Neurophysiologie rétinienne

Download Report

Transcript Neurophysiologie rétinienne

Cours 5
NEUROPHYSIOLOGIE
RETINIENNE
INTRODUCTION
L’œil est une sphère d’environ 25 mm de diamètre
encastrée dans l’orbite, protégée par les paupières,
lubrifiée par les sécrétions lacrymales et animée par
trois paires de muscles.
Grâce à lui, nous sommes capables de jauger notre
environnement, ses couleurs, ses formes et ses
mouvements.
Pour montrer l’importance du sens de la vision, il faut
savoir que environ 250 millions de photorécepteurs
(cônes ou bâtonnets) sont concentrés sur les rétines des
deux yeux.
En venant les frapper, les photons entraînent par une
cascade de réactions enzymatiques la formation de
signaux nerveux.
Ceux-ci sont ensuite orientés vers quelque deux millions
de cellules ganglionnaires situées sur la couche interne
de la rétine. A ce niveau se forment déjà des contrastes
de couleur ou de luminance.
Ainsi élaboré, le signal visuel quitte l’œil par le nerf
optique, composé de 1 million de fibres nerveuses, qui
l’acheminent vers les structures sous-corticales et
corticales dévolues à la vision.
Chez l’homme, elles n’occupent pas moins de 15% du
cortex cérébral.
Pour voir quelque chose, il faut non seulement de la
lumière et des surfaces qui la réfléchissent mais aussi
un dispositif optique qui sélectionne les rayons pour
former une image.
Ainsi formée, l’image doit être acquise, traitée et
transformée avant d’être envoyée au cerveau.
Dans cette organisation, la rétine occupe une position
stratégique puisque deux opérations essentielles y sont
réalisées :
- Une transduction de l’énergie de la lumière contenue dans
l’image en des signaux électrochimiques élaborés par des
photorécepteurs.
- Un traitement de ces signaux pour coder l’image sous forme de
trains d’impulsion électriques propagées par le nerf optique.
I - IL EXISTE DEUX TYPES DE
PHOTORECEPTEURS : LES CONES ET LES
BATONNETS
Une caractéristique surprenante de la rétine est que la
lumière doit traverser les couches les plus proximales
(en référence au centre du globe oculaire) avant
d’atteindre les photorécepteurs.
Sur son passage, la lumière traverse successivement la
cornée, l’humeur aqueuse, le cristallin, le corps vitré et
la couche nerveuse de la rétine.
Ces couches sont cependant translucides, car
dépourvues d’éléments sanguins, ce qui fait que la
lumière parvient à la rétine sans absorption ni
déformation.
Dans la fovéa centrale, la partie de la rétine qui possède la plus
grande résolution spatiale, on ne trouve que des photorécepteurs.
Constituée de cônes, c’est là que l’image est perçue avec la plus
grande netteté. Les cônes détectent les formes et les couleurs et
sont responsable de la vision diurne. Chaque cône transmet son
information à plusieurs fibres du nerf optique.
Située plus près du nez, se trouve le disque optique qui
correspond à l’endroit où le nerf optique quitte la rétine. Ce disque
optique n’ayant pas de récepteur n’occasionne aucune vision.
Les bâtonnets, situés à la périphérie de la fovéa, interviennent
pour la vision nocturne, quand la lumière est particulièrement
faible. Ils ont une très faible perception des détails et des couleurs
car plusieurs dizaines de bâtonnets ne sont liés qu'à une seule
fibre du nerf optique.
Les caractéristiques particulières des deux systèmes
reposent sur la nature des récepteurs et le type de
connexion avec les autres éléments de la rétine.
A l’exception de la fovéa, il y a 20 fois plus de bâtonnets
(108) que de cônes.
Les cônes sont bien plus importants pour la vision
puisque leur perte conduit à un état de cécité légal.
Les bâtonnets diffèrent des cônes structurellement en
ayant des photorécepteurs plus longs, ce qui leur
permet de capturer davantage de lumière. Les
bâtonnets sont également sensibles aux rayons de
lumière s’approchant de leur axe sous un angle large
alors que les cônes le sont pour des rayons orientés
plus directement.
Le système des bâtonnets est convergent. La plupart
des bâtonnets font synapse sur un même interneurone :
la cellule bipolaire.
Cette organisation augmente la capacité du système
des bâtonnets à détecter la lumière mais au détriment
de la qualité de l’image
Les cônes sont connectés à un autre type
d’interneurones, les cellules horizontales, dirigées
latéralement.
II - LES CONES ET LES BATONNETS PRESENTENT
DES DIFFERENCES STRUCTURELLES ET
FONCTIONNELLES
Chacun des récepteurs se compose de trois parties : un
segment externe, un segment interne et une terminaison
synaptique.
Le segment externe permet la photoréception.
Le segment interne est continu avec la portion terminale
de la cellule réceptrice qui fait synapse avec l’élément
suivant de la transmission rétinienne. Il contient le noyau
ainsi que de nombreuses mitochondries et ribosomes.
