Dossier complet amphotherapie
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Principes du traitement par l’amphothérapie
J.M. Soulier
© Sauramps Médical. La photocopie non autorisée est un délit.
MPR-MMO, 4, rue Goscinny - 34130 Saint-Aunès
La prise en charge de la cervicalgie commune
par les techniques manipulatives a été bien
codifiée en ostéopathie-orthopédique. Le traitement du dérangement intervertébral mineur
(DIM) ou d’autres lésions sur un ou parfois
plusieurs segments a prouvé son efficacité
immédiate aussi bien sur la récupération des
amplitudes articulaires que sur les phénomènes douloureux [2]. Traditionnellement, le
traitement par ostéopathie-orthopédique
n’est pas répétitif mais parfois le thérapeute
se trouve confronté à une récidive précoce
qui peut évoluer vers la chronicité malgré une
rééducation active et proprioceptive bien
conduite. Parmi cette population de patients
sportifs amateurs présentant des cervicalgies
invalidantes, nous avons volontairement sélectionné un sous-groupe chez lequel une
“rectitude cervicale” avait bien été mise en
évidence sur les clichés radiologiques en profil neutre ou plan sagittal.
Bases théoriques
Elles partent d’un principe de base en rééducation : la proprioception dans la rééducation
des pathologies articulaires joue un rôle fondamental. Nous avons tous en mémoire le cas
des séquelles d’entorses de la cheville qui,
malgré une tonification active bien menée,
laissaient toujours au patient une impression
d’instabilité. La rééducation proprioceptive
sur plateau instable permet actuellement de
les améliorer très rapidement.
Il faut rappeler aussi les résultats spectaculaires des techniques de thérapies manuelles
dans les gains d’amplitude articulaire après
un traumatisme du pied et de la cheville. Elles permettent de télescoper les temps de
récupération.
L’hypothèse serait qu’une récidive régulière
d’une cervicalgie chez un sportif amateur,
sans réels traumatismes graves, doit avoir
une cause proprioceptive.
En résumant, rapidement la biomécanique du
rachis [4] il apparaît que les mouvements de
la tête et des yeux sont volontaires. Ils sont
couplés dans une synchronisation dite “oculocéphalogyre” d’action volontaire pour suivre,
comme chez le prédateur, sa proie. Le rachis
est recruté par action réflexe non volontaire.
Leur mouvement réflexe non volontaire. Leurs
mouvements sont inter-reliés et suivent un
rythme spécifique prédéfini selon “une programmation motrice automatisée” (PMA).
Aucune action volontaire n’est possible électivement sur une seule vertèbre. Nous ne pouvons mobiliser qu’un groupe de vertèbres.
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A cette motricité automatique pour suivre les
mouvements volontaires des yeux, s’ajoutent
les réflexes posturaux qui permettent la position érigée.
Traitement innovant guidé par
l’imagerie et la biomécanique
du rachis
Le DIM qui perturbe la PMA semble n’être ici
que l’effet secondaire d’un trouble postural
qui augmenterait les réflexes posturaux et
entretiendrait ainsi des contractures réflexes
des grands muscles mobilisateurs du rachis.
Les principes de rééducation suivront ceux
de l’épaule, le recentrage en MMO débutera
le traitement. Il sera suivi par une reprogrammation ou rééducation proprioceptive active
effectuée, sous le contrôle du thérapeute, par
le patient dans le but de garder sa tête humérale bien centrée. Au niveau du rachis cervical, nous reprendrons ce même protocole
thérapeutique. En premier, le traitement du
dérangement vertébral (DIM) par une manipulation vertébrale en techniques non forcées (TNF). Il sera suivi d’une reprogrammation active de la programmation motrice
automatique (PMA). Calquée sur la rééducation proprioceptive, elle n’a pas pour but un
gain d’amplitude articulaire, ni de force musculaire, ce ne sont pas des exercices de
gymnastique, mais une stimulation neurologique des réflexes posturaux et des automatismes de la synchronisation des contractions
musculaires, des muscles monosegmentaires. Pratiquées en petites séries de 3 ou
4 mouvements, elles ne sont pas effectuées
en séries longues mais fractionnées dans la
journée (fig. 1).
Rappel de notre concept
personnel du rachis [3]
Nous calquons la physiopathologie du rachis
sur celle de l’épaule.
