"Symétries brisées en théorie statistique des champs" de Janvier 2014
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Transcript "Symétries brisées en théorie statistique des champs" de Janvier 2014
Examen sur le cours “Symétries brisées en théorie statistique des champs”
Master 2 Concepts fondamentaux de la physique, parcours matière condensée
Janvier 2014
Durée : 3h. Tous documents manuscrits et polycopiés de cours autorisés
Etude d’une chaîne polymérique en dimension d
Les parties 1 et 2 peuvent être traitées de façon indépendante
Une chaîne polymérique (appelé polymère dans la suite de l’énoncé) est une longue chaîne
flexible composée de molécules appelées monomères reliés par des brins. Lorsque l’on place un
polymère dans une solution, il peut prendre différents types de morphologie. Si les interactions
entre monomères sont répulsives, il préfèrera une forme étendue de grande entropie. Au contraire,
si les interactions sont attractives, les polymères auront tendance à former des objets compacts. Le
but de ce problème est de comprendre les propriétés statistiques des formes étendues des polymères
à l’aide d’approches variées.
1
Modèles simples d’une chaîne polymérique
On considère un des modèles les plus simples pour un polymère dans une espace de dimension
d : une chaîne de N + 1 molécules (ou monomères) connectées par N liens de longueur fixe a. La
direction de chaque lien est complètement aléatoire (voir un exemple sur la figure 1).
Figure 1 – Exemple de polymère composé de N + 1 monomères
1.1
Chaîne idéale
On considère une chaîne polymérique “idéale” sans interaction entre les monomères. Soit Ri
la position du ieme monomère, et ai = Ri − Ri+1 le vecteur lien entre le ieme et le (i + 1)eme
monomère. Chaque vecteur ai a pour longueur a et la direction de chaque lien étant aléatoire,
nous supposerons donc hai i = 0 et hai aj i = a2 δij . La moyenne hi est définie ici par la moyenne
thermodynamique sur toutes les configurations possibles de la p
chaîne. On introduit le vecteur
¯ ≡ hR2 i.
R ≡ R1 − RN +1 et l’on définit la taille d’un polymère par R
1
¯ pour la chaîne idéale. Que vaut l’exposant ν, appelé exposant de Flory, défini
1) Calculer R
ν
¯
par R = aN ?
2) Nous voudrions remplacer notre chaîne idéale par un modèle de chaîne composée de “gros
monomère” qui possède les mêmes proprités globales. Il s’agit d’une procédure de “coarse graining”
qui consiste à diviser la chaîne en N/b morceaux contenant chacun b monomères consécutifs,‘ces b
monomères formant un “gros monomère” effectif. C’est l’analogue de la procédure de décimation
vue en cours pour les modèles de spins. Soit R′j la position du j eme morceau (qui peut par exemple
être défini par la position du centre de masse des b monomères qu’il contient). La nouvelle chaîne
est alors définie par la série des positions R′i et les vecteurs a′i = R′i − R′i+1 . Bien sûr, les vecteurs
a′i auront en général une longueur différente. Néanmoins, dans une première approximation, on
supposera |a′i | = a′ .
¯ ′ = R.
¯ Pourquoi ? Quelle relation cela impose t’il entre a′ , a et b ?
On souhaite imposer que R
1.2
Chaîne polymérique en interaction
Dans le cas de la chaîne idéale, rien n’empêche deux monomères d’occuper la même position. Dans la réalité, il existe des interactions répulsives entre monomères. En se restreignant
aux interactions à deux corps, on peut écrire l’énergie d’interaction sous la forme U = 21 Uij où
Uij = U (Ri − Rj ) est le potentiel d’interaction entre les monomères i et j.
3) Considérons dans un premier temps une interaction répulsive locale entre monomère de
type Uij = kB T vδ(Ri − Rj ) où T désigne la température, kB la constante de Boltzmann et v ≥ 0
la force des interactions. Quelle est la dimension de v ? Quelle interprétation pouvez vous donner
à v ? A quoi peut-on s’attendre quand à l’exposant ν ?
4) Pour évaluer l’effet des interactions, on va utiliser l’argument de “coarse graining” développé
dans la question 2). On divise donc la chaîne en N/b morceaux contenant chacun b monomères
consécutifs. Chaque morceau est désormais caractérisé par les constantes a′ et v ′ l’interaction renormalisée entre les morceaux.
a) Argumenter que l’on peut écrire a′ sous la forme
a′ = b1/2 a(1 + Hb (u)),
(1)
où u = v/ad est un paramètre sans dimension et Hb (u) est une fonction définie positive. Que vaut
Hb (0) ? On ne cherchera pas à calculer la forme exacte de Hb .
b) De la même manière, on peut montrer que
v ′ = b2 v(1 − Lb (u)),
(2)
où Lb (u) est une fonction définie positive. Justifier le terme en b2 dans l’équation (2) ainsi que le
signe de Lb .
5) Comme dans la question 2), on imposera que la taille de la chaîne est conservée sous l’action
¯ ′ = R.
¯ Ecriver l’équation de renormalide la transformation de renormalisation c’est-à-dire que R
′
′
′
d
sation pour u = v /(a ) ?
