Analyser/interpréter

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Quelques éléments de réf lexion
Bruno Girard, inspecteur de l’éducation nationale
2012©
« Penser, analyser, inventer ne
sont pas des actes normaux, ils
constituent la respiration
normale de l'intelligence. »
Jorge Luis Borges
 L’enseignement du français vise deux grandes
compétences :
- Entrer dans l’échange écrit : lire, analyser, écrire.
- Devenir un lecteur compétent et critique.
Deux axes :
 Une idée de décomposition
 Une idée de résolution
 1. Action de décomposer un tout en ses éléments
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constitutifs
2. Examen souvent minutieux qui tente de dégager les
éléments propres à expliquer
3. Observation
4. Terme psychanalytique
5. Dosage
6. Décomposition d’une grandeur physique
7. Dissection des relations fonctionnelles, organiques,
causales, des natures, des fonctions
8. Terme d’optique
 1. Méthode démonstrative, déductive, conduisant à
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l’exposé d’une vérité
2. Etude des fonctions d’ensemble et des liens entre les
objets
3. Généralisation d’une série d’observations
4. Calcul
5. Opération intellectuelle réflexive basée sur des
relevés ou des observations
Une « régression » qui part de la conséquence pour
arriver au principe
 Pour Buffon, ainsi, le style, c'est l'homme même, c'est-à-dire que le style, c'est
l'écart par rapport à la norme linguistique. Cet écart peut être de différents
ordres mais il vise à produire un effet chez le lecteur (ou chez l'auditeur).
Georges Mounin distingue le style comme écart, le style comme élaboration
(cependant, précise-t-il, tout écart ou toute élaboration ne fait pas
nécessairement style) et le style et la connotation.
 Michael Riffaterre défend l'idée que la stylistique étudie les messages comme
portant l'empreinte de la personne du locuteur.
 Selon Cressot toute extériorisation de la pensée qu’elle se fasse par la parole ou
au moyen de l’écriture (c’est-à-dire la communication) est un processus
subjectif et rhétorique destiné à agir sur le destinataire. L'énonciateur opère
donc un choix parmi les possibilités ouvertes par la langue et affectant
différents niveaux linguistiques comme la morphologie, la syntaxe, l'ordre des
mots, la lexicologie ou les temps verbaux.
 Pour Marouzeau le style est « l’attitude que prend l’usager, écrivant ou parlant,
vis-à-vis du matériel que la langue lui fournit » alors que pour le linguiste
allemand Leo Spitzer , le style est « la mise en œuvre méthodique des éléments
fournis par la langue ». « Le style c’est le texte même ».
 Trois étapes d’une démarche réflexive sur les textes
 Décrire : c'est faire un certain nombre de constations objectives sur le
texte, afin d'obtenir une base solide sur laquelle l'analyse et
l'interprétation viendront se fonder.
 Analyser : c'est démonter le mécanisme du texte, mettre en évidence
comment il fonctionne, comment il cherche à atteindre le(s) but(s) que
l'auteur a fixé(s), ou comment il arrive à produire sur le lecteur certains
effets.
 Interpréter : c'est proposer des hypothèses, sinon des conclusions sur le
sens du texte. Si l'on a fait soigneusement le travail de description et
d'analyse, on se rend compte que le sens du texte, s'il n'est jamais
exactement réductible à une seule dimension, à un seul "message",
peut être précisé en fonction de paramètres assez objectifs. Il peut se
révéler obscur, ambigu, paradoxal, mais il n'est jamais aléatoire.
« Tout texte écrit est contractuel. Il lie
l’auteur et son lecteur à la promesse
d’un sens »
George Steiner « Le silence des livres »
 Approche de Bally en 1909 :
« Etudie les faits d’expression du langage du point de vue
de leur contenu affectif, c’est-à-dire l’expression des
faits de la sensibilité par le langage et l’action des faits
de langage sur la sensibilité . »
Traité de stylistique française, 1909.
Le style (donc) un compromis entre nature et culture…
 Approche de Guiraud en 1955 :
L’analyse stylistique serait « l’étude des valeurs extranotionnelles d’origine affective ou socio-contextuelles qui
colorent le sens. C’est l’étude de la fonction expressive du
langage opposée à sa fonction cognitive ou sémantique. »
Pierre Guiraud, La sémantique, 1955.
Ce que Genette traduit immédiatement alors en : « le style
est la fonction expressive du langage, comme opposée à sa
fonction notionnelle, cognitive ou sémantique. »
Et Mikel Dufrenne qualifiant le style d’expression connotée
d’ajouter : « Le style est la fonction connotative du
discours, comme opposée à sa fonction dénotative . »
Ces modalités sont essentiellement :
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Celles de l’écriture
Celles des mots
Celles des phrases
Celles des postures énonciatives
Celles des procédés rhétoriques
Qui permettent aux auteurs de livrer :
- Leur vision du monde
- Leur expression sensible
- Leur univers
Et de les faire partager.
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
(Au-delà de la connaissance des contextes, de la biogénèse des
textes, de l’histoire sociale, économique, politique et culturelle
des auteurs, des écoles, des courants, des individualités…)
La grammaire
La linguistique
La rhétorique
La poétique
La sémiotique
Pour décrire l’utilisation qu’un auteur fait de tel ou tel élément
langagier.
-
Fait de langue digne d’observation signifiante
Se pose alors la délicate question de sa représentativité et de sa valeur
Les principaux « procédés » sont :
La progression textuelle,
Les procédés énonciatifs,
Les procédés lexicaux,
Les procédés grammaticaux,
Les procédés rhétoriques.

