pour une reforme du financement la securite sociale

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Transcript pour une reforme du financement la securite sociale

Retraites, le rendezvous de 2010…
Henri Sterdyniak
Economiste à l’OFCE
[email protected]




La crise de 2008-2009 est venu aggraver brutalement les difficultés
de financement du système de retraite, tout en retardant les
perspectives d’une forte hausse de l’emploi des seniors.
Le patronat a demandé un nouveau rendez-vous en 2010. Le
président de la république a promis que : « Tout serait mis sur la
table ».
Certains proposent des remèdes miracles, des réformes structurelles
qui assureraient l’équilibre automatique du système des retraites.
Faut-il changer la stratégie adoptée en 2003 ? Faut-il une nouvelle
réforme en 2010 ? Faut-il changer l’architecture du système ?
.
2

Le système de retraite français est menacé de déséquilibres en
raison d’un facteur structurel : l’allongement de la durée de vie, d’un
facteur de moyen terme : l’arrivée à la retraite des générations de
baby-boomers, nés après la guerre. S‘y ajoute la crise financière des
années 2008-09.

L’espérance de vie à la naissance était de 68 ans pour les hommes
et 73,5 ans pour les femmes en 1970 ; elle est passé à 77 ans pour
les hommes, 84 ans pour les femmes en 2007 et devrait se situer à
84 ans pour les hommes et 89 ans pour les femmes en 2050.

La hausse est d’environ 2 ans tous les 10 ans.

La France a maintenu un taux de fertilité satisfaisant (1,98 enfant par
femme), le plus élevé d’Europe.
3
Espérance de vie à 0/60 ans
Hommes
Femmes
1970
68,4/16,5
73,6/20,8
2000
75,3 / 20,4
82,8 / 25,6
2007
77,0 /22,0
84,0 /27,0
2050
83,8 /26
89,0 /30
4

De 1946 à 1950, le nombre de naissance par an a atteint 840 000
contre 600 000 de 1936 à 1945 : nous avions relativement peu de
retraités, nous allons maintenant en avoir beaucoup.

Actuellement, 800 000 jeunes arrivent chaque année sur le marché
du travail ; jusqu’en 2005, 550 000 personnes atteignaient 60 ans. Il y
avait une hausse spontanée de la population active potentielle de
l’ordre de 250 000 personnes par an.

A partir de 2006, les départs sont de l’ordre de 825 000. Ceci au
deux conséquences, l’alourdissement progressif du nombre des
personnes de plus de 60 ans , donc des dépenses de retraites et la
stagnation de la croissance de la population active potentielle, qui
peut être considéré comme une bonne nouvelle (il est plus facile de
faire baisser le chômage) ou comme une mauvaise nouvelle (la
croissance va être ralentie).
5
Nombre de naissances (milliers par an)
1926-1930
752
1931-1935
694
1936-1940
611
1941-1945
598
1946-1950
863
1951-1955
815
6
Ratio +de 60 ans/20-59 ans
1990
35,7
2000
38,3
2005
38,3
2010
42,8
2020
52,3
2030
60,9
2040
66,1
2050
69,0
7
Que faire ? trois stratégies extrêmes :

La première consisterait à augmenter les taux de cotisation retraite
d’environ 9 points, soit 0,2 point par an (16 points, soit 0,35 point par an,
pour le total : maladie +retraite+famille+chômage).

Chaque année sur 1,5% de hausse de salaire, 0,25% seraient consacrées
à la hausse des cotisations retraites et 0,15% à la santé.

La part des retraites dans le PIB passerait de 13% à 17,5%. Il faudrait 6,5
point de dépenses publiques en plus dans le PIB (soit 4,5 points pour la
retraite, 3 pour la santé, 0,5 point de moins pour le chômage, 0,5 point de
moins pour la famille).

Problèmes : le patronat et le gouvernement refusent toute hausse des
prélèvements obligatoires, et surtout des cotisations employeurs ; les
syndicats refusent que les salariés soient les seuls à payer. Peut-on
trouver d’autres ressources ?
8
Que faire ? trois stratégies extrêmes :

La deuxième consisterait à accepter une baisse du niveau des retraites
de l’ordre de 28%. Le ratio retraite moyenne/salaire moyen passerait de 72
à 51%.

Les retraités seraient paupérisés.

Ceci permettrait de développer des fonds de pensions.

Projet libéral : minimum vieillesse + faibles pensions publiques + fonds de
pension (pour les cadres et les salariés des grandes entreprises).

Problèmes : rupture au sein du salariat ; la crise a décrédibilisé les fonds
de pension ; l’épargne des ménages doit augmenter (ce qui nuit à la
croissance) ; phase transitoire pénible.
9
Que faire ? Trois stratégies extrêmes :

La troisième consisterait à accepter un allongement de la durée des carrières. Le ratio
retraités/actifs est actuellement de 52,5%. Tendanciellement, il passerait à 83% en 2050. Pour
le stabiliser à 52,5%, il faudrait reculer de 6 ans l’âge moyen de fin d’activité, soit de 59 à 65 ans
; il est actuellement de 64 ans en Suède.

Ceci peut s’effectuer de façon autoritaire (recul de l’âge ouvrant droit à la retraite, suppression
des dispositifs de pré-retraites) de sorte que les seniors seraient contraints d’accepter des
emplois au rabais et des baisses de salaires, social-libérale (le niveau de la retraite dépendra
de l’âge de départ, de sorte que les salariés pourront choisir une faible retraite à 60 ans ou une
retraite satisfaisante à 65 ans) ou social-démocrate (mobilisation sociale, aménagement des
carrières et des conditions de travail).

Pour : ceci correspond à l’allongement de la durée de vie ; faut-il consacrer celui-ci uniquement
à la retraite ?

Contre : Faut-il l’emploi à tout prix ? Un partie des emplois marchands sont peu utiles. La
mécanisation détruit les emplois non-qualifiés. Les emplois qualifiés sont victimes
d’obsolesence. Réduction de la période de retraite heureuse et active.

C’est la solution retenue en 2003. La question des retraites devient la question de l’emploi des
seniors, donc celle de l’emploi.

Il n’y a que des solutions pénibles.
10
La position du patronat :

Le patronat préconise de stabiliser les taux de cotisation, d’augmenter
rapidement l’âge ouvrant le droit à la retraite, d’ajuster sur le niveau des
retraites, d’inciter les salariés à avoir recours à la capitalisation.

Mais les entreprises ne veulent pas conserver les salariés après 55 ans ;
la crise rend impossible une hausse rapide de l’emploi des seniors ; la
rentabilité de la capitalisation n’est pas garantie ; une partie des vieux
tombera dans la pauvreté, ceux qui seront contraints de partir tôt et ceux
qui n’auront pu épargner.
11
La position des syndicats ?

Les syndicats devraient se battre pour garantir le niveau de vie relatif des
retraités. Mais certains acceptent de signer des accords dans les régimes
complémentaires qui induisent des baisses continuelles des taux de
remplacement.

Il faut augmenter le taux d’emploi des seniors et reculer l’âge moyen de départ
à la retraite C’est un choix douloureux. mais il faut aussi différencier les
conditions de départ à la retraite selon la pénibilité du travail et lier
l’allongement de la durée de cotisations à la situation de l’emploi des 55/65
ans.

Il faut fournir de nouvelles ressources à la Sécurité sociale. Il faut éviter les
niches sociales (intéressement, participation, perco), mais ne pas trop
compter sur les recettes miracles. Il faut revendiquer des hausses de
cotisations employeurs mais accepter des hausses de cotisations salariés.

Il faudrait garantir la pérennité du système des retraites par répartition ; le
gouvernement et les partenaires sociaux devraient annoncent clairement que
c’est par la hausse des cotisations que le système sera si besoin équilibré,
une fois effectués les efforts nécessaires en matière de recul de l’âge de fin
d’activité, à taux de remplacement globalement fixe.
12
La réforme de 2003

La réforme de 2003 avait réaffirmé que le socle du système français
demeurait le système par répartition. Elle avait décidé que le système des
retraites serait équilibré à l’avenir par l’allongement progressif de la durée de
cotisations requise pour avoir droit à une retraite à temps plein.

Mais le taux d’emploi des seniors n’a guère progressé ; la crise de 2007-2009
a décrédibilisé le scénario de retour rapide au plein emploi

L’inquiétude persiste sur la soutenabilité financière du système et sur le
niveau de retraite dont bénéficieront les jeunes générations.

Le système est compliqué et peu transparent de sorte que son équité est
souvent mis en doute, qu’il s’agisse des disparités entre le public et le privé ou
des disparités entre générations.
13
2008, les rendez-vous manqués

L’allongement de la durée requise de cotisation de 40 à 41 ans, au rythme
d’un trimestre par an, a été lancé en 2009, malgré la dégradation de la
situation économique et le peu de succès de la mobilisation en faveur de
l’emploi des seniors.

Depuis 2003, les négociations sur la prise en compte de la pénibilité n’ont
pas abouti. De fait, le Medef a bloqué la négociation et le gouvernement l’a
laissé faire.

La conférence tripartie qui pouvait décider d’une revalorisation des
pensions du régime général a été purement formelle. Le gouvernement a
imposé, sans débats, l’absence de revalorisation.

Aucune garantie n’a été donné sur l’évolution des taux de remplacement.

Aussi, les syndicats n’ont pu s’engager dans la stratégie de mobilisation
sociale pour l’emploi des seniors.
14
2008, les rendez-vous manqués

Dans les régimes complémentaires, le patronat a abordé la négociation de
façon offensive en refusant toute hausse de cotisations et en menaçant de
remettre en cause la retraite à 60 ans. Certains syndicats (CFDT, CFTC,
FO et CGC) ont accepté de signer un accord qui prolonge la baisse des
taux de remplacement en 2009-2010 et qui demande aux pouvoirs publics
de fixer un rendez-vous en 2010 pour « réexaminer l’ensemble des
paramètres qui visent à pérenniser les régimes de retraite par répartition :
il s’agit principalement de l’articulation entre l’âge de la retraite, la durée
d’activité et de cotisation, le montant des cotisations et le niveau des
pensions ».

Le pilotage du système laisse à désirer : des décisions ont été annoncées
par le Président de la République (revalorisation du minimum vieillesse et
des pensions de réversion) ou prises au Parlement (comme le report à 70
ans de l’âge de la mise à la retraite d’office, la libéralisation complète du
cumul emploi/retraite, la mise sous condition de ressources du minimum
contributif) sans consultation des partenaires sociaux.
15
Faut-il un rendez-vous en 2010 ?

Le rendez-vous de 2010 n’était pas prévu par la loi de 2003, qui avait fixé des
rendez-vous en 2008 et 2012.

Il a été réclamé par le Medef (qui veut obtenir un report de l’âge de la retraite à 62
ans). Mais peut-on remettre en cause les principes de la réforme de 2003 ?

Le gouvernement tire prétexte du déficit de la CNAV pour prétendre qu’il est urgent
d’introduire de nouvelles réformes. Mais ce déficit est largement dû à la crise. En
2010, celle-ci a couté environ 12 milliards aux régimes de retraites et 9 milliards à
l’Unedic, soit 21 milliards.

Certains économistes, et la Commission de Bruxelles, prétendent qu’il faut rassurer
les marchés sur la soutenabilité des finances publiques et donc annoncer de fortes
réductions des dépenses de santé et de retraites. Les classe dominantes utilisent la
menace des marchés pour prétendre qu’il faut une réforme importante et rapide.

Faut réduire les dépenses sociales pour combler les 8 % du PIB du déficit public
actuel ? Ce serait peu pertinent du point de vue social (faut-il accroitre les inégalités
sociales dont le gonflement est une des causes de la crise ?) comme économique
(comment serait comblé le déficit de la demande ainsi provoqué ? par une nouvelle
bulle financière ?). Faut-il après la crise causée par le dérèglement des marchés
financiers demander aux ménages d’y avoir recours pour financer leur retraite ?
16
Solde des systèmes de retraites et de chômage
2008
2009
prév.
2010
prév.
2009
effet
crise
2010
effet
crise
2010
Solde
structurel
-4,6
-5,6
-8,2
-10,7
-3,0
-4,9
-5,8
Agirc
1,0
0,3
-1,2
-1,7
-0,8
-1,3
-0,4
Arrco
2,0
1,4
-0,4
-2,1
-1,7
-2,8
0,7
Unedic
3,5
4,5
-1,3
-4,6
-5,4
-9,0
4,4
FRR
1,8
1,8
1,5
1,5
-0,2
-0,2
1,7
FSV
0,2
0,8
-3,0
-4,5
-2,0
-3,3
-1,2
FFIPSA
-1,1
-1,2
-1,4
-1,4
-1,4
R. ad. FP
1,6
1,7
1,7
1,7
1,7
Total
4,4
3,7
-12,3
-21,8
Ep-retraite
6,7
6,9
7,1
7,3
Milliards
d’euros
2007
Cnav
13,1
21,5
-0,3
7,3
17
Faut-il un rendez-vous en 2010 ?

Des rendez-vous trop fréquents, comme la remise en cause de la réforme
de 2003, aboutissent à semer l’inquiétude et à diminuer la fiabilité du
système.

La conjoncture est peu propice à prendre des mesures fortes pour l’emploi
des seniors.

Les transferts de ressources en provenance de l’Unedic sont impossibles.

Ce n’est pas le moment de peser sur la consommation en augmentant les
taux de cotisation retraites.

Le gouvernement se refuse à envisager des hausses de cotisations.
L’équilibre risque de se faire par baisse des pensions.

