Cannabis et travail

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Cannabis et travail
« Entreprises et stupéfiants »
SRE 29
28/09/2010
Dr BODENES Alexandra STI Brest
Questions posées :




Où en est la médecine du travail sur le sujet?
Quel rôle tient-elle?
Que faire en cas de suspicion lors d’une visite
annuelle?
Que peut faire le directeur d’entreprise en cas
de suspicion?
Consommation du cannabis en
France : Etat des lieux






Problème émergent depuis quelques années.
1,2 millions de consommateurs réguliers, 550 000
consommateurs quotidiens.
Evolution du niveau d’expérimentation du cannabis à 17 ans :
Doublement de la consommation entre 1990 et 2000.
Hommes : les H préfèrent le cannabis et l’alcool, les femmes préfèrent les
BZD, les amphétamines et propoxyfène, les jeunes préfèrent les cannabis et
les amphétamines.
Cependant tendance à la féminisation.
Taux THC : Pourcentage taux THC élevé/1968 ; pouvoir hallucinogène
augmente, agressivité, troubles de la vigilance…
Le monde de l’entreprise ne peut
être épargné

Arrivée dans le monde du travail de jeunes
polyconsommateurs

Secteurs les plus touchés : transport, hôtellerie, restauration
et construction.


La problématique des postes de sécurité – conditions de
travail + ou - addictogènes…
Conséquences :15 à 20% des accidents professionnels,
d’absentéisme et de conflits interpersonnels au travail, seraient
liés à l’usage de l’alcool, des psychotropes et des stupéfiants.
1ère étude chez des salariés du Nord-Pas-DeCalais (1995)


1976 échantillons d’urine de 13 services de santé au travail
24% de consommateurs de produits psychoactifs

4.81% de consommateurs de cannabis
4 salariés sur 10 affectés à un poste de sécurité sont
consommateurs de substances psychoactives

Biais :



pas de confirmation des dépistages urinaires
caractère régional de l’étude et proximité de l’Europe du Nord





2004 Nord-Pas de Calais :
1000 Chauffeurs routiers
Dépistage métabolites urinaires et
confirmation des positifs en GC/MS
99% H, 37 ans âge moyen
Cannabis 8,5% confirmés (85 CAS positifs)
Enquête finistérienne en 2006 : Alcool,
cannabis, tabac, médicaments psychotropes





Evaluer l’importance de la consommation de produits psycho-actifs au niveau de
l’entreprise sur 1 semaine Enquête par questionnaire dans le cadre de la médecine
du travail
Effectuée au cours des visites médicales du travail par 24 médecins (Brest, Morlaix, BTP
Finistère)
Durée : 1 semaine
16% employeurs se
Enquête ponctuelle
disent confrontés à
Respect de l’anonymat
une consommation
de produits illicites
60
entrepreneurs
Finistériens du
BTP
428 salariés
10,9 % cannabis
positif
82 % : moins de 35
ans

Enquête SAM (Stupéfiants et Accidents Mortels) :



230 décès/an/accident de la route/cannabis.
Risque accident de la route :
x 2 si cannabis +,
x 8 sous l’effet de l’alcool,
x 16 si cannabis + alcool.
Pas de données en France sur AT liés à une
consommation de cannabis.
Risques liés à la consommation aiguë

Effets recherchés : IVRESSE CANNABIQUE
•
Sensation de relaxation, de légèreté, de flottements.
•
Augmentation des perceptions sensorielles (lumière et
musique)
Altérations de l’espace et du temps
•
•
•
Euphorie, besoin de rire et de bavarder,
Facilitation du contact social
Risques liés à la consommation aiguë:
effets non recherchés
SOMATIQUES
•Tachycardie,
•Variations TA,
•Céphalées,
•Epigastralgies,
•Sensation de faim,
•Hyperhémie conjonctivale,
•Mydriase,
•Sécheresse oropharyngée
PSYCHIQUES
• Troubles anxieux (y compris
attaque de panique, « bad trip »)
•
•
Dépersonnalisation
Troubles psychotiques :



BDA,
hallucinations visuelles,
Sentiment persécutif diffus
(« effet parano »),
rémanences spontanées
(« flash-back »)


Effets induits :


accidents de la circulation,
accidents de travail.
Risques liés à la consommation aiguë

Ces effets secondaires sont:



Dose-dépendants
Personnalité-dépendants
Modifiés en cas de prise d’autres psychotropes
… Mais pour l’essentiel ils sont
NON PREDICTIBLES et
NON
REPRODUCTIBLES!!!
Cannabis et accidentologie

Diminution de l’aptitude à conduire:




Diminution des réflexes
Modifications des perceptions, de l’attention et du traitement des informations
Aptitude réduite pendant 2 à 4H (maximum 8 à 12H voire
plus) après avoir fumé du cannabis
Potentialisation respective des effets du cannabis et de l’alcool
sur la conduite (or fréquence de la consommation associée)
Le médecin du travail
Rôle de conseiller – garant de la santé en entreprise
Relations privilégiées avec la hiérarchie et les représentants
du personnel
Connaissance approfondie du travailleur dans un climat de
confiance
Connaissance du milieu et des conditions de travail
Indépendance professionnelle
Secret professionnel
L’employeur n’a juridiquement aucun moyen d’imposer à un
médecin du travail le recours, même pour certains postes
dangereux ou à risque, à tel ou tel examen particulier
complémentaire.
Le médecin du travail

Conseille le chef d’entreprise :
 aménagement des conditions de vie et de travail,
 la protection des salariés,
 la prévention et l’éducation sanitaires.

