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Exploration et suivi d’un Hirsutisme: Quel apport de la biologie? CORATA – 15 Mai 2014 Dr Carole NICOLAS IE3M Service Endocrinologie et Médecine de la Reproduction Hôpital Universitaire Pitié Salpêtrière Pr Touraine [email protected] 1. QUAND PEUT-ON PARLER D’HIRSUTISME ? 2. QUEL(S) EST (SONT) LES MECANISMES DE L’HIRSUTISME ? 3. QUELS EXAMENS PERMETTENT D’ABOUTIR LE PLUS VITE POSSIBLE AU DIAGNOSTIC ETIOLOGIQUE ? 4. COMMENT TRAITER L’HIRSUTISME ? HYPERTRICHOSE Excès de pilosité somatique Généralisée, familiale, «constitutionnelle», préexistant à la puberté NON ANDROGENODEPENDANTE HIRSUTISME La pilosité s’étend dans les territoires où elle siège habituellement chez l’homme : visage,thorax,abdomen, périnée, creux inguinaux La pilosité est plus dense, dure et pigmentée que dans l’hypertrichose banale ELLE EST ANDROGENODEPENDANTE SENSIBILITE AUX ANDROGENES Testostérone totale : Testostérone libre + Testostérone liée au protéines SHBG Androgènes Insulinorésistance Estrogènes CRITERES DIAGNOSTIQUES Hirsutisme: Définie cliniquement par le score modifié de Ferriman-Gallwey > 8 – Subjectif – Semi-quantitatif – Problème chez les blondes ou patientes épilées – Définie dans une population à peau blanche MECANISMES DE L’ HIRSUTISME HYPERPRODUCTION d’Androgènes par l’Ovaire ou la Surrénale HYPERSENSIBILITE du Follicule pilopilo-sébacé aux Androgènes : Hirsutisme Idiopathique Les principaux androgènes chez la femme la Testostérone (T) la Δ4 - androstènedione (A) 50 % : secrété par les surrénales A 50 % : secrété par l’ovaire 30 % : secrété par l’ovaire T 70 % : « produit » par conversion de D4 Interrogatoire = Etape fondamentale Date de début? Evolutivité? Histoire des cycles Existence et date des premières règles Régularité Douleurs abdominales prémenstruelles Antécédents familiaux: origine méditerranéenne? Dystrophie ovarienne ? Hyperplasie surrénalienne congénitale ? Traitement androgénique ? Critères de diagnostic clinique Récent, explosif Apparu à la puberté + trouble des règles Ancien, important Morphotype : petite,trapue Virilisme OGE Antécédents familiaux TUMEUR ? DYSTROPHIE OVARIENNE? Ancien, généralisé Accentuation progressive Contexte familial Origine méditerranéenne HIRSUTISME IDIOPATHIQUE HYPERPLASIE SURRENALIENNE par Bloc Enzymatique Critère de diagnostic biologique: La Testostérone Plasmatique 0,4 ± 0,2 ng /ml Hirsutisme Idiopathique 0,6 à 1,2 ng/ml Dystrophie ovarienne ? > 1,2 ng/ml Tumeur ? Hyperthécose ovarienne ? Hyperplasie surrénalienne ? ETIOLOGIES Diagnostic étiologique des 873 patientes venant consulter pour hyperandrogénie Maladies spécifiques Tumeurs sécrétants androgènes 0.23% HCS classique 0.69% HCS non classique 2.06% Formes sévères d’insulinod’insulino-résistance 3.78% Diagnostics d’élimination SOPK 82.02% 82.02 % Hirsutisme idiopathique 4.47% Hirsutisme+androgènes élevés 6.75% Azziz r et al, JCEM 2004 ETIOLOGIES Diagnostic étiologique des 950 patientes venant consulter pour signes cliniques d’hyperandrogénie (hirsutsme, acné, alopécie) Maladies spécifiques Tumeurs sécrétants androgènes 0.20% HCS non classique 4.3% Diagnostics d’élimination SOPK 72.1% 72.1 % Hirsutisme idiopathique 7.6 % Hirsutisme+androgènes élevés 15.8 % Carmina E r et al, JCEM 2006 Syndrome des Ovaires Polykystiques 5 à 10 % des femmes en période d’activité génitale 20--25 % des adolescentes 20 Syndrome hétérogène et complexe Etiologie inconnue 25% 25 % des causes des aménorrhées secondaires Arrêt de la maturation folliculaire avec accumulation de petits follicules sous la corticale avec hyperplasie du stroma ovarien CRITERES DIAGNOSTIQUES Critères de diagnostic d’un SOPK = consensus Une femme présente un SOPK si elle réunie 2 des 3 critères suivants : - Anovulation ou dysovulation - Hyperandrogénie clinique et/ou biologique - Ovaires polykystiques à l’échographie : présence d’au moins 12 follicules de 2 à 9 mm au sein de chaque ovaire et/ou augmentation du volume ovarien > 10 ml Diagnostic d’exclusion Absence de tumeur ovarienne ou surrénalienne, HCS et de tumeur hypophysaire 2003 Rotterdam PCOS consensus. Fertil Steril 2004 Tumeurs virilisantes Aménorrhée