Représentations d’enfants de la fin du primaire sur la diversité linguistique Françoise Armand & Diane Dagenais.

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Transcript Représentations d’enfants de la fin du primaire sur la diversité linguistique Françoise Armand & Diane Dagenais.

Représentations d’enfants de la fin du primaire sur la diversité linguistique

Françoise Armand & Diane Dagenais

Politique éducative au Québec

 La

Politique d’intégration et d’éducation interculturelle

incite les enseignants, qu’ils soient en milieux pluriethniques ou non, à favoriser, chez leurs élèves: le «

savoir-vivre ensemble

dans une société francophone, démocratique et pluraliste » (MEQ, 1998 : 26)

Politiques éducatives en C-B

• • Language Policy tous les élèves devraient avoir l’opportunité d’apprendre les langues valorisées par les diverses communautés de la province (Ministry of Education, 1996) Multiculturalism Policy - le curriculum devrait être axé sur la justice sociale, rejeter l’eurocentrisme et reconnaître les expériences et les contributions des divers groupes sociaux les activités pédagogiques devraient prendre en compte la diversité des citoyens, faciliter l’accès à l’égalité et développer la responsabilité civique (Ministry of Education, 2003)

 Nécessité de mettre en place

des activités d’éducation interculturelle

: il s’agit notamment de faciliter la mise en place de relations positives qui valorisent et reconnaissent

la diversité culturelle, mais aussi linguistique

.

 « Faire de la langue une composante essentielle de l’éducation interculturelle, en vue d’encourager la compréhension entre différentes populations et d’assurer le respect des droits fondamentaux » (UNESCO, 2003 : 33).

Prise en compte de la diversité linguistique en milieu scolaire:

• • A Vancouver: accent p é dagogique sur la langue d (norme monolingue) ’ enseignement marginalisation des langues familiales et des ressources linguistiques des enfants plurilingues • A Montr é al: les interventions p diversit é linguistique é dagogiques ne ciblent pas la

La diversité linguistique au cœur de l’éducation interculturelle?

  Les programmes

d’Éveil aux langues

Il s’agit, par la manipulation et le contact avec des corpus de différentes langues, de sensibiliser les apprenants à la diversité des langues et, à travers l’objet langue, de leur faire prendre conscience de la diversité des êtres qui les parlent.

Éveil aux langues

 Cette approche est apparue en Grande-Bretagne, au début des années 80, grâce à Eric Hawkins (1987) et James Garrett (1991), qui sont à l’origine du courant

Language Awareness

.

 Reprise en Europe: -Programme Evlang (Candelier, 2004) -Programme Eole (Perregaux

et al.,

2003)

Leur objectif principal est de préparer les élèves à vivre dans des sociétés linguistiquement et culturellement diverses .

 Reprise au Québec et en Colombie Britannique - Programme ELODiL ( www.elodil.com

) • • 1) Armand & Dagenais (M é tropolis, 2002-2003, 2003 2004, CRSH/PC, 2004-2005) 2) Dagenais, Armand, Lamarre, Moore, Sabatier (CRSH, 2005-2008)

Fondements de la recherche

1) Recherches nord américaines en éducation et en linguistique appliquée: - perspective socioconstructiviste de l ’ apprentissage fond é e sur les origines sociales de la cognition -examen des é l é ments constitutifs de la collaboration dans les activit é s d'apprentissage, y compris la production co-jointe de l'activit é sociale, les relations entre les acteurs engag é s dans l'activit é , la construction discursive de leurs identit é s, de même que les conditions mat é rielles et les contextes socio historiques de leurs interactions (ex., Cummins, 2000; Donato, 2004; Toohey, 2000).

2) En sociolinguistique européene: -concept de

représentation

de la psychologie sociale sociale provenant française appliqué à l’étude du discours en situation d’apprentissage de la langue (ex.,

Castelloti et Moore, 2002

; Moore, 2001; Py, 2000) représentations des langues, des locuteurs et de l’apprentissage des langues (nommés représentations linguistiques)

Collaboration de recherche r é alis é e à Montr é al Vancouver et Armand (M é tropolis, IM, 2002-2003) Dagenais (M é tropolis, RIIM, 2003-2004) Armand & Dagenais (CRSH/PC, 2004-2005) • observations et enregistrements vid activit é s de classe é os des • entrevues de groupe et questionnaires aupr è s des é l è ves sur leurs repr é sentations linguistiques • recueil de documents pertinents

Activités d’éveil aux langues

      

Activités d’introduction

: Le bonjour dans toutes les langues, enquête sur les langues des enfants, diversité de l’interprétation de cris d’animaux Les emprunts linguistiques Les différentes versions d’un conte dans différentes langues Les proverbes et les locutions imagées dans différentes cultures Diversité de l’écriture Origines des noms de lieux Etc.

