délivrance,
…
Le temps c’est le tic tac monstrueux de la montre,
La mort c’est l’infini dans son éternité.
« Ne chantez pas la mort » Léo Ferré / Jean-Roger Caussimon
45