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DiagnostiC
Des malaDies
infeCtieUses
BIOLOGIE MOLÉCULAIRE
Philippe nicollet,
Cyril maingourd
Laboratoire d’analyses
Sèvres-Atlantique
210, avenue de la Venise-Verte
BP 570, 79022 Niort Cedex
[email protected]
[email protected]
0,05 CfC
par article lu
apport de la biologie
moléculaire au diagnostic
de laboratoire
des maladies infectieuses
La PCR (polymerase chain reaction) est un outil diagnostique performant en constante évolution.
Afin d’optimiser le résultat de l’analyse, le praticien doit raisonner son prélèvement
selon la pathogénie et les particularités de l’agent infectieux.
Résumé
favec les
techniques de
biologie moléculaire
(PcR ou polymerase
chain reaction),
plus sensibles
et plus rapides
que les méthodes
traditionnelles, se
sont développés des
tests d’identification
pour la plupart des
micro-organismes
infectieux d’intérêt
chez les bovins.
fla technique PcR
continue d’évoluer
pour donner un
plus grand nombre
d’informations
(quantification), ainsi
qu’une simplification
de son utilisation.
fParallèlement à ces
progrès techniques
du diagnostic
vétérinaire, le
praticien se trouve
confronté à des
résultats d’analyse
dont l’interprétation
nécessite une
compréhension
de la pathogénie
de la maladie,
des propriétés de
l’agent infectieux
et des modalités de
prélèvement.
L
es succès de la génétique moléculaire et les progrès effectués en génie génétique ont rendu possible la mise en évidence de séquences d’ADN
ou d’ARN de manière très spécifique.
La biologie moléculaire appliquée au diagnostic
date de 1985 et porte le nom d’amplification enzymatique
en chaîne d’ADN in vitro. Cette technique plus connue sous
le sigle PCR (polymerase chain reaction) permet d’amplifier n’importe quel fragment de matériel génétique en
quelques heures (encadré complémentaire sur www.WKVet.fr). Par sa capacité à amplifier des séquences d’acides
nucléiques présentes en très faibles quantités dans un
échantillon, la PCR est d’un intérêt fondamental dans les
domaines du diagnostic vétérinaire. Elle permet d’envisager la détection d’un agent infectieux directement dans
un échantillon biologique complexe même si celui-ci est
faiblement contaminé ou dans un mélange d’échantillons
de plusieurs animaux, ce qui est une particularité toute
vétérinaire. L’utilisation de cette technologie est également
très intéressante quand l’agent pathogène est de culture
délicate, voire impossible (par nature ou à la suite d’un
traitement antibiotique précoce), ou lorsque les résultats
104
microbiologiques classiques sont obtenus après un délai
très long ou qu’ils manquent de spécificité [8].
Complémentaire de la sérologie et de la culture pour le
diagnostic de nombreuses maladies (paratuberculose,
diarrhée virale bovine [BVD], fièvre Q, chlamydiose, toxoplasmose, néosporose, etc.), la PCR fait l’objet actuellement de textes officiels et, prochainement, d’une norme
Afnor. Largement présente depuis plusieurs années dans
les laboratoires vétérinaires (notamment depuis la crise
de la fièvre catarrhale ovine [FCO] entre 2007 et 2008),
cette technique suscite encore un certain nombre de
questions parmi les praticiens sur les prélèvements, les
limites de détection, la confiance à accorder à un résultat
PCR et la façon de l’interpréter.
partICularItés
des prélÈVeMents
destInés À la pCr
Quelle que soit l’analyse conduite, un prélèvement erroné
est source d’erreur pour le résultat et le diagnostic final.
Il est important pour le praticien de maîtriser les règles
générales d’un prélèvement pour réaliser une analyse
PCR.
1. les prélèvements sont-ils adaptés ?
Bien choisir le site de prélèvement
L’analyse PCR, qu’elle soit quantitative ou qualitative,
consiste à rechercher l’ADN ou l’ARN d’un agent pathogène, et non pas les conséquences de sa présence,
comme le font les analyses sérologiques. Le prélèvement
doit être raisonné en fonction de la pathogénie, et concerner un milieu ou un organe où l’agent pathogène est présent ou se multiplie. Cette donnée est donc primordiale
et varie selon l’agent recherché [18]. Ainsi, une analyse
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Diagnostic Des malaDies infectieuses
Apport de la biologie moléculaire au diagnostic
de laboratoire des maladies infectieuses
PCR paratuberculose ne peut s’effectuer sur le sang, pas
plus que la recherche PCR de la fièvre Q.