6)a) On réitère cette procédure de “coarse graining”. Cela difinit un paramètre d’interaction u′′
pour un polymère composé de N/b2 morceaux. Après n étapes de la procédure de renormalisation,
le paramètre u(n) décrit l’interaction pour un polymère composé de N/bn morceaux. Montrer qu’il
existe une dimension critique supérieure dc telle que pour d > dc , u(n) → 0 lorsque n → ∞. Que
vaut dc ?
2
b) Pour un polymère formé de N liens de taille a, on peut s’attendre à ce que
¯ = af (N, u),
R
(3)
¯ est préservé sous l’action
où f est une fonction d’échelle sans dimension. En utilisant le fait que R
du groupe de renormalisation, que pouvez vous en déduire pour l’exposant ν lorsque d > dc ?
Quelle interprétation physique pouvez vous donner à ce résultat ?
7) En supposant que pour d < dc , u(n) → u∗ 6= 0, déterminer l’exposant de Flory ν en fonction
de u∗ , b, et des fonctions Hb et Lb .
8) Les résultats des questions précédentes indiquent que dc peut être interprété comme une
dimension critique supérieure par analogie avec les systèmes critiques. Cela suggère qu’un développement en ǫ = dc − d permette de calculer l’exposant ν pour un polymère en interaction. Le
développement en ǫ donne à l’ordre le plus bas
Hb (u) =
d
2π
d/2
(b)
ǫ/2
1
u ( + O(1)) ;
ǫ
Lb (u) =
d
2π
d/2
4
(b)ǫ/2 u ( + O(1))
ǫ
(4)
d d/2
(b)ǫ/2 u(n) .
Il est plus commode d’introduire α(n) = 2π
a) A partir du processus d’itération, montrer que α(n) et α(n+1) sont reliés par
8 (n)
(n+1)
ǫ/2 (n)
.
1− α
α
= (b) α
ǫ
(5)
Montrer que cette équation de récursion admet un point fixe non trivial α∗ 6= 0 que l’on
calculera.
b) Etudier la stabilité de ce point fixe et en déduire la correction à l’ordre ǫ de l’exposant
critique de Flory ν. Comparer au résultat de Flory qui avait obtenu ν = 3/5 en dimension d = 3.
9) Question bonus indépendante : On cherche à comprendre comment les résultats précédents sont modifiés si l’on considère des polymères chargés où chaque monomère possède une
charge e. Les interactions Coulombiennes de longue portée entre les monomères prennent la forme :
Uij = kd
e2
,
|Ri − Rj |d−2
2
où kd est une constante qui dépend de d. On introduit la quantité sans dimension Υ = k kTdaed−2 .
B
a) On suppose que l’équation pour a′ garde la même forme que dans (1). Etablir l’équation de
renormalisation reliant Υ′ à Υ.
b) Montrer qu’il existe trois cas de figure possible selon que d > dc2 , dc1 < d < dc2 , d < dc1 .
Déterminer dc1 et dc2 et discuter la physique associée à ces trois cas de figure.
2
Chaine de polymère avec volume exclu et modèle O(n) pour
n=0
Dans une brève note (J. Phys. Lett. 38A, 339 ’1972)), P.G. de Gennes établit l’équivalence
entre le problème d’une chaine de polymère avec volume exclu (SAW), c’est à dire la chaine
étudiée dans la partie précédente, et un modèle ferromagnétique de spins de symétrie O(n) à la
température critique Tc , lorsque n = 0. Nous allons tout d’abord admettre cette propriété, en
explorer des conséquences, puis proposer une explication heuristique.
3
2.1
Groupe de renormalisation du modèle de Heisenberg à symétrie O(n)
~ x) à n composantes placés aux
L’hamiltonien du modèle de spins classiques de longueur unité S(~
noeuds d’un hyper-réseau carré à d dimensions et interagissant par des couplages ferromagnétiques
J > 0 entre premiers voisins s’écrit
H=−
J X~
~ x + ~δ)
S(~x) · S(~
2
(6)
~
x,~
δ
où ~δ est un vecteur de longueur a0 reliant deux sites proches voisins. La transformation de
Stratonovich-Hubbard permet alors d’exprimer la fonction de partition du problème sous la forme
d’une intégrale fonctionnelle sur des champs auxiliaires à n composantes (ϕa (~x)), a = 1, 2, ..n.
Z
Z=
D(ϕa (~x)) exp −βF (ϕa (~x))
Au voisinage de la température de transition de champ moyen Tc 0 , F (ϕa (~x)) s’écrit
Z
X
1X
ϕa (~x)2 ϕb (~x)2 ]
(r0 (ϕa (~x)2 + c(∇ϕa (~x))2 ) + u
F ∝ J dd x[
2 a
(7)
(8)
a,b
r0 = (T − Tc 0 )/T . Par ailleurs, c et u sont des constantes positives.
