Émission ionique secondaire SIMS

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Transcript Émission ionique secondaire SIMS

Émission ionique secondaire SIMS
Procédures d’analyse
par
Évelyne DARQUE-CERETTI
Maître de Recherche à l’école des Mines de Paris
Henri-Noël MIGEON
Laboratoire d’Analyse des Matériaux, Luxembourg
et
Marc AUCOUTURIER
Directeur de Recherche au CNRS
1.
Spectrométrie, identification, sensibilité ..........................................
P 2 619 - 2
2.
Analyse quantitative................................................................................
—
3.
Analyse et résolution en profondeur ..................................................
—
7
4.
Analyse de surface ...................................................................................
—
13
5.
Imagerie, analyse en trois dimensions ...............................................
—
15
6.
Analyse chimique, identification, résolution....................................
—
17
7.
Conclusion ..................................................................................................
—
20
Références bibliographiques ..........................................................................
—
21
5
L
e fait que l’émission ionique secondaire à partir de matériaux solides ne
puisse être décrite de façon quantitative par une théorie complète, la multiplicité des procédures analytiques possibles, l’existence d’artefacts analytiques
spécifiques à chaque procédure ou à des catégories données de matériaux, rendent impossible l’énoncé de procédures analytiques de routine universelles.
C’est pourquoi le plan adopté ici suit une logique expérimentale. Pour chaque
problème analytique (ou procédure d’analyse), les performances recherchées,
les limitations prévisibles, les meilleures procédures sont résumées et illustrées
par des exemples concrets. L’ordre adopté va du plus simple au plus complexe,
ce qui signifie que les performances et les méthodes explicitées pour une procédure sont presque toutes à prendre en compte pour les procédures décrites
ensuite.
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P 2 619 − 1
1. Spectrométrie,
identification, sensibilité
La première procédure est l’identification des éléments, éventuellement des espèces chimiques, présents dans un solide. La méthode
de base est le tracé de spectres de masse. Les performances recherchées sont l’identification exacte des espèces (sélectivité), et une
limite de détection la plus faible possible (sensibilité) pour chacune
des espèces.
■ Identification, sélectivité
Pour ce qui concerne la sélectivité des identifications, le problème
principal est l’existence d’un très grand nombre d’espèces ioniques,
mono- et polyatomiques, dans les spectres de masse issus de la plupart des matériaux. Il y a donc superposition, à une valeur donnée
de M/q , de plusieurs espèces, rendant difficile l’interprétation des
spectres (« interférences »). Les réponses à ce problème résident
dans les choix de la nature des ions primaires, de la polarité des
ions secondaires analysés, dans l’utilisation des « signatures
spectrales » ou des rapports isotopiques naturels, dans la sélection
en énergie des ions secondaires, dans l’augmentation de la résolution en masse du spectromètre.
● Le choix de la nature des ions primaires et de la polarité des
ions secondaires découle des considérations de P 2 618, § 1.1 :
— utilisation d’ions O2+ (éventuellement analyse sous pression
partielle d’oxygène) pour la détection sous forme d’ions positifs des
espèces à faible énergie d’ionisation, comme les métaux facilement
ionisables et certains non-métaux (Si, C) ;
— utilisation d’ions alcalins (Cs+) pour l’analyse sous forme
d’ions négatifs des espèces à forte affinité électronique, comme H,
C, O, S, tous les métalloïdes, beaucoup de non-métaux, les métaux
nobles (Au, Cu, etc.) ;
— utilisation d’ions Cs+ et de la détection d’ions MCs+ (ou
MCs2+), pour l’analyse de certaines espèces difficiles à ioniser sous
les deux polarités (N, Zn, Cd, Hg, etc.).
La comparaison des spectres obtenus pour les deux polarités
(figure 1, [1]) montre les variations de réponse suivant la nature des
espèces. Cette comparaison, éventuellement avec des sources primaires différentes, permet souvent de lever nombre d’ambiguïtés,
en particulier dues aux interférences.
● Les signatures spectrales des espèces élémentaires sont en fait
les séries d’isotopes naturels de ces éléments. C’est un puissant
moyen d’identification, puisque, dès lors que les interférences ne
viennent pas perturber les hauteurs respectives des pics, les rapports d’intensités mesurées sur les différentes masses atomiques
d’un élément sont fixés et spécifiques. Les abondances isotopiques
naturelles de tous les éléments sont tabulées dans la plupart des
traités d’analyse ou de chimie. Pour l’identification de composés
(ions polyatomiques), la « règle du développement du polynôme »
doit être appliquée : si une molécule possède n atomes d’un élément possédant p isotopes d’abondances ai, leur contribution est
déduite des termes du polynôme (a1+a2+...+ap)n.
Il existe une autre forme de signature spectrale, qui peut être la
série d’ions polyatomiques associés à un élément donné ou à une
espèce chimique donnée. En analyse des composés moléculaires
(par exemple les polymères), on sait que le SIMS statique conduit à
l’émission de séries d’ions « parents » du composé, c’est-à-dire de
groupements moléculaires, soit identiques aux molécules du matériau, soit résultant d’une fragmentation partielle de celles-ci. On
peut alors, dans les meilleurs cas, identifier une molécule et mesurer sa masse moléculaire absolue (figure 2 [2]), obtenir la distribution de masse moléculaire d’un polymère, différencier des
polymères voisins par leurs produits de fragmentation (figure 3 [3]).
Une analyse des spectres permet même de fournir, par identification
des fragments, des indications sur le comportement et la stabilité
des liaisons présentes dans le polymère. Ces procédures, qui
s’apparentent à celles de la spectrométrie de masse classique en
P 2 619 − 2
Intensité secondaire (coups / s)
ÉMISSION IONIQUE SECONDAIRE _________________________________________________________________________________________________________
5 keV 40 Ar+
107
+ –
Ga As
69Ga
71Ga
106
75As
As–
Ga+
105
104
103
As+
Ga–
102
10
67
69
71
73
75
77
Masse (u)
ions secondaires positifs
ions secondaires négatifs
u = unité de masse atomique
Figure 1 – Spectres d’ions secondaires positifs et négatifs, émis
par un échantillon GaAs sous bombardement Ar+ (5 keV) [1]
chimie organique (gaz et liquides), conduisent à l’établissement de
véritables « atlas » [4] [5] de spectres correspondant aux différents
composés susceptibles d’être rencontrés.
Il faut garder à l’esprit (et ceci est valable en SIMS statique et
dynamique, quel que soit le spectromètre, y compris les spectromètres à temps de vol) que l’importance relative des signaux observés
dépend considérablement des conditions expérimentales et des facteurs de transmission (en particulier, filtrage en énergie volontaire
ou involontaire, voir § 4). Un « atlas » n’a donc de validité que pour
un équipement donné et pour des conditions d’analyse parfaitement précisées.
Le même type de procédure peut dans l’idéal être appliqué aux
corps minéraux, par exemple aux oxydes (voir P 2 618, figure 7).
Dans ce cas, il a déjà été souligné que, en tout cas en SIMS dynamique, les ions polyatomiques observés, formés par recombinaison
au-dessus de la surface d’espèces monoatomiques pulvérisées, ne
sont pas représentatifs de la stœchiométrie des composés existant
dans le matériau. Les travaux actuellement consacrés à l’analyse de
surface des composés inorganiques (voir § 4) par SIMS statique font
cependant état des possibilités de procéder à des identifications
d’espèces chimiques minérales ou organominérales présentes en
surface à partir du spectre de masse des ions polyatomiques [31]
[32]. De même, l’utilisation d’ions polyatomiques peut contribuer à
obtenir une imagerie « chimique » de composés polyphasés (voir
§ 6).
● La sélection en énergie des ions secondaires permet souvent
de simplifier les spectres. La méthode consiste à sélectionner les
ions possédant une énergie cinétique nettement supérieure à l’énergie de franchissement de la surface. Pour cela, on diminue (de 5 à
100 V par exemple) la valeur absolue du potentiel d’extraction de
l’échantillon par rapport à sa valeur nominale (± 4 500 V dans cet
exemple), sans changer le centrage du faisceau. Sachant que les
ions polyatomiques possèdent un spectre plus resserré vers les fai-
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_________________________________________________________________________________________________________ ÉMISSION IONIQUE SECONDAIRE
16.103
C
III
Intensité (coups / s)
Nl
H3C
H3C
H2NOC
CH2
CH2
H3C
12.103
CH2
H2NOC
O
Vitamine B12
H
I
Co
N
N
H 3C
H
CH2
H
C CH2
C
IV
CH3
CH3
CH2
N
CH3
N
CH3
(M + H) +
CH2
N
+
N
CONH2
H
II
C
H2NOC
CH2
III
CH2
CH
CH3
H CH2
CH3
CH2
CONH2
CONH2
NH
C83H90N14O14PCo
masse : 1 356
O
CH2
H3 C
CH
O
8.103
P
–O
HO
(M + Ag) +
O OH
H H
O
H
H2C
4.103
(M – CN) +
0
800
1 000
1 200
1 400
1 600
Masse (u)
Figure 2 – Spectre de masse par SIMS à temps de vol d’un dépôt de vitamine B12 (masse moléculaire 1 356) sur une plaque d’argent [2]
bles énergies cinétiques, ils sont ainsi pratiquement éliminés de la
mesure. Cette méthode est employée par exemple pour identifier la
présence de traces d’arsenic (75As) dans le silicium, sachant que
celui-ci donne facilement des ions polyatomiques (75(Si2O) =
29Si30Si16O).
Elle est très couramment utilisée pour éliminer les ions
hydrocarbures CxHy présents comme polluants dans toutes les
atmosphères des chambres d’analyse.
● La méthode la plus sûre pour identifier les interférences de
masse est d’utiliser la spectrométrie de masse à haute résolution.
Les exemples les plus spectaculaires sont la séparation du pic 32S
du pic 32(O2), ou l’analyse du phosphore 31P dans le silicium, qui
forme facilement les ions hydrures (28Si3H), (29Si2H), et (30Si1H).
Dans ce dernier cas la résolution requise est supérieure à M/∆M =
5 000 (mesurée à 10 % du maximum du pic). Un autre exemple [2]
est la séparation en TOF-SIMS des polluants de surface du silicium
au niveau de la masse 56 : 56(Si2), ou 56Fe, ou différents composés
hydrocarbonés, oxycarbonés, ou carbonitrurés, 28SiCO, 29SiCNH,
23NaO H, 28SiCNH , C OH , C N H , etc.