Être attentif aux modalités de prélèvement
Selon leur concentration, certains produits peuvent être
potentiellement inhibiteurs de la PCR : talc des gants de
prélèvement, héparine (tubes à bouchons verts), glycérol,
éthanol, ADN à fortes concentrations (prélèvements hautement polycontaminés par de nombreuses bactéries ou
moisissures), EDTA à concentrations élevées, etc. Autant
que possible, le praticien veille à respecter les consignes
du laboratoire en matière de prélèvement (utiliser des
tubes EDTA lors de recherche BVD sur sang total, pas
de gel alcoolisé pour les prélèvements fécaux lors de
recherche de paratuberculose, etc.).
L’étape d’extraction de l’ADN permet en général de se
débarrasser des inhibiteurs. Cependant, certains produits
peuvent gêner l’analyse PCR, et, a minima, la rendre
moins sensible.
Un échantillon positif peut en entraîner d’autres…
Par la très grande sensibilité des méthodes PCR, il convient
de prévenir tout risque de contamination du prélèvement
en utilisant du matériel stérile à usage unique (aiguilles,
gants, pots). De même, le praticien doit éviter de récupérer des prélèvements souillés par l’environnement (placentas ou fèces dans la litière, par exemple), notamment
lors de recherche d’agents infectieux résistants comme
Mycobacterium paratuberculosis ou Coxiella burnetii.
2. Quelle température
de conservation du prélèvement ?
L’analyse PCR détecte un acide nucléique : un ADN ou
un ARN. Ces molécules ne doivent pas être dégradées
entre le moment où le prélèvement est effectué et celui
où il arrive au laboratoire. Or, après le prélèvement, les
cellules, les bactéries ou les virus commencent à mourir,
et leur ADN ou ARN est mis à nu. Les acides nucléiques
sont rapidement dégradés par des DNases (ou RNases),
enzymes présentes partout dans l’environnement. Comme
tout système enzymatique, il fonctionne beaucoup moins
bien à des températures basses. C’est pourquoi les prélèvements doivent être rapidement mis au froid positif.
Les cycles de congélations et de décongélations cassent
l’ADN, et doivent donc être évités le plus possible.
3.
Une validation de la qualité
des échantillons est nécessaire
pour le laboratoire
(1) Dans le cas d’une
reverse transcriptase,
ou transcription
inverse, qu’il ne faut
pas confondre avec
une real time-PCR,
de l’ADN est généré
à partir d’une copie
d’ARN cible.
Lors d’un diagnostic par PCR, il est indispensable pour
le laboratoire d’utiliser un “contrôle interne” [6]. Ce dernier est une molécule d’ADN (pour la PCR) ou d’ARN
(pour la RT-PCR [Reverse-Transcritptase PCR])(1) qui va
être amplifiée en même temps que la cible recherchée.
Idéalement, le contrôle interne est présent dans le prélèvement de départ, et permet donc d’évaluer la qualité de
toute la chaîne d’analyse, à savoir celle du prélèvement,
la conservation avant réception au laboratoire, la conservation au laboratoire, la qualité de l’extraction des acides
nucléiques et celle de l’amplification (absence d’inhibiteurs de la PCR).
Si le contrôle interne est bien amplifié, le prélèvement a
été correctement réalisé et conservé avant son envoi au
laboratoire, pendant l’envoi, puis au laboratoire. De plus,
la révélation de ce contrôle interne traduit l’absence d’inhibiteurs de la réaction de PCR et permet donc de valider
un résultat négatif sur un prélèvement donné.
InterprétatIons
des résultats pCr
En diagnostic de routine, la méthode d’analyse idéale
pour le praticien doit permettre d’aboutir à un diagnostic
de certitude, c’est-à-dire d’objectiver la présence ou non
d’un agent infectieux et de corréler celle-ci aux symptômes observés sur le terrain.
En réalité, la plupart du temps, le résultat d’analyse restitué par le laboratoire doit être confronté aux autres éléments de l’examen de l’animal ou du troupeau. De plus,
il s’interprète dans un contexte épidémiologique donné
qui influence la valeur prédictive du résultat.
Les exemples suivants, fréquemment rencontrés en pratique rurale bovine de routine, illustrent les apports, mais
aussi les limites, de l’analyse PCR de laboratoire.
1.