soudaine Virilisation intense Installation rapide Tumeur ovarienne Sécrétion T > A, SHBG diminuée LH diminuée, réponse normale à LHRH Echographie : souvent (-) Cathétérisme veineux : gradient veineux ovarien unilatéral Bon pronostic Tumeur surrénalienne Augmentation SHEA et D4, du fait évolution lente Taille importante Hypercorticisme souvent associé Mauvais pronostic 1 cm Hyperthécose Ovarienne Rare Hyperplasie du stroma ovarien Cathétérisme veineux : sécrétion bilatérale Tentative de freinage : ± Traitement = parfois résection cunéiforme nécessaire A noter la sécrétion excessive de T et D4 de façon bilatérale Rapport Testo/D4 en fonction pathologie A noter: en cas de tumeur rapport D4A/Testo D4A/Testo proche de 1 beaucoup plus élevé en cas de SOPK Hyperplasie Congénitale des Surrénales (HCS) 21 – hydroxylase (21 OH) : 90-95% cas 11- hydroxylase (11 OH) 3β- hydroxysteroïde deshydrogenase (3β-HSD) Hirsutisme et bloc enzymatique surrénalien Blocs en 21 OHase à révélation tardive 126 femmes Diverses Régions Françaises : 68 % Algérie 5,5 % Italie 5,5 % Espagne 5,5 % Portugal 4,5 % Juifs Séfarades 6% Juifs Ashkénases 5,5 % Blocs en 21 OHase à révélation tardive Symptômes Hirsutisme : 90 % - isolé : 55 % - avec cycles anormaux : 29 % - avec infertilité : 6 % Cycles (spanioménorrhée) : 32 % Infertilité : 12 % Traitement de l’Hirsutisme Stratégie de la prise en charge • Croissance du poil est un phénomène cyclique lent Efficacité des traitements sur plusieurs mois • Traitements symptomatiques • Reprise de l’hirsutisme à l’arrêt,++hyperandrogénie • Médicaments sont partiellement efficaces sur poils transformés Intérêt l’épilation • Études limitées dans le temps et dans le choix des produits Les Traitements Cosmétiques à proposer • Le rasage, l’épilation chimique et mécanique doivent être proscrits sur le visage • Technique de décoloration: Parfois suffisants, toujours nécessaires • Seuls les traitements permettant une épilation « permanente » doivent être proposés – Electrolyse ou Laser – Pas de prise en charge par l’Assurance-Maladie Coût élevé A réserver aux zones les plus gênantes d’un point de vue esthétique : visage en particulier, mamelon, ligne blanche Surtout efficace en cas de peau claire et de poils foncés, sur les poils en phase de pousse Traitements locaux Eflornithine : Vaniqa® crème – Topique ralentissant la croissance du poil – Inhibiteur irréversible de l’ornithine decarboxylase, enzyme modulée par androgènes et participant à la croissance poil – 1 application faciale x2/j – Effet maximal en 8 à 24 semaines – Amélioration de l’hirsutisme : 32 % des patientes (vs 8 % sous placebo) – Effet réversible à l’arrêt - Tolérance bonne (irritation locale transitoire) - ~ 60 euros par mois… J.A. Balfour American Journal of Clinical Dermatology 2001 Stratégie de la prise en charge • Traitements locaux • Traitements généraux : fonction demande Les traitements anti-androgènes recommandation N°1 La contraception estroprogestative est le traitement de première intention de l’hirsutisme modéré et de l’acné de la femme non-ménopausée (grade C) Attention chez la femme obèse au risque TE +++ <35 ans, pas d’autres FRCV CONTRACEPTION OESTROPROGESTATIVE • Pas de supériorité d’une COP par rapport aux autres – Drospirenone + 30µg ou 20µg d’ethinyl-estradiol (EE) • aucune étude randomisée contre placebo publiée • deux études prospectives : réduction des scores d’hirsutisme Gregoriou O GynecolEndocrinol 2008 Batukan C Fertil Steril 2008 – Utilisation préférentielle d’un OP par rapport à un autre : bases théoriques de la 3ème génération versus 2ème génération. – Mais sur-risque thromboembolique bien connu pour les 3eme génération – Pas de différence entre les OP contenant de CPA, du lévonorgestrel, du desogestrel ou de la drospirénone Porcile A Fertil Steril, 1991 Breitkopf DM Contraception. 