2
2
3
4
2
4
Une augmentation de la résolution en masse est inévitablement
accompagnée (sauf en détection par temps de vol) d’une diminution
importante des facteurs de transmission donc de la sensibilité. Cette
méthode est donc à employer avec précaution.
■ Résolution spatiale, limite de détection et précision
Comme pour toute méthode de microanalyse, la sensibilité, exprimée en limite de détection (fraction volumique ou superficielle minimale mesurable pour une espèce donnée) et la précision (possibilité
de séparer deux mesures très voisines ou incertitude sur une
mesure donnée) dépendent directement du volume analysé. Toute
réduction de ce volume se traduit par une diminution proportionnelle de la quantité de particules détectées pendant le temps d’analyse, et donc par une dégradation de ces deux qualités. La justesse
elle-même (qualité de la mesure d’être proche de la valeur réelle)
peut être affectée, compte tenu de l’imprécision accrue sur le
volume analysé.
De par le caractère « destructif » de l’analyse SIMS (prélèvement
du volume analysé dans l’échantillon pendant l’analyse elle-même),
toute tentative d’améliorer la précision des mesures ou de diminuer
la limite de détection par une prolongation de la durée d’acquisition
se traduit par une augmentation du volume analysé, donc une
dégradation de la résolution spatiale. La qualité principale de l’analyse SIMS, par rapport aux autres méthodes de microanalyse étant
sa très faible limite de détection pour la plupart des éléments, il faut
être conscient que toutes les améliorations de résolution spatiale,
telles que l’analyse de surface en SIMS statique, la réduction de
l’aire analysée en mode microscope, l’analyse « ponctuelle » en
mode microsonde, se traduisent par une dégradation de la limite de
détection, de la précision et éventuellement de la justesse. La
figure 4 résume sous forme d’abaques cette relation entre la sensi-
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P 2 619 − 3
ÉMISSION IONIQUE SECONDAIRE _________________________________________________________________________________________________________
104
x 10
bilité de détection et le volume analysé, conditionné par le diamètre
du faisceau et le nombre de couches éliminées par unité de temps,
lui-même fonction de la densité d’ions primaires [6].
x 30
PEMA
La sensibilité est appréciée par la connaissance de la limite de
détection d’un élément donné dans une matrice donnée. Cette limite
de détection peut être exprimée, soit en concentration (% ou ppm
atomique, at · cm−3, etc.), soit en nombre d’atomes par unité de surface analysée (at · cm−2, fraction de couche atomique, etc.) lorsque
la profondeur analysée est très petite (analyse de surface en SIMS
statique par exemple). Cette définition doit être assortie d’une indication sur le volume analysé. Compte tenu du fait que les ions
secondaires émis instantanément par la surface de l’échantillon proviennent d’une profondeur extrêmement faible (une à deux couches
atomiques), et même si l’on tient compte du fait que la nécessaire
accumulation des signaux pendant un certain temps revient (en
SIMS dynamique) à analyser à chaque séquence une profondeur du
matériau nettement plus grande (1 à quelques nm), la sensibilité
dépend donc essentiellement de l’aire analysée. Les exemples de
limites de détection qui figurent dans le tableau 1, en conditions
analytiques volontairement comparables, concernent des aires analysées de 104 à 105 µm2, soit un volume de quelques dizaines de
µm3. L’ordre de grandeur des limites de détection est donc de 1 ppm
pour 1 µm3 analysé, soit environ 104 atomes ou 10−18 g en valeur
absolue.
213
101
155
0
104
100
x 30
x3
200
x 100
PnPMA
115
109
Intensité (coups / s)
85
169
139
0
241
100
104
x 10
x 100
PsBMA
183
129
269
100
104
200
x 10
x 30
PcHMA
x 100
209
321
0
100
200
PsBMA
PcHMA
PEMA poly(éthylméthacrylate)
PnPMA poly(n-propylméthacrylate)
m/Z
poly(s-butylméthacrylate)
poly(cyclohexyméthacrylate)
Figure 3 – Spectres de masses par SIMS à temps de vol
de 4 échantillons de poly(méthacrylate)
différant par leur groupement ester [3]
La sensibilité dépend beaucoup de l’élément et des conditions
d’analyse (choix du faisceau primaire, pression partielle d’oxygène,
polarité des ions détectés). Certains éléments sont très mal détectés
à l’état monoatomique (exemples : Zn, N), d’autres sont détectés
avec une sensibilité extrême (Al, alcalins, alcalino-terreux). Les
interférences (plusieurs composés sur une même masse) sont la
source principale de dégradation de la limite de détection. Un certain nombre de méthodes, décrites ci-dessus et illustrées dans le
tableau 1, les minimisent. Il faut y ajouter l’emploi des ions MCs+,
dont les masses (supérieures à 133) se situent dans un domaine où
la « pollution » des spectres par les hydrocarbures est moindre.
Lorsque la détection d’un élément est limitée par la pollution de
l’atmosphère d’analyse (oxygène, hydrogène, carbone), l’emploi
d’isotopes naturels peu abondants comme traceurs (18O, 2H, 13C)
permet d’améliorer très notablement la limite de détection, à condition que ces isotopes aient pu être introduits volontairement dans
l’échantillon. L’exemple de la figure 5 [7] fait appel à ce traçage isotopique pour l’étude de la répartition du deutérium (abondance
naturelle D/H = 1,5 · 10−4), introduit volontairement dans GaAs, permettant ainsi une limite de détection meilleure que 5 · 1015 at · cm−3
(0,1 ppm at.). Une autre application est l’utilisation des isotopes 13C
et 2H dans le domaine de l’analyse des composés hydrocarbonés
(polymères).
■ Dégâts d’irradiation, effets de charge
10 –6
10 –4
10 –2
1
Courant d'ions (A)
10 –3
u
cea
fais
du
ètre1 cm
m
a
10 –5
Di
10 –7
10 2
10 – 5
10 – 3
10 – 1
m
1m
10 –9
100
µm
10
10 –11
10 1
µm
1µ
10 –13
10 –5
10 3
m
10 – 3
10 –1
10
Couches atomiques éliminées / s
Limite de détection (ppm)
Densité d'ions (mA . cm–2)
10 5
10 3
Figure 4 – Relation entre la sensibilité de détection et le volume
analysé par unité de temps
P 2 619 − 4
Le principe même de l’analyse ionique par émission secondaire,
basé sur une série de collisions atomiques conduisant à la pulvérisation des atomes superficiels, implique une dissipation d’énergie
des ions primaires dans tout le volume correspondant à leur implantation. Cette implantation provoque, comme cela a déjà été souligné, une modification des compositions et la création de défauts
atomiques qui dégradent la fiabilité des analyses (voir § 3, Résolution en profondeur). L’estimation des volumes impliqués, des
concentrations implantées et des quantités de défauts créés peut
être obtenue grâce à des modelés de type Monte-Carlo, comme le
logiciel TRIM [8]. De plus, le bombardement par les particules primaires chargées, l’extraction des ions secondaires, et surtout la production d’électrons secondaires consécutive aux interactions du
faisceau avec la cible, provoquent, dans le cas d’échantillons isolants ou semi-conducteurs, une modification du potentiel local de
surface préjudiciable à la fidélité de l’analyse. L’effet est moindre
(mais présent) en régime statique. Ces phénomènes complexes sont
décrits dans un certain nombre d’études récentes [9] qu’il serait trop
long de développer ici. Les conséquences analytiques sont minimisées en pratique par des procédures particulières (voir P 2 618, § 2.4,
Cas des échantillons isolants).
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Tableau 1 – Limites de détection, en condition de routine, de quelques impuretés dans les semi-conducteurs
(résolutions en masse à 10 % du signal maximum). Aire balayée : 250 x 250 µm2 · Aire analysée : 3 600 µm2
Élément
Ion
analysé
Faisceau
primaire
Courant primaire
(µA)
Résolution en masse
(M/∆M)
Limite de détection
(ppm at.)
H
1H−
Cs+
200 à 400
300
2 à 20
D
2H−
Cs+
200 à 400
300
0,1 à 1
C
12C−
Cs+
200 à 400
300
1 à 20
O
16O−
Cs+
200 à 400
300
1 à 50
S
32S−
Cs+
400
3 000
2 · 10−2
B
11B+
O2+
1 000
300
10−3
P dans SI
32P−
Cs+
400
300
50
P dans SI
32P−
Cs+
400
4 000
1
As dans SI
751As−
Cs+
400
300
0,2 (décalage
d’énergie)
Ag, Mg, Mn
M+
O2+
1 000
300
5 · 10−4 à 10−3
Al, Cr
M+
O2+
1 000
300
10−4 à 5 · 10−4
Si dans GaAs
28Si−
Cs+
400
300
2 · 10−2
Concentration de deutérium (at./cm3)
cédemment, et les procédures expérimentales pour les minimiser
restent les mêmes.
■ Expressions générales
L’expression phénoménologique de l’intensité ionique (nombre
de particules par unité de temps) recueillie pour une espèce ionique
±
A donnée s’écrit :
1019
±
±
I ( A ± ) = F A1 ( collection ) ° F A2 ( ionisation ) ° F A3 ( pulvérisation )
1018
On admet que les trois facteurs sont indépendants, donc que les
convolutions précédentes sont des multiplications.
1017
1016
t = 15 min t = 1 h
1
t=4h
2
Profondeur (µm)
Échantillon : Ga As type p, dopé Si, D
Température : 266 °C
t : temps d'exposition de l'échantillon au plasma micro-onde
Figure 5 – Profil de diffusion de deutérium introduit dans GaAs
par plasma micro-onde [7]
2. Analyse quantitative
L’obtention des concentrations vraies dans un matériau à partir
des signaux d’émission ionique secondaire est, dans le cas général,
l’un des points faibles de la méthode, en raison de la complexité des
processus de pulvérisation et d’ionisation sous bombardement de
particules Un certain nombre de procédures sont cependant proposées pour l’analyse quantitative. Les problèmes de sélectivité et de
sensibilité se posent évidemment dans les mêmes termes que pré-
Le facteur de collection F1, souvent écrit η (A±) dépend en principe de l’espèce considérée, des conditions expérimentales, de la
texture de l’échantillon (mono- ou polycristal par exemple), etc. Il est
très difficile de le mesurer. On cherche toujours à l’éliminer dans les
procédures d’analyse quantitative.
