Judaïsme - christianisme : Passerelles vers un avenir

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Transcript Judaïsme - christianisme : Passerelles vers un avenir

Yonathan Lévi
Judaïsme - christianisme :
Passerelles vers un avenir
commun
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À l’Eternel, la Terre et tout ce qu’elle contient.
À ma femme Catherine, pour tout ce qu’elle
m’apporte
sur le plan affectif et spirituel. Ton amour
illumine ma vie.
À mes enfants que j’aime : Philippe et Ayelet
Merci à mes cher amis André Gouzes et Alain
Combes pour leur relecture et leurs conseils.
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Sommaire
Introduction ................................................................
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Chapitre I : Sacerdoce, Messianité et Divinité ........
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Chapitre II : En se penchant sur les textes ............... 37
Chapitre III : Ces dogmes qui nous emprisonnent .... 67
Chapitre IV : Lecture de Yo’hanan chez les juifs .... 109
Chapitre V : Dieu et Yeshoua .................................... 163
Chapitre VI : Mystiques juives et chrétiennes ......... 181
Chapitre VII : Dépasser les dogmes ......................... 199
Chapitre VIII : Oser le renouveau ............................ 229
Annexes ........................................................................ 261
Glossaire des noms en hébreu ................................... 267
Bibliographie ............................................................... 281
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Introduction
Lors d’un précédent ouvrage « Une foi à deux
voix » (éditions Cerf), écrit avec mon épouse
Catherine Lévy, nous avions confronté nos
expériences de foi ainsi que nos visions théologiques
et la façon d’aborder les problèmes de société.
Les conférences que nous donnons, et en
particulier celle intitulée « Jésus : rabbin, prophète ou
Messie ? » visent à montrer combien sont proches le
Judaïsme et le Christianisme. Mais il est évident que
deux heures de conférence ne peuvent contenir tout
ce qu’il y aurait à dire sur ce sujet, tant le domaine est
vaste.
Ce livre essaye de pousser plus loin
l’argumentation développée dans « Jésus rabbin,
prophète ou Messie ? ». Il ne s’agit pas de créer une
nouvelle religion fourre-tout dans laquelle on aurait
saupoudré un peu de judaïsme et un peu de
christianisme.
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Il s’agit plutôt, à l’aide des textes Juifs et Chrétiens,
de développer et de d’étendre le plus possible le
raisonnement face à cette question à laquelle nous
tentons de répondre : Judaïsme et Christianisme, si
proches, sont-ils prisonniers de leurs dogmes
respectifs ?
Certains propos, qui pourraient choquer le lecteur,
émanent de ma réflexion et ne reflètent pas la « ligne »
du Judaïsme Libéral auquel je me réfère dans ma vie
de tous les jours. Mais une bonne partie de la base de
l’argumentation de ce livre provient des textes
canoniques Juifs ou Chrétiens, ou de commentateurs
reconnus par tous.
J’ai pris le parti de redonner leurs noms originels à
Jésus, aux membres de sa famille à ses apôtres, ainsi
qu’à certains lieux, afin de restituer l’ambiance
originale que ne donnent jamais les traductions. Le
nom de Paul, l’apôtre des Gentils, est traduit ici par
Shaoul, alors que Chouraqui préfère son nom romain
de Paulos, bien qu’il cite dans son introduction aux
écrits pauliniens le nom de Shaoul de Tarse.
Au terme de cet ouvrage j’espère seulement avoir
permis aux lecteurs de s’interroger sur la nécessité des
dogmes qui, trop souvent, emprisonnent le croyant,
et l’éloignent de sa synagogue ou de son église.
Yonathan Lévy
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Chapitre I
Sacerdoce, Messianité et Divinité
Avouons-le franchement, Jésus pose un problème
aux Juifs. Certainement parce qu’il est Juif lui-même,
et que ce nom de Jésus qui lui a été donné ne
représente rien par rapport à son nom hébreu
originel : Yeshoua, qui veut dire Sauveur. Et puis
parce qu’il a été présenté comme un homme qui
s’était éloigné de la tradition, celle de ses pères, et
donc celle de Moshé (Moïse).
Si ses idées n’étaient restées que les siennes, mais
voilà : il en a fait un enseignement, drainant à sa suite
des disciples !