PCR et diagnostic
de la paratuberculose
f La technique PCR consiste à détecter la présence d’un
fragment d’ADN spécifique de M. paratuberculosis, après
une étape d’amplification. Elle peut être réalisée à partir
des mêmes prélèvements que ceux utilisés pour la culture
(ganglions mésentériques ou fèces).
Théoriquement, cette méthode devrait permettre de
détecter un très faible nombre de bactéries. Toutefois,
sur le plan pratique, ses performances actuelles de sensibilité sont jugées équivalentes à celles de la coproculture,
considérée actuellement comme la méthode de référence
(de 70 % chez les animaux cliniques à 23 à 29 % chez les
individus infectés subcliniques) [20, 21]. La technique
PCR permet néanmoins d’obtenir un résultat en 48 heures,
avec une spécificité estimée à 100 %. La présence, assez
fréquente, d’inhibiteurs de la réaction d’amplification
dans les matières fécales constitue toutefois l’inconvénient majeur de cette technique, conduisant alors à une
analyse ininterprétable à rééditer.
En raison de ses performances équivalentes (voire moins
bonnes) à celles de la coproculture, mais de son coût
supérieur (environ 30 €), la technique PCR est plutôt un
test adapté aux situations d’urgence (exportation) ou de
confirmation clinique (situation dans laquelle la valeur
prédictive négative de l’examen est meilleure) [3].
Selon les données actuelles, la PCR ne dépiste qu’un
animal excréteur sur deux. Les erreurs par défaut (faux
négatifs) peuvent résulter :
- du caractère hétérogène de la répartition des amas de
bacilles dans les fèces (la PCR est effectuée à partir d’environ 1 g de fèces et M. paratuberculosis tend à se présenter
sous forme d’amas) [4] ;
- de l’intermittence de l’excrétion ;
- d’un niveau d’excrétion inférieur au seuil de sensibilité
de la PCR (102 bacilles/g).
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Points forts
€les méthodes de la biologie moléculaire employées dans les
laboratoires vétérinaires reposent sur la mise en évidence par
amplification d’acides nucléiques bactériens, viraux ou parasitaires.
€avec les techniques de PcR (polymerase chain reaction) se sont
développés des tests d’identification pour la plupart des microorganismes infectieux d’intérêt chez les bovins
€globalement, les techniques fondées sur la PcR présentent des
performances de sensibilité et de spécificité meilleures que les
méthodes traditionnelles, et sont réalisées dans un délai plus court.
€l’interprétation par le praticien des résultats d’analyse nécessite
une compréhension
de la pathogénie de la maladie, des propriétés
de l’agent infectieux et des modalités de prélèvement.
(2) Automate
VersaTREK®.
(3) Adiavet®
PARATB.
C’est pourquoi des résultats PCR paratuberculose peuvent
être discordants pour un même animal dans le temps,
en fonction de la qualité du prélèvement, du moment
où il est réalisé et de la prise d’essai pour analyse au
laboratoire.
f Actuellement, plusieurs pistes d’amélioration de la sensibilité de la méthode sont à l’étude.
L’une d’entre elles consiste à effectuer une culture de
M. paratuberculosis en milieu liquide et à associer celle-ci
à un système de détection automatisé de la croissance des
mycobactéries(2). Les échantillons pour lesquels une croissance bactérienne est détectée (délai de 15 à 42 jours)
sont ensuite analysés par PCR. Le gain de sensibilité estimée par plusieurs études menées dans des cheptels laitiers et allaitants pourrait aller jusque 40 %, par rapport à
la PCR temps réel réalisée sur des échantillons analysés
à J0 [2].
Une autre voie d’amélioration de la sensibilité de la
méthode consiste à augmenter la prise d’essai de fèces,
puis à filtrer celle-ci afin de récupérer une quantité accrue
de M. paratuberculosis(3).
En plus d’améliorer le diagnostic individuel de routine,
ces évolutions attendues permettraient d’envisager avec
de meilleures chances de succès (mais parfois un risque
de déconvenue pour des éleveurs considérés comme
indemnes à ce jour) les plans d’assainissement ou de
qualification de troupeau, voire les analyses de mélanges
de fèces qui rendraient le diagnostic moins coûteux [19].
2. PCR et diagnostic des avortements
Les avortements bovins sont pénalisants sur le plan économique, à cause du manque à gagner direct dû à la perte
du fœtus ou indirect lié au décalage de la lactation. Ils
sont fréquemment associés à des maladies infectieuses,
notamment zoonotiques (brucellose, fièvre Q, néosporose, salmonellose, etc.), pour lesquelles la PCR est une
technique de choix pour aider au diagnostic.