Le facteur de pulvérisation s’écrit pour un alliage soumis à faisceau primaire de courant Ip (courant primaire, exprimé en nombre
de particules par unité de temps reçues par la surface analysée) :
F 3A = S T I p C A
à condition de considérer que le rendement de pulvérisation total ST
est bien la somme des rendements de pulvérisation des différentes
espèces A, B, C, ... contenues dans l’échantillon, pondérée par les
concentrations CA, CB, CC ... de ces espèces (voir P 2 618, § 1.1). Ceci
est vrai en régime permanent de pulvérisation, pour lequel la composition de la matière pulvérisée est identique à la composition du
volume de l’échantillon qui lui a donné naissance (voir plus loin § 3,
Analyse en profondeur, pulvérisation différentielle). On sait cependant que le rendement de pulvérisation total, donc les rendements
de pulvérisation de chaque espèce, dépendent eux-mêmes des concentrations.
Le facteur d’ionisation F2 représente la probabilité d’ionisation
moyenne, définie plus haut (P 2 618, § 1.2) pour les ions sélectionnés
dans la bande d’énergie considérée. Cette probabilité est définie
pour l’échantillon (« éch ») et dépend, comme cela a été souligné
précédemment, de la nature et de la composition du matériau :
±
±
F A2 = P éch ( A )
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P 2 619 − 5
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L’intensité ionique prend la forme :
±
±
±
I ( A ) = η ( A ) P éch ( A ) S T I p C A
qui représenterait, si les facteurs η, Péch et ST étaient indépendants
des concentrations, la droite d’étalonnage de l’analyse. Ceci n’est
malheureusement le cas pour aucun d’entre eux.
Fe
Cr
ρ FeCr
, ρ FeCr
3,0
ρ Fe
FeCr
2,0
On peut définir un coefficient de sensibilité relatif :
±
±
CA
I (A )
η ( A ) P éch ( A )
,
tel
que
:
k AB = ------------- ------------------------------------------± - = k AB --------±
η ( B ) P éch ( B )
I (B )
CB
L’utilisation de tels coefficients, valables rappelons-le pour une
concentration déterminée, (puisque ST peut dépendre de la composition), est la seule façon de traiter de façon quantitative les résultats
d’une mesure, et de les comparer d’un équipement à l’autre. Leur
détermination nécessite un étalonnage dans des conditions rigoureusement définies (alliage de nature et de composition connues et
voisines de l’échantillon à analyser, réglages, donc coefficients de
transmission pratiquement identiques, etc.).
Une autre façon de traiter le problème est de considérer la quantité :
±
P éch ( A )
±
ρ ( A ) = ---------------------------± PA ( A )
souvent appelée « facteur d’exaltation », qui représente le rapport
des rendements d’ionisation de A entre l’échantillon et le corps A
pur.
La comparaison des signaux entre le corps A pur et le matériau
analysé s’écrit, en admettant que les facteurs de transmission sont
les mêmes :
S T,éch
I éch ( A ± )
P éch ( A ± ) S T, éch
±
-------------------------- = ------------------------------------------------ C A = ---------------- ρ ( A ) C A
±
±
PA ( A ) SA
IA ( A )
SA
Moyennant une mesure des rendements de pulvérisation de
l’échantillon et du corps pur (par mesure des volumes de cratères),
l’étalonnage dépend alors de l’expression du facteur d’exaltation.
On peut quelquefois considérer, pour une catégorie d’alliages
déterminée, que la probabilité d’ionisation ne dépend que de
l’environnement chimique de l’atome pulvérisé. Pour un alliage
binaire A-B, ceci conduit à l’expression :
Péch (A±) = PA (A±) CA + PB (A±) CB
qui met en jeu les probabilités d’ionisation de A dans A pur et B pur
(dilution infinie). Le facteur d’exaltation varie alors linéairement
avec la concentration (figure 6, [10]). Le coefficient de sensibilité
devient (variation hyperbolique) :
k AB
PA ( A + ) CA + ( 1 – CA ) [ PB ( A + ) / PA ( A + ) ]
= --------------------- ------------------------------------------------------------------------------------------------PB ( A + ) ( 1 – CA ) + CA [ PA ( A + ) / PB ( A + ) ]
Ce modèle a été utilisé pour quantifier l’émission ionique positive
sous saturation de la surface en oxygène (émission de toutes les
espèces à partir de leur forme oxydée en surface). Son utilisation,
lorsque sa validité a été démontrée, permet d’interpoler les valeurs
des coefficients de sensibilité avec plus de précision et sur de plus
larges domaines de concentration.
Un autre exemple est celui de l’étude des laitons α (alliages Cu-Zn
à moins de 30 % de zinc) [11], toujours sous saturation de la surface
en oxygène. Le rendement de pulvérisation mesuré s’écrit :
ST = SCu (1 + 0,69 CZn) (ions Ar+ de 15 keV sous 60° d’incidence)
Grâce à l’emploi de méthodes d’analyses de surface (spectrométrie Auger) pour la mesure directe des concentrations superficielles
P 2 619 − 6
ρ Cr
FeCr
1,0
CCr
CFe 0
100 % Fe
50 %
100 % Cr
0
50 %
Figure 6 – Variation de facteurs d’exaltation ρ (Fe+) et ρ (Cr+)
avec les concentrations atomiques dans les alliages Fe-Cr [10]
modifiées par la pulvérisation différentielle (voir § 3), le facteur
d’exaltation et le coefficient de sensibilité ont pu être exprimés
quantitativement :
0,45 C Zn
p CuZn ( Zn + ) = 0,63 + 0,37 ---------------------------------1 – 0,55 C Zn
C Zn
I ( Zn + )
-------------------- = 0,13 ---------+
C Cu
I ( Cu )
soit : kCuZn = 0,13
La présence de zinc ne perturbe pas l’ionisation du cuivre, mais le
zinc est plus difficilement ionisé dans le laiton que dans le zinc pur.
■ Méthode d’itération
On peut également citer une méthode itérative, utilisée pour les
matériaux contenant un grand nombre d’éléments, toujours les
mêmes, comme ceux que l’on rencontre en minéralogie [12]. Dans
ce cas, l’expression de la probabilité d’ionisation d’un élément i
dans le modèle linéaire s’écrit, pour n composants :
P éch ( i + ) =
n
∑ Pj ( i
+)
Cj
j=1
Un élément (ici Si) est pris comme référence, et on définit un coefficient d’ionisation relatif :
n
∑ Pj ( i
j=1
+)
Cj
R Si ( i + ) = -------------------------------------- =
n
P j ( Si + ) C j
∑
n
∑ Xj ( i
+)
Cj
j=1
j=1
si l’on suppose, ce qui est en général vérifié, que le rendement
d’ionisation du silicium dépend peu de la composition, et où Xj est
la probabilité d’ionisation de l’élément j rapportée à celle de Si dans
le même environnement. La concentration de l’élément i est calculée à partir des intensités mesurées I (i +) normées, par :
I ( i + )/ R Si ( i + )
C i = -------------------------------------------n
I ( i + )/ R Si ( i + )
∑
i=j
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Les coefficients Xj sont déterminés à partir d’échantillons étalons
de la même famille (par exemple des silicates contenant les composants Si, Al, Na, K, Ca, Fe, Mg, Ti) que l’échantillon à analyser (au
moins autant d’étalons que d’éléments). Puis les coefficients R sont
calculés pour l’échantillon en prenant une série de concentrations
supposées. Grâce aux expressions précédentes, on peut alors, à
partir des intensités, calculer une nouvelle série de concentrations,
elle-même utilisée pour obtenir de nouveaux coefficients R , et ainsi
de suite. Trois ou quatre itérations sont en général suffisantes pour
que le système converge.
matrice compensent les inconvénients, principalement liés à une
sensibilité (limite de détection) moins bonne.
■ Analyse isotopique
■ Cas des alliages très dilués (analyse de traces)
La mesure quantitative par SIMS des rapports isotopiques d’un
même élément (ou d’éléments apparentés par réactions de fission
par exemple) peut être obtenue, en particulier dans les matériaux
géologiques, avec une grande précision, moyennant un affinement
de la fiabilité des spectromètres (stabilité et reproductibilité du
champ magnétique). Les applications en astrophysique (datation de
météorites) ou en géophysique sont importantes. La figure 8 [14]
montre ainsi un résultat issu des travaux portant sur le réacteur
nucléaire naturel OKLO, au cours desquels la détermination précise
des quantités de produits de fission (ici 207Pb) permet une datation
excellente de l’histoire géologique du réacteur.
Dans le cas des alliages très dilués (teneurs des éléments à analyser inférieures à une fraction de % atomique), le problème se simplifie considérablement. On peut alors considérer que le rendement
d’ionisation de l’impureté i est constant (environnement invariable),
le rendement de pulvérisation constant également, et le coefficient
de sensibilité devient (Ma désigne la matrice pure) :
3. Analyse et résolution
en profondeur
Il est cependant rappelé que, si le volume (épaisseur) à analyser le
permet, les méthodes plus simples d’analyse quantitative en microsonde électronique aboutissent à des résultats plus précis avec
moins d’étalons.
I ( i± )
η ( i ) PM ( i ± )
k i M = ------------------- ------------------------- , d′où C i = k i M ----------------I ( M a± )η ( M a ) P M ( M a± )
Il suffit d’un seul étalonnage par impureté pour déterminer son
coefficient de sensibilité. Une telle procédure est celle qui est utilisée pour l’analyse des semi-conducteurs. Des étalons précis peuvent être obtenus par implantation. La figure 7 résume la procédure
dans le cas de la détermination quantitative du profil de concentration d’un dopant (bore 11B) dans le silicium (profil expérimental :
figure 7 a) : l’étalon est un monocristal de silicium implanté en élément 11B (énergie 150 keV, dose 1015at · cm−2). À partir du profil
expérimental de l’étalon implanté (figure 7 b), la connaissance de la
profondeur du cratère d’analyse (par profilométrie, voir § 3) et de la
dose d’implantation donne accès au profil vrai dans l’étalon
(figure 7 c), qui permet de calculer, éventuellement en tout point de
ce profil, le facteur de sensibilité, par rapport à l’élément de matrice
( S i+ )
I
k B Si = C B ----------------- . L’application de ce coefficient au profil expériI ( B+ )
mental, dont l’axe des profondeurs est également étalonné par profilométrie du cratère, fournit le profil étalonné (figure 7 d ), par
I ( B+ )
inversion de la même formule C B = k B Si ---------------- . Pour plus de préI ( Si + )
cision, il est toujours nécessaire d’effectuer les mesures sur l’étalon
et sur l’échantillon rigoureusement dans les mêmes conditions
expérimentales et à la suite l’une de l’autre. La plupart des logiciels
d’exploitation des équipements modernes effectuent ces calculs
automatiquement.
