L`art moderne

Download Report

Transcript L`art moderne

Quatuor à cordes n°2 opus 10
-
Les Demoiselles d’Avignon
Dissolution de l’espace tonal jusqu’à l’atonalité
Recours à l’atonalité dans le dernier mouvement
L’homogénéité de l’espace est rendue par le timbre (4 instruments à cordes)
Dissolution de l’espace : aspect
bidimentionnel
Influence de l’art primitif – statuette
ibérique
L’espace est rendu par la couleur
-
Structure : 4 mouvements
-
Structure : on peut scinder le tableau
en trois zones verticales de largeur
croissante
1.
2.
Mässig (modéré)
Sehr Rasch (scherzo)
1.
La partie gauche, plus traditionnelle
dans la représentation avec la femme
debout
3.
Litaneï : Langsam (Prière : lent) sur un
texte de Stefan George. Sorte de
transition. Armure encore présente
2.
Les deux femmes présentées
spectateur sur un fond gris-blanc
4.
Entrückung : sehr langsam (Retraite : très 3.
lent) sur un poème de Stefan George
« Je sens l’air d’une autre planète »
La partie droite cubiste
au
3.2. La fragmentation : Deuxième phase (analytique et atonale)
« Picasso étudie un objet comme un chirurgien dissèque un cadavre ».
Arianna Stassinopoulos-Huffington
Cubisme analytique
Atonalité
Erwartung opus 17
(1909)
Sur un texte de Marie Pappenheim
Le Portrait d’Ambroise Vollard,
1910
Huile sur toile, 93 x 66 cm
Moscou, Musée Pouchkine
a. Chez Picasso : Le Portrait d’Ambroise Vollard
« La réalité objective, il faut la plier soigneusement comme on plie
un drap et l’enfermer au placard ».
Pablo Picasso
•
•
Picasso s’oppose à la réalité objective : il veut montrer une image aussi
complète que possible des objets, du sujet
Il faut comprendre l’objet de l’intérieur : destruction et fragmentation
•
Le détail n’est pas reconnaissable mais les fragmentations juxtaposées
donnent naissance à une forme globale compréhensible (vision
syncrétique)
« Picasso, par exemple, pouvait détruire toute ressemblance analytique du
détail formel abstrait, tout en obtenant par l’imbroglio de ses portraits une
bonne ressemblance syncrétique ».
Anton Ehrenzweig, L’ordre caché de l’art
•
Il utilise la couleur – palette réduite au camaïeu de brun, gris et ocre –
pour évoquer l’espace
•
Dans Le Portrait d’Ambroise Vollard, il détruit le sujet de son oeuvre
b. Chez Schönberg : Erwartung opus 17 (1909)
« Dans Erwartung, Schoenberg se défait de tous les moyens censés
traditionnellement rendre la musique intelligible ; répétitions des thèmes,
intégrité et transformation discursive de motifs clairement reconnaissables,
structure basée sur un cadre tonal ».
Charles Rosen, Schoenberg
• Œuvre composée fiévreusement entre le 27 août et le 12 septembre
1909 sur un texte de Maria Pappenheim, dermatologue et poétesse
• Cette dernière s’appuie sur les caractéristiques physiques décrites
dans Etudes sur l’hystérie (1895) de Freud et Breuer pour écrire
son texte
• Son texte est donc haché et entrecoupé de ponctuation pour
traduire l’amnésie, l’hallucination, la perturbation de la vision et du
langage
• Schönberg brouille les repères de l’auditeur : il détruit le système
tonal : c’est une œuvre atonale
• Il a recours au verbe pour donner une structure à la musique
• La fragmentation du texte : fragmentation des motifs = angoisse
• Eclatement de l’orchestre : chaque phrase musicale reçoit une
nouvelle couleur grâce à une combinaison orchestrale nouvelle
• La voix traduit cette fragmentation : parlé et chanté
• Il fragmente la tonalité en utilisant toutes les notes de la gamme
chromatique dans un ordre indifférencié : tous les sons ont la même
importance
• Il n’y a plus de thème mais de courts motifs
QuickTi me™ et un
décompresseur TIFF (non compressé)
sont requis pour visionner cette i mage.
Exemple d’un motif de 9 sons sur le texte « Maintenant, je m’enlace à toi dans la mort »
Erwartung opus 17
3.3. La synthèse : Troisième
dodécaphonique sérielle)
phase
(synthétique
et
a. Chez Picasso : le cubisme synthétique
Violon et feuille de
musique, 1912
Papiers collés sur carton,
78 x 65 cm
Paris, Musée Picasso
La guitare, 1913
Papiers collés, fusain, encre
et craie sur papier bleu,
monté sur toile, 66,4 x 49,6
cm
New York, MoMA
Joueur de cartes, 1913-1914
Huile sur toile, 108 x 89,5 cm
New York, MoMA
• Le cubisme synthétique regroupe à la fois les papiers collés, les
constructions et la peinture imitant les papiers collés (Joueur de
cartes)
• Les papiers collés synthétisent les fragments du cubisme
analytique : plans différenciés
• Il emploie des objets hétéroclites
• Il intègre des lettres ou des mots : volonté de communication
avec le récepteur = rendre intelligible l’œuvre d’art. C’est le cas
de Joueur de cartes
b. Chez Schönberg : la méthode dodécaphonique sérielle
« La composition
l’intelligibilité ».
avec
douze
sons
n’a
d’autres
buts
que
Arnold Schönberg
Präludium Suite opus 25
•
La série-mère peut être transformée de trois façons :
1.