C’est ainsi qu’à deux endroits, le traité du Talmud
Sanhédrin parle de Yeshoua : « Il a été dit que
Yeshoua pratiquait la sorcellerie ; il a séduit et égaré
Israël. » (Sanhédrin 43a)
« Il sera lapidé parce qu’il a pratiqué la magie et
trompé et égaré Israël. » (Sanhédrin 107b)
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Qu’est-ce que les Juifs savent de lui, en dehors de
ce qui est rapporté dans les Evangiles ? Peu de choses
en fait. Il est né à Beit Lékhem, et a vécu à Natzrat
(Nazareth), en Galilée. Sa mère se nommait Myriam,
et son père n’est pas nommé. Il a eu des frères et des
sœurs. Ses études rabbiniques à Kfar Nahoum
(Capharnaüm) le rendent proche des pharisiens. Son
maître s’appelait rabbi Yeshoua ben Pérahia. Sa
période de prédication s’étend sur deux à trois ans au
maximum. Arrêté, il est condamné par les Romains à
la crucifixion.
C’est à partir de sa mort que les opinions
divergent. Est-il un envoyé de Dieu ? Est-il le Messie
que tous espèrent ? Ou est-il Dieu Lui-même comme
le proclame Yo’hanan (Jean) dans son quatrième
Evangile ?
Revenons à la Genèse au chapitre I et au verset 26 :
« Dieu dit : “Faisons l’homme à notre image, à notre
ressemblance.” » Le verset 27 précise : « Dieu créa
l’homme à son image ; c’est à l’image de Dieu qu’il le
créa. » Soit dit en passant, la ressemblance (en hébreu
Dmout) a disparu au verset 27. Une interprétation
reprise par mon épouse, est que Dmout est de la
même racine que Dam, le sang. Or ce sang disparu
dans ce verset, aurait été réservé et se retrouverait à la
croix, dans le sang de Yeshoua.
Convenons simplement que l’homme et la femme
ont été faits à l’image de Dieu. C’est donc qu’ils lui
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ressemblent. Or les rabbins disent que l’homme
ressemble à Dieu comme un fils ressemble à son père.
Que faut-il entendre par là ? Dieu et l’homme
seraient-ils de même nature, et dans ce cas où serait la
limite entre le divin et l’humain ? Ou s’agit-il d’une
sorte de jeu de mots, une parabole, une image pour
nous faire prendre conscience que l’homme n’est pas
Dieu lui-même, mais plutôt le reflet de la divinité ?
Ce principe de la ressemblance de l’homme à Dieu
pose le problème de la relation entre le Créateur et ses
créatures. En Espagne, plus particulièrement en
Catalogne, mais aussi en Provence, les maîtres de la
Kabbale, entre le 10e et le 12e siècle, se sont penchés
sur la nature de ce lien ; ils en ont conclu qu’il s’agirait
d’un lien véritablement organique. Cela signifie que
l’essence est identique, seule l’intensité de Dieu par
rapport à l’homme crée la différence. De même
l’homme, pour arriver au niveau de son Créateur, doit
palier son manque de connaissance.
Pour autant, ce principe n’a pas toujours été celui
du judaïsme traditionnel, celui des rabbins. Entre le
judaïsme rabbinique et les idées formulées dans la
Kabbale, il s’est passé plusieurs siècles ; pendant ce
temps, le terme de « ressemblance » n’avait pas la
même résonance : il s’agissait alors, plus d’une image,
d’une métaphore que d’une véritable ressemblance au
sens kabbalistique du terme.
Peut-on dire que les Chrétiens se soient inspirés du
récit de la Création ? En d’autres termes,
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l’incarnation, dogme fondamental dans le
christianisme, est-elle tirée de ce texte de la Genèse ?
Il est certain que les premiers Chrétiens ne pouvaient
ignorer ce passage de la Torah (le Pentateuque), ni les
commentaires qu’en faisaient les maîtres.
Mais il n’y a jamais eu d’explication officielle pour
rapprocher les thèses de la ressemblance et celle de
l’incarnation. Peut être parce qu’il n’y en a pas.
En fait, en étudiant la Torah, nulle part ne figure
l’idée que Dieu se serait fait homme, ni même que
Dieu et l’homme puissent être de même nature.