Les segments externes contiennent un système
composé de disques membraneux (1000 environ)
empilés.
Les repliements des membranes des disques
contiennent les photopigments visuels.
Chaque molécule de pigment est orientée à l’intérieur de
la membrane de façon à maximaliser l’absorption d’un
photon (la plus petite quantité de lumière) d’un rayon
lumineux.
Le potentiel d’attrapage des cônes et des bâtonnets est
accru par la disposition verticale des disques. La lumière
qui échappe à l’un des disques est attrapée par un
autre.
Les segments externes des bâtonnets se renouvellent à
un rythme rapide par des déplacements des disques
vers la partie interne.
Dans les bâtonnets, un à trois nouveaux disques
viennent s’ajouter à la base du segment externe toutes
les heures.
Simultanément, les anciens disques sont éliminés au
sommet et phagocytés par des cellules épithéliales
pigmentaires.
Cette phagocytose intervient selon un rythme à peu près
circadien. Celui relatif aux bâtonnets est déclenché le
matin par la lumière, celui relatif aux cônes est
déclenché le soir par l’obscurité.
II –1 L’excitation des cellules en bâtonnet implique la
dissociation de la rhodopsine
Comment la lumière est-elle absorbée et
subséquemment transformée en signal électrique ?
La première étape réside dans l’absorption de la lumière
par un photopigment.
Il s’agit de protéines colorées dans les membranes des
segments externes qui subissent des transformations
structurales suite à l’absorption de la lumière.
Il en résulte la production d’un potentiel récepteur
Les bâtonnets sont sensibles à la lumière du fait de la présence
d’un pigment, la rhodopsine (rhodo : rose, opsis : vision) qui
présente la particularité d’absorber des photons
Il y a à peu près 109 molécules de rhodopsine dans le segment
externe de chaque bâtonnet.
Chacune molécule de rhodopsine, comme tous les photopigments, contient deux éléments : une glycoprotéine (l’opsine) et
un petit lipide dérivé de la vitamine A, le rétinal.
Seul le rétinal interagit physiquement avec la lumière. Le rétinal
présente la particularité de pouvoir exister sous deux formes,
chacune apparaissant signifiante pour une phase du cycle visuel.
Dans l’obscurité, le rétinal a une forme repliée, on l’appelle alors
cis-rétinal.
A la lumière, le cis-rétinal se déplie et prend une nouvelle forme
appelée trans-rétinal et se décolle de l’opsine.
De façon à être réutilisé, le trans-rétinal doit être ré-isomérisé en
cis. La lumière fait donc passer le rétinal d’une forme à l’autre.
Cette photo-isomérisation suffit à initier la cascade d’évènements
biochimiques qui conduit à la production d’un signal électrique, le
potentiel récepteur, à travers la membrane du photorécepteur.
Après une exposition prolongée à une lumière intense, la plus
grande partie de la rhodopsine a été dissociée, amenant les
molécules de trans-rétinal dans l’épithélium pour reconstituer du
cis-rétinal et rendant les bâtonnets moins sensibles à la lumière.
Après exposition à une lumière très intense, lorsque la rhodopsine
des bâtonnets a été dissociée, cela prend presque une heure
pour resynthétiser l’ensemble de la rhodopsine.
II –2 L’excitation des cellules en cône implique la
dissociation d’une opsine
Tout comme pour la rhodopsine, les pigments visuels des cônes
sont composés d’une protéine, l’opsine, et d’une molécule, le cisrétinal, dont la fonction est d’absorber la lumière.
Il y a trois types de cellules-cônes, chacune contenant une opsine
différente et de ce fait absorbe plus particulièrement une partie du
spectre de la lumière visible.
Il s’agit de l’érythrolabe, du chlorolabe et du cyanolabe,
respectivement sensibles aux trois couleurs primaires: le rouge, le
vert et le bleu.
Les primates sont en effet trichromates : n’importe quelle couleur
peut être reproduite par le mélange, en proportions choisies, de
trois couleurs primaires.
La sensibilité de l'oeil humain aux trois couleurs primaires est
inégale
Lorsqu'un type de cône fait défaut, la perception des couleurs est
imparfaite, on parle alors de daltonisme (ou dichromasie). On
distingue généralement :
•Les protanopes, insensibles au rouge (B)
•Les deutéranopes, insensibles au vert (C)
•Les trinatopes, insensibles au bleu (D)
Dans chaque cône, la sensibilité du rétinal à une
longueur d’onde particulière est déterminée par le type
d’opsine.
Chacun des photorécepteurs est plus sensible pour une
partie du spectre.
La décomposition et la régénération des pigments des
cônes semblent analogues à celles de la rhodopsine
mais d'une façon beaucoup plus rapide.
II –3 La lumière est transformée en signal électrique
Les modifications engendrées au niveau de la rhodopsine ou des
opsines modifient la perméabilité de la membrane du segment
extérieur, causant la fermeture des canaux à Na+ qui sont ouverts
dans l’obscurité.