Assure à tout salarié une surveillance médicale en vue de
s’assurer du maintien de son aptitude au poste de travail
occupé.

Peut demander recours à des personnes ou organismes
spécialement qualifiés en matière de prévention des risques
professionnels, de sécurité et de conditions de travail.
Code du travail
• non discrimination à l’embauche pour état de santé, sauf inaptitude constatée par le
médecin du travail,
• examens complémentaires possibles en milieu du travail : à la charge de l’employeur
ou du service inter, pour déterminer l’aptitude au poste, pour le dépistage de
maladies professionnelles ou des maladies dangereuses pour l’entourage.
•
pas de disposition spécifique concernant le cannabis
Code de déontologie (art.95 et 75)
• indépendance des décisions sans limitation,
• respect du secret professionnel,
• action dans l’intérêt de la santé des personnes qu’ il examine, dans l’intérêt de leur
sécurité au sein de l’entreprise ou des collectivités dont il est responsable.
1. On conseille les sensibilisations en
entreprise


Mettre en place une politique globale d'entreprise ou d’établissement à
l'égard de l'usage nocif des substance psychoactives, afin de rendre plus
aidant le lieu de travail .
Présentation en CHSCT, notification du problème dans le règlement
intérieur, lister dans le RI les postes à risques, inclure le « risque addictif »
dans le document unique.

Création d’une cellule « addiction »
Prévision de la réinsertion ou de la reconversion

Intérêt des « interventions brèves »

2. Consultations de médecine du travail

Importance de l’entretien médical

Examen clinique : Recherche de symptômes (Pauvreté des
signes cliniques sauf situation aiguë)

Dépistage éventuel et examens complémentaires si nécessaires

Information sur les effets, sur les risques liés à la
consommation de cannabis
Consultations de médecine du travail

Orientation vers le réseau de soins : médecin traitant, service
d’alcoologie et d’addictologie, CCAA, ANPAA, drogues info
services, écoute alcool…

Prévoir étude de poste, discuter éventuellement aménagement,
mutation …aide à la réinsertion.

Dossier médical : la tenue et le contenu de nos dossiers doivent
suivre les recommandations de la HAS.
OUTILS DE REPERAGE
Questionnaire : CAGE Cannabis
• Avez-vous déjà ressenti le besoin de Diminuer votre consommation de
cannabis ?
• Votre Entourage vous a t-il déjà fait des remarques au sujet de votre
consommation ?
• Avez-vous déjà eu l'impression que vous fumiez Trop de cannabis ?
• Avez-vous déjà eu besoin de fumer du Cannabis dès le matin pour vous
sentir en forme ?
Deux réponses positives à ces questions ou plus évoquent une
consommation nocive.
Outils de repérage
Questionnaire d’auto-évaluation de consommation nocive de cannabis
1. Votre entourage s'est-il plaint de votre usage de cannabis ?
2. Avez-vous des problèmes de mémoire immédiate ?
3. Avez-vous déjà eu des épisodes délirants lors d'usage de cannabis ?
4. Considérez-vous qu'il est difficile de passer une journée sans "joint" ?
5. Manquez-vous d'énergie pour faire les choses que vous faisiez habituellement ?
6. Vous êtes vous déjà senti préoccupé par les effets de votre usage de cannabis ?
7. Avez-vous plus de difficultés à étudier ? à intégrer des informations nouvelles ?
8. Avez-vous déjà essayé sans succès de diminuer ou d'arrêter votre usage de
cannabis ?
9. Aimez-vous "planer", "être défoncé(e)", (stoned) dès le matin ?
10. Etes-vous de plus en plus souvent "défoncé(e)" ?
11. Avez-vous ressenti " le manque ", des maux de tête, de l'irritabilité ou des
difficultés de concentration quand vous diminuez ou arrêtez l'usage de cannabis ?
Trois réponses positives ou plus, suggèrent un usage problématique de cannabis.