Moshé fut celui qui fut le plus proche de Dieu
puisqu’il lui parlait « face à face ». Mais Moshé était
un être humain, créé, avec des parents humains.
Jamais la Bible hébraïque ne laisse entendre qu’un
homme, aussi grand fut-il, puisse être de la même
nature que Dieu, c’est-à-dire incréé.
Or de nombreux théologiens reconnus déclarent
que le second Testament est la suite logique du
premier, en ce sens qu’il s’insère dans la tradition
juive.
Les trois premiers évangiles synoptiques ne
présentent aucune opposition au dogme juif de
l’époque. S’ils présentent Yeshoua comme le Messie,
jamais ils n’abordent sa déité, ni même le fait qu’il eut
été incréé.
En revanche le quatrième évangile, celui de
Yo’hanan, se démarque des précédents, et ceci dès le
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prologue en introduisant un concept nouveau : le
Verbe ou le Logos.
Jusqu’alors, tous les textes de la tradition Juive
étaient écrits en hébreu. Or tous ceux de la tradition
chrétienne, que ce soit les évangiles, les actes des
apôtres, les épîtres de Shaoul ou encore de Yaakov
(Jacques), ont tous été écrits en langue grecque.
Est-ce une volonté délibérée de se démarquer du
judaïsme et d’établir une fois pour toutes une barrière
infranchissable entre les deux religions ?
Cette propagation de la première littérature
chrétienne en grec semble de prime abord
surprenante. En effet, les premiers adeptes de
Yeshoua étaient tous Juifs, comme lui. Ils parlaient et
écrivaient l’hébreu ; ils pensaient en hébreu, pas en
grec. De plus l’histoire Juive n’a pas gardé un bon
souvenir des Grecs : les mœurs de ces derniers étaient
dissolues par rapport à l’éthique de vie que prônait la
Torah, et la guerre que les judéens avait menée en 165
avant notre ère contre les Syriens hellénisés
d’Antiochus Epiphane était encore présente dans les
mémoires.
Mais force nous est de constater que le grec était la
langue des érudits, celle la plus employée dans les
pays du bassin méditerranéen. Le grec avait la place
qu’occupe l’anglais de nos jours.
Pourtant, on pourrait trouver des points communs
entre les pensées grecques et juives, ne serait-ce que
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cette recherche inlassable de la vérité, qui est une des
références de la sagesse juive.
Yeshoua avait toutes les raisons d’ignorer le grec ;
c’est une évidence que son enseignement a été donné
en hébreu, qui était la langue du pays, l’araméen
n’étant pas si répandu que ce que l’on a voulu
prétendre.
De nos jours tous les Chrétiens ont conscience que
les évangiles et les textes qui les suivent possèdent une
origine hébraïque.
D’ailleurs un des pères de l’Eglise, au IV° siècle,
Eusèbe de Césarée, fait état d’écrits d’un certain
Papias d’Hiérapolis en Phrygie, et qui fut évêque de la
toute jeune église au II° siècle et dans lesquels ce
dernier évoquait un recueil des paroles de Yeshoua.
Celui-ci aurait été écrit en araméen – ou en hébreu, et
transcrit dans la même langue par les disciples. Ceuxci auraient pris des notes tout en suivant les
déplacements de leur maître.
Ce serait ce recueil que les auteurs des évangiles
auraient consulté pour composer les évangiles
synoptiques.
Il semblerait que Papias ait été conscient des
difficultés que présentait une traduction de l’hébreu
en grec. En effet, ces deux langues sont différentes par
leurs concepts, par leur forme grammaticale. Selon
Eusèbe de Césarée, les auteurs des trois premiers
évangiles auraient traduit en grec, avec leurs faibles
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moyens, le recueil des paroles de Yeshoua. Cette
traduction est connue sous le nom grec de Logia, et en
français Les Paroles. Malheureusement les écrits de
Papias ont aujourd’hui disparu.
« Traduire, c’est trahir », comme le dit un adage
fameux. Il est certain que toute traduction apporte
son lot de contresens, d’interprétations hasardeuses,
qui éloignent du texte original et de sa
compréhension initiale. Les traductions ne sont
jamais neutres, et les traducteurs sont nécessairement
influencés par leur époque, par leurs commanditaires,
et par le but à atteindre.