Les participants à Vancouver

   classe d’immersion française de 5e/6e année en banlieue (27 élèves); 1 élève francophone du Québec (Lorraine); 4 élèves de diverses autres origines: coréen (Chun), suédois (Maria), russe (Vacya) et mandarin (Louisa).

Les participants à Montréal

Deux classes régulières en milieu pluriethnique de 5/6e année et deux classes d’accueil (élèves immigrants nouvellement arrivés apprenant le français) : total de 89 élèves

L ’analyse des données

   Transcription des données Organisation des données dans N6, un programme informatique pour le traitement des données qualitatives Catégorisation thématique des données  Quelques résultats….

À  Vancouver: Analyses provenant de la th è se de N. Walsh sur: - le r ôle de la collaboration dans la co construction des connaissances  -la mise en commun des ressources linguistiques (langues connues par les individus et la collectivit é ) -le changement des repr é sentations à d ’ une conversation et à l ’ int é rieure plus long terme dans l ’ ann é e scolaire Exemple 1: extrait de vid é o de la co construction dans une conversation

VANESSA: Ok, qu’est-ce qui nous dit que c’est une recette?

SUSAN: Je sais un petit peu d’espagnol.

VANESSA ( STEVEN: SUSAN:

lit le texte en espagnol à voix haute

Et il y a “ingredientes”.

Ça dit “minutos”.

): “patata...dado...ensalada” Bla bla bla “prepare” (elle reconnaît ce mot et le VANESSA

(continue de lire le texte) (inaudible

): dit d’une voix forte) prépare!!! Oups!

STEVEN: Qu’est-ce que c’est ça?

VANESSA: Comme prépare, en français.

STEVEN: Prépare?

VANESSA: Oui. comme prepare (

anglais

).

SUSAN: Je vais aide toi.

VANESSA

(continue de lire à voix haute

) SUSAN: Non, ça c’est pas ( ? ) ça dit salade est ici.

VANESSA (

continue de lire à voix haute

): “por la mitad. Corte los extremos.” Extremes!! (

anglais

) “Extremo de las judias verdes. Lave la y corte la en trozos con quenos” (?).

MARTHA: “conquenos”, consequences (

anglais

).

VANESSA: Non! (

rit

) “en trozos con quenos. MARTHA: Consequences (

anglais

)!

STEVEN: Oui, mais “ingredientes”!

SUSAN: Est ce que tu penses que ça c’est olive (

anglais

)? VANESSA: Vineg...!

STEVEN: ..grette.

VANESSA: ...”de vino”.. oliver...(

anglais

).

SUSAN: Olive (

anglais

).

VANESSA: Oui... oui, oui, oui.

(transcription de vidéo, activité recette en espagnol: 176-199)

   mis à part l’énoncé de Martha (“consequence”), la contribution de chaque élève est acceptée et sert d’appui pour co-construire, à l’intérieur d’une conversation, une représentation de ce texte en espagnol les élèves s’appuient sur les congénères (“prepare”) et autres mots qui leur paraissent proches (“minutos”, “ensalada”) ils s’autorisent à recourir à l’ensemble de leurs compétences plurilingues pour attribuer un sens au texte

Exemple 2: l

’é

volution des repr

é

sentations de la langue chinoise dans le temps

à

partir d

entrevues men

é

e avant et apr

è

s l

implantation des activit

é

s d

’é

veil aux langues

 Entrevue avant les activités d’éveil aux langues: Pamela: […] if you said “how are you doing”, it would be like two little things.

Susan: And like “rain” is like one thing […] Robert: […] it sort of looks like a table with like a stick going through it with an umbrella on top. And it’s got little dots coming down.

 Entrevue après les activités d’éveil aux langues: Susan: I’ve always wanted to learn Chinese […] They have a different alphabet than us. They have signs and we have letters.

Robert: Yeah we have letters, and they’re like one word is a symbol , and some of them actually look like what they’re talking about.