Au niveau de l’épaule, une désynchronisation des muscles de la coiffe des rotateurs
(petits muscles courts) va entraîner une perturbation de la cinétique du membre supérieur mobilisé par les grands muscles longs
(les faisceaux du deltoïde) : ce sera le syndrome sous acromial.
Au rachis cervical, les vertèbres sont stabilisées en segmentaire par des muscles mono-articulaires (court et long lamellaire) puis
mobilisées globalement par les grands muscles longs (SCM-spénius).
a
b
c
d
Fig. 1 : Les exercices proposés en Programmation Motrice Automatique (PMA)
a)position de départ.
b)premier mouvement : la projection antérieure ou antépulsion de la tête (protrusion) qui augmente la lordose
de la partie haute du rachis cervical.
c)deuxième mouvement de recul du menton ou rétropulsion (rétraction) qui augmente la lordose de la jonction cervico-dorsale.
d)troisième mouvement d’extension globale qui permet de mobiliser en lordose maximale tout le rachis
cervical et la jonction cervico-dorsale.
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La correction posturale permanente permet
au patient d’éviter la projection antérieure de
la tête qui entraîne des contractures réflexes
des muscles posturaux postérieurs. Ils jouent
le rôle de hauban et évitent la chute de la tête
en avant. L’effet paradoxal et aggravant au
niveau du rachis dorso-lombaire en position
assise, provient de la mise en tension maximale des ligaments postérieurs qui permettent aux muscles postérieurs suspenseurs de
se mettre au repos. Les contractions disparaissent complètement. Le patient ressent
une sensation de repos et de détente qui l’encourage à rester en cyphose (fig. 2, 3, 4, 5).
Cette projection antérieure de la tête majorée
en position assise sera le facteur aggravant
essentiel des cervicalgies chroniques. Leur
disparition passera par la correction posturale
permanente.
Critères de sélection du
groupe
Critères radiologiques
Définition de la “rectitude” cervicale :
La sélection porte uniquement sur les patients
présentant une “rectitude” cervicale. Cette
étude de la statique cervicale est obtenue à
partir du cliché dans le plan sagittal en profil
neutre : on trace une ligne reliant l’angle supérieur du mur postérieur de l’odontoïde à
l’angle inférieur du mur postérieur de C7 (ligne a : en centimètre) et la flèche cervicale
(ligne b : en millimètre). Le terme de rectitude
cervicale sera utilisé plutôt que de raideur qui
sous-entendrait un processus d’enraidissement comme dans la spondylarthrite ankylosante. Seront englobés sous ce terme de
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Fig. 2 et 3 : Position en cyphose
Fig 4 : Position corrigée
Fig 5 : Position hypercorrigée en lordose résumé
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“rectitude cervicale”, les aspects radiologiques de rectitude mais aussi d’inversion de
courbure et de rachis sigmoïde (fig. 6).
Le classement des courbures cervicales se
fait en fonction de l’indice d’Arlet (d’après
Wackenheim) [1]. Ne seront sélectionnés que
les groupes a/b >1,5 et a/b < 0 (fig. 7).
Les patients consultaient pour des douleurs
cervicales évoluant depuis au moins 1 an et
avaient déjà bénéficié d’un bilan permettant
d’écarter une origine inflammatoire ou tumo-
a
rale. Ils doivent aussi avoir été traités à plusieurs reprises par divers traitements médicaux ainsi que par manipulations ou par des
techniques de manuelles thérapies ou d’ostéopathie.
Une fois le groupe sélectionné, les trois critères sont successivement analysés : le niveau
des DIM trouvés à l’examen, le nombre de
mois d’évolution avant la consultation au cabinet, les différents traitements antérieurs et
le nombre de séances de kinésithérapie.
b
d
c
e
Fig. 6 : Les différents aspects radiographiques des pathologies concernées.
a) Rectitude sans discopathie ; b) Rectitude globale ; c) Rectitude cervicale typique avec discopathies
C4/C5/C6 ; d) Inversion de courbure C4/C5/C6/C7 : e) Rectitude sans discopathie C6/C7
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Fig. 7 : Courbures cervicales
Le protocole du traitement par
amphothérapie lors de la
consultation
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Une fois le diagnostic posé, le traitement par
amphothérapie débutera par la technique
passive effectuée par le thérapeute : une manipulation en technique non forcée (TNF) du
DIM douloureux. La deuxième partie active et
effectuée par le patient, sera la stimulation de
la motivation du patient.
