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L’analyse du discours
Lingua francese
Dott.ssa Anna Giaufret
Laurea specialistica in linguistica
a.a. 2005-2006
Programme du cours
Analyse du discours : la linguistique
française.
Panorama des théories linguistiques
abordant l’analyse du discours avec une
attention particulière aux travaux de
Dominique Maingueneau.
Textes et sites Internet conseillés
E. BENVENISTE, Problèmes de linguistique générale, Paris,
Gallimard, 1966 et 1974 (BF).
D. MAINGUENEAU, Les Termes clés de l’analyse du
discours, Paris, Seuil, 1996 (épuisé).
D. MAINGUENEAU, Analyser les textes de communication,
Paris, Nathan, 1998 (BF).
D. MAINGUENEAU, L’Enonciation en linguistique française,
Paris, Hachette, 1999 (O).
Marges Linguistiques , n. 9, mai 2005, p. 64-75,
www.marges-linguistiques.com
M.-A. PARVEAU, G.-E. SARFATI, Les Grandes théories de la
linguistique, Paris, Armand Colin, 2003 (O).
Pages perso de Dominique Maingueneau (publications,
glossaire d’analyse du discours, textes) :
http://perso.wanadoo.fr/dominique.maingueneau/
Modalités d’examen
L’examen sera oral et se déroulera
entièrement en langue française.
But et articulations du cours
En quoi consiste l’analyse du discours ?
Textes qui vont nous aider à définir l’AD:
article de Dominique Maingueneau, paru dans
Marges linguistiques n. 9 de mai 2005
(consultable en libre accès sur Internet à
l’adresse www.marges-linguistiques.com);
réflexions contenues dans d’autres ouvrages
de Maingueneau, qui abordent les différentes
facettes de cette discipline;
deux volumes fondateurs d’Emile Benveniste
Problèmes de linguistique générale (1966 et
1974).
Première étape
définir la discipline et son objet
ses frontières ne sont pas encore aujourd’hui
clairement définies
débat en cours entre:
ceux qui y voient une discipline de plein droit
ceux qui affirment que c’est plutôt le terrain de
rencontre entre plusieurs disciplines différentes
(psychologie, sociologie, anthropologie, théorie
littéraire, etc. )
Constitution de l’AD
Formation progressive à partir des années
60
Convergence de courants très divers
(linguistes, anthropologues, sociologues,
philosophes, etc.)
Pré-histoire
Formalistes russes (1915-1930):
formalisation de la logique des
enchaînements transphrastiques (conte);
Linguistique distributionnelle de Harris
(’50s aux USA): analyse d’unités
supérieures à la phrase (même si en
dehors de toute référence à la
signification);
1965: Théorie de la littérature de T.
Todorov avec préface de R. Jakobson
(essais des formalistes)
Les idées fondatrices
Benveniste et Jakobson « cherchent à
dégager comment le sujet parlant s’inscrit
dans les énoncés qu’il émet »
(Maingueneau, 1976)
Jakobson, Essais de linguistique générale,
1963 (shifters)
Benveniste, Problèmes de linguistique
générale, 1966 et 1974 (nous y
reviendrons)
Les développements (1)
Développement de plusieurs courants:
ethnographie de la communication,
analyse conversationnelle (Grice)
Ecole française : M. Foucault (dispositifs
énonciatifs)
courants pragmatiques (Austin et Searle)
théories de l’énonciation (Ducrot, Culioli)
linguistique textuelle
M. Bakhtine (genres de discours, dimension
dialogique)
Les choses se précisent
Années 80 et 90
création d’une terminologie spécifique
décloisonnement généralisé entre les différents
courants qui ont le discours pour objet
Définitions de l’AD
Définitions contextuelles trop vagues:
l’étude de « l’usage réel du langage par des
locuteurs réels dans des situations réelles »
(Teun Van Dijk 1985)
Discipline qui « studies not just utterances, but
the way utterances (including the language
used in them) are activities embedded in social
interaction » (Deborah Schiffrin 1994)
Définitions précises, mais trop restrictives.