Le report de l’âge de la retraite de 60 à 62 ans comme le réclame le
MEDEF risque d’augmenter le chômage des 60/62 ans (et surtout des
jeunes). Beaucoup des 60/62 ans se retrouveront chômeurs de longue
durée ou à l’ASS. Estimation : Retraités = - 1 million (17 M d’euros) ;
Chômeurs : +0,8 (13 M d’euros) ; Emplois =+0,2 (3 M de cotisations
sociales) =gain 7 Milliards d’euros.
18
Faut-il un rendez-vous en 2010 ?

La CGT propose « une maison commune des retraites » pour unifier le
système par le haut : retraite à 60 ans, les 42 ans étant comptés à partir
de 18 ans, indexation des salaires portés au compte et des pensions sur
les salaires, taux de remplacement de 75%. Mais comment financer un
système si généreux ?

La CFDT demande une remise à plat, mais pour aller où ? « Il faut être
lucide : le système créé en 1945 n'est plus adapté. Un rafistolage n'est
plus possible. Il faut une réforme d'ampleur du système par répartition
pour faire face au vieillissement de la population, à des carrières plus
erratiques et à l'enjeu de la pénibilité du travail. Les retraites doivent mieux
coller aux parcours de vie des assurés, avec plus de choix personnels et
plus de lisibilité car le système actuel est trop complexe ».

Dans ses vœux, le président a parlé de « consolider le système des
retraites et assurer sa pérennité financière ».
19
Le point de vue de la CFDT (projet de résolution)






Refus de la baisse du niveau des pensions. Hausse de la durée requise de
cotisation ou des taux de cotisation en faisant financer par l’impôt la solidarité, la
bosse des baby-boomers et la crise.
Partage équilibré des gains d’espérance de vie entre durée de cotisation requise et
espérance de vie.
Permettre à chaque salarié de construire sa retraite. Pour étendre les possibilités de
choix des salariés et mieux prendre en compte leur parcours professionnel dans le
calcul des pensions, la CFDT propose que ce système soit plus lisible et assure à
chacun la reconnaissance des spécificités de son parcours dans un cadre collectif.
Mais ce projet est très flou. Comment s’exprimerait cette reconnaissance ?
La CFDT revendique l’extension des possibilités de choix des personnes.
Choix du moment du départ à la retraite, sans condition d’âge, sans décote, et à taux
plein, dès lors que le nombre de trimestres requis est atteint. Mais le texte ne dit
rien sur les cas où la durée n’est pas atteinte.
L’épargne retraite. Il faut généraliser l’accès à une épargne retraite collective, avec
abondement de l’entreprise, pour l’ensemble des salariés quels que soient leur
statut, la taille de leur entreprise et leur secteur d’activité. Faut encourager la
capitalisation qui prive de ressources la répartition ?
Les pouvoirs publics doivent garantir rapidement une augmentation conséquente
des ressources allouées au fonds de réserve des retraites. Les retraites sont
garanties par le maintien du système par répartition; pas par le FRR.
20
Des sondages…

1.
2.
3.
4.
5.

1.
2.
3.
4.
Selon le sondage CNAV, octobre 2009 :
confiance sur le niveau de sa retraite : 34 /64
Solidité du système : 58/39
Réforme/conserver/abandonner : 64/23/7
Cotiser plus 47 / 48 ; travailler plus tard 42/52 ; avoir une retraite plus
faible 18/80.
Age souhaité : 57 ans . Age contraint 64 ans. Age acceptable 62 ans
Selon le sondage JDD-IFOP, janvier 2010
Il y a eu de bonnes réformes 19 ; des mauvaises 40 ; pas de réformes
40.
confiance sur le niveau de sa retraite : 24 /76
Age contraint 64,7 ans ; âge acceptable 62.
Cotiser davantage 41 ; travailler plus longtemps 34 ; partir tôt avec une
faible retraite 23
21
L’emploi des seniors en France

L’âge moyen de cessation d’activité des salariés du secteur privé est de
l’ordre de 58,5 ans. C’est le plus bas en Europe. Beaucoup de seniors
connaissent une période de préretraite ou de chômage avant de liquider
leurs droits à la retraite. A 58 ans, le taux d’emploi n’est plus que de 50%.

Le taux d’activité des 55-59 ans est faible (en 2007, 58,5 % contre 72 % aux
Etats-Unis et au Royaume-Uni, 75 % en Allemagne et 85% en Suède), celui
des 60-65 ans est extrêmement bas (16,5 % au lieu de 36% en Allemagne,
46% en Grande-Bretagne, 53% % aux Etats-Unis et 65% en Suède,).
Existe-t-il vraiment des différences d’employabilité aussi grandes entre les
actifs français et américains ?

Il semble normal que l’augmentation de la durée de vie se traduise par des
augmentations proportionnelles des périodes d’activité et de retraite, et non
par le seul allongement de la retraite. Le maintien du ratio retraite/activité
suppose un partage des gains d’espérance de vie entre 2/3 d’activité et 1/3
de retraite. La durée de vie s’allonge de 1,8 ans tous les 10 ans, ceci justifie
un allongement de la période d’activité de 1 an tous les 10 ans.
22
Age moyen de sortie du marché du travail en 2008
Irlande
64,1
Suède
63,8
Pays-Bas
63,2
Royaume-Uni
63,1
Espagne
62,6
Allemagne
61,7
Finlande
61,6
Belgique
61,6
UE15
61,5
Danemark
61,3
Autriche
60,9
Italie
60,8
France
59,3
Source : Eurostat.
23
Taux d’emploi
Taux d’emploi Taux d’emploi
15-64 ans 2008 55-64 ans 2008
Evolution
2008-1997
Suède
74,3
70,1
+7,5
Japon
70,7
66,3
+3,1
Etats-Unis
70,9
62,1
+5,0
Royaume-Uni
71,5
58,0
+9,7
Danemark
78,1
57,0
+5,3
Finlande
71,1
56,5
+20,9
Allemagne
70,7
53,8
+15,7
Pays-Bas
77,2
53,0
+21,0
Espagne
64,3
45,6
+11,5
Autriche
72,1
41,0
+12,7
France
64,9
38,3
+9,3
Belgique
62,4
34,5
+12,4
Italie
58,7
34,4
+6,5
24
L’emploi des seniors en France

L’allongement de la durée de cotisation requise est préférable au report de l’âge
minimum de la retraite : ceux qui ont commencé à travailler jeune et pour
lesquels la durée d’activité est très longue et l’espérance de vie plus courte,
peuvent partir avant ceux qui ont débuté leur carrière tardivement et qui ont une
espérance de vie plus importante.

La loi de 2003 prévoit que la durée de cotisations requise pour obtenir une
pension à taux plein augmentera de 40 à 41 ans entre 2009 et 2012, puis à 42
ans à partir de 2016 ou 2020. En 2020, la durée de cotisation requise sera de
42 ans : ceux qui ont commencé à travailler à 18 ans pourront partir à 60 ans ;
ceux qui ont commencé à 23 ans devront attendre 65 ans.

L’allongement de la durée de cotisation requise n’a de sens que si,
effectivement, la durée d’activité s’allonge. Sinon, de nombreux seniors se
retrouveraient sans emploi et devraient arbitrer entre une retraite précoce avec
un bas taux de remplacement ou une longue période de pauvreté avec comme
seule ressource une allocation de chômeur en fin de droits, avant d’avoir droit à
une retraite à taux plein.

Réussir à allonger la durée d’activité suppose trois préalables : le retour à la
proximité du plein emploi, un changement de mentalité des entreprises pour
qu’elles acceptent d’employer les seniors, la prise en compte de la pénibilité de
certaines activités.
25
L’évolution de l’emploi

En 2003, il semblait que la France pouvait contrebalancer le choc « papy
boom » par un double choc emploi : retour au plein emploi ; hausse de
l’emploi des 55/60 ans, puis des 60/62 ans (d’ici 2020) puis des 62/65 ans.

Le taux de chômage a commencé à diminuer, de 8,8 % en décembre 2003
à 7,2 % en mars 2008, mais la baisse a été stoppée début 2008 et le taux
de chômage atteint 9,1% à la mi-2009 ; il devrait atteindre 10 % fin 2009 ;
10,5% fin 2010, soit très proche du maximum de 1996.

De début 2003 à 2009-T3, le taux d’emploi des 55-65 ans a légèrement
progressé en France : en taux sous-jacent, de 39,3% à 43,7% pour les
hommes, de 32,9% à 38,6% pour les femmes. Sa hausse provient en partie
de la répercussion de la progression de l’activité féminine avant 55 ans.

De 2003 à 2009, le taux d’emploi des hommes de 25-50 ans a baissé de 0,7
point ; celui des 55-65 ans a augmenté de 0,9 point. Le taux d’emploi des
femmes de 25-50 ans a augmenté de 4 points ; celui des 55-65 ans a
augmenté de 3,1 points.

L’emploi des 55-65 ans a jusqu’à présent relativement bien résisté à la crise.
26
Evolution récente du marché du travail
De 08-T1 à 09-T3
Taux d’emploi
Taux de chômage
Taux d’activité
15-24 ans
-1,8
+2,4
+0,6
25-49 ans
-1,1
+1,5
+0,4
55-64 ans
+0,9
+0,9
+1,8
27
Les pré-retraites

Au cours des dernières années les possibilités de départ en préretraites ont
été fortement réduites. Ne subsistent plus que trois dispositifs : l’ASFNE, le
CATS, le CAATA.

L’introduction d’un dispositif de départ anticipé pour carrières longues a joué
en sens inverse depuis 2004 en permettant à ceux qui sont entrés dans la
vie active avant 16 ans de partir avant 60 ans. Cette mesure qui vise une
plus grande équité sociale (ceux qui sont entrés précocement dans l’activité
ont souvent occupé des emplois peu qualifiés et plus pénibles que la
moyenne ; leur espérance de vie est moins longue) a contribué à repousser
la remontée des taux d’emploi des seniors. Entre 2004 et 2008, elle a permis
560 000 départs anticipés en retraite, pour un coût, pour la CNAV, de l’ordre
de 2,4 milliards d’euros en 2008.

La Dispense de Recherche d’Emploi était ouverte à partir de 57,5 ans ; cet
âge est passé à 58 en 2009, devrait passer à 59 ans en 2010, à 60 ans en
2011. La DRE devrait être supprimée en 2012.
28
Les pré-retraites

L’Allocation Equivalente Retraite (AER), permet aux chômeurs qui justifient
de 160 trimestres de cotisations retraite, de percevoir une allocation sous
condition de ressource de 968 € par mois (au lieu de 454 € à l’ASS). Le
gouvernement veut la supprimer. Elle a été maintenu pour 2009 et 2010.

Le taux de préretraités, y compris les chômeurs âgés indemnisés et
dispensés de recherche d’emploi, a peu régressé parmi la population des
55-64 ans, depuis le début des années 1990.

Contrairement aux épisodes précédents, la crise ne s’est pas traduite par
une forte hausse des pré-retraites.
29
Bénéficiaires de dispositifs de retraites anticipées
Fin 2000
Fin 2006
Fin 2008
Préretraites
publiques
159
78
56
DRE
349
417
350
–
211
252
508
706
658
Retraite anticipée
Total
30
L’emploi des seniors

1.
2.


La question de l’emploi des seniors se pose de façon différente à court et à moyen
terme. A long terme, la hausse de l’emploi des seniors est une ardente nécessité,
dans la mesure où la hausse des cotisations est refusée. Deux stratégies sont
possibles.
La première consisterait à supprimer les possibilités de départ en préretraites et à
retarder l’âge ouvrant droit à la retraite et compter sur des mécanismes de marché (la
baisse du salaire relatif) pour assurer un niveau d’emploi satisfaisant des seniors. Elle
ferait porter le poids de l’ajustement sur les seniors, qui seraient contraints d’accepter
de fortes baisses de salaires pour conserver ou retrouver un emploi.
La seconde serait de tenter de modifier d’abord la situation du marché du travail, puis
les comportements des entreprises, pour assurer un niveau satisfaisant d’offres
d’emploi d’actifs seniors avant de limiter les possibilités de départ précoce.
Jusqu’à présent, ni les entreprises ni les syndicats ne se sont vraiment mobilisés pour
allonger la durée de carrière dans les entreprises. Ceci peut s’expliquer par le manque
de vigueur des politiques publiques menées au cours des dernières années en
matière d’incitation à l’emploi des seniors ; par les réticences des syndicats à s’inscrire
dans une stratégie qu’ils ont jusqu’à présent refusée et que les travailleurs
n’apprécient guère, par le refus des entreprises de conserver des travailleurs qu’elles
jugent moins productifs et trop bien payés.
Ceci s’explique aussi par le persistance du chômage de masse : les entreprises
souhaitent embaucher des jeunes, moins coûteux et plus adaptables. Il est difficile de
lancer la mobilisation pour l’emploi des seniors, en période de baisse des effectifs. Il
faut aussi embaucher des femmes, des jeunes, des handicapés, des enfants
d’immigrés.
31
La mobilisation pour l’emploi des seniors




Même en situation de pénurie de main-d’œuvre, les employeurs pourraient
refuser d’embaucher ou de conserver des travailleurs seniors, en préférant
délocaliser leur production ou en faisant appel à des travailleurs immigrés.
Aussi, l’allongement des carrières ne peut-il être envisagé sans un profond
changement des mentalités et des pratiques des entreprises : la mention
d’un âge limite dans une offre d’emploi (y compris publique) doit être
interdite.
Chaque type de carrière doit être repensé pour permettre, soit par la
formation permanente, soit par la reconversion, une poursuite de l’activité
jusqu’à 60, 62 ou 65 ans.
Il faut que les entreprises acceptent d’embaucher des salariés de plus de 55
ans.
Le gouvernement a demandé aux entreprises de pratiquer des politiques de
maintien en activité des seniors. Des accords doivent être signés au niveau
des branches et des entreprises avant Janvier 2010. Sinon, les entreprises
devront payer une cotisation retraite supplémentaire de 1%.
32
La mobilisation pour l’emploi des seniors

En 2008, la loi a reporté à 70 ans le droit de l’entreprise de mettre en
retraite un salarié.