Elle passera par l’explication claire et précise
de sa rectitude cervicale, de cause souvent
idiopathique, responsable de ses récidives
douloureuses. Elle peut en être la cause initiale ou le facteur déclenchant, elle perturbe
la PMA du rachis qui redevient douloureux,
génère des contractures musculaires responsables du verrouillage des mouvements.
Le patient débutera immédiatement ses exercices sous le contrôle du thérapeute pour un
apprentissage de la mobilisation active du rachis inspirée de la technique de Mc-Kenzie.
Chaque exercice en lordose est bien spécifique du niveau de l’inversion de la courbure
diagnostiquée sur le bilan radiologique dans
le plan sagittal (fig. 8 à 11).
Exemples d’exercices à effectuer par le patient, s’il présente une rectitude ou une inversion de courbure du rachis cervical bas ou de
la jonction cervico-dorsale (fig. 7). Ces mouvements sont à être répétés dans la journée
mais en séries courtes de deux ou trois fois
dix mouvements.
Les mouvements sont faciles à réaliser immédiatement après les techniques de MMO
en Techniques Non Forcées (TNF) qui ont levé
les contractures réflexes dues aux DIM et
permettent de retrouver les amplitudes articulaires habituelles dans l’indolence.
Le patient est encouragé à effectuer quotidiennement son auto-rééducation, sans dépasser quatre mouvements et les renouveler
si possible régulièrement dans la journée.
Pour éviter de les oublier, il doit les intégrer à
ses séances d’échauffement sportif.
Les exercices démontrés lors de la consultation ont pour objectif de s’approcher le plus
possible de la lordose physiologique idéale
selon l’indice d’Arlet (a/b = 0,8-1,5) et même
de les hyper-corriger.
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Fig. 8 : La position de départ s’effectuer en position
ressentie comme neutre par le patient. En réalité, il est
en projection antérieure et le plus souvent n’en a pas
conscience. L’index touche le nez.
Fig. 9 : L’index reste immobile et sert de point de référence. Le patient recule la tête comme s’il voulait
toucher le mur avec la nuque sans incliner la tête ni en
avant ni en arrière (rétraction). Rétropulsion.
Fig. 10 : Il accentue le recul du menton au maximum
(rétropulsion maximale) qui n’est maintenue qu’une
ou deux secondes.
Fig. 11 : Répétition du mouvement et progressivement
diminution de la projection en avant.
Tous ces exercices sont inspirés de Mc Kenzie et effectués en auto-correction active. La
spécificité essentielle de ces exercices est
d’être basée sur le bilan radiologique et non
sur les tests répétitifs qui déclenchent des
symptômes.
La théorie du traitement est tout autre, même
si les exercices s’en approchent.
Discussion : La place de
l’amphothérapie dans les
cervicalgies chroniques
Volontairement la sélection porte sur un groupe de “cervicalgies chroniques” qui ont épuisé toutes les thérapeutiques habituelles. Une
analyse individuelle de l’étiologie de cette
cervicalgie leur a été proposée. Habituelle-
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ment la trithérapie : Antalgique - AINS - Myorelaxants donnait de bons résultats, la Manuelle-thérapie permettait d’augmenter ce
pourcentage d’amélioration et la rééducation
active prescrite et bien conduite ajoutait également quelques points positifs de succès. Il
persistait toujours le groupe “des cervicalgies
irréductibles”.
Cette approche thérapeutique appelée Amphothérapie associe deux techniques très
complémentaires : l’une segmentaire passive,
l’autre posturale ou globale active.
L’indolence immédiate et la récupération des
amplitudes articulaires instantanée produite
par les thérapies manuelles permettent d’enclencher une mobilisation active en extension
et même en hyperextension alors que le patient volontairement ou non, redoutait ou ne
pouvait pas l’effectuer.
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La douleur provoquée par le DIM stoppait tous
les mouvements d’extension cervicale. L’hypothèse évoquée serait que cette PMA reprogrammée, permet une fois acquise en extension, de récupérer les autres amplitudes,
aussi bien en rotation qu’en inclinaison.
Les difficultés rencontrées sont nombreuses :
1) La thérapie manuelle par TNF est un art et
demande un apprentissage qui parfois
semble long et difficile. Les manipulations
“fortes” sont souvent redoutées et refusées par les patients déjà multimanipulés
et “craqués”.