Au cours de nos études bibliques qui réunissent
principalement des Chrétiens, j’essaie de replacer
chaque texte dans son sens et son contexte hébraïque,
afin que nos auditeurs parviennent à une meilleure
compréhension du texte, et qu’ils puissent avoir
également une possibilité d’étendre les idées qu’il
véhicule.
C’est dans le quatrième évangile que le concept de
logos fait son apparition. Or ce mot ne signifie pas
seulement « parole » : en grec, il englobe également
l’idée de savoir, de connaissance, de dialogue. Toutes
choses qui rapprochent du concept grec de la vérité.
Et voici que dans son prologue Yo’hanan écrit que
le verbe s’est fait chair.
C’est une idée déjà connue dans le judaïsme que de
dire que la parole peut être créatrice : en effet dans la
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Torah, dans Genèse 1 :3 « Dieu dit : « que la lumière
soit ! » Et la lumière fut. » En décomposant l’action, il
y a d’abord la parole de Dieu, suivie de la réalisation
de celle-ci. Dieu dit quelque chose, et il y a création.
Sa parole est donc création.
Pourtant en affirmant que Yeshoua est Dieu,
Yo’hanan l’évangéliste ne se démarque-t-il pas
définitivement de la tradition de ses pères, voire des
auteurs des trois premiers évangiles ? Et comment les
Juifs pouvaient-ils accepter cette idée soulignée dès les
premiers mots de son évangile :
« Au commencement était le verbe et le verbe était
à côté de Dieu et le verbe était Dieu » ? Yeshoua est-il
ce verbe à côté de Dieu ?
Pour les Juifs, le summum de la relation entre Dieu
et l’humanité se fait dans la relation que Dieu a avec
Moshé. La révélation au Sinaï, les dialogues entre la
divinité et le serviteur fidèle sont les symboles de la
relation à Dieu à travers un intermédiaire. Mais Dieu
reste invisible. On ne peut l’atteindre. On ne peut
donc pas le représenter.
Pour les premiers Chrétiens il fallait bien que l’on
puisse conceptualiser un personnage qui pourrait être
vu, entendu, compris et adoré. C’est à partir de cette
idée que s’est exprimée l’idée que le logos pourrait être
ce nouvel intermédiaire entre Dieu et les hommes.
À partir de là, la distance à parcourir n’est plus
bien grande pour annoncer que le verbe s’est fait
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chair, qu’il est apparu concrètement en la personne de
Yeshoua, seule véritable incarnation de Dieu.
Mais si tel est le raisonnement de l’auteur du
quatrième évangile, comment le verbe peut-il être à
côté de Dieu et être Dieu Lui-même ?
Dieu et l’homme se confondent-ils au point qu’un
homme, Yeshoua, puisse l’incarner, cette incarnation
existant depuis l’éternité ?
Telle était la recherche de Philon d’Alexandrie qui
voulait percer le mystère de l’incarnation. Dans un de
ses écrits, malheureusement perdu, mais dont la
teneur nous est rapportée par Eusèbe de Césarée, le
philosophe grec écrivait que lors de la Création,
l’homme avait été fait « à l’image du second Dieu, le
logos » puisque « rien de mortel ne pouvait être
représenté à l’image du Très Haut, Père de l’univers. »
Si l’on remet les choses dans l’ordre, Dieu précède
évidemment le logos. Il est supérieur à toute la
Création, logos compris.
Dans Genèse 1 :27 il est écrit que « Dieu créa
l’homme à son image, à l’image de Dieu il le créa ;
homme et femme il les créa ».
Une question s’impose : pourquoi cette
redondance ? Pourquoi cette forme d’insistance « à
l’image de Dieu il le créa » ? Il eut été tout aussi clair
de se contenter d’une seule phrase « Dieu créa
l’homme à son image ».
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Philon pose la question de cet il. Qui est-il ? Et
pourquoi parler de cet il comme s’il ne s’agissait pas
de Dieu mais d’un autre être ?
La réponse de Philon est claire : il s’agit du logos. Il
serait la partie visible de ce Dieu invisible. Du coup, la
première création serait ce logos, qui pour Philon
s’apparenterait au souffle divin, au Rouakh haKoddesh
Juif.
