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Gestion des informations de l’entreprise 1 INTRODUCTION
ENSG-ENPC 9 décembre 2005
Plan du cours
• 09/12/05 (1) : Introduction (Michel Volle) • 09/12/05 (2) : Organisation et gestion du SI (Michel Volle) • 16/12/05 (1) : « Knowledge Management » (Christophe Talière, Air France) • 16/12/05 (2) : Les systèmes de gestion des ressources humaines (François Andrieux, ANPE) • 06/01/06 (1) : Les ERP (Jean-Michel Beving, SAP) 06/01/06 (2) : L’informatique de communication (Michel Volle) • 27/01/06 : Génie sémantique (Michel Volle)
Quelques informations
• Michel Volle, 64 ans • Formation : X, ENSAE, docteur en histoire • Expérience : INSEE, cabinet ministériel, France Telecom, Air France, ANPE, Bouygues Telecom, création et direction d’entreprises. • Ouvrages : – Analyse des données – Histoire de la statistique industrielle – Le métier de statisticien – e-conomie • Délégué général du club des maîtres d’ouvrage des systèmes d’information • Conseil en systèmes d’information et enseignement (Université de Rennes, IAE de Paris, ENSG) • www.volle.com • [email protected]
I – L’invention de l’entreprise moderne
Le dictionnaire, révélateur culturel
• Encyclopédie (1751-1765) – « le dessein d’exécuter quelque chose, ou l’exécution même de ce dessein » • Littré (1885) – « 1° dessein formé qu’on met à exécution ; 2° conditions déterminées pour l’exécution de certains travaux, pour une fourniture » • Larousse (2002) – « 1. Ce que quelqu’un entreprend. 2. Affaire commerciale ou industrielle ; unité économique de production »
La statistique, révélateur conceptuel
• Colbert (1699) – « Constater, par des termes numériques, la situation des fabriques du royaume » • De Tolosan (1788) – Tableau des « principales industries de la France » : priorité aux matières premières • Statistique générale de la France (1833) – Une approche monographique • Recensements industriels – 1861 : priorité aux produits – 1895 : priorité aux techniques – A partir de 1940 : priorité à l’articulation entre la finance, l’investissement et la production (Keynes et Leontief)
Qu’est-ce que l’« entreprise » ?
• Elle est masquée par la trivialité du « business is business », la banalité du quotidien, le silence de la création culturelle • Hégémonie idéologique (Gramsci) – En Europe : l’Etat (et, avant l’Etat, l’Eglise) – Aux Etats-Unis : l’Entreprise • L’entreprise est un espace organisé (donc non marchand) plongé dans le marché • C’est une être vivant, donc sujet à des pathologies, qui relève de la biosphère comme de la noosphère, et qui est inséré dans la nature physique, humaine et sociale • Il met en œuvre la pensée pratique, orientée vers l’action, et non la pensée ontologique, orientée vers la contemplation de l’être dans sa permanence
Une définition « biologique »
• Toute personne morale productrice est une entreprise – (y compris les administrations qui produisent des services) – Un « métier » est une entreprise dans l’entreprise • L’entreprise est le lieu où le travail des êtres humains s’organise afin d’agir sur la nature pour en obtenir des résultats utiles • On ne peut la décrire qu’à partir de « vues » que l’on souhaite pertinentes mais qui restent partielles : économie, organisation, finance, social, stratégie etc.
Le concept fondamental : l’activité
Technique
Technologie Savoir-faire
Input
Matières premières Biens intermédiaires Services Activité
Ressources
Capital fixe Travail
Output
Biens de consommation Biens intermédiaires évolués Services évolués
Le processus, pivot de l’entreprise
Commande Flux Bouclage Activité Produit (bien ou service) Processus de production
Le système d’information : Urbaniser
Entreprise
l’entreprise
Domaine Processus Activité Composant Donnée
Application, composant, processus
• Application – Structure de données + algorithmes de calcul • Composant – Ensemble de classes organisées autour d’une classe maître et décrivant un être du monde réel – Analogue à « dossier » – Passer de l’application au composant = faire passer la priorité des algorithmes aux données • Processus – Succession des tâches qui concourent à la production de valeur – Les applications ne contiennent pas d’information sur les processus – Les SI modernes automatisent le parcours des dossiers entre les divers agents qui doivent les traiter
De l’urbanisation à la modélisation
• Une même démarche, une portée différente – Chronologie, granularité • La modélisation – Langage UML (Unified Modeling Language, 1997) • Domaines, processus, activités, composants, données • Diagrammes d’activité, de classe, de séquence • Un problème : la communication – Un pivot : le référentiel
II – Repères historiques
Avant 1880
• L’entreprise est dans les limbes aux Etats-Unis • « Back Office », « Front Office » : la boutique du village • Les chemins de fer suscitent le développement d’un nœud d’affaires à Chicago – Commerce des céréales et de la viande ; industries agricoles et alimentaires ; transport ; banque ; assurance. • Le travail de bureau s’organise dans les premiers gratte-ciels.
