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Demi-journée "Marathon" de formation continue
Samedi 3 mai 2014
Sujet n° 10
DROIT DU TRAVAIL
(Patrick SPINEDI, titulaire du brevet d’avocat, LLM Droit européen, président du
groupe IV du Tribunal des prud’hommes)
Législation
______________________________________________
Modifications récentes (2013-2014) et projets
a) Adoptés
•
Entrée en vigueur depuis le 1er janvier 2013 de l’art. 32 al. 1 de la Loi sur le travail (Obligation
pour l’employeur d’aviser le détenteur de l’autorité parentale ou le tuteur lorsque le jeune
travailleur tombe en incapacité de travail).
•
Entrée en vigueur depuis le 1er décembre 2013 de l’art. 27 al. 1quater de la Loi sur le travail
(Possibilité d’occuper des travailleurs le dimanche et la nuit pour les magasins des stationsservice qui sont situés sur les aires des autoroutes ou le long d'axes de circulation importants
fortement fréquentés par les voyageurs et dont les marchandises et les prestations répondent
principalement aux besoins des voyageurs).
•
Entrée en vigueur depuis le 1er janvier 2014 de l’art. 333b CO par lequel les rapports de
travail passent à l’acquéreur avec tous les droits et obligations qui en découlent en cas de
transfert d’entreprise durant un sursis concordataire, dans le cadre d’une faillite ou dans celui
d’un concordat par abandon d’actifs, en cas d’accord de l’acquéreur et sans opposition du
travailleur.
•
Entrée en vigueur depuis le 1er janvier 2014 des art. 335 e al. 2, 335 h à 335 k CO relatifs au
licenciement collectif (obligation de mener des négociations en vue d’établir un plan social
lorsque l’employeur emploie habituellement au moins 250 travailleurs et lorsqu’il entend
résilier le contrat d'au moins 30 travailleurs dans un délai de 30 jours pour des motifs de
gestion non inhérents à leur personne ; obligation de saisir un tribunal arbitral en cas d’échec
des négociations).
•
Entrée en vigueur le 1er janvier 2014 de l’Ordonnance contre les rémunérations abusives
dans les sociétés anonymes cotées en bourse.
•
Entrée en vigueur le 1er janvier 2014 de la directive du SECO adoptée en vertu de l'art. 42 al.
1 de la Loi sur le Travail (LTr) s'adressant aux autorités d'exécution et concernant les
contrôles de l'enregistrement de la durée du travail (art. 46 LTr et art. 73 de l'ordonnance 1
relative à la LTr).
b) Projets à venir
•
Message du Conseil fédéral sur la révision partielle du code des obligations (Protection en cas
de signalement d’irrégularités par le travailleur ; « whistle blowing » ; projet d’introduction des
art. 321a bis à 321a septies CO relatifs à ladite protection et d’introduction des art. 328 al. 1 et
3 et 336 al. 2 lit. d relatifs à la protection du travailleur) (FF 2013 8547)
"Marathon"
•
Samedi 3 mai 2014
Ouverture par le Conseil fédéral d’une procédure de consultation relative à une nouvelle loi
prévoyant un cadre minimal à l’échelle nationale pour les heures d’ouvertures des magasins
durant les jours ouvrables (possibilité d’ouvrir entre 6 et 20 heures du lundi au vendredi et
entre 6 et 19 heures le samedi ; motion Lombardi) (FF 2014 1705)
Jurisprudence________ _____________________________________
Jurisprudence fédérale et cantonale 2013-2014 (état au 28.02.2014)
a) Jurisprudence fédérale
1.