Les préretraites d’entreprises sont taxées à 50% ; les indemnités de mise
à la retraite sont taxées à 50% à partir de 2009.

Un plan national d’action concerté pour l’emploi des seniors a été lancé.
Il comportait la création d’un CDD pour seniors (de plus de 57 ans) mais
ce dispositif n’a connu aucun succès ; la suppression de la contribution
Delalande ; la possibilité de cumul emploi/retraite et prévoyait des
campagnes d’informations visant à encourager l’emploi après 55 ans

Il faut renforcer ce dispositif et surtout les syndicats doivent s’emparer du
sujet, réclamer aux entreprises de maintenir les travailleurs en emploi
jusqu’à 60, 62 ou 65 ans.
33
La mobilisation pour l’emploi des seniors

Faut-il instaurer des réductions de cotisations employeurs pour les salariés audelà d’un certain âge ? Le risque est d’aggraver encore les difficultés de
financement de la Sécurité sociale et d’induire d’importants effets d’aubaine : il
serait choquant de faire payer moins de cotisations à tous les salariés de plus de
55 ans qui sont souvent les mieux payés de l’entreprise.

Faut-il remettre en cause les règles de hausses des salaires à l’ancienneté ?
Faut-il des dégradations ? Faut-il demander aux entreprises d’imaginer une
seconde carrière pour les plus de 55 ans : des postes adaptés pour eux, avec
moins de responsabilités, de pénibilité, de salaire ? C’est difficile
psychologiquement pour les actifs concernés et économiquement pour les
entreprises qui auraient de nombreux seniors de 55-65 ans à employer ainsi. Le
jeu en vaut-il la chandelle ? La forte hausse du nombre de travailleurs seniors
risque de se heurter au faible nombre de postes à faibles tensions et pénibilités
qui pourraient leur convenir.

Faut-il créer des emplois-vieux au SMIC pour les plus de 55 ans que les
entreprises refusent d’employer ? Ce n’est qu’une solution de denier recours

Faut-il supprimer les âges de 60 et de 65 ans comme âge ouvrant le droit à la
retraite et garantissant le droit à une retraite au taux plein ? Certains pensent
que l’existence de ces âges-butoirs se répercute sur les possibilités de formation
et de carrière des actifs dès 55 (ou même 50 ans). C’est la demande du Medef.
Ce serait contraire à l’esprit de la réforme de 2003.
34
La mobilisation pour l’emploi

L’exemple des pays scandinaves (en particulier la Finlande et la Suède)
montre que l’allongement de la durée de carrière passe par une mobilisation
au niveau des entreprises, le patronat et les syndicats se mettant d’accord
sur une stratégie d’aménagement des carrières, des conditions de travail et
de formation, permettant à toutes les carrières de se prolonger jusqu’à 62 ou
65 ans.

Toutefois, la politique d’incitation au travail risque de faire des perdants
parmi les travailleurs seniors qui ne réussissent pas à se maintenir en
emploi. Il faut donc tenir compte de la disparité des travailleurs en termes
d’usure des capacités de travail et d’espérance de vie. Un compromis social
fructueux est nécessaire pour que les syndicats s’impliquent dans ce
processus.

Il devrait comporter une différentiation des conditions de départ à la retraite
selon les professions, un accord sur des bonifications de cotisations pour les
emplois pénibles et des garanties sur l’évolution du niveau des retraites.

Les entreprises et les salariés doivent comprendre qu’ils ont le choix entre
deux scénarios : soit réaliser cette mobilisation pour l’emploi des seniors,
soit accepter une forte hausse des cotisations.
35
L’emploi et la crise…




Cependant, cette mobilisation ne doit pas s’effectuer au détriment de l’emploi des
jeunes. Elle ne peut s’effectuer qu’en période de nette croissance de l’emploi, quand
l’économie s’approche du plein emploi. Si, à moyen terme, l’emploi des jeunes et des
vieux est complémentaire, ce n’est pas le cas à court terme. C’est toute la difficulté de
la situation actuelle.
Faut-il licencier des jeunes adultes chargés de famille ou des personnes proches de
la retraite ?
Il faut, à court terme, maintenir des mesures de pré-retraites pour les salariés seniors
licenciés dans des secteurs et des régions en difficulté, qui n’ont guère d’espoir de
retrouver un emploi, sachant que ce n’est pas une stratégie porteuse. La stratégie
porteuse, c’est l’emploi jusqu’à 60 ans pour tous, jusqu’à 62 ou 65 pour certains mais
elle doit s’accompagner d’une politique active de ré-industrialisation, de soutien aux
entreprises en difficulté, de maintien de l’employabilité par la formation et
l’amélioration des conditions de travail.
La réussite de la réforme de 2003 supposait que, de 2004 à 2014, la France obtienne
un taux de croissance de l’ordre de 2,4 % (soit 1,6 % correspondant aux gains de
productivité du travail ; 0,5 % pour réduire le taux de chômage ; 0,4 % pour accroître
les taux d’activité des seniors ; – 0,1 % correspondant à la baisse de la population
active tendancielle). On en est loin….0,9% depuis 2004 Il faudrait 5 années à 3,8%...
36
L’emploi et la crise…





La réforme de 2003 effectue un certain choix social entre durée de la période de
travail et durée de la retraite. Ce choix est-il conforme au souhait des actifs ?
D’un côté, l’exclusion précoce des travailleurs seniors les écarte très vite de la vie
active, alors que certains pourraient et préfèreraient travailler. Elle se répercute sur les
possibilités de formation et de carrière des actifs à partir de 50 ans. Elle devient
absurde compte tenu de l’allongement de la durée de vie et de la durée des études.
De l’autre, jouir d’une longue période sans travail, en bonne santé, permet aux jeunes
retraités de s’investir dans de nouvelles activités sociales, culturelles, de loisirs... Dans
cette optique, la retraite à 60 ans est une utilisation des gains de productivité, comme
la semaine de 35 heures.
Les travailleurs souhaitent-ils revenir sur cette utilisation? Actuellement, les sondages
montrent que non. Compte tenu de la pénibilité de leur travail, des risques de se
retrouver sans emploi, de nombreux salariés de 55 à 60 ans attendent avec
impatience la retraite et refusent de voir prolonger de 3 à 5 ans leur période d’activité.
Faut-il faire des efforts importants pour prolonger les carrières après 60 ans en
situation de sous-emploi, quand il y a pénurie d’emplois non-qualifiés, quand les
entreprises refusent d’embaucher les plus de 55 ans ? La solution choisie est celle
que les salariés rejettent le plus nettement. Changer le travail, retourner au plein
emploi, constituent deux préalables à l’allongement de la durée de la carrière. Celle-ci
doit s’inscrire dans une stratégie de long terme.
Les syndicats sont dans une situation délicate. Il leur faut s’inscrire dans une stratégie
qu’ils ont jusqu’à présent refuser, que les travailleurs n’apprécient guère, mais qui est
inévitable.
37
La prise en compte de la pénibilité du travail

La loi de 2003 prévoyait des négociations des partenaires sociaux pour
tenir compte de la situation des travailleurs affectés à des travaux
pénibles, ces négociations devant aboutir dans un délai de 3 ans. La
négociation, engagée en 2004, n’a pas abouti malgré 17 réunions entre le
patronat et les organisations syndicales.

Le Medef refuse le recours aux dispositifs généraux, mais propose
d’aménager les fins de carrière. Il propose un passage au mi-temps pour
les salariés ayant exercé un métier pénible : le dispositif serait réservé aux
salariés âgés de plus de 58 ans, avec 40 ans d’activité, exposés pendant
30 ans à des facteurs de pénibilité, présentant des traces durables,
identifiables et irréversibles sur leur santé résultant des travaux pénibles
qu’ils auraient exercés. Il propose d’utiliser une partie des primes
compensatrices à la pénibilité pour mettre sur pied un dispositif d’épargnetemps pouvant être utilisé pour un départ précoce à la retraite.

Les syndicats proposent un dispositif général permettant le départ
anticipé de catégories de salariés ayant été les plus exposés à la
pénibilité. Cependant, il est difficile d’établir une liste d’activités pénibles ;
la durée d’exposition justifiant un traitement particulier est relativement
arbitraire.
38
La prise en compte de la pénibilité du travail

Les périodes de travaux pénibles pourraient donner droit à des trimestres
validés supplémentaires ; ceux-ci seraient payés par les entreprises des
secteurs concernés (et une contribution nationale). Ce dispositif
permettrait d’aller vers des conditions de retraites différentes selon la
profession et tenant compte de l’espérance de vie. Il faudrait une réflexion
globale sur les métiers qui ne peuvent se prolonger au-delà de 50 ou 55
ans. Il faut choisir entre deux formules : demander aux entreprises
d’organiser leur reconversion à 50 ans ou maintenir le principe d’une
retraite précoce.

Faut-il refuser de lier pénibilité et retraite sous prétexte que la pénibilité
doit être réduite plutôt que compensée ? Je ne crois pas. Cette position
est un alibi commode pour ne rien faire. Il faut que le système des retraites
tienne compte des différences d’espérance de vie et des différences dans
les capacités à prolonger son activité après 60 ans.

La négociation ayant échouée, le gouvernement aurait du intervenir. On
n’imagine mal en effet que l’allongement de la durée d’activité requise à 42
ans soit mise en place sans la contrepartie d’une garantie pour les
travailleurs soumis à des conditions de travail difficiles.
39
Le libre choix…

Une stratégie alternative est celle du « libre choix du départ à la retraite ». L’allongement
de la carrière passerait par un accroissement des possibilités de choix ouverts aux
salariés. La réforme de 2003 a rendu plus flexibles les conditions de départ à la retraite.

D’ici 2020, la durée de cotisation requise pour le taux plein passera à 42 ans ; la décote
par année manquante passera de 10 à 5 % par an ; une surcote de 5% a été instaurée
pour les années cotisées au-delà de 60 ans et de la durée requise.

Les actifs qui auront commencé à travailler à 18 ans pourront partir à 60 ans ; ceux qui
auront commencé entre 18 à 23 ans seront fortement incités à attendre 42 années de
cotisations ; ceux qui ont commencé plus tard à attendre 65 ans. En 2020, peu d’actifs
pourront bénéficier de la surcote, car il sera difficile d’avoir commencé à travailler tôt et
d’aller au-delà des 42 ans.

En 2008, 7% des pensions sont liquidées avec décote ; 9,6% sont liquidées avec surcote
(gain mensuel moyen : 36 euros pour 6 trimestres).

Un salarié a un salaire de 100, soit un salaire net de 85, un coût salarial de 140. Il a un
droit à la retraite de 60. Une année supplémentaire lui rapporte 25 et rapporte 115 à la SS
(s’il s’agit bien d’un emploi supplémentaire). La surcote lui rapporte 60*5%*23=69. Tout le
monde est gagnant : lui 94 ; la SS : 46.

En situation de chômage, il prend la place d’un jeune qui aurait gagné 67 (coût salarial 94,
salaire net 57). La SS doit payer 30 d’allocation chômage au jeune. Le bilan est : senior :
25+69 :94 ; entreprise : -47 ; jeune :-27 ; SS : 49-69=-20.
40
Le libre choix…

Le système n’est pas parfait. La pension dépend de la durée de carrière, ce qui a
l’avantage d’inciter à la poursuite de l’activité, en favorisant ceux qui ont commencé à
travailler tôt, donc sans donner d’avantages injustifiées aux cadres. Par contre, la
pénalisation des carrières courtes est arbitraire et peu justifiée.

Le nouveau barème fait en grande partie disparaître la notion de « retraite à taux
plein », puisqu’il devient possible d’avoir plus que le taux plein et que la pénalité pour
carrière courte est réduite. Mais le barème est complexe, d’autant plus qu’il faut tenir
compte du barème spécifique des régimes complémentaires.

La loi de 2003 a ouvert la possibilité de valider trois années d’études universitaires,
ce qui est contradictoire avec l’objectif d’allongement de la durée d’activité des cadres.
La loi prévoyait que ce rachat sera actuariellement neutre mais valider des années
manquantes auprès de la CNAV permet d’obtenir le taux plein pour le Régime
général, mais aussi pour les régimes complémentaires. C’est donc particulièrement
rentable pour les cadres… et coûteux pour les régimes complémentaires. Il faudrait
revoir la coordination entre CNAV et régimes complémentaires et, à terme, supprimer
la possibilité de rachat.

Il faudrait valider pour la retraite les périodes de chômage des jeunes n’ayant encore
pas travaillé.
41
Le cumul emploi-retraite

Faut-il faciliter le cumul emploi-retraite? Les salariés pourraient connaître une
seconde carrière de 60 à 65 ans, en combinant par exemple 50 % d’une pension de
retraite et un revenu d’activité, qui pourrait être relativement bas. Mais peut-on exclure
les seniors des entreprises, avec un très bas niveau de retraite, en les exhortant à
trouver un « petit boulot » ou à créer une entreprise ? Est-ce l’âge idéal pour changer
d’activité, apprendre un nouveau métier ? Il y aura demain un grand nombre de 60-65
ans. Comment retrouveraient-ils tous un emploi dans des conditions satisfaisantes ?
Que feraient les seniors après 65 ans ?