■ Utilisation de la post-ionisation ou des ions MCs+
La post-ionisation (SNMS), ou la détection d’ions MCs+ sous bombardement Cs+, permet en principe de s’affranchir de la variation
des rendements d’ionisation en fonction de l’environnement des
atomes (donc des concentrations), puisque seules sont prises en
compte les particules neutres émises. Le problème se ramène alors
à une bonne connaissance des rendements de pulvérisation, et de
leurs variations éventuelles avec les concentrations. L’étalonnage
est considérablement simplifié [13], en tout cas en SNMS « vrai ».
Le cas de l’analyse par détection des ions MCs+ est un peu plus
complexe [29].
L’analyse SNMS trouve son domaine d’application privilégié dans
la caractérisation des couches minces, pour laquelle les contaminations éventuelles aux interfaces et les variations brutales de composition peuvent provoquer en SIMS normal des effets d’exaltation
incontrôlés. Les avantages de la quasi-élimination des effets de
Puisqu’elle permet la mesure en continu de la composition de la
matière pulvérisée en fonction du temps de pulvérisation, c’est-àdire de la profondeur dans l’échantillon de la zone analysée, l’analyse ionique est un moyen de choix pour la détermination des variations de concentration en fonction de la distance à la surface. Les
aspects concernant l’identification des espèces, les limites de détection, l’expression quantitative des concentrations, ont été traités cidessus et interviennent bien évidemment dans l’analyse en profondeur.
Le problème posé est celui de la précision de la relation concentration (ou signal)-profondeur, c’est-à-dire de la résolution en profondeur de l’analyse. Il ne faut pas confondre, du point de vue des
définitions, quatre notions différentes, bien que liées.
● Pour certaines méthodes d’analyse (par exemple : RBS, ERDA,
analyse sous faisceau d’électrons exploitée en fonction de la tension
d’accélération), le traitement des signaux (en général la connaissance de l’énergie des particules détectées) permet de connaître la
profondeur depuis laquelle ils sont émis. La résolution en profondeur est alors conditionnée par la précision avec laquelle cette profondeur est calculée.
● La seconde notion est celle de profondeur analysée, autrement
dit l’épaisseur de la zone qui émet des signaux indiscernables entre
eux à un instant donné. En analyse ionique, cette profondeur est de
l’ordre de une ou deux couches atomiques ; c’est la limite ultime de
la résolution en profondeur, si l’on savait exploiter instantanément
tous les signaux recueillis (c’est théoriquement le cas en SIMS statique). En SIMS dynamique, il est nécessaire d’accumuler pendant un
certain temps les signaux pour obtenir une précision suffisante et la
profondeur d’analyse correspondant à un signal recueilli est donc
largement supérieure aux une ou deux couches atomiques théoriques.
● La troisième notion, spécifique aux méthodes qui, comme le
SIMS, font appel à la pulvérisation ionique, correspond à la précision avec laquelle est connue la position de la surface émettrice par
rapport à la surface initiale, en fonction du temps écoulé depuis le
début de l’analyse (voir ci-dessous : mesure des profondeurs).
● Enfin, la répartition des concentrations dans l’échantillon peut
être perturbée par l’analyse elle-même (effets d’implantation, etc.),
provoquant ainsi une imprécision sur les profils.
La résolution en profondeur en analyse ionique est en fait une
combinaison des trois dernières notions. Les paragraphes suivants
tentent d’en dégager quelques facteurs.
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P 2 619 − 7
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Intensité (coups/s)
Intensité (coups/s)
106
106
105
105
104
104
14Si++
14Si++
103
103
102
102
11B+
11B+
101
101
100
100
3,7 µm
10–1
0
5
10
a
15
1,7 µm
10–1
20
25
30
Temps d'abrasion (min)
0
5
profil brut du signal 11B dans l'échantillon
en fonction du temps d'abrasion
b
Concentration
(atomes/cm3)
Concentration
(atomes/cm3)
1020
1019
1019
10
15
20
25
30
Temps d'abrasion (min)
profil brut du signal 11B dans l'étalon implanté
(1015 at . cm–2, 150 keV)
1018
1018
1017
1 ppm a.
1017
1016
1016
1015
B
1014
1015
1014
0,2
0,4
c
0,6
0,8
1
1,2
1,4
1,6
1,8
2
Profondeur (µm)
profil de bore dans l'étalon implanté,
étalonné en profondeur et concentration
1
d
2
3
B
3,7 µm
4
Profondeur (µm)
profil étalonné dans l'échantillon
Figure 7 – Application de l’étalonnage en concentration pour une impureté très diluée, ici le bore dans le silicium [CNRS Bellevue]
■ Effets de bords de cratère, effets « mémoire »,
effets de redéposition
Au cours de l’analyse en profondeur, les conditions expérimentales doivent être choisies pour que le signal mesuré provienne effectivement du fond du cratère d’érosion. Il est indispensable que l’aire
analysée soit petite devant la surface totale du cratère d’érosion
(aire balayée). Il peut se produire, en cas de fortes variations de
concentrations pendant l’érosion, une pollution de la chambre
d’analyse (lentille d’extraction) par l’élément analysé, qui se redépose sur l’échantillon dans les étapes ultérieures (« effet
mémoire »). Cet effet mémoire est quelquefois évité par un changement, en cours d’analyse, de la face avant de la lentille d’extraction.
Il se peut aussi que des éléments ou composés volatils issus des
zones de la surface proches de la zone d’analyse ou de l’atmosphère
se redéposent au fond du cratère d’érosion pendant l’analyse. Ce
P 2 619 − 8
phénomène est particulièrement dangereux pour les composés
organiques, facilement dégradés par le faisceau ionique. Plus l’analyse est rapide (fort courant primaire), moins la probabilité de redéposition est grande. Plus l’énergie des ions primaires est grande,
plus les effets de dégradation risquent de se produire (volume
dégradé en particulier).
■ Mesure des profondeurs, influence de la rugosité initiale
sur la résolution
La conversion de la durée d’érosion en profondeur depuis la surface ne peut être réalisée que postérieurement à l’analyse. Le
moyen le plus précis est la profilométrie mécanique. Un tel profilomètre mesure le déplacement vertical d’une pointe fine (1 à 5 µm de
rayon de courbure) en contact avec l’échantillon, en fonction de la
position sur la surface, et permet ainsi de mesurer la profondeur et
les dimensions du cratère d’érosion (figure 9). La précision en pro-
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elles sont « profondes », au calcul de la précision apparente de la
mesure.
206 Pb/ 238U
0,5
La conversion du temps d’érosion en profondeur suppose que la
vitesse d’érosion, donc le rendement de pulvérisation, soient restés
constants pendant l’analyse. Sachant que ce rendement peut varier
avec la composition de la zone analysée, et que la vitesse d’érosion
varie proportionnellement à la densité de courant primaire, il est
très important de tenir compte de ces considérations dans l’étalonnage en profondeur des profils (exemples : analyse de multicouches
ou de profils avec fortes variations de concentrations, etc.).
(1968 ±50) Ma
0,4
0,3
0,2
0,1
0,0
0
2
4
6
8
207 Pb/ 235U
Points expérimentaux
Concordia
L'intersection de la droite correspondant aux mesures corrigées
(points expérimentaux) avec le diagramme calculé (Concordia)
permet d'obtenir l'âge de la zone analysée (ici 1968 + 50 millions
d'années).
Figure 8 – Datation U-Pb d’une zone du réacteur nucléaire naturel
OKLO [46] par analyse ponctuelle (sonde de 20 µm) des ions
270
(UO2+) ; 267(UO2+), 206Pb+, 207Pb+
Zone
analysée
Profondeur
(µm)
Zone
modèle
0
– 0,5
– 1,0
– 1,5
– 2,0
0
200
400
600
x (µm)
La profondeur du cratère est ici de 1,86 µm
Figure 9 – Profil d’un cratère de pulvérisation tel que mesuré
à l’aide d’un microprofilomètre [CNRS Bellevue]
fondeur peut être de 1 nm, à condition que la surface initiale soit
définie avec une précision équivalente (rugosité initiale de l’échantillon) . Comme pour tout profilomètre, une gamme limitée de longueurs d’onde du spectre de rugosité est prise en compte. Cela
signifie que les rugosités de longueur d’onde inférieure à une certaine valeur, de l’ordre du micromètre, ne participent pas, même si
La rugosité initiale de l’échantillon conditionne la précision de
mesure de la profondeur atteinte et donc la validité du profil concentration-profondeur final. Cependant, la formule (1) déjà présentée en
P 2 618, § 1.1.1 qui lie le rendement de pulvérisation à l’angle
d’impact du faisceau primaire, soit : ST (θ) = S0 (cosθ)−ƒ, avec ƒ proche de 1, montre que, en première approximation, pour des angles
d’impact suffisamment faibles, et en négligeant toute rugosité supplémentaire induite par le bombardement lui-même, la surface peut
« reculer » presque parallèlement à elle-même au cours de l’érosion. En effet, en présence d’une surface initialement rugueuse,
dont la normale locale fait un angle θ avec le faisceau, la densité de
courant primaire locale est proportionnelle à (cos θ). Par modulation
du rendement de pulvérisation, la vitesse de recul local de la surface
v’ est alors partout proportionnelle à (cosθ)1−ƒ. Ceci explique que,
malgré une mauvaise connaissance des profondeurs réelles, il soit
quelquefois possible de mettre en évidence des variations de
concentration en profondeur sur des distances bien inférieures à la
rugosité initiale (couches minces déposées sur des substrats
rugueux). Ce raisonnement ne s’applique que si ƒ est très proche de
1, et surtout si l’on peut négliger les effets « d’ombrage » dus à la
rugosité. Dans le cas contraire, ces effets peuvent provoquer une
aggravation de la rugosité, donc du défaut de résolution en profondeur.