Du fait de l’amplification d’un fragment génomique spécifique, la détectabilité (capacité à déceler des quantités
réduites d’agent infectieux) de la PCR est à la fois un avantage et un inconvénient pour le praticien et le laboratoire :
elle permet d’identifier la présence même en petites quan-
106
tités d’un agent infectieux, parfois sur des échantillons où
celui-ci aurait été masqué par des micro-organismes de
contamination avec des méthodes d’identification classiques. En revanche, elle accroît le risque de dépistage
dans l’échantillon d’agents pathogènes environnementaux de contamination, dont la présence ne signifie pas
qu’ils soient impliqués dans l’épisode abortif (Coxiella
burnetii) [14].
Certains tests PCR proposent d’aborder le diagnostic moléculaire en restituant une information sur la quantification
des copies de matériel génétique par rapport à un échantillon dont la quantité de matériel génétique est connue
ou relativement à un plasmide titré.
Ainsi, en fonction de la matrice analysée, le laboratoire
peut fournir des informations au praticien sur le caractère
significatif ou pas de la présence d’un signal moléculaire
détecté par la PCR.
Dans le cas du diagnostic de la fièvre Q, dont l’agent
Coxiella burnetii est particulièrement résistant dans l’environnement extérieur, un seuil de 104 bactéries/g de
placenta ou tout résultat positif sur des organes (rate,
poumon, foie) ou dans le contenu stomacal de l’avorton
est retenu, et ce quelle que soit la quantité de bactéries
présentes. La présence de Coxiella burnetii dans l’avorton,
quelle que soit sa quantité, permet de rapporter l’avortement à la fièvre Q sans ambiguïté [1].
En deçà du seuil de 104 bactéries/g de placenta, un échantillon peut être potentiellement contaminé par des bactéries environnementales, et cela ne suffit pas pour affirmer
que la bactérie est responsable de l’épisode abortif.
D’un point de vue pratique, l’ensemble des prélèvements destinés à l’analyse PCR lors d’avortement peuvent être constitués de sang provenant du cœur et du
fluide thoracique, du contenu stomacal, de l’encéphale
du fœtus (néosporose) et du placenta (ou d’écouvillons
utérins) [7].
3. PCR et diagnostic du BVD
Le BVDV est un virus à ARN à l’origine de la maladie des
muqueuses chez les bovins, générant des pertes économiques importantes dans les élevages. L’infection prénatale d’un veau entre le 60e jour et 120e jour de gestation
d’une vache naïve conduit à la naissance d’un animal
infecté permanent immunotolérant (IPI), extrêmement
contagieux. Le dépistage précoce de ces individus IPI
est essentiel dans le cadre des plans d’éradication ou de
surveillance des introductions d’animaux. La PCR a largement amélioré les possibilités de diagnostic direct de
routine à partir de prélèvements sanguins (sérum ou sang
total), d’organe, de cartilage ou de lait.
Les méthodes de détection du virus BVD par PCR autorisent le dépistage de jeunes bovins IPI même sous immunité colostrale, permettant de s’affranchir des prises de
sang “avant buvée colostrale” autrefois indispensables
[17].
La sensibilité de la biologie moléculaire permet également d’effectuer la recherche sur des pools de prélèvements de plusieurs animaux [17].
Enfin, dans une large proportion de cas, l’analyse individuelle par PCR en temps réel permet de distinguer un
animal IPI d’un individu virémique transitoire grâce au
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Diagnostic Des malaDies infectieuses
Apport de la biologie moléculaire au diagnostic
de laboratoire des maladies infectieuses
caractère quantitatif de cette procédure : la charge virale
est considérable chez les animaux IPI, avec un taux virémique moyen de 10 000 virus par millilitre de sang [9]. Le
principe de la PCR en temps réel est de faire apparaître
la fluorescence de manière proportionnelle à la quantité
d’ARN cible initialement présent. La mesure de la fluorescence est donc proportionnelle au nombre de copies
d’ADN produites par la PCR, lui-même proportionnel au
nombre d’ARN viraux présents au départ, autorisant ainsi
une distinction théorique entre une charge virale massive
(IPI) et une virémie transitoire plus faible. Lorsque le résultat PCR obtenu ne permet pas de statuer (résultat obtenu
situé dans une zone de quantification intermédiaire), une
seconde analyse réalisée 10 à 15 jours plus tard caractérise
une virémie persistante ou transitoire. Le cas de bovins CI
(congenital infection), définis comme des jeunes issus de
mères infectées en fin de gestation, a été cité et correspond à un statut de virémie transitoire prolongé durant
plusieurs mois [11].