On s’attachera au plan de l’expression (le signifiant) et au plan du contenu (le signifié)

On y associera parfois le paratexte et les dominantes textuelles et d’autres savoirs (littéraires,
culturels, historiques…)

Forme et fond vont de pair. « Analyser c’est dévoiler ce qui est fondamentalement lié dans le texte »
(C. Fromilaghe)

Texere : Tisser en latin. Chaque élément d’un texte concourt à la signification de l’ensemble

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-
 On analyse un texte par la forme pour aboutir à une
hypothèse interprétative en vue de résoudre une
question problématique.
 La démarche est simple :
1. Lire, comprendre, sentir.
2. Repérer, relever en vue de rendre compte.
3. Identifier et classer.
4. Analyser et démontrer.
5. Montrer notamment des effets de sens, des effets
esthétiques, des effets émotionnels avérés.
 Il convient de chercher la valeur du procédé pour
l’évaluer quantitativement et qualitativement :
1. Quantitativement :
- De manière statistique simple,
- Degré de présence et/ou d’absence,
- Les reprises à haute fréquence,
- La répartition dans le texte.
2. Qualitativement :
- Signification/pertinence,
- Impact/effet.
 Tout effet « catalogue ».
 Toute lecture « myope ».
 Toute lecture purement « linéaire » : se détacher de ce type de
déroulement pour regrouper les procédés autour de
« dominantes », autrement dit en opérant des regroupements
dépendants de la logique imposée par la problématique
proposée. Ce type de lecture n’offre pas de « projet » de lecture ni
de plan de composition.
 La paraphrase plate et/ou le délayage.
 La séparation de la forme et du fond.
En rester à des procédés véritablement constitutifs du texte !
Jakobson
« La dominante donne la possibilité de ne retenir que
deux ou trois axes directeurs susceptibles d’orienter et
d’organiser l’étude du détail. »
Document « ressource » « lire » : « La lecture
analytique reste une activité d’attention portée au
détail. »
L’analyse établit en quoi les procédés concourent à
l’expressivité du texte, au rendu des émotions, à
l’esthétique de l’œuvre.
Il y a, dans toute production artistique, un langage à comprendre :
- Comment l’œuvre est-elle composée ?
- Pourquoi l’est-elle ainsi ?
- Comment l’artiste crée-t-il l’émotion ?
- Comment s’inscrit-il ou se démarque-t-il du contexte de son
époque ?
- Quels choix esthétiques mettent particulièrement en valeur le
sens qu’il a voulu donner à son œuvre ?
- A quels effets d’écriture le lecteur, le spectateur, est-il aujourd’hui
sensible ?
- « La réflexion sur l’écriture de l’œuvre et ses effets sur le lecteur
d’aujourd’hui ».
« Faire découvrir les moyens par lesquels l’auteur a
obtenu l’effet qu’il recherchait, à construire et à
expliquer le sens qu’une première lecture ne faisait que
laisser deviner. »
« On évite donc de choisir des textes ou des œuvres qui
ne « résistent » pas. »
 « Elle permet de découvrir des idées, une écriture, un
auteur, de passer d’une signification personnelle
supposée à une interprétation collective négociée, de
dégager des enjeux aussi bien en production qu’en
réception. Un texte vit avec les souvenirs, les images
mentales, les représentations intimes du lecteur, et
face à lui tout élève a le droit d’anticiper, de
transformer des détails en indices, de valider ou
d’infirmer ses hypothèses, d’interpréter. L’analyse d’un
texte ne peut se réduire à un questionnement