Le risque de cette solution est d’exonérer les entreprises de leur responsabilité vis-àvis du vieillissement de la main-d’œuvre. La mesure ne résout pas en elle-même la
question du financement.

Depuis 2009, le cumul emploi-retraite est possible sans restriction. Le cumul est à
peu près équivalent à la surcote. Un salarié de 62 ans qui continue à travailler a le
choix entre prendre sa retraite (gain 70 immédiat) ou bénéficier d’une surcote (gain :
70*5%*23=80,5 étalé sur 23 ans).

Autoriser le cumul emploi-retraite sans changer d’emploi risque d’être couteux pour la
Sécurité sociale. Cela n’a de sens que si l’emploi est supplémentaire, mais pas si le
senior prend la place d’un jeune car, dans ce cas, le système de protection social doit
payer des prestations chômage aux jeunes. L’entreprise peut-elle maintenir en emploi
des cumulards en licenciant des plus jeunes. N’aurait-il pas fallu attendre le retour au
plein emploi ?
42
Le niveau des retraites

Actuellement, la retraite nette moyenne représente environ 72 % du salaire
net moyen. Le niveau de vie des retraités est légèrement inférieur à celui
des actifs, en termes de revenu par unité de consommation, de l’ordre de
90%. Ce chiffre passe à 95% si on intègre le revenu implicite que représente
le loyer du logement que l’on possède et occupe et à 98% si on intègre les
revenus financiers.

En 2007, le taux de pauvreté des plus de 65 ans est de 10,3% contre 13,4%
pour l’ensemble de la population. Le taux de pauvreté est de 10,1% pour les
retraités,10,5% pour les personnes en emploi, 46,3% pour les chômeurs.

De 1996 à 2005, le niveau de vie des plus de 65 ans n’a augmenté que de
0,8% par an contre 1,3% pour l’ensemble de la population. Globalement, la
situation relative des plus de 60 ans apparaît encore satisfaisante. Mais, les
réformes en cours risquent d’amener une détérioration progressive de leur
situation relative.
43
Taux de pauvreté en 2007 (seuil à 60 %)
0-15 ans
17,8 %
15-25 ans
22,1 %
25-55 ans
11,7 %
55-65 ans
9,4 %
+ de 65 ans
10,3 %
Total
13,4 %
44
Le niveau des retraites

La réforme Balladur de 1993 provoque à terme une baisse de l’ordre de
28,5% du niveau des retraites du régime général.

Cette baisse est obtenue par l’allongement à 25 ans du nombre d’années
prises en compte dans le calcul du salaire de référence et par l’indexation
sur les prix des salaires pris en compte (et non plus sur les salaires). Le taux
de remplacement brut, au moment du départ, baisse ainsi progressivement
de 50% à 41,5%.

Depuis 1987, les retraites ne sont donc plus indexées sur les salaires, mais
sur les prix, de sorte que, pour chaque individu, son niveau de vie relatif tend
à diminuer au cours de sa retraite, d’environ 25% pendant ses 20 années de
retraite.

Les retraités, jadis exonérés de cotisations sociales, ont subi la création puis
la montée en puissance de la CSG.

En sens inverse, joue l’effet d’amélioration des droits : les nouveaux retraités
ont plus cotisé que les anciens, en particulier les femmes. Les couples de
retraités touchent de plus en plus souvent deux retraites.
45
Le niveau des retraites

Le pouvoir d’achat du minimum vieillesse n’a pas été revalorisé de 1999 à 2007. En
1984, il représentait 52% du revenu médian des ménages ; en 2007, il n’est plus qu’à
42,5%. Cette stagnation explique la diminution du nombre de titulaires du minimum
vieillesse (ils ne sont plus que 609 000).

Augmenter le minimum vieillesse de 25%, comme l’a promis le gouvernement (ce qui
aurait un coût de 2,5 milliards) le ramènerait au niveau relatif de 1984 si
l’augmentation était immédiate. Une augmentation étalée sur 5 ans n’entrainerait
qu’une hausse relative de 15%. De plus, la mesure est limitée aux personnes seules ;
les couples n’en bénéficient pas.

Depuis la réforme de 2003, les retraites ont été gérées avec une extrême rigueur. Les
retraités ont perdu 0,7 % de pouvoir d’achat (retraites non-imposables du privé), 1,2%
(retraites imposables du privé) ou 1,9 % (retraites imposables de la fonction publique),
soit de l’ordre de 8 % par rapport aux salaires.

Durant ces dernières années, la différence du niveau des pensions entre les
nouveaux retraités et les retraités décédés entraîne une hausse de 1,2% par an du
niveau moyen des retraites ; les présents-présents perdent 0,2% par an de pouvoir
d’achat. La retraite moyenne augmente d’environ 1% par an en pouvoir d’achat tandis
que le salaire par tête augmente, en moyenne, à 1,3% l’an.

Les retraités sont toujours menacés par une hausse de la CSG, qui est de 6,6% pour
les retraités imposables contre 7,5% pour les salariés. Les retraites non-imposables
ne paient pas de CSG, mais elles pourraient se la voir progressivement appliquer. Ce
serait injuste car les bas-salaires bénéficient eux de la PPE ou du RSA qui compense
46
en quasi-totalité la CSG.
Le minimum vieillesse (personne seule)
1984
1990
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
Pouvoir d’achat
Base 100 en
1998
97,3
97,1
100
101,5
100,8
101,4
101,6
101,1
100,6
100,8
101,0
101,3
102,6
106,2
% du revenu
médian
52,0
48,7
47,0
45,9
45,1
44,8
44,8
44,0
43,3
42,5
42,9
44,2
47
Evolution des retraites depuis 2003
Bilan en
pouvoir
d’achat*
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
Indice des prix
2,1
2,1
1,8
1,4
1,5
2,8
0,4
Plafond de la SS
3,4
1,8
1,6
2,9
3,6
3,4
3,1
7,5
Salaire de référence RC
1,6
2,3
2,4
2,9
3,7
3,4
1,8
5,8
Minimum vieillesse
1,5
1,7
2,0
1,8
1,8
4,1
3,9
4,7
Minimum contributif
1,5
4,2
2,6
4,6
1,8
4,4
1,2
8,2
Régime général
1,5
1,7
2,0
1,8
1,8
1,4
1,2
–1,2
Pensions RC
1,6
1,7
2,0
1,7
1,7
1,5
1,3
–1,4
Fonction publique
0,8
1,7
2,0
1,8
1,8
1,4
1,2
–1,9
*En janvier 2005, la CSG sur les retraites est passée de 6,2 à 6,6%, ce qui a induit
une baisse de 0,5 % du pouvoir d’achat des retraités imposables.
48
Les régimes complémentaires

Les régimes complémentaires (Agirc, Arrco) sont gérés par les partenaires sociaux.
Les cotisations permettent d’acheter des points (à un certain prix d’achat, nommé
aussi salaire de référence) ; ces points donnent droit à une certaine pension (c’est
la valeur du point). Le rapport entre la valeur du point et le prix d’achat est le taux
de rendement du système.

Depuis 1996, la valeur du point (donc les pensions) n’évolue que comme les prix,
tandis que selon les périodes, le prix d’achat du point évolue comme les salaires ou
comme les prix.

L’accord de 2003 comportait une baisse du taux de rendement jusqu’en 2008,
puisque le prix d’achat du point augmente comme les salaires et la valeur du point
n’est indexée que sur les prix. Il a été prolongé en 2008 pour 2 ans. Le taux de
rendement affiché est ainsi passé de 11,5% en 1995 à 8,30 % en 2009.

Les taux de remplacement net, mesurés au moment du départ à la retraite, ont
déjà fortement diminué de 1990 à 2008, passant de 91% à 76% pour les noncadres ; de 76 à 60% pour les cadres, sous l’effet de la Réforme Balladur, des
accords dans les régimes complémentaires, enfin de la montée en puissance de la
CSG.

A l’avenir, tout dépendra, surtout pour les cadres, des négociations dans les
régimes complémentaires. Pour les non-cadres, le taux de remplacement pourrait
se situer en 2020 entre 72% (si les négociations stabilisent le taux de rendement
des régimes complémentaires) et 68% (si la dérive continue) ; pour les cadres entre
58 et 53%. Cette baisse serait évidemment du pain bénit pour les fonds de retraite
par capitalisation.
49
Evolution des taux de remplacement
Génération
Départ
Carrière
Salaire brut
Net
1930
1990
40a
100
78,7
Non-cadre
1948
2008
40a
100
78,5
CNAV
ARRCO
AGIRC
47,7
25,2
44,0
20,0
41,5
19,6/16,4
47,7
25,2
53,2
44
20
39,9
41,5
19,6/16,4
39,6/33,8
Pension brute
Pension nette
Taux net de
remplacement
72,9
71,6
64,0
59,3
61,1/57,9
56,6/53,6
126,1
123,6
103,9
95,9
100,7/91,7
93,0/84,7
91,0
75,5
72,0/68,3
75,8
60,3
58,4/53,3
1958
2020
42a
100
78,5
1930
1990
40 a
200
163,1
Cadre 2P
1948
2008
40a
200
159
1958
2020
42 a
200
159
50
Public, privé : quelle convergence ?

Jusqu’à la réforme de 2003, les retraités continuaient à bénéficier de la
hausse de la valeur du point fonction publique ainsi que des augmentations
résultant des réformes statutaires. Mais, dans ces dix dernières années, le
point fonction publique baissait en pouvoir d’achat. Depuis 2003, les retraites
de la FP progressent comme les prix.

Les fonctionnaires continueront à bénéficier du calcul de la retraite sur le
salaire de fin de carrière : 75% du dernier salaire (hors primes). Mais les
salaires ne progressent pas en fin de carrière et le point de la fonction
publique baisse en pouvoir d’achat.

Le taux de cotisation n’a pas été aligné sur celui du privé (7,85 % au lieu de
10,55 % sous-plafond et 8,6 % au-dessus du plafond), l’Etat payant lui 60 %
au lieu de 15,6% pour les employeurs du privé.

Un régime complémentaire sur les primes et rémunérations annexes des
fonctionnaires (plafonnés à 20% du TI) pour 10 % de cotisations.

En 2008, le taux de remplacement du salaire est dans le public de 83 à 61 %
dans le privé de 76 à 60 % (qui passeront à 72-58 ou 68-53 en 2020).


Mais le privé a souvent des régimes surcomplémentaires : Pere, Perco,
retraites chapeaux.
Les divergences ne sont guère socialement soutenables, mais les
fonctionnaires ne peuvent être alignés sans précaution sur le privé.
51
Public, privé : quelle convergence ?

En pouvoir d’achat, le point de la fonction publique a perdu 14,4% de 1985 à
2008.

Calculer la retraite sur les 25 dernières années ferait perdre 16% de retraite
aux fonctionnaires (si le calcul se fait sur les points) ou 9,8% (si le calcul se
fait sur les salaires revalorisés sur les prix).

Calculer la retraite sur les 10 dernières années leur ferait perdre 2,2% (calcul
sur les points) ou gagner 1,8% (calcul sur les salaires revalorisés sur les prix).

Mais, il faudrait remettre au cause la distinction salaire de base/prime et la
non-indexation du point de la Fonction publique.

La fonction publique s’exempte des règles imposées au secteur privé
(contrats à durée déterminée, âge limite de 65 ans, pas de cotisations sur les
primes). C’est intolérable.

Mais, il faut maintenir la spécificité du Statut.
52
Taux de cotisations public/privé
Fonction publique
Privé, sous plafond :
RG
ARRCO
AGFF
Privé, Sur plafond
RG
AGIRC
AGFF
Salariés
Employeurs
7,85
60 (?)
10,55
6,75
3,0
0,8
15,6
9,9
4,5
1,2
8,6
0,1
7,6
0,9
15,6
1,6
12,7
1,3
53
Le taux de remplacement des fonctionnaires
C
Traitement
Prime
B
A
100
0
20
40
7,67
9,3
11,67
1
1,20
1,4
Cotisation
7,85
7,85 + 0,5
7,85 + 0,5
Salaire
83,48
101,15
118,58
CSG-CRDS
Cont. solidarité
Retraite sur traitement
Retraite sur prime
75
0
3,15
3,15
CSG-CRDS
5,32
5,55
5,55
Retraite
69,68
72,60
72,60
Taux de remplacement
net
83,3
71,8
61,2
54
Les mécanismes non-contributifs
Le système français comporte de nombreux mécanismes non-contributifs.
1.
La règle des 25 meilleurs années récompense les carrières moyennes
ascendantes et corrige les aléas de carrière.
2.
Les périodes de chômage indemnisés sont prises en compte, ainsi que
les arrêts maladie, maternité, les arrêts pour élevage d’enfants (AVPF),
les périodes de pré-retraites (mais pas le chômage en début de
carrière).
3.
Les avantages familiaux.
4.
Le minimum contributif.
55
Peut-on économiser sur les avantages familiaux ?





