Communication et production forcées des pièces dans le procès civil

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Transcript Communication et production forcées des pièces dans le procès civil

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AnCES & RiSk MAnAgEMEnt
LLEuRS ACtEuRS & ConSEiL
Federation of European Risk
Management Associations
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Commission européenne
Bruno lasserre
Autorité de la concurrence
charlotte cochaud
Michel & Augustin
sylvie Arnautu
Coface
Anne-Marie Guillerme
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idex
ISBN 978-2-918858-55
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15/11/2013 15:10
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tiré du Guide 2014
Risk management, assurance
& contentieux
risk management, assurance & contentieux • cahier des experts
Communication et production forcées
des pièces dans le procès civil
Les pièces sont au cœur du débat judiciaire. Le juge, garant du respect du contradictoire, doit imposer à
la partie qui invoque une pièce de la communiquer si la demande lui en est faite. Le juge peut enjoindre
une partie ou un tiers de produire une pièce réclamée par une partie qui ne la détient pas. si le sujet
paraît simple, l’expérience montre que des confusions sont commises. Brefs rappels.
Sur LeS auTeurS
paul Talbourdet, avocat associé
L
Matthieu Barthélemy, avocat associé
proCédure
’importance des pièces
dans le procès civil a
conduit certains systèmes,
comme ceux de common law, à
instituer des procédures dites de
discovery dans lesquelles l’administration de la preuve ne repose
pas sur l’initiative des parties mais
sur une obligation faite aux parties de divulguer tous les éléments
de preuve pertinents dont elles
disposent, y compris ceux qui lui
sont défavorables, et ce par des
moyens variés et contraignants.
Dans notre système, l’administration de la preuve repose sur la
production et la communication
spontanées des pièces1. Une partie peut toutefois compléter les
preuves dont elle dispose en sollicitant du juge qu’il enjoigne la
production forcée des pièces que
l’adversaire n’accepterait pas de
verser spontanément ou de celles
détenues par un tiers. On rappellera qu’elle peut aussi, mais avant
tout procès au fond, solliciter le
prononcé d’une mesure d’instruction et les mesures tendant à la
conservation ou à l’établissement
160
collection guide-annuaire 2013-2014
décideurs
de la preuve (article 145 CPC).
Le régime de la communication
et de la production forcées des
pièces pendant le procès civil fait
l’objet de trois brefs chapitres du
CPC (articles 132 à 142), outre
quelques dispositions particulières à certaines juridictions.
pièce non communiquée :
attention à l’astreinte
L’obligation de communiquer les
pièces posée par l’article 132 CPC2
est sanctionnée par les articles 133
à 137 qui prévoient les modalités de recours au juge en cas de
méconnaissance. L’obligation est
stricte et ne saurait être considérée
comme remplie au motif que les
pièces sont « à la disposition » de
l’autre partie3.
Le juge, saisi « sans forme » d’une
demande d’injonction4, fixe le
délai de communication et prononce « au besoin » une astreinte5.
En pratique, la saisine du juge
sera faite aux termes de conclusions précédées d’une sommation
de communiquer délivrée par acte
: stratégie finance droit
Paul Talbourdet et matthieu Barthélemy, avocats
associés au sein du cabinet De Pardieu Brocas
maffei, interviennent dans de nombreux contentieux.
Paul Talbourdet : contentieux sensibles,
investissement, financement d’opérations
immobilières, montages et dossiers complexes,
restructuring et droit des assurances
matthieu Barthélemy : contentieux commercial,
bancaire et financier, restructuring et procédures
collectives
d’avocat ou d’huissier et restée
sans effet. La demande est formée
dans des conclusions dites d’incident mais rien n’interdit qu’elle
soit contenue dans les conclusions
au fond. La demande de communication forcée doit être une véritable demande… : il ne suffit pas
de signaler que la partie adverse a
omis de communiquer une pièce
dont elle fait état, encore faut-il
réclamer au juge qu’il force cette
partie à la communiquer. Le juge,
une fois saisi, a l’obligation, et
non la simple faculté, d’enjoindre
la communication6 ; seuls l’astreinte et le délai pour communiquer sont laissés à sa discrétion.