Cette fermeture conduit à une hyperpolarisation du
photorécepteur qui passe de –30 à une valeur pouvant atteindre –
80 mV, ce qui provoque une diminution proportionnelle de la
quantité de transmetteur libérée au niveau de la synapse.
La lumière inhibe ou hyperpolarise alors que l’obscurité excite ou
dépolarise les photo-récepteurs.
Ce processus est caractérisé par un degré important
d’amplification. L’absorption d’un seul photon conduit à la
fermeture de plusieurs centaines de canaux Na+.
Un messager chimique transporte l’information de la membrane
du disque vers la membrane externe du neurone photorécepteur.
III - L’INFORMATION VISUELLE EST TRAITEE PAR
PLUSIEURS TYPES DE NEURONES
La rétine est composée chez les vertébrés de cinq types de
neurones : les cellules réceptrices (cônes et bâtonnets), les
cellules bipolaires, les cellules horizontales, les cellules amacrines
et les cellules ganglionnaires.
Les cônes et les bâtonnets établissent un contact synaptique avec
des interneurones (cellules bipolaires) qui les relient avec les
cellules ganglionnaires. Ces dernières se projettent vers les corps
genouillés thalamiques, les tubercules quadrijumeaux (colliculi) et
d’autres noyaux du tronc cérébral.
Les cellules horizontales interagissent entre les récepteurs et les
cellules bipolaires. Les cellules amacrines interagissent entre les
cellules bipolaires et les cellules ganglionnaires.
III –1 Deux types de faisceaux dénommés «on» et «off»
coexistent pour transporter les signaux des
photorécepteurs
Dans l’obscurité, le photorécepteur est dépolarisé et libère
continuellement un transmetteur chimique qui agit sur les cellules
bipolaires.
Les cellules cônes font synapse avec deux types de cellules
bipolaires : les «on» et les «off» qui présentent la particularité de
répondre différemment à un même transmetteur libéré.
La cellule «on» est inhibée par le transmetteur, conduisant à ce
que la moindre quantité de transmetteur libéré, liée à l’apparition
de la lumière, dépolarise ou désinhibe la cellule bipolaire
A l’inverse, la cellule «off» est excitée par la présence de
transmetteur. Une moindre libération hyperpolarisera ou
inhibera la cellule.
Par la suite, chacune de ces cellules bipolaires pourra
se connecter sur des cellules ganglionnaires possédant
les mêmes propriétés, dénommées par conséquent
cellules ganglionnaires «on» ou «off».
Il faut noter dans tout cela que le signe de la
transmission est déterminé non pas par la nature
chimique du transmetteur mais par les propriétés de la
membrane post-synaptique du récepteur.
III –2 Les synapses vers lesquelles convergent les
cellules ganglionnaires «on» ou «off» sont de nature
électrique et chimique
Dans sa partie la plus distale (pied), le segment interne
possède des synapses à ruban (invaginantes), et des
synapses superficielles.
Une terminaison présynaptique se termine sur trois
éléments post-synaptiques (triade) : deux axones de
cellules horizontales occupent les positions latérales et
un axone de cellule bipolaire occupe la position centrale.
Ce type de synapse n’est rencontré qu’épisodiquement
dans la zone la plus interne, là où les cellules bipolaires
constituent les neurones présynaptiques.
III –3 Il existe trois systèmes parallèles de cellules
ganglionnaires nommées X, Y et W
Les cellules X (ou P comme parvo) ont une taille intermédiaire et
des petits champs dendritiques. Leur vitesse de conduction est
relativement lente.
Elles participent à une vision de haute acuité. Ces cellules du
trajet P répondent de façon soutenue, tonique, à la présence d’un
contraste maintenu stable dans le champs récepteur.
Les cellules Y (ou M comme magno) sont plus grosses,
possèdent une large arborisation dendritique. Leur vitesse de
conduction est élevée.
Ces cellules du trajet M répondent de façon phasique uniquement
aux cibles de grande taille et jouent un rôle décisif dans l'analyse
des formes.
Une troisième catégorie de cellules ganglionnaires W a
aussi été décrite. Elles sont petites mais sont dotées
d’une arborisation dendritique importante. Elles se
projettent sur les colliculi supérieurs et sont impliquées
dans les mouvements de la tête et des yeux.
III –4 Les cellules horizontales sont des interneurones
qui contribuent au contraste entre le centre et la
périphérie
Les cellules bipolaires sont activées par des récepteurs
de proximité mais peuvent aussi être affectées par des
récepteurs plus lointains, ceci par le biais
d’interconnections avec des cellules horizontales.
Ils déterminent par conséquent le champ récepteur des
cellules ganglionnaires.
Les cellules horizontales renforcent le contraste.
L’hyperpolarisation de certains cônes par la lumière va
induire la dépolarisation des cônes voisins par le jeu de
ces cellules horizontales
III –5 Les cellules amacrines font fonction
d’interneurones
Le rôle des cellules amacrine est de réguler les
interactions entre les deux voies de conduction «on» et
«off».
Le système des bâtonnets utilise l’amacrine comme seul
interneurone pour transmettre l’information aux cellules
ganglionnaires.