Les retraités ayant élevé trois enfants, ou plus, ont droit à une bonification de
10% de leur pension. Cette bonification compense le coût qu’a représenté pour eux
l’élevage de leurs enfants, en termes de carrière ou de possibilité d’épargne. Le
coût des majorations est de 8 milliards (3,3% des retraites).
En 2004, les hommes ayant eu moins de 3 enfants ont une retraite de 1465 euros.
Ceux qui ont eu 3 enfants et plus, de 1358 euros qui passe à 1476 euros. Les
femmes ayant eu moins de 3 enfants ont une retraites de 895 euros. Celles qui ont
eu 3 enfants et plus de 591euros qui passe à 648 euros.
Elle pose de délicates questions d’équité : est-il juste qu’elle soit proportionnelle à la
pension (et non forfaitaire, 90 euros par mois), les cadres touchant ainsi plus que
les ouvriers ? Mais, le système de retraite doit vérifier l’équité horizontale plus que
la redistribution verticale, qui passe par d’autres instruments.
La suppression de cette bonification serait un signal négatif, alors que la France doit
maintenir une fécondité satisfaisante et que ce sont les enfants, et en particulier
ceux des familles nombreuses, qui garantissent la pérennité du système de retraite
par répartition. La bonification pourrait être transformée en allocations familiales,
mais la transition est difficile et longue.
Par contre, cette bonification n’est actuellement pas soumise à l’impôt sur le revenu.
La suppression de cette niche fiscale (qui rapporterait environ 700 millions d’euros)
pourrait être envisagée dans le cadre d’un toilettage des niches fiscales.
56
Peut-on économiser sur les avantages familiaux ?




La majoration de durée d’assurance est de 8 trimestres pour les femmes dans le
régime général, de 4 dans la fonction publique (naissance avant 2004), de 2
(naissance après 2004). Elle se justifie par l’impact des enfants sur la carrière des
femmes, mais est remise en cause par la législation européenne (qui interdit les
différences hommes/femmes).
Statistiquement, il apparaît que les pères de famille ont le même niveau de retraite
que les hommes n’ayant pas élevé d’enfants alors que les mères perdent beaucoup
en droit propre à la retraite (- 34% pour deux enfants, -62% pour 4 enfants) du fait
des arrêts d’activité, des périodes de temps partiel et des limitations de progression
de carrière.
La majoration de durée d’activité corrige en partie ces effets. Mais les pensions des
femmes restent plus basses que celle des hommes (48% en droit propre). Tant que
ces disparités subsistent, il faut maintenir des avantages différenciés en faveur des
mères. Leur suppression serait une injustice : ce sont à la fois le fort taux de
fécondité des femmes et leur fort taux d’emploi qui permettront le financement des
retraites de demain. Ouvrir la possibilité pour le couple de choisir le bénéficiaire est
délicat : à quel moment faire le choix ? Que faire si le couple se sépare ? Il faudrait
faire des projections délicates sur la carrière de chacun, son salaire et sa durée de
vie.
La majoration devrait bénéficier aux femmes dont la carrière a souffert, mais
comment les reconnaître ? Faut-il récompenser celles qui ont travaillé à mi-temps
ou celles qui ont travaillé à plein temps ? Il faudrait sans doute augmenter la retraite
des mères de façon forfaitaire plutôt que majorer la durée d’assurance, mais cela
est difficile juridiquement.
57
Peut-on économiser sur les avantages familiaux ?





Les pensions de réversion font l’objet de fortes critiques de la part de partisans de
l’individualisation des droits sociaux qui dénoncent le cadeau ainsi donné à des femmes qui
n’ont jamais travaillé, financé par les personnes qui travaillent. Elles seraient de plus très
coûteuses : 26 milliards d’euros en 2005 ; soit, 1,5 % du PIB. Les pensions de réversion sont
réservées aux couples mariés ; l’évolution des mœurs les met donc en question. Enfin, le taux
de réversion est de 54% à la CNAV (avec une condition de ressources), de 60% dans les
régimes complémentaires (sans condition de ressources et une condition de non-remariage) et
de 50% dans la fonction publique (sans condition de ressources). Ces disparités ne sont guère
justifiables.
Cependant, ces pensions bénéficient fortement aux femmes et compensent quelque peu les
différences de retraites entre genres dues aux différences de durée de carrière et de niveau de
salaires. Selon la Drees, les pensions de retraites des femmes représentent 62 % de celles des
hommes. La suppression des pensions de réversion amputerait les pensions des femmes de 18
% et les ferait passer à 48% de celles des hommes. De nombreuses femmes passeraient au
minimum vieillesse. La pension de réversion récompense les couples qui se sont inscrits dans le
mariage. Celui-ci permet à la société de faire des économies de prestations d’assistance. La
réversion a trois modalités : éviter la pauvreté chez les veuves, droit de suite de l’assurance
sociale, maintien du pouvoir d’achat.
Malheureusement, la réforme de 2003, faite sans concertation sur cette question, a prévu la
suppression de la limite d’âge pour la pension de réversion (naguère de 55 ans, actuellement de
50 ans), en confondant pension de réversion et pension de veuvage. Une réforme satisfaisante
maintiendrait la limite d’âge pour la réversion, créerait une allocation spécifique de veuvage pour
les décès précoces. La pension de veuvage serait temporaire (2 ans), dépendrait des enfants à
charge et du salaire du défunt (et non de ses droits acquis à pension), avec un plafond et un
plancher. En 2009, la limite d’âge de 55 ans a été rétablie.
Regrettons que la réforme de 2003 n’ait pas été l’occasion d’uniformiser les régimes de
réversion entre public et privé (par exemple, à 60 % de la pension du défunt, avec un plafond
aux deux tiers de la somme des pensions des conjoints.
Le gouvernement avait annoncé que le taux des pensions de réversion du régime général
passerait à 56% en 2009 ; 58% en 2010 et 60 % en 2011. Mais la mesure ne devait pas être
pas rétroactive. En fait, le passage à 60 % en 2010 sera limité aux personnes de plus de 65 ans,
58
dont la retraite totale ne dépasse pas 800 euros.
Retraite moyenne en 2004
Hommes
Femmes
Femmes/Hommes
Droits directs
1550
745
48 %
Droits dérivés
13
229
Accessoires
67
37
Minimum Vieillesse
7
9
1636
1296
Total
62 %
59
Quel financement pour les retraites ?

Le gouvernement et le patronat refusent toute hausse de cotisations
retraites. Cependant, en janvier 2006, les taux de cotisation retraites ont
été augmentées de 0,2 point (0,1 point pour les salariés ; 0,1 pour les
entreprises). Les cotisations AGIRC ont été augmentées de 0,3 point (0,2
point pour les salariés, 0,1 pour les entreprises).

Le gouvernement va faire financer les avantages de retraite liés aux
enfants par la branche famille. Elle paie déjà 60% des 3,75 milliards de
coût de la majoration de 10% ; reste 1,5 milliards. Mais, quid de
l’indexation des allocations familiales et de l’amélioration des modes de
garde ?

Le gouvernement s’est refusé à annoncer une hausse sensible des
cotisations pour garantir l’équilibre du système dans le futur. Peut-on
écarter a priori que les actifs choisissent collectivement de vivre une
longue période de retraite, avec un niveau satisfaisant de retraite, du
moment qu’ils acceptent d’en payer le prix en terme de cotisation ? La
hausse des taux de cotisation retraite pourrait être d’autant mieux
acceptée que l’avenir du système est assuré et que le niveau des retraites
est garanti.
60
Quel financement pour les retraites ?

La retraite, étant un salaire différé dépendant des salaires reçus, doit être
financée par les salaires et non sur une autre assiette. Un système qui
verse des prestations plus élevées aux retraités ayant eu les plus hauts
salaires ne peut pas être financé par l’impôt. Ne peuvent l’être (mais c’est
déjà le cas) les avantages non-contributifs : avantages familiaux, minimum
vieillesse….

Par contre, pour alléger les prélèvements portant sur les revenus
d’activité, il serait nécessaire que progressivement les prestations
universelles (comme les prestations familiales ou l’assurance-maladie)
soient financées par la CSG (mais peut-on faire payer plus les retraités ou
les revenus du capital ?) ou par une contribution assise sur la valeur
ajoutée des entreprises ou par la taxation écologique et non plus par des
cotisations assises sur les seuls revenus d’activité.

La part des salaires (y compris cotisations sociales) dans la VA des
sociétés était de 70,5 % en 1972 ; elle est maintenant de 65 % (soit 4,5
points). La part des dividendes nets est passée de 4 à 7,3 %. La part des
intérêts a baissé de 2,5 points ; celle des impôts a augmenté de 3,7 points.
Il parait difficile d’augmenter fortement la part des salaires. La hausse des
cotisations devra sans doute être payée par les salariés.
61
Quel financement pour les retraites ?

Les exonérations de cotisations sociales et les niches sociales fragilisent le
financement de la Sécurité sociale. Cependant, l’Etat rembourse à la Sécurité
sociale le manque à gagner résultant des exonérations de cotisations sociales (bassalaires, heures supplémentaires, etc.).

L’idéal serait de supprimer les niches sociales de façon à ce que tous les revenus
d’activité payent bien la totalité des cotisations sociales, tous les autres revenus des
ménages payent bien les prélèvements sociaux.

En 2007, le gouvernement a créé une nouvelle niche sociale en exonérant les
heures supplémentaires de cotisations salariés, d’impôt sur le revenu et même de
CSG (coût 4 milliards de cotisations et de CSG et 1,5 milliard d’IR). C’est un
précédent dangereux.

Faire payer des cotisations retraites à l’ensemble des dispositifs d’épargne
entreprise, de participation, d’intéressement, de prévoyance rapporterait 11 milliards
d’euros à la Sécurité Sociale.

Tous les revenus des ménages non salariaux devraient payer la CSG-CRDS et les
prélèvements sociaux, au taux de 12,1%. Y échappent actuellement certaines plusvalues immobilières (celles réalisées sur la résidence principale), certaines plusvalues mobilières (décès ou donation mais elles sont désormais taxées au 1er euro).
Y échappent aussi les loyers fictifs.
62
Taxer les niches sociales à 30 %
Dispositif
Montant en 2009
Existant
Taxation à 30 %
Participation, intéressement
20
1,6+0,4
6
Stock-option
2,5
0,3
0,7
Prévoyance, Perco
17,1
2,1
5,2
Aides aux salariés
5,5
0,0
?
Prime de départ
3,5
0,5
1,1
Total
31,8
4,9
16,0
63
L’équilibre financier est-il assuré ?
Le scénario central du COR (novembre 2007) retient :

Taux de chômage de 4,5% après 2015.

Hausse modérée des taux d’activité (+400 000 actifs), soit 0,5 année de
recul de l’âge moyen de départ du marché du travail. Le COR est plus
prudent que l’INSEE. La population active passe de 28 millions en 2007 à
28,2 en 2050 (contre 28,5 pour l’INSEE).

Forte baisse du ratio retraite/salaire : - 23 % (de 72 à 55%).
Conclusion ; le déficit restant est de 1,7% du PIB. Il serait comblé par les
excédents du régime de chômage (1 point) et une hausse modérée des
cotisations (0,7 point de PIB, soit 1.8 point de taux de cotisation).
 Problèmes : la baisse relative des retraites est très forte ; comment est-elle
obtenue ? le scénario suppose implicitement que la politique d’incitation à
l’emploi des seniors est un semi-échec.
 Les projections d’avril 2010 ne devraient pas être très différentes.
 Les projections de la Commission confirme que la France entend éviter la
hausse des dépenses de retraites par la baisse relative des prestations
64
Projection de la Commission européenne (2008)
En % du PIB
Niveau
2007
Allemagne
Autriche
Belgique
Danemark
Espagne
Finlande
France
Italie
Pays-Bas
Royaume-Uni
Suède
UE15
10,4
12,8
10,0
9,1
8,4
10,0
13,0
14,0
6,6
6,6
9,5
10,2
Effet taux Effet taux
de
de
dépendance couverture
7,3
-1,8
9,0
-3,2
6,6
-0,8
6,0
-4,3
10,3
-1,1
7,7
-3,1
8,0
-2,2
10,0
-3,5
6,1
-1,6
3,2
-1,6
4,6
-0,2
7,1
-1,9
Effet
emploi
Effet taux
de pension
Niveau
2050
-0,8
-0,6
-0,5
-0,2
-1,1
-0,7
-0,5
-1,3
-0,2
-0,3
-0,4
-0,6
-2,2
-3,8
-0,5
-0,8
-1,1
-0,5
-4,0
-4,4
-0,7
0,2
-3,9
-2,1
12,8
13,6
14,7
9,6
15,4
13,3
14,2
14,7
10,2
8,1
9,5
12,6
65
L’équilibre financier est-il assuré ? Un autre scénario

Il faudrait être plus ambitieux en matière d’emploi des seniors, Un scénario
rouge, plus volontariste, aboutit à une population active de 29,8 millions en
2050 (+5,7%).

Il faudrait stabiliser le ratio retraite/salaire (coût : 2 points de PIB).

Il faudrait accepter des hausses de cotisations plus importantes : la part
des retraites augmenterait de 2,6 points -1 point de chômage et 0,5 point
de famille-exclusion : Reste 1,1 point de PIB, soit 2,8 points de cotisations
(0,2 point chaque année pendant 15 ans).

Si l’allongement de la durée des carrières était effectivement obtenu, il
serait possible de remettre en cause certains aspects néfastes des
réformes antérieures comme la stricte indexation sur les prix.

Ne pas s’interdire a priori toute hausse des cotisations fournirait une
marge de manœuvre qui pourrait être utilisée pour améliorer la générosité
du système : moindre pénalisation des carrières courtes et interrompues,
des difficultés d’insertion en début de vie active, meilleure prise en compte
de la pénibilité du travail…

La question essentielle est celle de l’emploi.
66
Hypothèses de taux d’activité
France Insee/COR Rouge HS Etats-Unis
2005
2050
2050
2005
Suède
2005
Femmes
25-55 a
80,7
83,3
85
75
86,5
Total
55-60 a
60,0
63,0/62,0
75
72
84
Total
60-65 a
19,6
40,2/33,7
50
52
64
Total
+de 65 a
1,3
1,1
4
15
10
67
Une grande réforme assurant un équilibre automatique ?