Définition de l’objet : qu’est-ce que le
discours ?
Ce n’est pas un objet immédiatement
donné
Il ne fait pas l’objet d’une seule discipline
L’utilisation pléthorique du terme discours
est « un symptôme de son statut
théorique instable » (Maingueneau, 1976)
Discours et linguistique saussurienne
Le discours n’est pas un terme que l’on
peut substituer à la parole saussurienne,
ni opposer à la langue.
Pour Saussure, la parole est individuelle,
volontaire, accidentelle et spontanée, alors
que la langue est sociale, réglementée et
essentielle
Il y a dans le concept de discours une
composante sociale très forte et en même
temps il est une instance d’actualisation
de la langue.
Discours entre langue et parole
On pourrait dire qu’il s’agit de
l’articulation de la langue et de la
parole, un troisième terme qui manquait
au binôme saussurien.
Discours: un terme polysémique (1)
Discours vs langue= parole (linguistique saussurienne)« usage de la langue dans un contexte particulier » (DAD)
Le discours peut être orienté vers la dimension sociale
(Gardiner), mentale (Guillaume) ou énonciative
(Benveniste) ; « usage restreint de ce système » :
positionnement dans un champ discursif (discours
communiste) ; type de discours (discours journalistique) ;
productions verbales spécifiques d’une communauté de
locuteurs (discours des infirmières) ; fonction du langage
(d. polémique, descriptif, etc.)
Discours vs phrase = message, énoncé (unité linguistique
de dimension supérieure à la phrase)
Discours: un terme polysémique (2)
discours (théories de l’énonciation) au
sens large : « toute énonciation supposant
un locuteur et un auditeur, et chez le
premier l’intention d’influencer l’autre en
quelque manière » (Benveniste 1966)
Discours: un terme polysémique (3)
Discours vs énoncé (ou texte)(linguistique
française):
« L’énoncé, c’est la suite des phrases émises entre deux
blancs sémantiques, deux arrêts de la communication ;
le discours, c’est l’énoncé considéré du point de vue du
mécanisme discursif (conditions de production) qui le
conditionne » (L. Guespin, Langages, 23)
« […] le sens d’un énoncé est défini en dehors de tout
cadre énonciatif, alors que sa signification est référée
aux circonstances de communication qui en font un
discours » (Maingueneau, 1974 ; terminologie de
Charaudeau).
En d’autres termes, énoncé + situation de
communication = discours.
Caractéristique du discours en
linguistique du discours
le d suppose une organisation transphrastique
le d est orienté (linéarité de la communication langagière)
le d est une forme d’action (il s’insère dans des activités
langagières d’un genre détermine, par ex. un tract)
le d est interactif
le d est contextualisé
le d est pris en charge : il « est rapporté à une instance qui
à la fois se pose comme source des repérages personnels,
temporels, spatiaux et indique quelle attitude il adopte à
l’égard de ce qu’il dit et de son interlocuteur »
le d est régi par des normes sociales et normes spécifiques
le d est pris dans un interdiscours
Conditions de production et situation
de communication
Relation entre les conditions de production
(Guespin) et la situation de communication
(Charaudeau) :
tous deux se réclament de l’analyse du discours
Guespin cherche à élucider les mécanismes de la
pratique usuelle du langage
Charaudeau s’intéresse surtout à des textes et à
des types de textes en les analysant à partir de
méthodes fondées sur une théorie de
l’articulation du discours sur les conditions sociohistoriques.
linguistique du discours et analyse du
discours
Maingueneau (1995) : « le discours ne devient
véritablement objet de savoir que s’il est pris en
charge par diverses disciplines qui ont chacune
un intérêt spécifique : sociolinguistique, théories
de l’argumentation, analyse du discours, analyse
de la conversation, l’analyse critique du discours
(la « CDA » anglo-saxonne), etc. »
Cet ensemble constitue la linguistique du
discours, dont l’analyse du discours ne serait
qu’une des composantes.