■ Rugosité induite par le bombardement primaire
Le bombardement ionique induit une rugosité qui dégrade de
façon continue et croissante la surface en cours d’analyse, augmentant l’incertitude sur la profondeur. Cette rugosité a pour origine à la
fois le caractère aléatoire de la pulvérisation et des effets liés au
matériau, tel que le rôle de l’orientation cristallographique sur la
pulvérisation pour les échantillons polycristallins. C’est certainement l’effet de dégradation de la résolution en profondeur le plus
grave et le plus difficile à minimiser. La figure 10 [11] montre un
exemple de rugosité induite due à l’influence de l’orientation cristalline dans un polycristal Cu-Zn. Sur les monocristaux eux-mêmes, la
pulvérisation dans une seule direction conduit à l’apparition de
« rides » (ripples) de surface dont le mécanisme de formation n’est
pas clairement établi. Dans des cas extrêmes, on observe la
« croissance », au fond des cratères, de « cônes » ou de
« cheminées de fées », sans doute liés à des hétérogénéités locales,
dont la hauteur peut atteindre plusieurs microns.
Quelle que soit l’origine de la rugosité induite, l’expression quantitative de la perte de résolution en profondeur qu’elle provoque
peut se faire par une analyse « probabiliste » de la pulvérisation,
considérant que la vitesse de pulvérisation est une fonction aléatoire (de Poisson, approchée en gaussienne) de la position. Le
modèle SLS (Sequential Layer Sputtering) [28] permet d’établir
qu’un créneau initialement parfait de concentration conduit à un
84 (larprofil mesuré en fonction erreur (erfc), dont l’écart-type ∆ z 16
geur du profil mesurée par la différence de profondeur entre les
points correspondant à 16 % et 84 % de la hauteur du créneau)
s’écrit, en fonction de la profondeur z atteinte :
84 = α ( z ) 1/2
∆ z 16
Le coefficient α n’est que rarement modélisable (dans le modèle
SLS le plus simple, il est égal à 2 a1/2, a étant la distance interréticulaire). Son expression est amplement discutée dans la littérature
[15] [16]. Il est en pratique souvent nécessaire de le mesurer sur des
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ÉMISSION IONIQUE SECONDAIRE _________________________________________________________________________________________________________
Intensité (coups/s)
106
105
104
x
Co+
103
Cu+
102
10
1
10–1
0
5
10
15
20
Temps (min)
Intensité (coups/s)
a faisceau primaire O+2
18 µm
a
courbes de niveau par rugosimétrie
(0,25 µm entre deux courbes)
100
Si - Substrat
90
80
70
Si+
Co+
60
50
40
30
20
10
0
Cu+
0
10
10 nm
b
20
30
40
50
60
Temps (min)
faisceau primaire O+2,
pression partielle d'oxygène 5.10–2 Pa
Intensité (coups/s)
6.103
5.103
CoCs+
4.103
3.103
2.103
CuCs+
1.103
SiCs+
0
18 µm
10 nm
c
b
image d'électrons secondaires de la même zone
Figure 10 – Laiton Cu-30 % Zn. Centre d’un cratère de pulvérisation
(Ar+ 5,5 keV) [11]
échantillons modèles, pour parvenir à une déconvolution des profils. Il ne dépend en principe pas de l’énergie des ions incidents.
Les remèdes expérimentaux à ce type de défauts ne sont pas universels. Il est reconnu que la pulvérisation réactive sous oxygène,
accompagnée d’un balayage de la surface par une pression partielle
P 2 619 − 10
5
10
15
Temps (min)
faisceau primaire Cs+,
détection d'ions MCs+
Figure 11 – Comparaison des profils d’analyse en profondeur
d’un échantillon de 10 couches alternées (Co / Cu) d’épaisseur
unitaire 5 nm sous différentes conditions [17]
d’oxygène dans la chambre d’analyse, diminue dans la plupart des
cas la rugosité induite, en minimisant les effets cristallographiques
(polycristaux), et par inhibition de la formation des rides sur les
monocristaux. De même, la pulvérisation sous Cs+ semble avoir des
effets analogues. La figure 11 [17] illustre un exemple de ces améliorations pour l’analyse de multicouches métalliques. Elle montre
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en effet que, en modifiant les conditions expérimentales (présence
d’une pression partielle d’oxygène) ou en changeant la nature des
ions incidents (Cs+ au lieu de O2+ ici), la résolution en profondeur
peut être considérablement améliorée.
Une mise en rotation azimutale de l’échantillon a généralement
un résultat positif, par élimination des effets « d’ombrage » qui stabilisent et aggravent la rugosité induite.
Concentration
CA*
CBs
CB*
CAs
■ Effets directs liés à l’implantation du faisceau primaire
Ces effets correspondent à l’existence sous la surface en cours
d’analyse d’une zone perturbée d’une épaisseur pouvant atteindre
10 à 20 nm, et dans laquelle l’implantation du faisceau primaire
induit de très nombreux défauts susceptibles de provoquer des diffusions accélérées des éléments présents. L’implantation elle-même
peut créer des déplacements en cascade des atomes (mélange ionique). Enfin, et puisque les rendements d’ionisation dépendent de
l’environnement des atomes dans la cible, des variations de concentration de l’élément implanté au cours de l’analyse (passage d’une
couche à une autre, par exemple) induisent des variations incontrôlées des signaux ioniques.
Pour ces trois effets (diffusion accélérée, mélange collisionnel,
variation des rendements d’ionisation), les influences de l’énergie et
de la nature du faisceau primaire sont primordiales. Il faut distinguer
deux régimes successifs :
— un régime transitoire, pendant lequel la concentration de
l’espèce incidente dans la zone perturbée varie continûment avec la
profondeur abrasée ;
— le régime permanent qui lui succède lorsque le recul de la surface et l’implantation aboutissent à un état stationnaire des concentrations dans cette zone.
Une quantification de ces phénomènes est possible, en utilisant
les données des logiciels de modélisation de l’implantation (par
exemple TRIM [8]). Cette quantification démontre que le régime permanent est atteint après l’érosion d’une profondeur égale à environ
2 Rp, et que la profondeur perturbée est de l’ordre de 3 σp ,Rp et σp
étant respectivement le parcours moyen des atomes implantés et la
dispersion (straggling) de leur répartition, tels que les prévoit le logiciel.
Exemple : pour les ions Cs+ bombardés avec une énergie de
14,5 keV dans le silicium, les valeurs sont :
Rp = 15 nm, σp = 4,3 nm.
Pour le mélange collisionnel, des modèles semi-théoriques ont
été élaborés. Ils prévoient que, pour un créneau idéal de concentration (de C1 à C2 , avec C1 > C2), la décroissance du signal avec la profondeur est exponentielle. La pente de cette décroissance en
coordonnées semi-logarithmiques (decay length) varie en proportion inverse de Rp, donc de l’énergie des ions incidents et de la
racine carrée de leur masse. Il est possible, moyennant un étalonnage préalable sur échantillons modèles et des mesures à énergie
primaire variable, de tenter une déconvolution de cet effet sur les
profils expérimentaux.
Régime
transitoire
Régime
permanent
Temps ou profondeur
Figure 12 – Schéma de variation des concentrations dans
* et C * et à la surface C s et C s ,
la matière pulvérisée C A
B
A
B
au cours des premiers instants de l’analyse d’un alliage A-B
équiatomique, lorsque le rendement de pulvérisation
de l’espèce A est plus grand que celui de l’espèce B
plus rapide de l’élément A conduit, en début d’analyse, à une surconcentration de cet élément ( C A* ) dans la matière pulvérisée, responsable d’un appauvrissement du même élément à la surface
( C As ) . Ce n’est qu’après abrasion d’une profondeur suffisante qu’un
régime permanent s’établit, pour lequel la concentration dans la
matière pulvérisée est égale à la concentration en volume, grâce à
l’appauvrissement superficiel en élément(s) facilement pulvérisable(s). Ces variations faussent transitoirement la composition de la
matière pulvérisée et le résultat de l’analyse. La profondeur intéressée par cet effet transitoire peut atteindre 10 à 20 nm, ce qui dégrade
d’autant la résolution en profondeur et rend aléatoire l’interprétation des profils sur des couches minces dont l’épaisseur est du
même ordre de grandeur. On notera d’ailleurs que l’erreur introduite
est permanente pour les méthodes d’analyse de surface utilisant un
décapage ionique (XPS, AES).
La modélisation des effets transitoires de pulvérisation différentielle n’est actuellement pas effectuée. Elle nécessiterait de toute
façon une connaissance exacte des rendements de pulvérisation et
de leur variation en fonction des concentrations (mesures systématiques de volumes de cratères d’érosion sur des échantillons modèles).
■ Rôle des effets de matrice, intérêt du SNMS
Le fait que les rendements d’ionisation dépendent fortement de la
composition est un handicap sérieux de l’analyse en profondeur, en
particulier pour les couches minces où les variations de composition
sont importantes. L’analyse par post-ionisation (STIMS ou SNMS)
permet de lever ce handicap, par exemple pour l’identification des
composés définis interfaciaux [33].
■ Résumé, conclusions
■ Effets de ségrégation induite
Ces effets sont également dus à l’implantation du faisceau primaire qui crée une hétérogénéité chimique à la surface. Cette hétérogénéité peut provoquer des déplacements à longue distance des
espèces présentes dans l’échantillon qui modifie les profils de
concentration obtenus. L’étude de ces effets est très spécifique.
■ Effets de pulvérisation différentielle
Lorsque les rendements de pulvérisation des éléments contenus
dans l’échantillon sont nettement différents les uns des autres, cette
pulvérisation différentielle provoque, au début d’une analyse ou si
les concentrations varient brusquement à une profondeur donnée,
une modification de la concentration des éléments en surface.
Le schéma de la figure 12 illustre ce phénomène [11] : si l’on considère un alliage A-B équiatomique et uniforme, la pulvérisation
L’analyse en profondeur et son but ultime qui est la conversion du
profil brut expérimental signal-temps en un profil concentrationprofondeur représentatif de l’échantillon réel nécessitent donc à la
fois le respect d’un certain nombre de précautions expérimentales
et, si possible, la déconvolution des résultats pour tenir compte des
phénomènes physiques décrits ci-dessus. La figure 13 [18] rassemble quelques-uns de ces effets, mis en évidence grâce à l’analyse par
différentes méthodes d’un même échantillon, ici un monocristal de
silicium implanté en cuivre. On y voit que les profils mesurés en
SIMS ou par d’autres méthodes sous pulvérisation ionique (AES,
XPS) peuvent être assez différents du profil théorique (par modélisation TRIM) ou mesuré par méthode non-destructive (RBS). Il s’agit
ici d’une combinaison de plusieurs effets : implantation du faisceau
primaire et diffusion accélérée et/ou ségrégation induites par cette
implantation, pulvérisation différentielle.