Il est certes possible de continuer à équilibrer financièrement le système,
année après année, par des réformes dégradant progressivement le niveau
des pensions, quitte à rajouter des rustines (hausse du minimum contributif et
du minimum vieillesse) mais le système devient de plus en plus compliqué.
Cette stratégie n’est guère porteuse et n’est pas de nature à inspirer confiance
aux jeunes générations.

Il faudrait éviter l’accumulation des réformes paramétriques, par une grande
réforme assurant l’équilibre automatique. C’est le point de vue développé par
Madelin, Bichot et Leclerc d’un côté ; Bozio et Piketty de l’autre.

En 2009, à la demande du sénateur Dominique Leclerc, le Parlement a
demandé au COR un rapport sur “les modalités techniques de remplacement
du calcul actuel des pensions personnelles par les régimes de base
d'assurance vieillesse légalement obligatoires, soit par un régime par points,
soit par un régime de comptes notionnels de retraite fonctionnant l'un comme
l'autre par répartition”. Ce rapport est sorti en janvier 2010.

Ces réformes permettraient-elles d’améliorer notre système de retraite en
assurant sa soutenabilité financière, sans dégrader le niveau des vie des
retraités, sans augmenter les inégalités entre retraités, sans plonger dans les
précarité des travailleurs seniors ?
68
Des modalités techniques mais quels objectifs ?
1. Uniformiser et simplifier le système français
Ceci permettrait d’éviter les disparités sans justification entre les secteurs
publics et privés, de dissiper les sentiments d’injustices entre salariés, de
régler la question des poly-pensionnés, d’uniformiser les pensions de
réversion et les avantages familiaux, de repérer et de favoriser les basses
retraites. La gestion du système serait plus simple et transparente. Ceci
permettrait des choix sociaux plus transparent. Mais, il faudrait inclure les
régimes spéciaux (y.c. la fonction publique), donc les régimes
complémentaires (quid du paritarisme ?). Il faudrait une transition très
courte (sinon, le système serait encore compliqué). Il faudrait s’entendre
sur les règles de gouvernance du système : un système par points peut
être géré de multiples façons.
2. Un système plus contributif et juste
Mais selon quel critère de justice ? Faut-il viser la pure contributivité ou la
réduction des inégalités de retraite ?
69
Des modalités techniques mais quels objectifs ?
3. Réduire le niveau des prestations, en assurant un équilibrage automatique
en cotisations définies et en renonçant à tout objectif en terme de taux de
remplacement
L’objectif serait de permettre une baisse continuelle du taux de
remplacement en brisant la barrière de 50% (RG) et des 75% (Fonction
Publique, Régimes Spéciaux). Mais jusqu’ou ?
4. Garantir la pérennité du système
Les règles du système serait définies une fois pour toutes et l’équilibre
serait automatique, ce qui rassurerait les jeunes générations. Mais la
baisse des taux de remplacement n’aurait pas de limite…
5. Faciliter le « libre choix » du moment de départ à la retraite
Ce n’est pas obtenu automatiquement par un système à points. Il faut tenir
compte de l’âge de départ (ou de l’espérance de vie) ou passer à un
système de comptes notionnels. Mais faut-il retarder le départ à la retraite
par des mesures collectives ou par le libre choix ?
70
Des principes des systèmes sociaux de retraite

Les systèmes de retraite par annuités sont les héritiers du régime des retraites
d’entreprise.

Dans ce régime, le salarié peut prendre sa retraite quand il a atteint un certain âge,
A.

A cet âge, il a normalement effectuée une carrière complète, c’est-à-dire supérieure
à une certaine durée, N. Sa retraite vaut alors q wr où q représente le taux de
remplacement garanti et wr le dernier salaire.

Selon le contrat salarial implicite, l’entreprise doit assurer une carrière complète à
chaque salarié et le maintenir en emploi jusqu’à l’âge de la retraite.

La retraite a un caractère rétributif ; récompense de la carrière, elle dépend
logiquement de la position hiérarchique atteinte. Ce n’est pas un placement
financier.

Elle assure le maintien du niveau de vie. Le taux de remplacement n’a donc guère
de raison d’augmenter pour les salariés qui prolongent leur carrière.

Ce régime est périmé, mais, c’est celui qui correspond le mieux au principe : la
retraite est un élément du contrat salarial.

Il faut maintenir ses deux principes : le taux de remplacement garanti pour une
carrière normale et l’ouverture du droit à la retraite pour les salariés que les
entreprises ne veulent plus employer.
71
Des principes des systèmes sociaux de retraite






Ce système a été mutualisé dans la cadre des régimes par répartition par
annuités. Il s’est éloigné du système rétributif pour devenir plus contributif
Traditionnellement, le système par annuité s’équilibrait par hausse des
cotisations, à taux de remplacement fixe, solution conforme au contrat
implicite.
Lors de la montée du chômage, la gestion également a été conforme au
contrat implicite : les salariés âgés que les entreprises ne voulaient plus
employer ont été mis en préretraite.
Le RG a le défaut de ne garantir qu’un taux de remplacement insuffisant :
50% du salaire sous-plafond, ce qui a amené les partenaires sociaux à
développer des régimes complémentaires, qui assurent une retraite
satisfaisante, mais ont le défaut de complexifier inutilement le système.
La réforme de 1993 n’a pas osé faire baisser le taux affiché de
remplacement ; elle a diminué le taux effectif par le biais de la réforme des
modes d’indexation et l’augmentation du nombre de meilleurs années
prises en compte, ce qui a des effets pervers.
Les principes de fonctionnement du système veulent que son équilibre
soit obtenu par un choix social entre hausse des cotisations et hausse de
la durée d’activité, mais le système ne garde sa logique que si
effectivement les entreprises conservent leurs salariés jusqu'à l’âge
ouvrant droit à une retraite à taux plein et que la retraite assure aux
retraités un niveau de vie équivalent à celui des salariés.
72
Les régimes par points

Dans un système par point, chaque année de salaire au taux w induit le
versement de cotisation au taux c, qui donnent droit à des points dont le
prix d’achat est p. Ces points ont une valeur v. La retraite, acquise à partir
d’un certain âge, A, vaut donc : c N w v/p, v/p représentant ce que les
gestionnaires nomment le taux de rendement du système

Traditionnellement, v et p évoluent comme les salaires, ce qui assure une
prise en compte satisfaisante des carrières longues et la stabilité du taux
de rendement.

Le système se dégrade si v et p évoluent comme les prix, les carrières
longues sont défavorisées puisque les premières années sont
dévalorisées.

Il se dégrade plus encore si le prix d’achat des points augmente comme
les salaires tandis que la valeur du point augmente comme les prix. C’est
la gestion actuelle des RC. Au cours du temps, le taux de rendement
diminue comme les salaires, soit de 1,5% par an.

Dans ce système, la valeur du point ne dépendent pas de l’âge de départ
à la retraite, une fois l’âge requis atteint. Le système n’est pas très incitatif
à l’emploi.
73
Les régimes par points

Le système par points est plus souple que le système par annuités.

La gestion est plus facile : il suffit de réduire progressivement la valeur du
point pour équilibrer le système.

Le système peut fonctionner à taux de cotisation fixe si la valeur du point
diminue du montant nécessaire.

L’allongement de la durée de vie (ou les difficultés économiques) se
traduit alors par une baisse de la valeur des pensions.

En contrepartie, les garanties fournis aux salariés sont plus faibles ; il
n’existe pas de taux de remplacement assuré pour une durée normale de
carrière ; les salariés ne sont pas assurés de toucher une retraite
satisfaisante, qui leur assure la parité de niveau de vie avec les actifs.

Un système par point apparaît plus contributif qu’un système par annuités.
Tout se passe comme si les salariés achètent par leur cotisation un actif
financier, les fameux points, et que la retraite était la rente viagère
correspondant à cette accumulation financière. Toutefois, la valeur des
points n’est pas explicitement reliée à l’espérance de vie au moment du
départ à la retraite.
74
Les régimes par points





Certains préconisent un système par points équilibré par baisse des
retraites, dans un système à cotisations définies.
Le sénateur Dominique Leclerc écrit ainsi : « Il conviendrait de faire
évoluer nos régimes de base, à commencer par le régime général, vers
des systèmes à cotisations définies, répartissant entre les retraités le
produit des cotisations en provenance des actifs, sans avoir la possibilité
d’augmenter le taux des dites cotisations ».
Alain Madelin et Jacques Bichot estime que le système actuel distribue
des « faux droits », qu’il faut fixer le taux de cotisation, puis « la fixation de
la valeur du point, trimestre après trimestre, permettrait d’ajuster les
dépenses aux ressources ».
Ces propositions ne sont pas acceptables. Les salariés n’auraient aucune
garantie sur le montant de leur retraite. L’ajustement se ferait sur les
retraités, qui n’ont plus de liberté d’action. Les entreprises seraient
déchargés de toute responsabilité quant à l’emploi des seniors. Les actifs
et les entreprises pourraient avoir l’impression qu’il n’est pas utile
d’organiser la mobilisation sociale pour l’emploi des seniors.
En 2009, le déficit de la CNAV représente 8% des pensions. Faut-il une
baisse des retraites de 8% ?
75
La taxe sur l’activité/ sur la poursuite d’activité

Les économistes socio-libéraux estiment que le système de protection sociale
est responsable de l’inefficacité du système économique européen. Ils mettent
en accusation la « taxe sur l’activité ».

On considérait naguère que le système de protection sociale devait assurer
les travailleurs. Un travailleur avait un salaire de 100 ; il payait 30 de
cotisations et il avait droit, à la retraite, à des allocations de 50, soit un taux de
remplacement de 50/70 = 70 %. Plus ce taux de remplacement était élevé,
plus le système était jugé satisfaisant.

Les sociaux-libéraux essaient de modifier cette perspective. Considérons ce
travailleur ; son activité (par rapport à la retraite) lui rapporte 20. Il subit une
taxe de 80 % sur son activité. L’objectif devient de réduire ce taux
confiscatoire, censé décourager la poursuite d’activité.

La logique libérale amène à prôner la réduction des « trappes à inactivité »,
qui concernent les chômeurs, les personnes au revenu minimum, les mères au
foyer, les retraités.

En matière de retraite, il faudrait donc introduire la « neutralité actuarielle ».
76
Le mythe de la neutralité actuarielle

Selon le principe de neutralité actuarielle, le choix du moment du départ à la retraite
doit être neutre sur le gain net qu’un actif retire du système.

Si les actifs ont droit à une retraite de 50 % de leur salaire moyen à 62 ans après 42
ans de carrière, une personne partant à l’âge A ayant cotisé N années a droit à :
(1) P=50 % * w * (N/42) * (23/(85 – A)).

Il faudrait donc donner 57,4 % de son salaire moyen à une personne partant à 64 ans
après 44 ans de carrière, soit un gain de 7,4% par an. Une personne partant à 60 ans
après 40 années de carrière devrait avoir 43,8 %, soit une perte de 6,2% par an..

Tenir compte de l’âge de départ à la retraite pour fixer le montant de la retraite
procurerait un double avantage :
1.
le système serait plus équitable (ceux qui travaille plus tard ne subventionnent pas
ceux qui partent à la retraite tôt)
2.
il serait plus incitatif : une année de travail supplémentaire est récompensé par un
supplément de retraite, qui correspond à l’année de cotisation supplémentaire et à
l’année de retraite non-perçue.

La réforme de 2003 a prévu de porter à 5 % la décote et la surcote du Régime
général. A terme, le salarié partant à 64 ans après 44 années de carrière aura une
pension de 55 % de son salaire moyen ; celui qui partira à 60 ans après 40 années de
carrière aura 42,9%. L’effet incitatif est proche de celui de la neutralité actuarielle.
77
Le mythe de la neutralité actuarielle

Toutefois, le barème actuel peut sembler injuste pour ceux qui commence tardivement à travailler :
une personne qui prend sa retraite à 66 ans en ayant commencé à cotiser à 24 ans reçoit la même
pension qu’une personne qui la prend à 62 ans en ayant commencé à cotiser à 20 ans alors
qu’elle devrait avoir 20% de plus..

Faut-il aller plus loin ? NON.

La neutralité actuarielle telle que nous venons de la définir est un mythe trompeur. L’âge de départ
à la retraite ne renseigne en rien sur l’espérance de durée de la retraite puisque l’espérance de vie
dépend fortement du sexe et de la profession Un système qui suppose que toutes les professions
ont la même espérance de vie est injuste pour les professions manuelles et favorise trop les
cadres. Dans la mesure où il n’est pas possible de tenir compte dans la législation de l’espérance
de vie effective, faire dépendre le montant de la pension d’une espérance de vie qui serait la
même pour tous écarte de l’équité.

Le barème actuel suppose implicitement que plus une personne a commencé à travailler tard, plus
son espérance de vie est longue. Si l’espérance de vie n’est pas de 85 ans pour tous, mais de 65
ans après l’âge de début de carrière, la pension doit être calculée par :
(2) P= 50 % * w * (N/42) * (23/(65-N).

Dans cette optique, il est normal que l’âge de départ à la retraite ne soit pas pris en compte dans
le calcul du montant de la retraite. Ainsi, le barème actuel ne donne qu’un taux de 48,8 % à un
salarié partant à la retraite à 65 ans en ayant débuté à 24 ans. C’est trop peu selon la définition (1)
de la neutralité actuarielle qui lui donne une espérance de vie de 20 ans ; il devrait avoir 56,1% ;
c’est trop selon la définition (2) qui lui donne une espérance de vie de 24 ans ; il devrait avoir
46,8%.