Arrêt du TF 4A_520/2012 du 26 février 2013 - Bonus – gratification – art. 322 d CO
Employé de banque ayant perçu un bonus depuis le début de ses rapports de travail en 1996. En
2006, l’employé est informé que son salaire de base pour l’année 2005 s’élève à CHF 207'550.- et
qu’il dispose pour cette même année d’un bonus composé d’une partie en espèces (CHF
1'807'744.-) et d’une partie différée exigible au bout de cinq ans (CHF 1'292'256.-). L’employé
résilie son contrat après avoir été informé des montants de sa rémunération pour 2005. L’employé
reçoit son salaire de base et la partie en espèces de son bonus, soit CHF 2'015'294.-, mais
l’employeur refuse de lui verser la partie différée de son bonus au motif que la résiliation du
contrat de travail a eu lieu avant le versement du montant différé. L’employé estime que ce
montant lui est dû dans la mesure où il ne peut être considéré comme accessoire par rapport au
salaire de base. Le Tribunal fédéral rappelle que le Code des Obligations ne définit pas le bonus
et qu’il convient donc de déterminer dans chaque cas d’espèce si ce dernier est une gratification
au sens de l’art. 322d CO. Cette disposition prévoit que si l’employeur accorde en sus du salaire
une rétribution spéciale à la fin de l’exercice annuel, le travailleur y a droit lorsqu’il en a été
convenu ainsi. Selon le Tribunal fédéral, une gratification peut avoir le caractère d’une prestation
particulière seulement si elle a une importance secondaire par rapport au salaire, ce qui doit se
déterminer selon les circonstances du cas d’espèce. Il est difficile d’admettre le caractère
accessoire d’une gratification lorsque cette dernière dépasse régulièrement le montant du salaire.
En l’espèce, la banque avait pleine discrétion dans la détermination du montant du bonus. Pour
cette raison, le Tribunal fédéral a donné raison à l’instance inférieure qui a qualifié le bonus de
gratification. Lorsque le salaire effectif atteint un montant suffisant largement à garantir l’existence
économique de l’employé, il n’y a pas de raison de limiter l’autonomie contractuelle dans le but de
protéger l’employé.
2. Arrêt du TF 4A_680/2012 du 7 mars 2013 – Harcèlement – Protection de la personnalité – art.
328 CO
Employé, né en 1953, engagé comme ingénieur, en 1980 et nommé au titre de fondé de pouvoir
en 1997. Son employeur fusionne en 1998 avec une société anonyme. Un nouveau contrat de
travail est établi avec la nouvelle entité. Jusqu’en 2004, l’employé a fait l’objet d’excellentes
évaluations, tant sur le plan technique qu’humain, ce qui ressort d’un certificat de travail
intermédiaire daté du 31 octobre 2004. En 2004, l’employé a un nouveau responsable, perçu
comme autoritaire, exigeant envers lui et les autres, accordant de l’importance aux performances
et aux résultats, sec, peu agréable, dur, mais juste, avec un style de commandement militaire. Les
relations entre l’employé et son nouveau responsable sont été difficiles, tendues, voire
conflictuelles, notamment en raison de la personnalité autoritaire et dure du responsable.
L’employé a dû licencier six personnes de son équipe. Cette décision a été prise sans qu’il soit
consulté. L’employé s’est plaint à plusieurs reprises. L’employé est tombé en incapacité de travail
du 24 août au 14 octobre 2007. A fin novembre 2007, l’employeur a annoncé la suppression de
poste de l’employé. Le 28 novembre 2007, l’employé s’est trouvé en incapacité de travail
er
définitive. Il a bénéficié des prestations de l’assurance maladie, puis à partir du 1 novembre
2008, d’une rente complète d’invalidité. Le psychiatre consulté par l’employé a fait état d’une
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"Marathon"
Samedi 3 mai 2014
personnalité un peu marginale, mal adaptée sur le plan social, présentant de grandes difficultés
d’adaptation. Son rapport faisait état d’un trouble d’adaptation ayant comme conséquence son
incapacité de travail ; de traits de personnalité schizo-typiques, phobiques et dépendant et comme
élément déclencheur de l’état anxio-dépressif, le conflit du patient avec son chef. L’employé a
déposé une demande en paiement portant sur CHF 30'000.- à titre d’indemnité pour tort moral et
CHF 107'666.- à titre d’indemnité de départ basée un document interne. La demande a été rejetée
par le Tribunal des prud’hommes de Genève, décision confirmée par la Chambre des