Toutefois, même si la notion de quantification paraît rassurante sur le plan intellectuel, la “justesse biologique”
(c’est-à-dire l’adéquation entre le résultat de l’analyse et
le statut réel de l’animal) du résultat doit être nuancée. En
effet, la quantification induit une comparaison du résultat
obtenu dans des conditions de terrain (moment du prélèvement, délai d’acheminement, conservation, volume)
avec un référentiel déterminé selon des données souvent
différentes. De plus, la quantification et sa traduction en
un statut IPI ou virémique transitoire impliquent la définition d’un seuil de décision, nécessairement évolutif
dans le temps : l’analyse PCR d’un bovin peut conduire
à le considérer comme un individu IPI au moment d’un
prélèvement réalisé au pic de virémie, tandis qu’un test
pratiqué plus tardivement sur un autre prélèvement fournira un résultat en faveur d’un statut virémique transitoire.
4. PCR et diagnostic de l’entérite
du veau
f Les méthodes de diagnostic traditionnel occupent
aujourd’hui une large place dans le diagnostic de routine
des entérites du veau, qu’il s’agisse de l’immunochromatographie rapide, de l’Elisa, de la coloration, de la culture
bactérienne ou virale.
Les agents infectieux majoritairement identifiés (seuls ou
en association) sont les cryptosporidies et les rotavirus,
présents dans 30 à 40 % des échantillons issus de veaux
malades âgés de moins de 1 mois, puis les coronavirus
[5, 10].
Les cryptosporidies, les rotavirus et les coronavirus peuvent être détectés en routine par une méthode immunoenzymatique sur fèces. Actuellement, une technique PCR
beaucoup plus sensible est disponible pour le diagnostic
des rotavirus et des coronavirus [15]. En raison de la résistance des rotavirus dans le milieu extérieur et du portage
fréquent de ceux-ci par les adultes, l’interprétation d’un
résultat positif par la méthode PCR ne signifie pas systématiquement que le rotavirus joue un rôle dans le syndrome
entéritique. A contrario, la sensibilité de cette technique
permet de la proposer pour des analyses de mélange de
fèces ou en vérification du statut indemne d’un lot de
veaux vis-à-vis des rotavirus.
f Au sein de la grande famille des souches de E. coli,
une large proportion d’entre elles ne sont pas pathogènes
et jouent un simple rôle commensal (digestion des aliments et apports vitaminiques). En revanche, plusieurs
sérotypes sont connus pour être potentiellement pathogènes dans certaines espèces animales, et notamment
chez les bovins. Les souches d’Escherichia coli pathogènes
présentent des facteurs de pathogénicité au premier rang
desquels figurent les adhésines. Chez les veaux, elles sont
habituellement détectées par une méthode d’agglutination sur lame (F5, F41, F17, CS31)CS31A semble être
le phénotype le plus fréquemment identifié parmi les
souches typables (environ 30 % des échantillons issus de
veaux malades) [5, 10]. Actuellement, la méthode PCR
permet de détecter aussi d’autres facteurs de pathogénicité et diminue d’autant la proportion d’Escherichia coli
dits non typables jusque-là, et qui sont souvent associés à
des troubles septicémiques [13].
f Plusieurs études ont montré, en effet, que les souches
d’Escherichia coli intestinal à potentiel septicémique possèdent d’autres facteurs de pathogénicité que les adhésines [12] :
- des cytotoxines (nécrosantes Cnf, distendantes Cdt,
etc.) ;
- des facteurs de résistance à l’action du complément
(TraT) ;
- une capacité à utiliser le fer sanguin comme un facteur
de croissance supplémentaire (iucD).
f En pratique, les souches d’Escherichia coli possédant les
fragments génomiques susceptibles d’entraîner la détention de ces facteurs de virulence sont caractérisées par
méthode PCR (migration sur gel d’agarose après amplification) après culture (photo). Les résultats obtenus permettent de proposer au praticien une interprétation plus
complète du “profil” de la bactérie (ou “pathotype”), qui
reflète la symptomatologie observée sur le terrain ou les
potentialités variées de pathogénicité contenues dans l’information génétique de la bactérie (tableau 2).