De 1880 à aujourd’hui
Back Office Front Office 1975
Petite chronologie
• Avant 1900 – Machine à écrire : 1868-1895 ; Machine mécanographique de Hollerith : 1890 ; Copieur : 1890 • 1900-1950 – Trombone : 1901 ; Classeur mécanique : 1904 ;Transistor :
1947
• 1950-1975 – Photocopie : 1960 ; Messagerie : 1964 ; Microprocesseur : 1971 ; Internet : 1973-1989 ; Traitement de texte : 1974 • 1975-2000 – Imprimante à laser : 1975 ; Post-it : 1980 ; Ethernet : 1980 ;
PC d’IBM : 1981 ; MacIntosh : 1984 ; World Wide Web : 1991
2000 : l’entreprise en réseau
Documentation Communication Travail Événement externe Événement interne Arrivée Départ
1970’s : les Applications
1980’s : Le Système d’Information
SGBD Référentiel
1990’s : Les processus
Événement Activité Transfert Bouclage Données & Traitements
Articuler l’EHO et l’APU
• L’informatique articule l’être humain organisé et l’automate
programmable doué d’ubiquité
– Spécialiser chacun dans ce qu’il fait le mieux : • L’être humain : comprendre, expliquer, décider, imaginer, concevoir • L’automate : classer, trier, mémoriser, calculer • La matière grise (logiciel) et le silicium (matériel) : progrès rapides de l’informatique – Un changement analogue à ceux apportés par l’écriture, l’imprimerie, les chemins de fer, l’électricité • Questions de savoir-faire et de savoir-vivre : – Relations entre langage conceptuel et langage naturel – Communiquer via l’informatique (messagerie, Intranet) – « Conduite du changement » et « changement de la conduite »
Apports et faiblesse de l’expression « système d’information »
• Introduite en 1972 par Jacques Mélèse sous l’influence de Herbert Simon • Entend corriger la superposition d’applications non coordonnées • … mais aujourd’hui les trois systèmes s’interpénètrent
2000’s : « Géologie du SI »
III – Repères sociologiques
valeur
Cycle de vie de l ’entreprise
Organisateurs, rationalisation Financiers, rentabilisation Fusions etc.
Prédateurs, destruction Pionniers, innovation temps
Les quatre parties prenantes de la décision
PDG ; relation avec les actionnaires, banquiers, administration, gouvernement ; médias, communication Politique Métiers Administration Informatique Stratèges (directeurs, décideurs) ; experts (concepteurs métier) ; organisateurs (managers) ; utilisateurs finals DG ; contrôle de gestion ; direction financière ; direction de l’organisation Maîtrise d’œuvre; dimensionnement des ressources ; architecture, choix des solutions ; expertise technique ; relations avec les fournisseurs ; exploitation
Sociologie des dirigeants
• En France les dirigeants ne sont pas des ingénieurs – Bien sûr, il y a des exceptions...
• Ils n’ont jamais mis les mains sur un clavier – Ceux qui sont en place aujourd’hui ne le feront jamais • Se font parfois une « grande idée » sur le « système d’information » – Volontarisme = velléité – Toute réalisation est mesquine, comparée au rêve • Mépris de la technique, surestimation du médiatique
Sociologie des métiers
• Détenteurs du savoir professionnel de l ’entreprise, mais...
• 1) Problème intellectuel – Emboîtage de divers niveaux d’expertise – Difficulté à « réaliser » • Exemple : le workflow – Difficulté à modéliser, à prioriser • 2) Problème d’organisation – Crainte envers la transparence – Crainte envers les changements d’organisation, la suppression des niveaux hiérarchiques intermédiaires – Relation entre expertise métier et décision SI
La tache aveugle de l’intellect
Concret = individuel Abstrait = conceptuel Concret = habituel Abstrait = nouveau
Tache aveugle
Le SI, révélateur des valeurs
• L’entreprise est-elle « nombriliste » ou « tirée par le marché » ?
– Quelle est la structure déterminante : l ’organisation ou le marché (clients, concurrents, fournisseurs?) • Des révélateurs – Identifiants • Numéro de la ligne dans les télécoms ; numéro de compte dans les banques. Identifie-t-on les clients ou les services ? – Référentiels • une nomenclature de produits par usine ? Un SI par filiale ? Découpage des missions, des régions selon l’équilibre de pouvoir ?
– Interopérabilité • Sait-on interfacer le SI avec ceux des partenaires ?
Sociologie de l’administration
• Compression des coûts – « enveloppe informatique » • Simplicité de l’organisation – refus de la distinction MOA/MOE – « tout ça c ’est de l ’informatique » • Confusion entre données comptables et indicateurs économiques – Le tableau de bord du Président est-il de bonne qualité ?