prud’hommes de la Cour de Justice. Le Tribunal fédéral constate tout d’abord que ne porte pas
atteinte aux droits de la personnalité de l’employé le fait de prendre une décision de licencier des
membres de son équipe, sans le consulter au préalable. Il rappelle ensuite le contenu de l’art. 328
al. 1 CO qui « impose à l'employeur de protéger et respecter, dans les rapports de travail, la
personnalité du travailleur, et de manifester les égards voulus pour sa santé. Le harcèlement
psychologique, ou mobbing, contrevient à cette obligation. Il se définit comme un enchaînement
de propos et/ou d'agissements hostiles, répétés fréquemment pendant une période assez longue,
par lesquels un ou plusieurs individus cherchent à isoler, à marginaliser, voire à exclure une
personne sur son lieu de travail. La victime est souvent placée dans une situation où chaque acte
pris individuellement peut éventuellement être considéré comme supportable, alors que
l'ensemble des agissements constitue une déstabilisation de la personnalité, poussée jusqu'à
l'élimination professionnelle de la personne visée. Il n'y a pas harcèlement psychologique du seul
fait qu'un conflit existe dans les relations professionnelles, qu'il règne une mauvaise ambiance de
travail, ou encore du fait qu'un supérieur hiérarchique n'a pas satisfait pleinement et toujours aux
devoirs qui lui incombent à l'égard de ses collaborateurs. Le harcèlement est généralement
difficile à prouver, si bien qu'il faut savoir admettre son existence sur la base d'un faisceau
d'indices convergents. L'employeur qui n'empêche pas que son employé subisse un mobbing
contrevient à l'art. 328 CO. L'employeur répond du comportement de ses collaborateurs (art. 101
CO). Il doit prendre des mesures adéquates si la personnalité du travailleur fait l'objet d'atteintes
notamment de la part d'autres membres du personnel. Le mobbing a par exemple été retenu à
l'encontre d'un chef d'office qui, dans le cadre d'une situation conflictuelle avec une employée,
n'avait pas tenté de dialoguer avec elle, mais avait choisi de l'isoler et de faire pression sur elle,
probablement pour la contraindre à quitter son emploi, en communiquant par l'intermédiaire de
notes, en donnant des directives reflétant un autoritarisme injuste, blessant et vexatoire, et en
faisant en sorte qu'il soit impossible d'exécuter les nombreuses tâches confiées. Après les faits,
l'employée avait présenté un trouble d'adaptation avec les signes d'un état de stress posttraumatique et avait sombré dans un grave état dépressif chronique. Par ailleurs, enfreint l'art. 328
al. 1 CO l'employeur qui, bien que dépourvu de toute intention de harcèlement, impose à ses
employés un système très contraignant d'acquisition de la clientèle par démarchage et qui, par
cette organisation commerciale, exerce une pression de nature à entraîner à terme une
dégradation de la santé des personnes qui y sont exposées. L'employé victime d'une atteinte à sa
personnalité contraire à l'art. 328 CO peut prétendre à une indemnité pour tort moral aux
conditions fixées par l'art. 49 al. CO. Encore faut-il que l'atteinte subie soit en rapport de causalité
naturelle et adéquate avec le dommage invoqué. » En l’espèce, le Tribunal fédéral a estimé que
les éléments de fait ne permettaient pas de retenir une attitude hostile spécifiquement dirigée
contre l’employé dans l’intention de l’isoler, de le marginaliser, voire de l’exclure de son lieu de
travail. Quand bien même l’employé avait souffert des changements survenus au sein de la
direction de l’employeur, on ne pouvait pas reprocher à son employeur une violation de l’art. 328
CO.
3. Arrêt du TF 4A_8/2013 du 2 mai 2013 - Provisions - art. 322b al. 1 CO – rémunération
« convenable » - art. 349a al. 2 CO
L’intimé, à partir du 1er juillet 2007, s'était engagé, pour une durée indéterminée et à plein temps,
à fournir, dans une situation de subordination à l'endroit de la recourante, ses services comme
"conseiller économique", moyennant le versement d'un salaire. En l’espèce, le salaire de l'intimé
consistait exclusivement dans l'encaissement de provisions. Celle-ci est une modalité particulière
de rémunération du travailleur. Aux termes de l'art. 322b al. 1 CO, s'il est convenu que le
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