Mais, le barème pénalise aussi les personnes qui ont eu une carrière courte pour d’autres raisons
que le fait d’avoir fait de longues études pour devenir cadre. Il n’y a pas de solution parfaite. Ceci
est en partie corrigé par l’AVPF. Il faudrait un statut pour les jeunes chômeurs sans avoir jamais
travaillé. Par contre, il ne faudrait pas autoriser le rachat des années d’études.
78
Taux de pension du Régime général en 2020/taux
actuariellement neutre* définition 1**/définition 2**
Début/Fin
60ans
61ans
62ans
63ans
64ans
65ans
66ans
18ans
50/46/50
52,5/49,1/53,5
55/52,4/57,1
57,5/56/61,6
60/60/66,3
64,3/64,3/71,5
65/69,2/77,3
19ans
46,4/44,9/46,8
50/48/50
52,5/51,2/53,5
55/54,8/57,1
57,5/58,7/61,6
60/63/66,3
62,5/67,7/71,5
20ans
42,9/43,8/43,8
46,4/47,1/46,8
50/50
52,5/53,5/53,5
55/57,4/57,1
57,5/61,6/61,6
60/66,3/66,3
21ans
39,4/42,7/41,1
42,9/45,9/43,8
46,4/48,8/46,8
50/52,3/50
52,5/55,9/53 ,5
55/60,2/57,1
57,5/64,8/61,6
22ans
36,2/41,6/38,6
39,4/44,8/41,1
42,9/47,6/43,8
46,4/51,0/46,8
50/52,0/50
52,5/58,9/53,5
55/63,4/57,1
23ans
33,0/40,5/36,2
36,2/43,6/38,6
39,4/46,4/41,1
42,9/49,8/43,8
46,4/50,7/46,8
50/57,5/50
52,5/61,9/53,3
24ans
32,1/39,4/34,0
35,2/42,5/36,2
38,5/45,2/38,6
41,8/48,5/41,1
45,2/49,4/43,8
48,8/56,1/46,8
50/60,5/50
25ans
31,3/38,3/31,9
34,3/41,3/34,0
37,4/44,0/36,2
40,7/47,3/38,6
44,1/48,1/41,1
47,6/54,8/43,8
48,8/59,1/46,8
26ans
30,3/37,2/30,0
33,3/40,2/31,9
36,4/42,9/34,0
39,6/46,1/36,2
43,0/46,8/38,6
46,4/53,4/41,1
47,6/57,6/43,8
* Sur la base d’un taux de 50 % pour un salarié partant à 62 ans en ayant commencé à travailler à 20 ans. ** selon la définition 1, l’espérance de vie à 20
ans est le même pour tous (65 ans)/selon la définition 2, l’espérance de vie est de 65 ans après le début de la carrière.
79
Espérance de vie à 35 ans (France-2005)
Hommes
Femmes
Cadres
46
50
Profession intermédiaires
43
49,5
Artisans, commerçants, chef d’entreprise
43
49
Employés
40
48,5
Ouvriers
39
47
Total
41
48
80
Le mythe de la neutralité actuarielle

Selon les principes de l’assurance sociale, la retraite est un dispositif social et
salarial ; ce n’est pas un dispositif financier géré par des choix individuels.

La société considère que chaque salarié peut travailler N années jusqu’à l’âge A ;
elle doit lui fournir un travail jusqu’à cette limite ; après le salarié a droit à une
retraite satisfaisante, qui lui assure une parité de niveau de vie avec les actifs. Lui
et son employeur peuvent convenir qu’il travaille plus longtemps, mais cela ne lui
ouvre aucun droit. Ce système est cohérent avec un contrat salarial implicite,
comportant un salaire rigide, progressant avec l’expérience.

En sens inverse, le système libéral – chacun choisit l’âge de départ à la retraite et
perçoit une retraite d’autant plus forte qu’il part tard – pose quatre problèmes :
1.
la norme de retraite satisfaisante disparaît. La société est dispensé d’offrir une
retraite satisfaisante à ceux qui partent à la retraite à 60 ans puisqu’elle peut leur
dire : « vous n’avez qu’à travailler jusqu’à 65 ou 70 ans ». En même temps, le
choix du départ à la retraite devient une question individuelle, de sorte que les
entreprises ne sont pas tenues de conserver leur travailleurs jusqu’à 65 ou 70 ans.
2.
Le départ à la retraite n’est un choix que pour une minorité de salariés. En 2005, à
59 ans, n’étaient encore actifs que 40% des salariés ; la majorité sont déjà dans
des dispositifs de pré-retraites ou de dispenses de recherche d’emploi ; pour eux,
une réforme libérale signifierait seulement une baisse du niveau des retraites.
Dans un système qui n’assurerait un niveau de retraite satisfaisant qu’à ceux qui
ont pu travailler jusqu’à 65 ans, de nombreux travailleurs contraints à partir
relativement tôt à la retraite se retrouveraient avec une pension misérable. Il faut
d’abord changer l’équilibre du marché du travail des seniors.
81
Le mythe de la neutralité actuarielle
3.
Le niveau de la retraite dépendrait de façon cruciale de l’âge de départ. Or, les salariés
ne sont pas égaux en termes d’espérance de vie et de capacité à travailler après 60 ans.
Certains qui ont effectués des métiers pénibles sont usés ; certains sont dans des
secteurs en difficultés tandis que d’autres qui ont eu des conditions de travail favorables
et sont dans des secteurs porteurs peuvent prolonger leur activité. Faut-il diminuer la
retraite des premiers en faveur des seconds ? Les inégalités de retraites seraient accrus
au profit de ceux qui ont la chance d’être en bonne condition physique et intellectuelle à
60 ans et qui ont les espérances de durée de retraite les plus longues.
4.
Le maintien en activité du salarié jusqu’à l’âge de son choix est contradictoire avec le
contrat salarial implicite actuel où le salarié a droit à une carrière non descendante, en
terme de responsabilités et de salaire. Un système où les salariés doivent prolonger leur
carrière pour avoir une retraite satisfaisante sera une source de tensions pénibles. Que
fera l’entreprise si le salarié n’a plus les capacités de travail correspondant à son poste
ou à son salaire ? Lui donnera-t-on le droit de baisser les salaires des salariés seniors
qui veulent continuer à travailler, de les faire régresser dans la hiérarchie ou celui de les
licencier pour insuffisance professionnel ? Sinon, le risque est grand que l’entreprise
licencie prématurément les seniors pour ne pas avoir à les employer jusqu’à 65 ans ou
plus.
Dans tous les cas, on place l’entreprise et le travailleur dans une situation délicate et
conflictuelle, ce que la gestion sociale de l’âge de la retraite permet d’éviter.

La neutralité actuarielle n’est pas la norme selon laquelle il faut réformer le
système de retraite français.
82
Vers un système de comptes notionnels ?

Antoine Bozio et Thomas Piketty (BP par la suite) proposent de remplacer la
mosaïque de régimes existant en France actuellement par un système de
retraite unique (on ne peut qu’être d’accord) fonctionnant sur le mode des
comptes individuels notionnels (c’est plus discutable). Ils prétendent que leur
système sera automatiquement équilibré, de sorte que sa pérennité sera
assuré.

Comme ils maintiennent un système de retraite par répartition avec un taux
de cotisation égal au taux actuel, leur système fournit la même masse de
retraites. Le système actuel fournit un taux de remplacement d’autant plus
fort que le salaire est bas. A court terme, les différences avec le système
actuel ne peuvent donc être que de second ordre.

Le ratio démographique devrait passer, de 38 % en 2005 à 69 % en 2050, en
raison de l’arrivée à l’âge de la retraite des générations nombreuses du
baby-boom et de l’allongement de la durée de vie. Nous devons arbitrer
entre hausse du taux de cotisation, baisse du taux de remplacement et
report de l’âge de fin d’activité. Aucune réforme ne peut esquiver cet
arbitrage.
83
Vers un système de comptes notionnels ?





BP proposent de passer à un système de comptes individuels notionnels (comme l’ont
fait la Suède et l’Italie). Le taux de cotisation serait fixe à 25% du salaire brut. Les
cotisations seraient revalorisées au taux de l’inflation + 2% (taux de rendement réel
représentant le taux de croissance du salaire). Chaque salarié choisirait le moment de
liquidation de ce capital (après 60 ans). Sa retraite correspondrait à la rente viagère
équivalente au capital accumulé, compte tenu de l’espérance de vie de sa cohorte à
l’âge choisi pour la liquidation. Après la liquidation, la pension progresserait comme le
salaire (ou la masse salariale.
Actuellement, les taux de cotisations retraite sont de 26,15% en dessous du plafond,
de 24,61% au-dessus. La proposition de BP correspond donc au niveau actuel des
taux de cotisation. Mais, ils proposent de figer ce taux de cotisation.
Le rendement d’un système par répartition à taux de cotisation fixe est théoriquement
égal au taux de croissance de la masse salariale. Les Suédois ont choisi de revaloriser
les cotisations sur le salaire ; les Italiens sur le PIB. Une indexation sur les salaires est
plus facilement compréhensible.
Pour la France, la différence devrait être faible dans les quarante années à venir.
Le système serait équitable puisque le placement retraite assurerait à chacun une
retraite correspondant à ses cotisations placées à 2%. La société pourrait rajouter
explicitement des mécanismes de solidarité (cotisations pour les période de chômage,
d’arrêt-maladie, etc.).
84
Vers un système de comptes notionnels ?





1.
2.
Chacun pourrait choisir librement la date de son départ à la retraite, entre 60 et 70 ans,
sachant que sa retraite serait d’autant plus importante qu’il part tardivement.
L’allongement de la durée de vie à taux de cotisation inchangé entrainerait
automatiquement une baisse du niveau des retraites que chacun serait libre d’éviter en
travaillant plus longtemps. C’est le système qui a été adopté en Suède.
Sous des dehors techniques, BP imposent deux choix sociaux : le système serait géré à
taux de cotisation fixe ; les salariés devraient choisir individuellement entre baisse de
leur retraite et report de l’âge de la retraite.
Le projet ne règle pas la question des déséquilibres futurs, sinon en réduisant fortement
le niveau des retraites ou en allongeant la durée des carrières.
BP font le choix de maintenir le taux de cotisation, de sorte que le capital accumulé à 60
ans est fixe relativement au salaire. Les conditions de l’arbitrage âge de départ à la
retraite/montant de la retraite se dégraderont donc quand l’espérance de vie
augmentera. On pourrait choisir au contraire d’augmenter le taux de cotisation pour
stabiliser les conditions de départ à la retraire.
BP reconnaissent eux-mêmes que leur projet ne règle pas les deux problèmes
essentiels :
Comment convaincre les entreprises de maintenir en activité les travailleurs âgés ? Au
contraire, le fait que le départ à la retraite soit censé devenir un choix individuel risque de
dégager les entreprises de leurs responsabilités et de nuire à la mobilisation sociale pour
allonger la durée des carrières.
Comment tenir compte de la disparité des capacités de travail après 60 ans et des
différences d’espérance de vie selon la carrière professionnelle ? Leur proposition, où le
montant de la retraite est fortement déterminé par l’âge de départ à la retraite, aboutirait
à augmenter les inégalités de retraite et à augmenter l’injustice du système.
85
Vers un système de comptes notionnels ?

Un système notionnel est un cas particulier d’un système par points. Les
cotisations sont obligatoirement revalorisées sur l’évolution des salaires
et le coefficient de transformation du capital en rente est obligatoirement
l’inverse de l’espérance de vie. Cette rigidité est un avantage pour les
salariés, qui ont, en principe, des garanties non sur le montant de leur
retraite, mais sur les règles qui gouverneront son évolution.

C’est, par contre, une forte contrainte pour les gestionnaires. Les Suédois
ont introduit un coefficient de stabilisation automatique qui réduit le
montant des retraites si le système tend à être déficitaire, mais ceci
affaiblit la fiabilité du système. Une autre façon de réguler le système
serait d’augmenter les cotisations, sans donner des droits
supplémentaires, en introduisant un taux d’appel supérieur à 100 %. En
tout état de cause, il faut faire un arbitrage délicat entre garantie des
droits des salariés et flexibilité du système.
86
Vers un système de comptes notionnels ?