Discours = texte + lieu social
Pour l’analyse du discours, discours = intrication d’un
texte et d’un lieu social
son objet n’est ni l’organisation textuelle ni la situation de
communication, mais ce qui les noue à travers un
dispositif d’énonciation spécifique.
Ce dispositif relève à la fois du verbal et de
l’institutionnel : penser les lieux indépendamment des
paroles qu’ils autorisent, ou penser les paroles
indépendamment des lieux dont elles sont partie prenante,
ce serait rester en deçà des exigences qui fondent l’analyse
du discours.
La notion de lieu social ne doit cependant pas être
appréhendée de manière trop immédiate : il peut s’agir
d’un positionnement dans un champ discursif (politique,
religieux…) » (Maingueneau 2005).
L’AD selon le Dictionnaire d’analyse du
discours, 2002 (1)
Discipline qui résulte à la fois de la
convergence de courants récents et du
renouvellement de pratiques anciennes
(rhétorique, etc.).
Interprétation plus courante : analyse du
rapport entre texte et contexte.
Analyse du discours comme étude du
discours : « discipline qui étudie le
langage comme activité ancrée dans un
contexte produisant des unités
transphrastiques »
L’AD selon le Dictionnaire d’analyse du
discours, 2002 (2)
Analyse du discours comme étude de la
conversation : analyse linguistique des
textes conversationnels (qui s’oppose à
l’analyse conversationnelle, de type plutôt
ethnométhodologique).
Analyse du discours comme point de vue
spécifique sur le discours : elle doit
« penser le dispositif d’énonciation qui lie
une organisation textuelle et un lieu social
déterminé ».
Articulations dans le champ de l’AD
On peut distinguer 4 grands pôles dans les
travaux d’AD :
interaction sociale ;
étude des situations et donc des genres de
discours ;
conditions de production et positionnements
idéologiques ;
organisation textuelle et marques
d’énonciation.
Il s’agit moins d’une discipline que d’un
espace de problématisation.
Quelques définitions
Patrick Charaudeau, Dominique Maingueneau,
Dictionnaire d’analyse du discours, Paris, Seuil,
2002
Champ discursif
champ découpé par l’analyste du discours dans
l’univers discursif, où un ensemble de formations
discursives sont en relation de concurrence, se
délimitent réciproquement (par ex. les différents
discours politiques). Le champ discursif est un
jeu d’équilibre instable et il n’est pas homogène,
car il y a des discours dominants/dominés et
centraux/périphériques. Espace discursif : sousensemble du champ d., constitué d’au moins
deux positionnements discursifs.
Communauté discursive
« les locuteurs relevant de
positionnements (un journal, un parti
politique, une école scientifique …) qui
sont concurrents dans un même champ
discursif ». On peut se demander si la
communauté discursive doit inclure
seulement les producteurs de textes ou
inclure ceux qui participent à leur
élaboration et diffusion.
Compétence discursive
« aptitude à maîtriser les règles d’usage
de la langue dans la diversité des
situations ». Différent de c. linguistique, c.
encyclopédique, c. logique, c.
pragmatique. Elle implique au premier
chef la maîtrise des genres de discours.
Chez Maingueneau : « aptitude du sujet,
historiquement définie, à produire et
interpréter des énoncés qui relèvent d’une
formation discursive déterminée ».
Conditions de production
« circonstances dans lesquelles un
discours est produit ». Souligne
l’importance de ce qui conditionne le
discours dans un contexte donné.
Enoncé
é (produit) vs énonciation (acte)
séquence verbale de taille variable
niveau transphrastique : « séquence verbale qui forme un tout
relevant d’un genre de discours » = texte
linguistique textuelle : é (« objet matériel oral ou écrit, […] objet
observable et empirique ») vs texte (« objet abstrait […] qui doit
être pensé dans le cadre d’une théorie (explicative) de sa
structure compositionnelle » (Adam 1992).
Analyse du discours : opposition établie par L. Guespin entre é et
discours : « L’énoncé, c’est la suite phrases émises entre deux
blanc sémantiques, deux arrêts de la communication ; le discours,
c’est l’énoncé considéré du point de vue du mécanisme discursif
qui le conditionne. Ainsi, un regard jeté sur un texte du point de
vue da sa structuration « en langue » en fait un énoncé ; une
étude linguistique des conditions de production de ce texte en fera
un discours » (Guespin 1971).