Conclusion
La biologie moléculaire présente de nombreux avantages
par rapport aux techniques dites classiques utilisées au
cours de l’identification des agents pathogènes. En raison
de sa technicité, il convient de prendre soin de préciser l’objectif avant de réaliser des analyses de biologie
moléculaire : identification d’un virus, d’une bactérie
(laquelle et dans quel prélèvement ?) ou d’un facteur
de virulence ?
Dans le cas de micro-organismes à culture difficile, lente
ou dangereuse pour le laboratoire, la PCR permet un diagnostic de routine de ou des agents pathogènes, et ce parfois avec de meilleures sensibilité et spécificité, dans un
délai plus court. Les applications sont actuellement déjà
nombreuses (BVD, paratuberculose, néosporose, fièvre Q,
FCO, etc.) à partir de matrices telles que le sang, le lait, le
mucus vaginal, des organes ou les fèces.
Lorsque le praticien raisonne son prélèvement en fonction des éléments de pathogénie de l’affection et des particularités éventuelles de l’agent infectieux, il bénéficie
d’un outil d’analyse performant au service de sa pratique
quotidienne.
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taBleaU 2
Rôle des facteurs de pathogénicité d’Escherichia coli détectés par PCR
TRoPisme
Classe
symPTômes
Intestinal
Diarrhéogènes
Diarrhées parfois
sanguinolentes,
déshydration,
mort
Extraintestinal
Invasives
Mammopathogènes
PRélèvemenTs
Fèces
Diarrhées parfois
sanguinolentes,
déshydration,
fièvre, septicémie,
bactériémie,
infections, mort
Organes,
sang, fèces
Mammite, fièvre,
mort
Lait, fèces
nom eT aCRonyme
FaCTeURs de viRUlenCe
ETEC :
entérotoxinogènes
F41, F5, parfois F17, ltI/II, staP,
parfois Hly a
STEC : shigatoxinogènes
stx1et/ou stx2, CNF1/2, iuc, cdtIII
et/ou cdtIV
EPEC :
entéropathogènes
eae
EHEC :
entérohémorragiques
eae, stx1 et/ou stx2, ehx
NTEC 2 :
nécrotoxinogènes
CNF2, cdtIII, F17, afa8, sfa, TraT,
parfois iuc et Hly a
NTEC 1 :
nécrotoxinogènes
CNF1, cdtIV, pap, sfa, TraT, Hly a,
parfois iuc
NTEC 2 :
nécrotoxinogènes
CNF2, cdtIII, F17, afa8, sfa, TraT,
parfois iuc et Hly a
ExPEC : septicémiques
eae, TraT, parfois Hly a
NTEC 1 :
nécrotoxinogènes
CNF1, cdtIV, pap, sfa, TraT, Hly a,
parfois iuc
NTEC 2 :
nécrotoxinogènes
CNF2, cdtIII, F17, afa8, sfa, TraT,
parfois iuc et Hly a
Source : Lasat.
aspect des gels
d’amplification
de détection
des facteurs de
pathogénicité.
Ces derniers
sont identifiés
par leurs poids
moléculaires
différents.
Marqueur E. coli 1
Photo : Lasat
Marqueur E. coli 2
- Stx1
(706 pb)
- Eae
- F4l
(443 pb)
(351 pb)
- LtI/II
(236 pb)
- Stx2
- StaP
(612 pb)
(459 pb)
- PapC
- SfaE
(652 pb)
(499 pb)
- EhxA
(339 pb)
- F17A
(336-340 pb)
- H1ya
(251 pb)
(177 pb)
- CnfI/II
(179 pb)
(133 pb)
- IucD
(136 pb)
3 % agarose
www.wk-vet.fr
Compléments
de lecture :
encadré
tableau
figure
Références
108
Marqueur E. coli 3
- CdtIII
- CdtIV
3 % agarose
Il est probable que les évolutions futures du diagnostic
PCR vétérinaire simplifient la pratique de routine en proposant aux laboratoires des trousses de diagnostic optimisé (plusieurs agents pathogènes recherchés en même
temps à partir d’un seul prélèvement), par la mise au point
de puces à ADN, par exemple.
- Gad = IPC (189 pb)
- Afa8E
- TraT
(141 pb)
(230 pb)
3 % agarose
Le matériel de laboratoire dédié à la technologie PCR
temps réel représente encore actuellement un investissement important et nécessite surtout un personnel technique très qualifié, ce qui se traduit par un coût de l’analyse relativement important par rapport aux méthodes
traditionnelles. ❚
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