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P 2 619 − 11
Concentration en Cu
ÉMISSION IONIQUE SECONDAIRE _________________________________________________________________________________________________________
Les figures 14 et 15 montrent que, malgré ces difficultés, il est
possible d’obtenir par analyse ionique par émission secondaire des
informations précieuses et irremplaçables. La figure 14 est un
exemple d’analyse de matériaux issus des technologies des semiconducteurs [19]. La figure 15 [20] représente le cas beaucoup
moins banal de la démonstration, par analyse isotopique en profondeur, d’une organisation structurale dans un copolymère polystyrène/PMMA (polyméthylmétacrylate) : seul le polystyrène a été
deutéré et, alors que dans le copolymère fondu, les signaux du deutérium et de l’hydrogène sont constants en fonction de l’épaisseur, il
apparaît dans le copolymère recuit une organisation lamellaire,
parallèle à la surface, démontrée par les oscillations en opposition
de phase des signaux H+ et D+. L’épaisseur des lamelles est de
37 ± 1,5 nm.
2,0
TRIM
RBS
SIMS (O2+)
1,5
SIMS (Cs+)
AES
1,0
XPS
0,5
0
0
50
100
Profondeur (nm)
En employant la même démarche (marquage partiel de chaînes
moléculaires par le deutérium), l’analyse en profondeur SIMS a permis récemment [21] de démontrer directement et de quantifier le
mécanisme de « reptation » des chaînes qui intervient dans l’interdiffusion des polymères.
Figure 13 – Comparaison des profils de concentration de cuivre
en profondeur, théorique (TRIM) et mesurés par différentes méthodes
d’analyse (RBS, AES, XPS, SIMS sous pulvérisation O2+, SIMS sous
pulvérisation Cs+) pour un monocristal de silicium implanté en cuivre
(150 keV, 1015 at · cm−2)
Concentration (cm–3)
1020
Concentration (cm–3)
1020
8
6
4
AI
AI
2
1019
Si
8
6
4
AI
Si
2
220 nm
Si
130 nm
2
1018
1018
8
6
4
8
6
4
Si
2
Be
200 nm
Be
320 nm
2
1017
8
6
4
Be
8
6
4
Be
2
2
1016
8
6
4
AlGaAs : Si
2
1015
AI
Be
Si
1019
8
6
4
1016
AI
Be
2
1017
8
6
4
2
AlGaAs : Si
1015
8
6
4
2 x 30 nm
Ga As NID
8
6
4
GaAs : Be
2
AlGaAs : Si
8
6
4
AlGaAs : Si
70 nm
GaAs : Be
2
1014
1014
0
0,2
0,4
0,6
0,8
1
1,2
1,4
0
0,2
0,4
0,6
0,8
Profondeur (µm)
a
couche de AlGaAs dopé Be (environ 200 nm)
entre deux couches AlGa As dopé Si
1,2
1,4
Profondeur (µm)
b
intercalation de deux zones tampons de GaAs
non intentionnellement dopé (2 x 30 nm)
autour de la couche de AlGaAs dopé Be
Figure 14 – Redistribution de Be et Si dans une hétérojonction AlGaAs/GaAs, réalisée par épitaxie par jets moléculaires
(pour transistor bipolaire) [19]
P 2 619 − 12
1
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— prise en compte des effets de matrice sur les rendements de
pulvérisation et d’ionisation.
Intensité (coups/s)
107
8
6
4
4. Analyse de surface
2
106
105
8
6
4
2
C
8
6
4
H
2
104 8
6
4
D
2
103 8
6
4
2
102 8
6
4
2
10 8
6
4
Au
2
1
0
500
1 000
1 500
2 000
Temps (s)
Les profils de l'hydrogène et du deutérium présentent des
oscillations en opposition de phase manifestant l'organisation en
lamelles (épaisseur des lamelles : 3,7 ± 1,5 nm)
Figure 15 – Profil SIMS (bombardement O2+, ions secondaires
positifs) d’un copolymère polystyrène deutéré/ PMMA non deutéré,
après recuit de 72 h à 170 °C. Épaisseur totale : 500 nm [20]
— En résumé, une analyse en profondeur doit, en plus des conditions d’identification et de quantification correctes énoncées dans
les paragraphes précédents, répondre au plus grand nombre possible des exigences suivantes :minimisation des effets de bord par
choix de l’aire analysée bien inférieure à l’aire érodée ;
— minimisation des effets de redéposition ou « mémoire » par
une vitesse d’érosion assez grande ;
— bonne connaissance des profondeurs érodées et rugosité initiale faible ;
— prise en compte et, si possible, déconvolution des effets de
rugosité induite ;
— prise en compte, mesure (variation d’énergie des ions incidents), si possible déconvolution, des effets liés à l’implantation du
faisceau primaire ;
— prise en compte des effets de pulvérisation différentielle, par
mesure des rendements de pulvérisation ;
Par son caractère destructif, l’analyse ionique à émission secondaire ne peut être classée dans la catégorie des microanalyses de
surface qu’à condition que la quantité de matière pulvérisée correspondant à une analyse unitaire soit inférieure ou égale à la profondeur d’émission, soit environ une couche atomique. C’est la
définition du SIMS statique. Cette condition est réalisée en SIMS à
temps de vol, grâce à la source primaire pulsée et à la détection
simultanée de l’ensemble du spectre de masse, mais peut l’être avec
les autres équipements si le courant ionique est suffisamment faible
et la détection suffisamment rapide (détection parallèle, petit nombre d’éléments analysés en détection séquentielle, par déflexion
magnétique). Le tableau 2 [30] donne une comparaison des performances générales des différents types de spectromètres en analyse
de surface.
Parmi les performances déjà discutées, les problèmes de détectabilité, d’identification des espèces, de quantitativité, se posent dans
les mêmes termes ; la sensibilité (limite de détection) est un paramètre important, puisque le volume analysé est par définition très petit.
C’est pourquoi la détection « ponctuelle » (imagerie ionique de surface) ne peut se faire en général que pour les éléments en forte
concentration et dans les appareils les plus sensibles (temps de vol).
Pour la quantification, l’emploi des coefficients de sensibilité relatifs
(§ 2) est indispensable, mais ici le problème du signal de référence
est souvent délicat, puisqu’il s’agit de choisir une espèce ionique
réellement significative par rapport au phénomène à étudier (signal
du substrat pour les couches adsorbées, fragment simple de référence pour les polymères, etc.).
■ Matériaux organiques
C’est dans le domaine des composés organiques que l’analyse de
surface par SIMS statique a été le plus développée [30], tirant parti
de l’émission d’ions polyatomiques (« moléculaires ») susceptibles
d’aider à l’identification des espèces moléculaires (§ 6). La figure 16
montre un exemple de contamination organique superficielle d’un
polymère métallisé par des traces d’huile à base de glycol [31]. Par
imagerie des fragments polyatomiques issus de la couche de contamination, la localisation des espèces contaminantes majoritaires est
obtenue avec une bonne résolution.
Les dégradations par le faisceau incident (charge, modification
des structures), en principe minimisées puisque le flux primaire est
très faible, sont cependant à prendre en considération sur ces matériaux très isolants et souvent instables. L’analyse de surface des
composés organiques, en particulier des polymères, est présentée
par beaucoup d’auteurs comme le domaine privilégié de la méthode
de pulvérisation sous bombardement de particules neutres (FABSIMS). La figure 17 [22] montre ainsi les influences comparées de la
dose d’ions ou d’atomes neutres primaires sur plusieurs signaux
ioniques émis par un polymère (PET). Il est à noter que, si l’analyse
FAB tend à minimiser (ou stabiliser ?) les effets de charge, elle
n’évite pas les autres dégâts d’irradiation (fragmentations, modification de structure moléculaire).
Tableau 2 – Performances typiques comparées de spectromètres de masse [30]
Résolution
M/∆M
Domaines de masse
Transmission
Mode de détection
Quadripôle
102 à 103
< 103
0,01 à 0,1
séquentiel
1
Secteur magnétique
104
> 103
0,05 à 0,5
séquentiel
ou parallèle
10 à 104
Temps de vol
104
103 à 104
0,5
parallèle
104
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Sensibilité
relative
P 2 619 − 13
ÉMISSION IONIQUE SECONDAIRE _________________________________________________________________________________________________________
Intensité (coups/s)
104
104
149
193
0
0
1
2
Dose/1013 ions . cm– 2
a
3
variation en fonction de la dose d'ions
primaires (Ar+) en SIMS normal
Les images correspondent aux ions suivants : 27(Al), 28(AlH), 31(CH3O)*,
39(C H ), 43(AlO), 45(C H O)*, 54(Al ), 55(C H ), 59(C H O)*, 69(C H ),
3 3
2 5
2
4 7
5 7
5 9
73(C H O)* et 87(C H O )*.
4 9
4 7 2
Sous chaque image, les valeurs numériques représentent la masse
imagée M, le nombre de coups sur le pixel le plus intense et le nombre
de coups total de l'image ionique considérée.
Figure 16 – Imagerie ionique sur un polymère (polyéthylènetéréphtalate) métallisé par l’aluminium et présentant des défauts
de recouvrement dus à la présence de traces d’huile à base de glycol
(molécules suivies d’un astérique *) (document fourni par M.F. Saldi)
Un domaine de choix de l’analyse des surfaces en SIMS statique
est la caractérisation des traitements de surface des polymères, par
exemple par irradiation plasma, récemment développés pour modifier les propriétés de réactivité. Ce type d’exploitation est aussi utilisé pour mettre en évidence des ségrégations de surface.