Enonciation
« la mise en fonctionnement de la langue
par un acte individuel d’utilisation »
(Benveniste 1974).
« l’événement constitué par l’apparition
d’un énoncé » (Ducrot 1984)
Formation discursive
« tout ensemble d’énoncés socio
historiquement circonscrit que l’on peut
rapporter à une identité énonciative : le
discours communiste », etc. Employé
surtout au sens idéologique, donc plutôt
« formation discursive politique » que
« publicitaire ».
Genre de discours
point de vue fonctionnel : selon les fonctions du
message (Jakobson et Halliday)
point de vue énonciatif : Benveniste distingue
entre discours et histoire/récit – caractéristiques
formelles des textes
point de vue textuel : organisation des textes
(Adam)
point de vue communicationnel : a) Bakhtine :
genres premiers (productions naturelles) / genres
seconds (productions construites) ; b)
Maingueneau : discours constituants (qui
prétendent à un rôle fondateur) ; c)
Charaudeau : genres situationnels.
Interdiscours
il est au discours ce que l’intertexte est
au texte.
Sens restrictif : « espace discursif,
ensemble de discours […] qui
entretiennent des relations de délimitation
réciproque les uns avec les autres ».
Sens large : « ensemble des unités
discursives […] avec lesquelles un discours
particulier entre en relation implicite ou
explicite »
Paradigme définitionnel / désignationnel
(M.-F. Mortureux 1993) : « liste de syntagmes
(en général nominaux, parfois verbaux)
fonctionnant en coréférence avec un vocable
[lexie en discours] initial dans un discours
donné » (Mortureux 1993). Il s’agit donc d’un
ensemble de reformulants parmi lesquels il est
nécessaire de dissocier ceux qui ont une valeur
désignative – en vertu de quoi il constituent le
paradigme désignationnel – de ceux qui
correspondent à des périphrases définitionnelles
et forment de ce fait le paradigme définitionnel ».
Positionnement
le fait qu’à travers l’emploi de certaines
expressions, le locuteur indique comment
il se situe dans un espace conflictuel ;
« identité énonciative forte dans un champ
discursif » ; « la position qu’occupe un
locuteur dans un champ de discussion,
[les] valeurs qu’il défend » (Charaudeau
1998b).
Pratique discursive
discours, activité discursive en général ;
un secteur de cette activité
Scène d’énonciation
Parasynonyme de « situation de communication » qui « met l’accent sur le
fait que l’énonciation advient dans un espace institué, défini par le genre
de discours, mais aussi par la dimension constructive du discours, qui se
« met en scène », instaure son propre espace d’énonciation ».
Selon Mainguenau (1993, 1998) il y a trois scènes d’énonciation distinctes :
la scène englobante : qui assigne un statut pragmatique au type de
discours dont relève le texte (un tract peut appartenir au discours
religieux ou politique) ;
la scène générique : définie par les genres de discours ;
la scénographie : instituée par le discours lui-même. Par exemple un texte
qui se présente sous forme de lettres (les 10 premières Provinciales de
Pascal). « La scénographie est à la fois ce dont vient le discours et ce
qu’engendre le discours ; elle légitime un énoncé qui de retour, doit la
légitimer, doit établir que cette scénographie dont vient la parole est
précisément la scénographie requise pour raconter une histoire, […] etc. »
La scénographie implique un énonciateur, un co-énonciateur, une
chronographie (temps), une topographie (lieu).
Topologie discursive
« se structure par rapport aux
communautés discursives, en particulier
par rapport aux caractéristiques de cellesci relativement aux formes de circulation »
de leurs discours. Par ex. circulation
interne/externe.
Typologie des discours
composante de la compétence
communicative du locuteur, acquise par
imprégnation ou par enseignement
explicite, lui permettant de comprendre et
produire des textes et de circuler dans la
société. Il existe de multiples typologies.