Signes rapportés par la hiérarchie et/ou les collègues:






retards, absences,
productivité diminuée,
comportement d’évitement vis-à-vis de la hiérarchie,
réactions excessives face aux critiques,
fréquentation fréquente et de longue durée des toilettes,
insouciance quant à sa sécurité ou à celle des autres plus
par incurie que par mépris délibéré.
Visite médicale demandée par l’employeur
Les prélèvements

Le dépistage systématique est illégal
Appliquer les recommandations de la MILDT « réglementer le dépistage
systématique, encadrer le dépistage occasionnel, exclure le dépistage
sauvage »

Cas où l’usage de drogues peut présenter dans le poste
envisagé un risque pour le salarié ou pour autrui, le dépistage
est possible. Mais nécessité :
1.
2.
3.
4.
D’avertir l’intéressé de la réalisation du test
Que les emplois à risque soient listés dans le RI
Le médecin du travail demeure seul détenteur et interprète du résultat
La fiche d’aptitude ne doit renseigner que sur la fiche d’aptitude ou
l’inaptitude, partielle ou totale sans motivation de la décision.
Critères de qualité d’une méthode
d’analyse toxicologique
Sensibilité
Spécificité
Simplicité
Rapidité
Robustesse
Exhaustivité
Faible coût

« aucune méthode analytique ne satisfait à
l’heure actuelle, à l’ensemble des critères de
qualité »
Les prélèvements

Sang : marqueur d’exposition actuelle.





Seul prélèvement autorisant une interprétation quantitative :
Responsabilité dans un trouble du comportement ou de la vigilance?
Pas de parallélisme strict entre la concentration en THC et le degré
d’incapacitation produit par le cannabis.
Salive : ultrafiltrat du plasma, marqueur d’exposition actuelle
 Pas de corrélation stricte avec la concentration sanguine : valeur surtout
qualitative (applications contrôles routiers)
Urines : très bon prélèvement pour le dépistage mais …
 Marqueur d’exposition récente à semi-récente
 Intérêt exclusivement qualitatif
 Facilité d’adultération ou de substitution
Cas de troubles du comportement d’un salarié
: que doit faire l’employeur?





Intervenir le plus rapidement possible
Faire cesser une situation dangereuse
Protocole défini par l’employeur
Médecine de soins
Reprise du travail après réception d’un
certificat d’aptitude médical délivré par le
médecin.
Le chef d’entreprise

Obligations générales en matière de sécurité
 Obligation de sécurité à l’égard de ses salariés
 Responsabilité des dommages que des salariés peuvent occasionner à
des tiers (art. 1384 du Code civil)

Règlement intérieur
 Ne peut contenir de clauses contraires aux lois et règlements
 Ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles
et collectives des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la tâche à
accomplir
 Non respect
pouvoir disciplinaire
Le chef d’entreprise
Le pouvoir disciplinaire
conscience du salarié

Condition indispensable à la prise de
Comportement du toxicomane à l’occasion du travail :



irrégularité de la qualité du travail, retards fréquents ;
refus du respect des règles disciplinaires, actes violents,
insubordination…
Sanction
Licenciement (cause réelle et sérieuse)

Introduction de drogue dans l’entreprise :
Rupture immédiate du contrat de travail (faute grave)




Les obligations de l’entourage professionnel :
le secret, le signalement, l’assistance à personne
en
danger
?
L’état d’addiction couvert par le secret professionnel :
Code pénal, art. 226-13 : La révélation d'une information à caractère secret par une personne qui en
est dépositaire soit par état ou par profession, soit en raison d'une fonction ou d'une mission
temporaire, est punie d'un an d'emprisonnement et de 15 000 € d'amende. Se trouve visé ici le secret
médical pour les informations sur l’état de santé détenues par le médecin du travail et l’infirmière du
travail mais aussi les informations personnelles à caractère social détenues par les assistants(es) de
service social.
La confidentialité des situations et des informations personnelles à respecter dans l’entreprise
Le signalement du risque grave ?
Le travailleur alerte immédiatement l'employeur de toute situation de travail dont il a un motif
raisonnable de penser qu'elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé, C. trav.
art. L4131-1. C’est la gravité et l’immédiateté du risque qui oblige professionnellement et
pénalement à signaler et non l’état d’addiction : en dehors de cette hypothèse, obliger les salariés à
signaler toutes les conduites addictives qu’ils pourraient connaître serait illégal.
L’obligation d’assistance à personne en danger vise tous les tiers, dont l’entourage
professionnel, ayant connaissance de la situation d’une autre personne en danger :
Code pénal, art. 223-6 : Quiconque pouvant empêcher par son action immédiate, sans risque pour
lui ou pour les tiers, soit un crime, soit un délit contre l'intégrité corporelle de la personne s'abstient
volontairement de le faire est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 € d'amende.
Sera puni des mêmes peines quiconque s'abstient volontairement de porter à une personne en péril
l'assistance que, sans risque pour lui ou pour les tiers, il pouvait lui prêter soit par son action
personnelle, soit en provoquant un secours.
Et le salarié?

Art L 230-3 du CT : « … il incombe à chaque
travailleur de prendre soin, en fonction de sa
formation et selon ses possibilités, de sa
sécurité et de sa santé ainsi que celles des
autres personnes concernées du fait de ses
actes ou de ses omissions au travail ».
Questions posées :





Où en est la médecine du travail sur le sujet?
Quel rôle tient-elle?
Que faire en cas de suspicion lors d’une visite
annuelle?
Que peut faire le directeur d’entreprise en cas de
suspicion?
Source : Formation sur le cannabis Dr Esther
Szwarc, service de Pathologies professionnelles
Strasbourg.
MERCI !