Intensité (coups/s)
104
104
149
193
0
0
1
b
Le tableau 3 [32] correspond à l’étude des mécanismes d’adsorption d’une molécule (ici CO) sur la surface des métaux, pour la compréhension des propriétés catalytiques de ceux-ci. Il y apparaît que
les proportions respectives des ions MCO+, M2CO+, ou M3CO+
détectés par SIMS sont directement représentatives de la structure
des adsorbats, respectivement linéaire, pontée ou triplement pontée, telle qu’elle peut être déterminée par d’autres méthodes : spectrométrie infrarouge (IR), spectrométrie à haute résolution de perte
P 2 619 − 14
variation en fonction de la dose d'atomes
neutres primaires (Ar) en FAB-SIMS
Fragments ioniques émis par le PET :
C
O+
C
C
O+
C
C
104 :
O
149 :
■ Matériaux inorganique
L’application du SIMS statique à l’analyse de surface des matériaux inorganiques est relativement récente [32]. Elle s’est surtout
intéressée aux études d’adsorption (premiers stades de l’oxydation,
mécanismes de la catalyse, etc.) et de pollution de surface. Les problèmes de dégâts d’irradiation sont ici moins critiques que pour les
matériaux organiques. Si le substrat est isolant, les effets de charge
sont minimisés par rapport au régime dynamique. Ils existent
cependant et peuvent nécessiter le recours à la méthode FAB-SIMS,
ou en tout cas à un faisceau électronique complémentaire. La
figure 18 [23] illustre comment, en tirant parti à la fois des effets
d’exaltation de l’oxydation sur l’émission d’ions métalliques positifs
et de l’émission d’ions polyatomiques (négatifs ici), il est possible de
caractériser les premiers stades de l’oxydation de quelques métaux.
2
Dose/1013 atomes . cm– 2
HO
O
193 :
HO
O
O
CH2
CH2+
Figure 17 – Variation des signaux ioniques secondaires émis
par le polymère PET [22]
d’énergie des électrons (HREELS), diffraction des électrons lents
(LEED).
Enfin, la figure 19 [32] montre comment l’imagerie ionique du
SIMS à temps de vol permet de mettre en évidence le rôle des ions
Cl− dans la corrosion par piqûre d’un acier revêtu de polymère
(alkyle). Le polymère est ensuite éliminé avant analyse SIMS.
L’adsorption combinée de ces ions et du chrome au fond de la
piqûre vient à l’appui des théories mettant en cause ces deux espèces. L’adsorption du sodium en périphérie de la piqûre permet de
préciser le mécanisme électrochimique de corrosion localisée.
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Intensité (coups / min)
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5. Imagerie, analyse
en trois dimensions
106
Pour obtenir la répartition spatiale des éléments (ou des phases,
voir paragraphe 6), l’analyse est localisée dans un petit volume. Il
est rappelé que toute diminution du volume analysé se traduit par
une perte de sensibilité et de précision de l’analyse, quelle que soit
la méthode employée. D’autre part, la concentration en un « point »
est toujours à rapporter au volume analysé. Une forte concentration
locale peut ne pas être détectée si le volume élémentaire d’analyse
qui l’englobe est grand devant l’extension spatiale de cette
ségrégation. Ainsi, une concentration de 100 % sur une seule
couche atomique perpendiculaire à la surface (ségrégation intergranulaire d’équilibre par exemple) est perçue comme une fraction atomique de 10−4 si le volume analysé qui la contient est 2 · 10−2 µm3
(4 µm2 x 5 nm), soit la valeur habituelle du volume analysé par une
sonde bien réglée.
Cr+
105
Ti+
104
Ni+
103
Cu+
102
10
0
200
400
Intensité relative
a
600
800 1 000 1 200
Dose d'oxygène (langmuirs)
ions secondaires positifs
1,2
CuO2–
TiO2–
1,0
0,8
0,6
CrO2–
0,4
NiO2–
0,2
0
0
200
400
b
600
800 1 000 1 200
Dose d'oxygène (langmuirs)
ions secondaires négatifs
1 langmuir = 10–6 torr/s
Figure 18 – Variation des courants ioniques émis en SIMS statique
pour quelques métaux au cours des premiers stades de l’oxydation,
en fonction de la dose d’oxygène [23]
La localisation latérale se fait soit en mode microscope soit en
mode microsonde. Elle est exploitée soit sous forme de mesure
quantitative globale sur une aire analysée la plus petite possible,
soit sous forme d’images quantifiées, soit encore sous forme d’images simples formées à partir de la galette de microcanaux et de
l’écran fluorescent. La résolution latérale est définie comme la possibilité de séparation de deux points de concentrations différentes.
En mode microscope, pour les mesures quantitatives globales de
l’aire analysée, la taille minimale de cette aire sélectionnée, ellemême limitée par les propriétés optiques du faisceau, de la colonne
secondaire, et des diaphragmes, définit la résolution latérale. Cette
taille minimale est de l’ordre de 2 µm (voir P 2 618, § 2). Lorsque
l’image est quantifiée par l’utilisation d’une caméra CCD, la mesure
locale n’est plus limitée en résolution latérale que par les aberrations du système optique et le diamètre des canaux de la galette de
microcanaux. Elle devient inférieure à 1 µm.
Il en est de même pour la résolution latérale des images projetées
sur l’écran fluorescent, mais l’information est alors essentiellement
qualitative. Cette information peut être amplifiée par des effets de
contraste dus aux variations locales de probabilité d’émission.
L’exemple de la figure 20 illustre ces effets de contraste : Il s’agit de
détecter des ségrégations de carbone dans un alliage à base de nickel contenant du chrome. Sur l’image des ions 12C−, seules apparaissent les surconcentrations locales en carbone à l’aplomb de
carbures de chrome Cr7C3. Par contre, sur l’image des ions 24(C2−)
pour la même plage, les carbures apparaissent toujours, mais un
joint de grain apparaît enrichi en carbone. Il s’agit d’une ségrégation
atomique, indétectable sur les ions monoatomiques en raison de sa
trop petite taille, mais dont le contraste est amplifié par le fait que la
probabilité de présence de deux atomes de carbone voisins y est
beaucoup plus importante que dans la masse des grains.
Tableau 3 – Proportions relatives d’émission des ions MnCO+ à partir de surfaces métalliques
monocristallines après adsorption de CO
SIMS statique
Surface
MCO+
M2
CO+
M3
CO+
Structure de l’adsorbat, par
IR/HREELS/LEED (1)
Cu (100)
0,9
0,1
...
Ru (0001)
0,9
0,1
...
Linéaire
Linéaire
Ni (100)
0,8
0,2
...
Linéaire + ponté
Ponté + linéaire
Ni (111)
0,6
0,4
...
Pd (100)
0,3
0,6
0,1
Ponté
Pd (111)
0,3
0,4
0,3
Triplement ponté
Pt (100)
0,65
0,35
...
Linéaire + ponté
(1) Linéaire = lié à 1 atome de surface Ponté (triplement) = lié à 2 (3) atomes de surface
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P 2 619 − 15
Nombre de coups
Nombre de coups
ÉMISSION IONIQUE SECONDAIRE _________________________________________________________________________________________________________
800
600
À l'extérieur
d'une piqûre
400
À l'intérieur
d'une piqûre
400
200
200
0
0
0
10
20
a
b
600
image ionique de Na+
30
40
50
60
0
70
80
Masse (u)
10
20
30
40
50
60
70
80
Masse (u)
spectres TOF-SIMS des régions situées respectivement à l'extérieur et à l'intérieur d'une piqûre
c
image ionique de Cl–
d
image ionique de Cr+
Figure 19 – Étude de la corrosion par piqûre d’un acier doux [32]
60Ni–
20 µm
a
12C–
24(C– )
2
b
c
Figure 20 – Images ioniques obtenues sur un alliage à base Ni présentant une ségrégation intergranulaire de carbone. Illustration de l’effet
de contraste en imagerie ionique [CNRS Bellevue]
En mode microsonde, la résolution latérale ultime est définie par
la taille de la sonde primaire sur l’échantillon et celle du pixel d’analyse ou d’image.
Des exemples d’imagerie ont été donnés ci-dessus (figures 16,
19, 20). La figure 21 [19] est une application de l’analyse quantitative localisée en microélectronique (mode microscope, aire analysée = quelques µm2).
P 2 619 − 16
Les meilleures résolutions latérales (quelques dizaines de nanomètres) sont obtenues avec l’équipement « Nano-SIMS ». La
figure 22 [24] illustre les performances de cet appareil en microbiologie. La résolution est ici, en mode microsonde, proche de 0,1 µm.
En mode microsonde, le fait que les signaux puissent être stockés
sous forme électronique au cours du temps autorise la reconstitution en trois dimensions de la répartition spatiale d’une espèce don-
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_________________________________________________________________________________________________________ ÉMISSION IONIQUE SECONDAIRE
Atomes/cm3
1019B
8
6
4
2
1018
a image linéaire de 12C14 N –
8
6
4
2
x 1 000
1017
8
6
4
SiO2
2
p+
1016
p+
n-EPITAXY
n+
8
6
image « racine carrée » de 32S–
b
n+
p
4
2
1015
0,2
0,4
0,6
0,8
1
Profondeur (µm)
c
Profil de bore implanté localement.
Ions primaires : Cs+
Surface analysée : 2 x 5 µm2
image linéaire de 12C–
Figure 21 – Analyse de zones implantées ou diffusées
dans un microcircuit intégré VLSI (transistor bipolaire) [19]
née, en tirant parti de la relation temps d’analyse-profondeur. Les
données stockées peuvent être disposées sous formes de
« coupes » de l’échantillon dans l’orientation désirée. Le même type
d’exploitation peut être assuré en mode microscope avec une
caméra CCD, grâce à une digitalisation des images successives aux
différentes profondeurs. La figure 23 [25] montre ainsi l’analyse en
trois dimensions d’un profil d’implantation de fer dans un échantillon de SiC.
d
image linéaire de 107Ag–
e
image linéaire de 80Se–
6. Analyse chimique,
identification, résolution
Les variations des rendements d’ionisation des espèces en fonction de la nature chimique des phases où elles se trouvent, qui sont
un handicap pour l’exploitation quantitative en analyse élémentaire,
peuvent être utilisées au contraire comme un moyen puissant
d’identification et de mesure des quantités des phases dans un
matériau.
Champ imagé : 20 x 20 µm2, 256 x 256 pixels.