Le compromis managérial
• L’entreprise dévorée par son organisation interne – Une image : la cervelle aspirée par l’intestin – Le dirigeant à la recherche de la paix dans l’équipe de direction • Pérennité des découpages inadéquats • Le « pragmatisme » : – Ce n’est pas le recours méthodique à l’expérimentation… – … mais le fait de prendre son parti de l’organisation existante • Impossibilité pratique de l’administration des données – Effets pervers de la comptabilité analytique – Corruption et honnêteté • Refus de l’innovation – Une image : avancer à reculons, sous la pression d’une main posée sur la poitrine • Les chutes sont nombreuses – Le massacre des innocents
Sociologie de l’informatique
• Culture du traitement des données • Méconnaissance de l’informatique de communication – « Ce n’est pas de l’informatique » – Difficultés de communication • Mauvaise maîtrise du langage connoté • La séduction des fournisseurs – Préférence pour les solutions chères
Crise de l’entreprise
• procédures longues et incertaines • délais et budgets incontrôlables et dépassés • négociations qui ne convergent pas • remise en question des décisions • désaveu des mandataires • ajournement des rendez-vous • absentéisme en réunion • réunions sans ordre du jour, durée limite ni compte rendu • pannes sans responsable identifié • messagerie et courrier infidèles • documentation non à jour • « certification qualité » substituant une sécurité illusoire à la vigilance et à l'esprit de responsabilité • informatique désordonnée (ressaisies manuelles, ergonomie pénible, référentiels redondants)
Crise du langage
• Jargon – Acronymes, anglicismes, noms propres, vocabulaire technique – Fréquence des mots « sérieux », « professionnalisme », « méthodologie », « rigueur » – Termes abstraits : « méthodologie » pour méthode, « problématique » pour problème, « technologie » pour technique, « générique » pour général, « spécifique » pour particulier ou pour local, « commanditaire » pour donneur d'ordres, « ordonnancement » pour mise en ordre – Abus du superlatif : le manque de contraste interdit la perception des priorités.
– Expressions qui s’autodétruisent : « principes concrets », « schéma exhaustif », « synthèse détaillée », « pilotage stratégique » • Crise des concepts – On dit « organisation » mais on dessine un organigramme ; « processus » sans définir livrables, acteurs ni délais ; « qualité » (« méthodologie de démarche qualité ») sans indiquer de critères.
– Confusions : données comptables / indicateurs économiques ; gestion / expertise ; observation / explication ; donnée statistique / donnée individuelle.
Approche médicale
• L’entreprise est sujette à des pathologies – C’est un être vivant : il est né et il mourra – Ne pas la supposer a priori rationnelle ni efficace – Dimensions de la pathologie : • sociologique • philosophique (refus de la modélisation) • intellectuelle (difficulté de la modélisation) • Aide au diagnostic : une check-list • L’approche médicale est longue, lente et discrète – Démarche sociologique et philosophique : • Modification indirecte des comportements (école de Palo Alto) • Un « compliment » à éviter : « Ce que vous faites est stratégique pour l’entreprise » – Démarche intellectuelle : • Professionnaliser la maîtrise d’ouvrage
Sortir de la crise
• Priorité : restaurer le processus de décision – Le langage suivra – Il revient aux dirigeants de structurer l’architecture de l’entreprise: processus de production et de gestion, outils d’observation et interprétation, élaboration de la stratégie • Comment faire ?
– Progresser par petits pas (méthode de Palo Alto) – Tableaux de bord sélectifs et clairs pour les dirigeants – Comités équilibrés • l’expertise technique s’exprime, la légitimité politique décide – Qualité sémantique du système d’information • administration des données, référentiels – Équilibre entre maîtrise d'ouvrage et maîtrise d'œuvre du système d'information
Un système d’information mûr
• Pour y arriver – Surmonter les obstacles, modifier l’organisation, faire accepter de nouvelles valeurs et de nouvelles compétences • Qu’est-ce qu’un SI mûr ?
– Référentiel en bon état, processus bien outillés, composants modulaires et évolutifs, interopérabilité avec les partenaires, processus administratifs équipés de workflows, divers médias bien articulés, SIAD en place, Intranet et Internet entrés dans les mœurs, SI urbanisé, • Utilisateurs satisfaits – « on sait ce qu’on a à faire », « la boîte marche bien », « c’est bien organisé », « on est bien dirigés » etc.
• Que reste-t-il à faire ?
– Utiliser le SI : former les nouveaux venus, animer les « bonnes pratiques », administrer les processus – Maintien à l’état de l’art : veille technologique, veille SI – Gérer les frontières : • « spécifique » / « progiciel » • interne / externe – Adapter le SI aux évolutions de l’entreprise – Minimiser le coût du SI