2.
3.
La rétrograde (on prend la série-mère en sens inverse)
L’inversion (les mêmes intervalles mais à l’envers)
La rétrograde de l’inversion
Série-mère Suite opus 25 et sa rétrograde
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 / 1 2
3 4 5 6 7
8 9 10 11 12
mi fa sol do#/fa#/ré#/sol#/ré/si do la sib/ sib la do si ré sol#/ré#/fa#/do#/sol/fa mi
Inversion et rétrograde de l’inversion Suite opus 25
1 2 3 4 5 6 7 8
mi/ ré#/do#/sol/ ré fa do f a#
9 10 11 12 / 1 2
la sol# si/sib/ sib si
3
4 5
6 7
sol#/ la / fa#/ do fa
8 9 10 11 12
ré sol do#/ ré#/ mi
•
Comme Picasso, Schönberg s’aperçoit qu’il peut organiser les éléments
fragmentés en séries transformables et juxtaposables selon différents
plans
•
Chaque nouvelle série obtenue peut être jouée sous forme de mélodie
(horizontale) ou d’accords (verticale)
•
La série peut être divisée en plusieurs fragments : c’est le cas ici : la
série-mère est divisé en trois fragments de quatre notes et le dernier
fragment est le monogramme récurrent de BACH
H C A B
QuickTime™ et un
décompresseur TIFF (non compressé)
sont requis pour visionner cette image.
1
mi
2
fa
3
sol
4
rŽb
5
solb
6
7
8
mib lab rŽ
9
si
10
do
11
la
12
sib
• La Suite opus 25 est la première œuvre dodécaphonique
sérielle
• La méthode est une synthèse qui permet d’être plus intelligible :
elle organise les fragments de l’écriture atonale
• La série remplace le thème
• L’opus 25 est une synthèse entre art moderne et tradition :
hommage à Bach, utilisation de formes baroques (suite de
danses : Präludium, Gavotte, Menuet/trio et Gigue) = rupture et
continuité
c. Conclusion
Avec les élèves de collège dans le cadre de l’HDA :
• Il semble intéressant de montrer en quoi le cubisme analytique de
Picasso et l’atonalité de Schönberg relèvent du principe de
fragmentation tout en soulignant le rejet et la destruction des
langages traditionnels
• Faire pratiquer le rapprochement entre cubisme synthétique et
dodécaphonisme sériel : construction de papiers collés, d’une
série et travail sur ses transformations possibles.. Voire même
faire des papiers collés avec des séries dodécaphoniques !
4. Un exemple de personnage commun aux deux artistes : Pierrot
Rote Messe extrait du Pierrot
Lunaire opus 21 (pièce n°11)
composée entre le 22 et 24 avril
1912 sur des poèmes d’Albert
Giraud
Trois musiciens, 1921
Huile sur toile, 200,7 x 222,9 cm
New York, The Metropolitan Museum of Art
4.1.
Support
littéraire
et
références
a. Texte de la Rote Messe - composition du Pierrot lunaire
Zu grausem Abendmahle (A)
Vers 1 : A la cruelle cène (A)
Beim Blendeglanz des Goldes (B)
Vers 2 : Sous l’éclat des ors aveuglants (B)
Beim Flackerschein der Kerzen (C)
Vers 3 : A la lueur vacillante des cierges (C)
Nacht dem Altar – Pierrot ! (D)
Vers 4 : S’approche de l’autel – Pierrot ! (D)
Die Hand, die gottweihte (E)
Vers 5 : La main, consacrée par Dieu (E)
Zerreist die Priesterkleider (F)
Vers 6 : Déchire les habits sacerdotaux (F)
Zu grausem Abendmahle (A)
Vers 7 : A la cruelle cène (A)
Beim Blende glanz des Goldes (B)
Vers 8 : Sous l’éclat des ors aveuglants (B)
Mit segnender Gebärde (G)
Vers 9 : Avec un geste de bénédiction (G)
Zeigt er den bangen Seelen (H)
Vers 10 : Il montre aux âmes apeurées (H)
Die triefend rote Hostie (I)
Vers 11 : L’hostie rouge ruisselante (I)
Sein Herz – in blugten Fingern (J)
Vers 12 : Son cœur – entre ses doigts
ensanglantés (J)
Zu grausem Abendmahle (A)
Vers 13 : A la cruelle cène (A)
• Le Pierrot lunaire est un cycle de 21 mélodrames sur des poèmes
d’Albert Giraud, traduits par Otto Erich Hartleben (1892). Il se divise en
trois parties : 3 x 7 mélodrames
• Cette œuvre a été composée à Berlin, elle a été commandée par la
chanteuse Albertine Zehme
• Dans le cycle I, Pierrot s’interroge sur son art. Dans le cycle II, il est
accusé du vol d’un rubis, vol qu’il n’a pas commis. Le cycle III est celui
d’un retour à la maison, un retour à la paix
• Le texte est symbolique : non seulement par le choix du personnage
mais également par l’histoire. Pierrot n’a pas commis de vol mais il est
accusé d’être poète ou musicien comme Schönberg à l’époque
• Emploi du sprechgesang : style vocal oscillant entre le parlé et le
chanté, mis au point par Schönberg pour la première fois dans
Pierrot lunaire
b. Choix des personnages : entre ici-bas et au-delà
• Pierrot est un personnage de la Commedia dell’Arte : à la fois pendant
d’Arlequin, serviteur, bouffon
• Avec Jean Gaspard Deburau (comédien, 1796-1846), il devient plus
poétique, éternellement optimiste mais toujours déçu = clown triste
• Dans Trois musiciens : Pierrot est accompagné d’Arlequin et d’un
moine
• Dans les deux œuvres, on trouve la présence de l’au-delà :
- Arlequin et Pierrot représentent le monde fragile de la mortalité
- Le moine et la Rote Messe : personnage religieux et scène sacrée
L’au-delà figure l’éternel dans le monde changeant de l’illusion ≠
aux personnages d’ici-bas
4.2. Mise en scène des personnages
Trois musiciens
1.