Diamètre de sonde : 0,1 µm
Figure 22 – Micrographies ioniques à balayage à haute résolution
spatiale sur une section d’un glomérule rénal humain [24]
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P 2 619 − 17
ÉMISSION IONIQUE SECONDAIRE _________________________________________________________________________________________________________
y
z
z
y
x
x
x
x
y
y
y
y
x
x
z
z
z
Intensité (coups/s)
a
image de Si 2+
b
image de Fe+
103
8
6
4
Profil dans la zone plus émissive
2
Si+2
102
8
6
L'axe z est parallèle à la direction d'érosion. Les images ioniques 3D et 2D de
l'ion Si2+ a et Fe+ b sont limitées par les images du diaphragme de champ
circulaire et apparaissent donc comme un « cylindre » en représentation 3D.
Les profils d'intensité des ions 54Fe+ et 56Si2+ montrés en c sont reconstitués
dans la direction z, pour le point (x,y) qui correspond à l'hétérogénéité
constatée dans les images b .
4
2
10
Fe+
8
6
4
2
1
0
1 000
2 000
c
3 000
Temps (s)
Figure 23 – Exploitation en trois dimensions d’un profil d’implantation de fer dans un échantillon de SiC [25]
P 2 619 − 18
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_________________________________________________________________________________________________________ ÉMISSION IONIQUE SECONDAIRE
a
image 27Al+
b
image 7Li+
image 7Li12C– 16O3–
c
Figure 24 – Localisation en modes image et microscope de cristaux aciculaires de carbonate de lithium à la surface d’un alliage Al-Li [26]
Nb
Intensité ionique secondaire
(INb /IFe ).10
57
4
(%)
100 *
*
*
*
75
*
3
*
*
*
2
50
*
**
*
*
1
Composition de l'acier (%)
P 0,019
C 0,18
Al 0,055
Mn 0,43
N2 0,0065
Si 0,27
S 0,016
Nb 0,044
*
* *
25
*
0
25
Nb
50
75
100
125
* *
150 x 103
Nb en solution
950
a variation du rapport des intensités ioniques de Nb+ et Fe+ avec la
concentration totale en niobium, respectivement totalement précipité
(*) et totalement mis en solution solide ( ). La mesure sur l'alliage
étudié ( ) permet de déterminer les proportions de Nb précipité (Nb )
et en solution solide.
* *
0
*
1 050
Sonde ionique
1 150
1 250
(°C)
Isolement électrochimique
b comparaison des pourcentages de Nb précipité obtenus par la
méthode précédente (*) et par isolement électrochimique ( ).
Figure 25 – Dosage du niobium précipité dans un acier [27]
L’exemple de la figure 24 correspond à l’utilisation du mode
image en microscopie ionique pour l’étude des phases dans les couches superficielles d’un alliage Al-Li [26]. Cet alliage présente une
épaisse couche isolante, dont l’analyse par XPS a par ailleurs montré qu’elle contient un carbonate. Les images ioniques localisent ce
carbonate de lithium, avec une résolution de 1 µm environ, sous
forme de cristaux aciculaires superficiels.
La figure 25 montre comment les différences d’émissivité peuvent être utilisées quantitativement pour mesurer les évolutions de
la précipitation d’un composé dans un matériau (ici NbC dans un
acier) [27]. On étalonne d’abord la variation de l’émission ionique de
Nb+ en fonction de sa concentration totale, soit dans l’alliage où il
est complètement précipité sous forme NbC, soit dans l’alliage où il
est complètement en solution solide (après recuit et trempe), et on
vérifie la linéarité des réponses en fonction de la quantité précipitée
(figure 25 a). Sur l’acier ayant subi un traitement thermique donné,
on peut alors remonter, à partir de la concentration totale en nio-
bium et du signal d’émission ionique du niobium, aux proportions
respectives de Nb précipité et en solution solide (figure 25 a). La loi
d’additivité utilisée n’est que la conséquence de la règle dite « du
bras de levier » des diagrammes de phase. La figure 25 b montre la
comparaison avec le procédé plus classique mais beaucoup plus
lourd d’isolement électrochimique.
L’utilisation qualitative (images) ou quantitative des effets de
matrice et/ou des ions multiatomiques pour l’analyse de phases
dans les matériaux apparaît donc comme une application importante de l’analyse ionique. Le choix de la procédure est en général
spécifiquement adapté au problème posé, mais quelques règles
sont à retenir. Ainsi, les ions polyatomiques choisis doivent tenir
compte des mécanismes de leur émission. Par exemple, pour doser
le carbure de silicium SiC dans le silicium, il est plus judicieux de
choisir les ions SiC2± que les ions SiC±. En effet, la formation des
ions SiC2± par recombinaison au-dessus de la surface des trois particules est totalement improbable en dehors des précipités, alors
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que celle des ions SiC± peut s’y produire. Dans une solution solide
A-B avec des concentrations respectives CA et CB, les probabilités de
formation d’ions A2±, AB± et B2± varient respectivement comme
C A2 , 2 C A C B et C B2 , alors que, pour des agrégats de l’élément B dans
le même alliage, la probabilité de formation des ions B2± varie
comme CB. En règle générale, si des ions polyatomiques sont identifiés comme caractéristiques des phases en présence, leur dosage
quantitatif permet d’obtenir, par application de la « règle du bras de
levier » des diagrammes de phases, les proportions volumiques respectives des phases.
7. Conclusion
Les performances particulières de la microanalyse des matériaux
par émission ionique secondaire en font un instrument nécessaire
dans les cas suivants :
— analyse et dosage quantitatif des impuretés en traces (moins
de 1 at. %, et jusqu’à 0,1 ppb) dans les solides, en particulier les
semi-conducteurs ;
— analyse et dosage de profils en profondeur sur des distances à
partir de la surface bien inférieures à 1 µm ;
— analyse des couches minces (épaisseurs entre 1 nm et quelques µm) et des interfaces correspondantes ;
— analyse moléculaire des matériaux organiques, en particulier
les polymères ;
— analyse de surface en mode statique des matériaux organiques ou inorganiques ;
— localisation spatiale, à une échelle inférieure au micromètre,
d’éléments, en particulier en trace, ou de composés moléculaires ou
minéraux, dans les matériaux complexes ou polyphasés.
Le tableau 4 permet de situer la méthode SIMS, en mode statique
ou dynamique, par rapport aux méthodes de microanalyse des
matériaux les plus couramment répandues. La microanalyse est
définie comme une analyse de matériau pour laquelle l’une au
moins des dimensions du volume analysé est de l’ordre ou inférieure au micromètre.
Soulignons encore cependant que l’analyse quantitative des éléments d’un matériau massif en concentrations notables n’est pas du
domaine de l’analyse ionique. La précision et la justesse des mesures sont meilleures dans ce cas avec des méthodes plus classiques,
comme l’analyse chimique, la microsonde électronique, la microscopie à balayage analytique, la spectrométrie à décharge luminescente, etc. En analyse élémentaire de surface, la spectroscopie
Auger et les spectroscopies de photo-électrons sont de même en
général mieux adaptées. Pour ce qui concerne la résolution latérale,
la microsonde électronique ou la microscopie à balayage ont souvent des performances meilleures. Il ne doit être fait appel à l’analyse quantitative par émission ionique que pour les cas où ces
autres méthodes n’ont pas les performances suffisantes. Ces cas
sont résumés ci-dessus.
L’analyse ionique par émission secondaire, déjà ancienne dans
ses principes, a vu se développer plus récemment un nombre
important d’applications nouvelles, et surtout de méthodes également basées sur l’analyse par spectrométrie de masse de faibles
quantités de matière (microanalyse) extraites de la surface des
matériaux. L’analyse statique par spectrométrie à temps de vol
(TOF-SIMS), la pulvérisation sous faisceau de particules neutres
(FAB-SIMS), l’analyse par post-ionisation des particules neutres
secondaires (SNMS) en sont les cas les plus répandus, mais on peut
également citer les méthodes d’analyse par ablation laser (LAMS)
ou par pulvérisation sous plasma (GDMS et ICPMS des solides) suivie de spectrométrie de masse, ou l’application de la spectrométrie
de masse tandem (MS/MS) à l’identification des composés moléculaires.
Tableau 4 – Comparaison des performances de quelques méthodes de microanalyse des matériaux
Éléments
détectés
Spectrométrie d’émission X
Z > 5 (B)
SEM-EDS
Microsonde (WDS
Z > 3 (Li)
et EDS)
Z > 5 (B)
STEM-EDS
Autres spectrométries
Z > 3 (Li)
XPS, UPS
AES
EELS en réflexion
Z>3
spécifique
EELS en transmission spécifique
Analyses sous pulvérisation
SIMS dynamique
Tous
SIMS statique
Tous
GDOS
GDMS
Tous
Tous
Analyses nucléaires
RBS
ERDA
NRA
PIXE
Limite de
détection
pour 1 µm3 ou
pour une
couche
Analyse ponctuelle,
imagerie
(Résolution latérale)
5 · 10−3
oui (env. 1 µm)
10−3
10−2
oui (env. 1 µm)
oui (1 à 10 nm)
< 0,1 couche
atomique
< 0,1 couche
atomique
0,1 à 1 couche
atomique
spécifique
non
(sauf prototype)
oui (1 à 10 nm)
10 à 100 nm
< 10−6
oui (0,2 µm)
10−2 couche
atomique
< 10−4
< 10−6
Analyse de couches
Analyse
Analyse Informations
minces
de surface quantitative
liaisons
Résolution en
Profondeur
chimiques
profondeur
analysée
(1)
non
++
non
non
non
+++
+
non
non
++
oui
++
oui
−
oui
non
−
oui
1 nm
non
oui
oui (0,2 µm)
qq nm
non
non
1 nm
1 nm
2 couches
atomiques
non
non
+
(traces ++)
+
+++
+ (?)
non
non
10 nm
100 nm
10 nm
non
10 nm
10 nm
10 nm
non
++
++
+++
+++
non
non
non
non
oui (20 nm)
non
non
0,1 mm
(modélisation)
10 à 100 nm
< 10 nm
0,5 à 5 nm
(avec pulvérisation)
< 10 nm
2 à 5 nm
(avec pulvérisation)
non
qq nm
(1) +++ : excellent
10−3 à 10−2
oui en microsonde (1 µm)
grands Z
petits Z
10−3 à 10−2
non
−3
−9
spécifique
10 à 10
oui en microsonde (1 µm)
−3
−6
Z = 15 à 35
10 à 10
oui en microsonde (1 µm)
Z = 75 à 90
++ : bon
+ : médiocre
− : non adapté
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