• • • Avant les activités d’éveil aux langues, les enfants manquent de terminologie pour décrire la langue chinoise, ils ont recours à des termes vagues (“thing”) Après l’analyse de l’évolution des idéogrammes et la comparaison de diverses écritures dans les activités d’éveil aux langues, ils utilisent une terminologie plus précise pour décrire cette langue (“signs”, “letters”, “symbols”) La participation aux activités d’éveil aux langues permet aux enfants de co-construire dans le temps un métalangage pour parler de la diversité linguistique

À Montréal:

Données issues de 4 groupes de discussion auprès de 17 élèves des classes régulières francophones en milieu pluriethnique

Guide d’entrevue

Thème 1 : ça sert à quoi une langue?

Thème 2 : appréciation des langues

Thème 3 : l’égalité des langues?

Thème 4 : l’égalité des locuteurs de langues?

Si vous pouviez choisir votre langue maternelle, laquelle vous choisiriez et pourquoi?

Thème 5 : les langues dans le monde.

Si vous pouviez, d’un coup de baguette magique, faire qu’il n’y a

qu’une seule langue parlée sur la terre

, pensez-vous que vous le feriez? Selon vous, est-ce une bonne idée ou une mauvaise idée?

Si oui, quelle devrait être cette langue?

Une seule langue parlée sur la terre: 4 élèves seulement sur 17 disent que c’est une bonne idée CL1-5-M : « Je pense que c’est une bonne idée. Même s’ils sont d’un autre pays, j’aurais plus d’amis, parce qu’on peut communiquer avec plus de monde.

» CL2-5-C : « Comme des personnes si elles ont de la misère en anglais, si ils parlent tous anglais, ils vont plus avoir de misère. » CL2-5-E : « Les personnes qui pensent que c’est une bonne idée sont des gens qui se découragent, qui disent « Oh, j’arriverai jamais à parler cette langue comme ça là! »

Une seule langue parlée sur la terre: 13 sur 17 élèves disent que c’est une mauvaise idée CL2-5-I : « Parce que on pourra pas parler dans notre langue pour que quelqu’un ne comprenne pas, et puis on va tous avoir la même écriture là, tout va être pareil, ça va être comme plate et poche. » CL1-5-C : « Je crois pas que c’est une bonne idée. Parce que j’aime entendre parler des autres langues, j’aime pas entendre toujours la même langue qui parle. » CL1-5-K apprendre d’autres langues aussi là. Pour pas parler la même chose.

: « Je pense pas que c’est une bonne idée. Parce qu’on peut » CL1-5-S : « Non, parce que la planète terre va être plate si c’est toujours la même langue. Si on parle anglais dans tous les pays ça va être plate. » CL2-6-M : « Parce que s’il y a une seule langue, il y a une seule culture et moi je ne veux pas cela.

» CL2-6-S : « Moi non, parce qu’on va penser que c’est pareil partout dans le monde et on ne pourra plus découvrir les autres cultures. On ne va plus rien découvrir. »

Rapport avec la langue maternelle et/ou d’origine: changerais-tu de langue maternelle…?

 Choix de l’anglais (4 élèves sur 13): CL2-6 S: « [je choisis l’] Anglais!!! [comme langue maternelle] Parce que c’est utile et moi je ne la parle pas. »  Choix du maintien de la langue d’origine comme langue maternelle (7 élèves sur 13): CL2-6-M : « Moi je garderais le vietnamien [comme langue maternelle], parce que si je ne le savais pas je ne comprendrais pas la culture de mon pays et je suis fière de mon pays. »  Discussion approfondie sur la langue maternelle et la langue apprise à l’école: CL2-5-C : Pas pour moi [je ne choisirais pas ma langue maternelle si je devais choisir la seule langue parlée sur terre], parce que ma langue maternelle c’est l’anglais mais je peux mieux écrire en français.

Observations préliminaires à Montréal  Les enfants ont une ouverture à la diversité linguistique  Certains enfants peuvent avoir une relation ambiguë avec les langues familiales (langues qu’ils maîtrisent à des degrés divers)

Pistes de recherche à poursuivre

1) Quels sont les liens entre le paysage linguistique local et les représentations qu’ont les élèves de: la diversité linguistique, -leurs langues familiales leur compétence plurilingue?

2) Les représentations de la diversité linguistique se développent-elles dans le temps avec la participation aux activités d'éveil aux langues sur 2 années scolaires?

3) Quel impact ont ces activités sur l’intégration scolaire des enfants de familles immigrantes et leur positionnement identitaire dans le discours?