Pourtant à la lecture des textes de Philon
d’Alexandrie, on ne trouve aucune référence à l’idée
que le Verbe ait pu se faire chair.
Comprendre la signification de ce que dit la Bible
au sujet de l’image et de la ressemblance divines
nécessite d’aborder d’autres pistes que celles
proposées par Philon.
Il convient d’étudier de plus près l’évangile de
Yo’hanan : celui-ci introduit dès son début le concept
du logos, lequel est absent de la Bible hébraïque.
Evidemment, pour des grecs ou des romains, le
concept est connu. Il semblerait que le quatrième
évangéliste ait voulu orienter le christianisme dans
une direction radicalement opposée à celle du
judaïsme.
Mais là aussi il convient de nuancer nos propos,
car Yo’hanan Juif comme l’était Yeshoua ne crée pas
volontairement le christianisme. À son époque, ceux
que l’on nomme désormais les premiers Chrétiens ne
s’appellent pas ainsi. Ce sont des Juifs qui
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appartiennent à un certain courant du judaïsme ; à
cette époque, le judaïsme n’était pas uniforme, mais
bien au contraire multiforme : il s’enrichissait de
courants de pensée dont les Sadducéens, Pharisiens,
Hassidim, Esséniens, et Zélotes, sont les plus connus.
Dire que Yo’hanan, et Shaoul (Paul) créèrent une
nouvelle religion est un non-sens historique. Ils ont
développé un courant du judaïsme, lui-même traversé
de plusieurs sous-courants comme les Evionim ou les
Nazaréim.
Pour rester dans l’air de l’époque, il faut
comprendre que pour les Juifs qui suivaient Yeshoua,
il n’était pas question de nouvelle religion, mais bien
plutôt du Messie.
Ce personnage du Messie est intéressant à plus
d’un titre. On a pu penser, à tort, qu’il s’agirait d’un
intermédiaire entre Dieu et les hommes. À tort parce
que rien dans la tradition juive, que ce soit dans la
Torah, dans les Talmud de Jérusalem et de Babylone
ou dans la Kabbale, ne laisse à penser qu’un
intermédiaire est nécessaire dans le dialogue entre
l’homme et son Créateur. Au contraire, la relation
directe est privilégiée.
Reprenons la Torah, ce que l’on nomme le
Pentateuque : à aucun moment il n’est fait mention
du Messie. C’est seulement dans les Prophètes que
celui-ci est annoncé comme l’Oint du Seigneur.
Bien sûr, il est l’envoyé de Dieu, et en tant que tel il
a pour mission d’assurer la sauvegarde du peuple
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d’Israël et de permettre l’avènement du règne de Dieu
sur cette terre, comme le précise la Bible dans l’Exode
25 :8 « Et ils me feront un sanctuaire et Je résiderai
parmi eux. » Mais le Messie n’exerce aucune fonction
de médiateur. Pas plus qu’il n’exerce une quelconque
fonction de rédempteur des fautes du peuple d’Israël
ou des soixante-dix nations.
Il semble qu’il y ait une différence fondamentale
entre Juifs et Chrétiens quant à la fonction
messianique.
Dans son « Jésus est-il Dieu » le professeur Gérard
Israël reprend l’exemple de la dispute de Barcelone
qui opposa en 1263 des prêtres d’origine juive et
convertis au christianisme, et Rabbi Moshé ben
Nahman, dit le Nahmanide. En effet cet événement
est symptomatique de la différence d’interprétation
entre Juifs et Chrétiens quant à la personne du
Messie. Rappelons que le Nahmanide n’eut d’autre
choix que de fuir l’Espagne, tant étaient fortes les
oppositions qu’il avait suscitées.
Nahmanide commença en s’adressant au roi Jaime
1er d’Espagne en définissant la fonction royale du
Messie fils de David : « Le Messie n’est autre qu’un roi
de chair et de sang comme toi. » Et « une fois
couronné, le Messie sera consulté par les dirigeants
des autres nations. » (Isaïe 2 :4)
« Il dominera de la mer à la terre et du fleuve aux
confins de la terre. » En outre, « le temple sera
reconstruit » (Ezéchiel 40) et « il lèvera l’étendard vers
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