On passe en transformée de Fourier, puis on subdivise l’intervalle de variation du module des
vecteurs d’onde ~q en deux parties : 0 ≤ q< ≤ baπ0 et baπ0 ≤ q> ≤ aπ0 . b > 1. On introduit les champs
correspondants (ϕa )< et (ϕa )> . On intègre sur les modes rapides ((ϕa )> ) à l’aide d’une approche
perturbative ce qui renormalise les paramètres r0 , c et u intervenant dans l’intégrale fonctionnelle
sur les modes lents ((ϕa )< ). Après une itération infinitésimale de ce groupe de renormalisation
(GR), b = 1 + dl, on obtient les équations du GR pour r, u , c.
1) Expliquez en quelques mots la raison pour laquelle on impose l’absence de renormalisation
du coefficient c.
2)
dr
dl
u(l)
= 2r(l) + 4Kd (n + 2) 1+r(l)
(9)
du
dl
= εu(l) − 4Kd (n +
u(l)2
8) (1+r(l))
2
Kd = Sd /(2π)d (Sd est l’aire de la sphère unité à d dimensions) et ε = 4 − d
Déterminez les points fixes de la transformation (i) pour d > 4 et (ii) pour d . 4.
3) Représentez, dans le plan (u (abscisse), r (ordonnée)), les lignes orientées d’écoulement des
équations du GR pour le cas (i) d’une part et (ii) d’autre part (2 figures). Justifiez en quelques
mots l’orientation de ces lignes.
4) Linéarisez ces équations au voisinage du point fixe non trivial pour ε > 0 et déduisez
l’expression de l’exposant ν. Vérifiez que, pour n = 0 on retrouve le même ν que celui obtenu
dans la première partie du problème pour la chaine de polymère avec volume exclu.
2.2
Sur l’équivalence du modèle O(n) pour n = 0 à Tc et du problème de
SAW
A Tc , l’expression de F pour le modèle O(n) (Eq.(8)) est équivalente à celle du problème SAW
dans la mesure où certaines conditions sont satisfaites.
4
5) Tous les champs ϕ figurant dans le terme quartique de F (troisième terme du membre de
droite de l’Eq.(8)) sont pris au même point ~x. En principe, le coefficient de ce terme quartique
est une fonction u(~x1 , ~x2 , ~x3 , ~x4 ) de quatre positions ~x1 , ~x2 , ~x3 , ~x4 . Quelle forme particulière cette
fonction a-t-elle dans le cas présent ? Quel parallèle peut-on établir avec le cas du problème de
SAW.
L’équivalence entre SAW et O(n=0) concerne les exposants critiques, mais pas Tc . En effet, le
problème SAW est un phénomène critique à T = 0, alors qu’en géneral Tc 6= 0 pour un modèle de
spins. On reprend l’Hamiltonien du modèle O(n), Eq.(6).
~ x) = δ S(~
~ x)+S~e1 où δ S(~
~ x) = S(~
~ x)−S~e1
On utilise la méthode de champ moyen, en écrivant S(~
~
et la valeur moyenne du spin en champ moyen est S =< S(~x) · ~e1 >. Suivant la démarche du
~ x). Ici on repère le vecteur S
~ sur l’hypersphère à n
cours, on linéarise alors H par rapport à δ S(~
dimensions ; ~e1 est le vecteur unitaire de "l’axe z". Un point sur cette hypersphère est repéré par
n − 1 angles θ1 , θ2 , ..., θn−1 ; le n-vecteur s’écrit alors
~ = (cos θ1 , sin θ1 cos θ2 , sin θ1 sin θ2 cos θ3 , ..., sin θ1 sin θ2 ... sin θn−2 cos θn−1 , sin θ1 sin θ2 ... sin θn−2 sin θn−1 ).
S
~
La composante selon "z" est donc la première composante de S.
2
6) Que vaut la valeur moyenne de (cos θ1 ) sur cette sphère unité (aucun calcul n’est nécessaire) ? Ecrivez l’équation d’auto-cohérence permettant d’obtenir S. Sachant que cette grandeur
tend vers 0 à Tc , développez l’exponentielle et déduisez l’expression de Tc , en terme de d, J, n.
Que vaut Tc pour n = 0 ?
7) On veut justifier le fait que la limite n = 0 décrit le problème de SAW. On considère l’effet
des interactions pour l’expression de dr
dl dans les Eqs.(9).Graphiquement, ce terme en u provient
de deux types de diagrammes.
u
b
ϕa
u
ϕ
a
ϕa
a
ϕ
a
a
ϕ
ϕ
ϕ
ϕ
a< a> b> b<
ϕ ϕ ϕ ϕ
a< a< b> b>
D1
D2
Les lignes externes, se terminant par un point symbolisent un champ ϕa . Donc aussi bien
D1 que D2 comportent des termes de type (ϕa )2 , La ligne interne représente une intégration sur
une "coordonnée". Elle symbolise donc une configuration où le système part d’un "endroit", se
propage, puis aboutit à un "endroit". La propagation est affectée par l’interaction u, matérialisée
par la ligne pointillée. Montrez que le poids d’un des deux diagrammes est proportionnel à n
(justifiez). Peut-on alors comprendre pourquoi la limite SAW correspond à n = 0 ?
5