mécanique, elle doit aussi et surtout permettre de
répondre au questionnement du lecteur. »
 « Dans l’étude des textes, il est nécessaire de tenir
compte du lecteur et de sa subjectivité. Le cours de
français consacré à la lecture analytique est ainsi un
moment essentiel d’interactions verbales entre le
professeur et les élèves, entre les élèves eux-mêmes.
 S’il est essentiel de partir des impressions et des
réactions des élèves lecteurs, il est également essentiel
de s’appuyer sur des connaissances et des capacités qui
contribuent à la construction du sens du texte.
 Il s’agit donc pour les professeurs de travailler sur les
textes en prenant en compte à la fois l’expérience
subjective des élèves et leur maîtrise progressive des
formes et des codes de la littérature. »
« La lecture analytique procède par des entrées diverses,
sans qu’il y ait une « grille de lecture » prédéterminée :
- La prise en compte de l’énonciation peut être ou non
un élément essentiel du projet de lecture.
- La mise en lumière du plan du texte peut être ou non
importante dans la construction du sens.
- Dans tel texte, c’est le lexique qui fonde
particulièrement l’interprétation, dans tel autre c’est le
recours à des figures (énumération, gradation, par
exemple), dans un troisième ce sont les formes de
phrases, ou les temps verbaux.
 L’évaluation des compétences de lecture à travers les
questions les questions d’analyse et d’interprétation.
 Le BO. « Le candidat analyse un ou deux effets d’écriture et
en propose une interprétation. »
 1 ou 2 questions ?
Si vous parcourez l’ensemble des sujets O qui vous ont été
proposés, vous vous apercevrez que deux questions
(d’analyse et d’interprétation ) sont toujours posées. Bien
entendu, cela n’interdit pas un sujet ne proposant qu’une
question d’analyse et d’interprétation même si ce n’est pas
le cas dans ce que vous avez sous les yeux.
 L’analyse peut-elle porter sur plusieurs documents ?
Les questions portent sur l’ensemble des textes et
documents ou sur un seul de ces textes et documents.
Par exemple dans le sujet 3, les questions 2 et 3 portent
sur l’ensemble du corpus. Il en est de même pour la
question 2 du sujet 1 (qui porte sur les deux textes et
sur la photographie) ; dans le sujet 6 la question 2
porte sur deux des trois textes.
 Le « comment » est prépondérant : sujets 1, 2, 5 et 6.
 L’approche démonstrative occupe deux sujets : sujets 1
et 4.
 L’objet de l’analyse peut être privilégié : le « quoi » :
sujet 3.
 L’explication : sujet 3
 La notion de procédés est souvent évoquée : sujets 1, 3,
4
 Gérard Genette « Style et signification »
 Léo Spitzer « Etudes de style »
 Catherine Fromilaghe et Anne Sancier-Château
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« Introduction à l’analyse stylistique »
Paul Ricoeur « La métaphore vive »
Oswald Ducrot « Le Dire et le Dit »
Jean-Michel Adam « Les textes : types et prototypes »
Patrick Chavaudeau « Grammaire du sens et de
l’expression ».
« Si l’estimable public se montre incapable de comprendre
telle ou telle remarque, ce n’est pas seulement parce qu’il
ignore
la Bible,
les langues anciennes,
l’histoire,
la mythologie,
les littératures classique et mondiale,
mais aussi parce qu’il ne possède pas les outils du langage,
la grammaire,
la métrique,
l’étymologie,
la magie des sons. »
Ernst Jünger, « L’Auteur et l’Ecriture », 1982.