2003 Mastorakos G Fertil Steril, 2002 Creatsas G, Ann N Y Acad Sci, 2000 Les traitements anti-androgènes recommandation N°2 L’acétate de cyprotérone (Androcur) à la dose de 50mg/j, 20 jours sur 28, associé à un estrogène est le traitement de première intention de l’hirsutisme modéré à sévère de la femme nonménopausée (grade C) Antiandrogènes : Acétate de cyprotérone Pregnane Ovaire Action anti-gonadotrope Androgènes Action anti-androgénique importante Follicule pileux Schéma d'administration : – 50 mg/jour d'acétate de cyprotérone 20 jours/ jours/28 28,, en association avec du 17 17β βestradiol par voie orale ou percutanée percutanée.. Efficacité nette sur l'hirsutisme : amélioration d’environ 60 60--80 80% % à un an J.H. Barth Clinical Endocrinology 1991 Les traitements anti-androgènes Acétate de Cyprotérone – Effets indésirables : aménorrhée secondaire, spotting, métrorragies, hématométrie, dyspareunie, baisse de la libido, prise de poids – L’effet de ce traitement sur la minéralisation osseuse est mal connu et à évaluer Les traitements anti-androgènes recommandation N°3 • Commentaires • La Spironolactone, sous couvert d’une contraception efficace, peut être proposée en deuxième intention en cas d’effets secondaires ou de contre-indication du CPA dans l’hirsutisme modéré à sévère (Grade C) • Hors AMM – Efficacité dose-dépendante mais pas d’étude rigoureuse de dose-réponse – Dose initiale : 100mg/j mais chez les patientes obèses, la dose nécessaire peut être de 200 à 300mg/j en 2 prises – EI : polydipsie, polyurie, nausées, céphalées, asthénie, gastrite, spotting... Antiandrogènes : Spironolactone Très utilisée aux USA Ovaire Androgènes 5α-réductase Follicule pileux Les traitements anti-androgènes recommandation N°4 • Le Flutamide ou le Finastéride, ne seront utilisés sous couvert d’une contraception efficace qu’en 3ème intention dans les hirsutismes sévères en cas d’effets secondaires ou de contreindication de la COP, du CPA à 50 mg/j ou de la spironolactone (grade C) • Hors AMM • Commentaires – Flutamide • Il semble aussi efficace à dose faible (125 mg) qu’à 250 ou 375 mg/j, sans effets secondaires hépatiques rapportés • Bilan hépatique nécessaire avant traitement puis régulièrement sous traitement –Finastéride • Efficace à la dose de 5 et 7.5 mg/jour Antiandrogènes : flutamide Antiandrogène pur non stéroïdien Ovaire Androgènes 5α-réductase Follicule pileux Inhibiteur de la 5αréductase : finastéride Inhibiteur compétitif de la 5α-réductase de type 2 Ovaire Androgènes 5α-réductase Follicule pileux Rôle de la metformine pour traiter l’hyperandrogénie • COMMENTAIRES • LA METFORMINE N’EST PAS SUFFISAMMENT EFFICACE Pas de données comparatives avec progestatifs ou pilule oestroprogestative sur de grands effectifs POUR TRAITER Effet inférieur aux oestroprogestatifs et aux anti-androgènes L’HYPERANDROGENIE Problème de tolérance au long cours En conclusion Hirsutisme est un symptôme fréquent Interrogatoire et examen clinique fondamentaux Toujours penser à la tumeur Le plus souvent OPK Ne pas oublier les blocs surrénaliens (6% des cas) Cas Clinique 1 Mme B, âgée de 30 ans, consulte sa gynéco pour une aménorrhée secondaire brutale , depuis 6 mois; elle décrit en outre depuis une peau grasse et l’existence d’une pilosité alors qu’auparavant ses cycles étaient parfaitement réguliers et qu’elle ne se plaignait pas de signe d’hyperandrogénie. Elle se plaint en outre d’hématomes fréquents et de l’apparition de quelques vergetures abdominales. A l’examen, on retrouve, outre un hirsutisme du visage et perimamelonnaire, une clitoridomégalie à 2.5 cm. Les premiers résultats hormonaux retrouvent un taux de testostérone à 2.1 ng/ml, une LH à 2.5; l’estradiol à 30 pg/ml. 1. Quelles sont les principales hypothèses diagnostiques? 2. Quels sont les examens complémentaires à mener? Cas Clinique 2 Mlle C, âgée de 25 ans, consulte pour une spanioménorrhée primaire associée à un hirsutisme. Sa sœur présente aussi les mêmes symptômes; son frère est bien portant. Un autre frère est mort-né à la naissance de cause inconnue. Dans son bilan, qu’elle vous apporte, le taux de testostérone est à 0.9 ng/ml, la 17-OHP à 5 ng/ml et l’échographie pelvienne retrouve 2 ovaires un peu augmentés de volume 1. Quelle est l’hypothèse diagnostique principale et comment allez-vous l’étayer? 2. Y a-t-il des examens à proposer à l’entourage familial? 3. Quels sont les principes thérapeutiques? 4. Cette femme vous interroge quant à son pronostic de fertilité?