Les personnages sont des 1.
allégories
et
jouent
d’un
instrument
Le moine : Max Jacob (partition)
Arlequin : Picasso (guitare)
2.
Pierrot : Apollinaire (clarinette)
2. Ils sont tous masqués
Rote Messe
Climax du 2e cycle du Pierrot
lunaire : Pierrot apparaît
comme le célébrant d’un culte
qui lui arrache le cœur (vers
12)
Pierrot est travesti – joué par
une femme et vient d’être
« démasqué »
• L’utilisation du masque et du travestissement sont des aspects
dérivés du double – en tant que portrait de l’artiste
• Schönberg et Picasso se mettent en scène dans ces œuvres –
comme nous l’avons vu précédemment, le texte du Pierrot lunaire
évoque la situation de rejet que vit Schönberg à l’époque.
4.3. Fragmentation
Trois musiciens
Rote Messe
1.
Tableau cubiste de la période 1. Œuvre atonale
synthétique : imitation de papier
collés en peinture
2.
Picasso évite la perspective en 2. Dissolution complète du système tonal
fragmentant les personnages (le
chien
par
exemple)
:
superposition de plans
3.
Espace en deux dimensions
4.
Côtés
primitifs
:
espace
bidimensionnel, contrastes de
couleurs, présence du chien
fragmenté dont le corps n’est pas
dans le prolongement de la tête et
du cou
3. Côté primitifs : atonalité comme une
sorte de primitivisme du son (sans
hiérarchie), sprechgesang angoissant et
percussif
4.4. Couleurs / timbres
a. Dans Rote Messe
• Le contraste des couleurs se traduit par :
-
Le choix de l’instrumentation : couleur sombre du trio clarinettebasse/alto/violoncelle ≠ clarté du piccolo dont la première note sur le
mot « cierge » rappelle sa luminosité
-
Opposition des registres : grave (ici-bas) / aigu (au-delà)
-
Dans Rote Messe, le quintette complet apparaît à plusieurs reprises
mais toujours dans une configuration différente ce qui ajoute de
nouvelles couleurs sonores
• Le piano effectue un rythme irrégulier et répétitif de l’aigu vers
le grave : ce côté instable et résonnant (grâce à la pédale)
évoque le temps de l’Au-delà, de la « lumière vacillante des
cierges » (vers 3)
• Figuralisme : utilisation de trilles au piano (= alternance très
rapide entre deux notes) pour figurer les tremblements de
« Pierrot victime »
• Figuralisme : déchirement de la voix (glissando sur un triton
"diabolus in musica") sur le mot « déchire » (= zerreist) du vers
« Déchire les habits sacerdotaux »
b. Chez Picasso
• Le peintre n’utilise aucune source de lumière qui pourrait créer
des ombres comme dans la réalité
• Les couleurs primaires vives s’opposent aux couleurs sombres
et profondes (moine, chien, arrière-plan)
• Conséquence : les zones vives telles « l’éclat des ors
aveuglants » (vers 2) attirent l’œil du spectateur car elles sont
mises en lumière par la prépondérance des plans sombres qui
les entourent – comme le piccolo dans la Rote Messe
4.2. Autres propositions autour de Pierrot
Rideau du ballet « Parade », 1917
Détrempe sur tissu, 10,6 x 17,25m
Paris, Musée National d’Art Moderne
Livret de Jean Cocteau ; peinture,
décors, costumes de Picasso ; ballet
russes de Diaghilev, chorégraphe
Massine
Musique : Erik Satie
Pablo Picasso
Pierrot et danseuse, 1900
Huile sur toile, 38 x 46 cm
Collection particulière
Claude Debussy
Mélodie française, Pierrot, début 1882,
poème de Théodore de Banville (sur l’air
« Au clair de la lune » )