2) Le temps d’explication qui permet l’adhésion du patient au traitement. Il doit prendre conscience de cette “rectitude”, ce qui
l’oblige à revoir tous ses principes d’assouplissement. En particulier, d’abandonner les étirements en flexion ou les autograndissements en double menton.
3) L’acquisition du geste technique de récupération de la lordose physiologique qui
permettra à la PMA de se programmer. Les
meilleurs résultats sont obtenus lorsque
les tests des mouvements à effectuer en
lordose sont effectués sous la surveillance
de kinésithérapeutes formés aux techniques de McKenzie.
4) La volonté du patient ou son “adhésion” au
traitement pour effectuer pluri quotidiennement ses exercices, tout au moins au
début.
5) Le faible niveau de preuve et ses effectifs
réduits, mais malgré cela cette étude apporte des résultats encourageants.
Conclusion
L’amphothérapie est sans danger à partir du
moment où le thérapeute sélectionne des
techniques non forcées tout particulièrement
chez le sportif amateur qui présente des cervicalgies chroniques.
L’analyse spécifique radiologique de ces rachis en “RECTITUDE” permet de proposer à
ce sous-groupe homogène de patients sportifs amateurs, présentant des cervicalgies
banales et chroniques évoluant depuis plus
d’un an, une Amphothérapie adaptée et personnalisée à chaque cas. L’Amphothérapie
est originale par cette double approche personnalisée, qui en fait son efficacité mais
aussi la difficulté à la mettre en place, elle
permet de porter, à court et long terme, un
bon pronostic.
Ces résultats qui semblent intéressants devront
être confirmés par des études de plus haut niveau de preuves aux effectifs plus larges.
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Résumé
Introduction
La prise en charge de la cervicalgie commune
par les techniques manipulatives a été bien
codifiée en thérapie manuelle. Le diagnostic
différentiel a éliminé les autres causes. Le
traitement du dérangement inter-vertébral
mineur (DIM) ou d’autres lésions, sur un ou
parfois plusieurs segments, a prouvé son efficacité immédiate aussi bien sur la récupération des amplitudes articulaires que sur les
phénomènes douloureux. Mais le thérapeute
se trouve parfois confronté à une récidive
précoce qui peut évoluer vers la chronicité
chez le sportif amateur malgré une rééducation active et proprioceptive bien conduite.
lon l’indice d’ARLET. Les exercices démontrés
lors de la consultation sont personnalisés selon l’imagerie décrite et inspirées de McKenzie, en auto-correction active. Le traitement
peut, dans les cas chroniques anciens, être
commencé par des kinésithérapeutes motivés à une prise en charge active et personnalisée de ces patients.
Résultats
L’efficacité globale est excellente en suivant
les critères de sélection à court et à long terme, ce qui ne fut pas le cas à long terme pour
ceux qui arrêtent la PMA.
Discussion-conclusion
Objectifs
Méthodes
Le groupe sélectionné a déjà épuisé toutes
les thérapeutiques habituelles. Le principe
d’analyse individuelle de l’étiologie est innovant. Les difficultés rencontrées par le praticien sont l’apprentissage des techniques non
forcées et le temps d’explication qui permet
l’adhésion du patient ; pour celui-ci, l’acquisition de l’exercice et sa volonté de les effectuer au quotidien.
Les clichés standards dans le plan sagittal
permettent de classer les différentes courbures rencontrées par rapport à une lordose
définie comme normale ou physiologique se-
Les résultats semblent intéressants et devront être confirmés par des études de plus
haut niveau de preuves aux effectifs plus
larges.
Proposer une amphothérapie (bithérapie) :
elle associe le geste de MMO à une auto-rééducation effectuée quotidiennement par le
patient, de façon personnalisée.
Bibliographie
[1] WACKENHEIM. imagerie du rachis cervical 2. SpingerVerlag France, 1990
[3] SOULIER J.M. Ostéopathie orthopédique. Amphothérapie. Tome 1 : le rachis. Sauramps médical. 2009
[2] MAIGNE R. Diagnostic et traitement des douleurs
communes d’origine rachidienne. Expansion Scientifique.
1997
[4] RABISCHONG P. Le programme Homme. Science histoire et société PUF. Janv. 2003; 138
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