Pour échapper au prononcé d’une
astreinte dissuasive, la partie sommée de communiquer une pièce
pourra renoncer à en faire état et
l’écarter elle-même des débats. Le
juge peut aussi en vertu de l’article
135 CPC – ce n’est qu’une faculté
- écarter du débat « les pièces qui
n’ont pas été communiquées en
temps utile ». Une partie peut
donc, au lieu de requérir la communication forcée d’une pièce
Par Paul Talbourdet et matthieu Barthélemy, avocats associés. de
pardieu Brocas Maffei
LeS poinTS CLéS
Une partie qui détient une pièce et en fait état dans le procès a l’obligation de la communiquer
sous peine d’astreinte ; la mise à la disposition de l’autre partie ne suffit pas
La demande de communication est faite sans forme mais doit être clairement formulée
Le juge a la simple faculté d’ordonner la production d’une pièce détenue par l’autre partie ou par un
tiers s’il est démontré que la pièce existe, qu’elle a un intérêt pour la solution du litige et s’il n’existe
pas d’empêchement légitime à sa production
invoquée par l’autre, ou dans le
cas où cette communication interviendrait tardivement, demander
qu’elle soit écartée des débats.
Des textes particuliers à certaines
juridictions complètent ses dispositions générales. Ainsi, devant la
cour d’appel, l’article 906 CPC
modifié par le décret du 3 mai
2012, applicable à la procédure
avec représentation obligatoire,
oblige les avocats à communiquer
les pièces et les conclusions simultanément, à peine d’irrecevabilité7.
Un régime plus strict de communication est également institué
dans les procédures à jour fixe et à
bref délai où les pièces visées dans
l’assignation doivent être signifiées et déposées avec l’assignation, toute production ultérieure
faisant courir au demandeur le
risque de perdre le bénéfice des
délais courts. Quant aux règles
particulières de compétence, on
citera l’article 770 CPC applicable
au tribunal de grande instance qui
donne pouvoir au juge de la mise
en état pour trancher tout incident relatif à la communication
et à la production des pièces, tandis que l’article 942, applicable à
la procédure sans représentation
obligatoire devant la cour d’appel,
donne compétence à cet effet au
magistrat chargé de la mise en
état.
le secret des affaires…) laissé à
l’appréciation du juge. Si la notion
d’empêchement légitime ne figure
qu’au chapitre de l’obtention des
pièces détenues par un tiers, rien
n’empêche a priori la partie au
procès à qui il est demandé la production d’invoquer un tel empêchement.
demande de production :
le juge est souverain
Qu’elles soient détenues par un
tiers ou par une partie au procès,
les pièces dont une partie veut
faire état mais qu’elle ne détient
pas peuvent faire l’objet d’une
production forcée dans les conditions prévues aux articles 138 à
142 CPC. La demande est faite
sans forme comme pour la communication forcée. Lorsque c’est
un tiers qui est enjoint, ce dernier
dispose d’un recours en rétractation ou en modification de la
décision, s’il invoque un « empêchement légitime » (en pratique
une obligation de confidentialité,
Le juge n’est pas lié par la demande,
laquelle doit viser précisément les
pièces réclamées, en établir l’existence et expliquer en quoi elles
peuvent contribuer à la solution
du litige. C’est ce qu’a rappelé un
conseiller de la mise en état de la
cour d’appel de Paris, pour rejeter
une demande de production forcée8, en ces termes :
« …en application des articles 138
et suivants du CPC, une partie peut
demander au juge la production des
pièces détenues par une autre partie
si elles sont nécessaires à la solution
du litige et si elles sont suffisamment déterminées pour que l’existence puisse en être vérifiée ; (…)
la demande générale de tous documents, courriers, télécopies (…)
entre X et Y dont l’existence n’est pas
certaine et dont la pertinence n’est
pas avérée au regard du débat en
cause est totalement indéterminée et
il ne peut y être fait droit. » On ne
saurait être plus clair.
Article 9 CPC.
« La partie qui fait état d'une pièce s'oblige à la communiquer à toute autre partie à l'instance. La communication des pièces doit être spontanée. »
3
Cass. Civ. 1ère, 20 mars 2013, n°12-14.488, Revue
Lamy Droit civil n°104.
4
Article 133 CPC
5
Article 134 CPC
6
Cass. Civ. 1ère, 20 mars 2013, précité.
7
Sur ce point voir notre article dans le hors-série Risk
management, assurance et contentieux 2013, p. 136
8
CA Paris, 25 novembre 2010, RG 08/15478.
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