Le système notionnel singe le système de retraite par capitalisation.
Mais, il est obligatoire et sa rentabilité ne dépend pas des fluctuations
des marchés financiers. La rentabilité promise (la productivité du travail)
peut être jugée faible, de l’ordre de 1,5% par an par rapport à la
rentabilité promise par la capitalisation. Celle-ci est souvent promise de
l’ordre de 3,5% (pour un placement à 50% en obligations de rendement
réel, 2%, et à 50% en actions de rendement réel, 6,5 %, moins 0,75 point
de frais de gestion). Mais la crise actuelle montre bien la volatilité de la
rentabilité financière

Faut-il renoncer à la logique de la retraite publique par répartition ?
Celle-ci n’est ni un placement financier, ni un singe de placement
financier. C’est un élément du contrat salarial, qui garantit le maintien du
niveau de vie des salariés quand les entreprises ne veulent plus les
employer, et un élément du contrat social, la masse salariale disponible
est répartie de façon équitable entre les actifs et les retraités. Ces
garanties sont perdues avec le système proposé puisque le niveau de la
retraite n’est plus garanti (et qu’il pourra d’autant plus baisser que l’État
pourra dire aux seniors : travaillez plus longtemps pour avoir une retraite
plus forte) et que la notion d’âge de la retraite disparaît.
87
Vers un système de comptes notionnels ?
1.
2.
3.
4.
La société est dispensé d’offrir une retraite satisfaisante à ceux qui partent à la
retraite à 60 ans puisqu’elle peut leur dire : « vous n’avez qu’à travailler jusqu’à 65 ou
70 ans ». En même temps, le choix du départ à la retraite devient une question
individuelle, de sorte que les entreprises ne sont pas tenues de conserver leur
travailleurs jusqu’à 65 ou 70 ans.
Le départ à la retraite n’est un choix que pour une minorité de salariés. En 2005, à
59 ans, n’étaient encore actifs que 40% des individus ; la majorité sont déjà dans des
dispositifs de pré-retraites ou de dispenses de recherche d’emploi ; pour eux, une
réforme signifierait seulement une baisse du niveau des retraites. Le « libre choix de
l’âge du départ à la retraite » suppose que les seniors n’aient aucune difficulté à
trouver ou à conserver un emploi..
En période de chômage de masse, la plupart des salariés n’ont pas le choix du
moment de leur départ à la retraite : un système qui n’assurerait un niveau de
retraite satisfaisant qu’à ceux qui ont pu travailler jusqu’à 65 ans n’est pas
acceptable : de nombreux travailleurs manuels contraints à partir relativement tôt à la
retraite se retrouveraient avec une pension misérable.
La disparité des espérances de vie selon la CSP rend injuste un système où le
montant de la retraite dépend trop de l’âge du départ à la retraite. Ce système serait
trop avantageux pour les cadres au détriment des ouvriers. Faut-il augmenter la
retraite de ceux qui pourront travailler au-delà de 60 ans, souvent des cadres, à
longue espérance de vie ? des personnes qui ont la chance d’avoir un travail
intéressant et peu usant ?
88
Vers un système de comptes notionnels ?
5.
Un travailleur licencié par son entreprise à 57 ans pourra-t-il attendre 5
ans, avec une préretraite ou une allocation chômage convenable, pour
faire liquider sa retraite à 62 ans à un taux acceptable ? Si la France
reste en situation de chômage de masse, cette nouvelle liberté peut
aboutir à une forte baisse des retraites des salariés qui seraient
chômeurs à 60 ans et contraints de prendre leur retraite à cet âge. Ces
salariés devront choisir entre vivre quelques années dans la misère avant
de liquider leur pension ou se résigner à liquider leur pension à 60 ans.
6.
L’individualisation du droit à la retraite risque d’augmenter les inégalités
entre retraités, entre ceux qui pourront prolonger leur activité, des cadres
qui ont eu la chance d’avoir des emplois peu usants et valorisants et les
ouvriers usés, qui devront partir tôt. Elle risque de créer des situations
délicates dans les entreprises (qui décidera du départ à la retraite ?
l’entreprise et le salarié ? que se passera-t-il quand le salarié souhaite
rester mais que l’entreprise l’estime pas assez productif ?). Enfin, elle
dégage collectivement les employeurs de leur responsabilité : maintenir
le niveau de vie des travailleurs qu’elles ne veulent plus employer.
89
Vers un système de comptes notionnels ?




BP font le choix de maintenir le taux de cotisation, de sorte que le capital
accumulé à 60 ans est fixe relativement au salaire. Les conditions de l’arbitrage
âge de départ à la retraite/montant de la retraite se dégraderont donc quand
l’espérance de vie augmentera. On pourrait choisir au contraire d’augmenter le
taux de cotisation pour stabiliser les conditions de départ à la retraire.
Considérons un salarié qui travaille de 20 à 60 ans. Il cotise au taux de 25 %, son
salaire augmente de 2 % par an. À 60 ans, il gagne 2 000 euros par mois. En
2008, son espérance de vie à 60 ans est de 24 ans. Sa retraite, d’après le
système de BP, est alors de 833 euros, soit un taux de remplacement brut de
41,7 % (et un taux de remplacement net de 47,9 %).
Un salarié de carrière similaire aura en 2050 une espérance de vie à 60 ans de 28
ans. À taux de cotisation fixe, sa retraite ne serait que de 714 euros pour un départ
à 60 ans, soit un taux de remplacement net de 41 %. Pour avoir une retraite de
833 euros, il devrait soit partir à 62,5 ans, soit cotiser tout au long de sa carrière à
un taux moyen de 29,2 %.
Il faut donc faire un choix social entre l’augmentation des cotisations, la baisse des
retraites, l’allongement des carrières. BP proposent une réforme technique qui ne
modifie ni la nécessité, ni la nature de ce choix.
90
t  0,5*
(1  r )12,5
(1  w)12,5
Le principe des 3 systèmes
La comparaison des systèmes est délicat car le système actuel est
hétérogène et déséquilibré.
Dans le Régime général de 2020, en notant r le taux de revalorisation des
salaires pris en compte, et w le taux de croissance du salaire, le taux de
remplacement brut vaut :
12,5

(1  r )
t  0,5*
12,5
(1  w)
soit, pour r=0 % ; w=1,5%, un taux de remplacement brut : t=41,5%.
La retraite est possible à 60 ans. Il existe une décote de 5% par année manquante par
rapport à 42 années de cotisations et 65 ans et une surcote de 5% par rapport à 60 ans
et 42 années de cotisations.
Par rapport à la carrière 18/60 ans, une année de plus rapporte 0% (avant 20 ans) ou
5% de retraite (après 60 ans).
Le système est relativement figé. Il n’y a pas de variable d’ajustement.
91
t  0,5*
(1  r )12,5
(1  w)12,5
Le principe des 3 systèmes
Dans un système de comptes notionnels, en notant r le taux de rendement
des cotisations, c le taux de cotisation, m, la durée de carrière et n
l’espérance de vie au départ à la retraite, le taux de remplacement brut est
approximativement :
(1  r )m / 2
t  c *(m / n) *
m/2
(1  w)
Pour w=r=1,5%, c=0,20, m=42, n=25,5, on obtient un taux de remplacement
brut de t=32,9%.
Le taux de rendement (rapport entre la pension et le capital) est de 1/n=3,93%
Par rapport à la carrière 18/60 ans, une année de plus rapporte 2,4% (avant
18 ans) ou 6,6 % de retraite (après 60 ans).
Le taux de remplacement (comme le taux de rendement) diminue
automatiquement sous l’effet de l’allongement de la durée de vie (à un taux
de l’ordre de 0,4% par an). Il n’y a aucune autre variable d’ajustement.
92
t  0,5*
(1  r )12,5
(1  w)12,5
Le principe des 3 systèmes
Dans un système par point, avec c, taux de cotisation, r le taux de croissance du prix
d’achat du point et q le rapport entre la valeur du point et le prix d’achat du point (le
taux de rendement affiché du régime).
(1  r )m / 2
t  c * m *q *
m/2
(1  w)
Un système par point peut être géré de 3 façons.
Le prix d’achat du point et la valeur du point sont indexés sur les prix. Le taux de
remplacement est rigide. Le système est proche du régime par annuités si :
-
1
1
c * m *q *
 0.5*
m/2
(1  w)
(1  w)12,5
Soit, pour c=17%, m=42, q=7,95 %. Une année supplémentaire rapporte 1,6% (avant
18 ans) ou 3,3 % (après 60 ans). Les premières années sont très mal prises en compte.
Il manque une surcote ou une dépendance à l’âge.
93
t  0,5*
(1  r )12,5
(1  w)12,5
Le principe des 3 systèmes
Le prix d’achat du point et la valeur du point sont indexés sur le salaire moyen. Le
système est proche du régime par annuités si.
-
c * m *q  0.5*
1
(1  w)12,5
Soit, pour c=17%, m=42, q=5,81%. Le taux de remplacement est rigide. Une
année supplémentaire rapporte 2,4 %. Les premières années sont
correctement valorisées. Il manque une surcote ou une dépendance à l’âge.
prix d’achat du point est indexé sur le salaire et la valeur du point est
indexé sur les prix.
-Le
t  c * m *q 0 *
1
(1  w)t
A la date 0, les paramètres sont équivalents à ceux du système précédent.
Mais, le taux de rendement se dégrade au taux de 1,5% par an
94
Taux de
remplacement
Premières
années
Années supplémentaires
Ajustement
Annuités
Fixe,
ajustement
difficile
0%
5% (surcote
après 60/42)
Age minimum,
durée requise, taux
de cotisation
Points
salaires/salaires
Fixe,
ajustement
possible
2,4%
2,4%
Valeur du point, âge
minimum, taux de
cotisation
Point prix/prix
Fixe,
ajustement
possible
1,6%
3,3%
Valeur du point, âge
minimum, taux de
cotisation
Points salaires/prix
Diminue de
1,5%% par an
2,4%
2,4%
Valeur du point, âge
minimum, taux de
cotisation
Comptes notionnels
Diminue de
0,4% par an,
pas
d’ajustement
2,4%
6,6%
Automatique,
arbitrage individuel
95
t  0,5*
(1  r )12,5
(1  w)12,5
Le principe des 3 systèmes
- Le taux de rendement du système pur de comptes notionnels est de 4,17%
pour n=24.
Le taux de rendement fictif actuel du RG est de 6,23 % (qui baisse à 5,20%
en tenant compte de la non-indexation des pension après liquidation).
-
Le taux de rendement affiché des RC est de 8,34%. En réalité, 5,27 %
(4,41% compte-tenu de la ni) pour l’ARRCO et 5,83% (4,88% compte-tenu de
la ni) pour l’AGIRC compte tenu de l’AGFF et du taux d’appel..
-
Ce taux est fixe pour le RC, baisse de 0,4% par an pour les comptes
notionnels, est fixe pour le système à points ou baisse de 1,5% par an.
-
Le système salaire/salaire est acceptable, mais il peut se dégrader en
salaire/prix, puis, au mieux, se stabiliser en prix/prix.
-
96
Vers un système de comptes notionnels ?




BP présentent un encadré 1, page 20, particulièrement trompeur. L’exemple pris est
celui d’un salarié qui travaille pendant 40 ans à un salaire de 2 000 euros, sur lequel
sont prélevés 25% de cotisations retraites.
BP supposent que la masse salariale augmente au rythme de 2% l’an, ce qui serait
aussi la hausse du salaire réel moyen. L’État garantit aux cotisations un rendement de
ce même 2%. Le travailleur a donc accumulé 377 000 euros à 60 ans, ce qui lui
donne, avec 20 ans d’espérance de vie, une pension de 1 540 euros, soit un taux de
remplacement de 77%, supérieur, nous disent BP, au 75% du système actuel. En net,
le taux de remplacement est même de 88,5%. Le système apparait équilibré et
généreux.
Le problème est qu’il est absurde de prendre le cas d’un travailleur qui n’a aucune
hausse de salaire pendant 40 ans dans une situation où le salaire moyen augmente de
2%. C’est totalement incompatible avec le graphique 2, page 85 de leur note, qui
montre que le salaire à l’embauche est de 80% du salaire moyen pour finir à 120% du
salaire moyen. Leur malheureux travailleur partirait lui de 80% du salaire moyen pour
finir à 36 %.
Considérons donc un cas réaliste. Avec le système proposé, pour un salarié moyen
dont les hausses de salaire au cours de la carrière seraient de 1 point supérieur à celle
du salaire moyen, le taux de remplacement brut serait de 34,2% pour 24 années
d’espérance de retraite (le chiffre actuel), soit 39,3% de taux de remplacement net. Ce
taux baisserait à 29,2% en brut, soit 33,5% en net pour 28 années d’espérance retraite
(le chiffre prévu pour 2050). Le projet aboutirait donc à des taux de remplacement net
très bas. Il est donc peu étonnant que l’équilibre du système soit assuré.
97
t  0,5*
(1  r )12,5
(1  w)12,5
Quel taux de remplacement ?
 Selon BP, leur système tend à avantager les salariés les plus défavorisés par
rapport au système actuel. Ceci n’est pas assuré.
Certes, le système actuel défavorise les carrières longues. Mais, l’Agirc et
l’Arrco fonctionne déjà en points et prennent en compte la totalité de la carrière.

Le Régime général ne prend en compte que les 25 meilleures années, ce qui
favorise certes les carrières ascendantes, mais qui augmente aussi la retraite de
ceux qui ont eu des accidents de carrières (chômage partiel, temps partiel), qui
sont souvent les plus pauvres ; s’y ajoute le minimum contributif.

Enfin, le taux de remplacement au-dessus du plafond est inférieur au taux de
remplacement en dessous du plafond, de l’ordre de 54,2 % contre 61,5 % dans le
cas le plus favorable. Le taux de remplacement des cadres est nettement plus
faible que celui des non-cadres.

Le
tableau 4 montre que le système BP fournit un même taux de remplacement
sur le salaire moyen. Le système actuel favorise les non-cadres à carrière
ascendante. Les cadres à carrière ascendante souffrent de la faiblesse des taux
de remplacement au-dessus du plafond.
La
retraite du système BP est plus basse que celle du système actuelle de
32,4 % pour le non-cadre à carrière stagnante, de 35,7 % pour le non-cadre à
carrière ascendante, de 31,3 % pour le cadre. C’est la catégorie intermédiaire qui
98
serait perdante, les cadres qui seraient relativement épargnés.
4. Taux de remplacement- paramètres 2008
Système actuel
Brut dernier
salaire
Système BP
Net
Brut
dernier
carrière
salaire
Brut
dernier
salaire
Net
Brut
dernier
carrière
salaire
Non-Cadre s=1,5% 41,5+20=61,5
s=2,5% 36,7+16,4=53,1
82,8
87,0
70,7
61,0
41,6
34,1
56,1
56,1
47,8
39,2
20,8+10+13,1=
43,9
79,3
50,4
30,1
56,1
34,6
Cadre
s=3%
99
t  0,5*
(1  r )12,5
(1  w)12,5
Quel taux de remplacement ?
La figure 1 du document, page 50, est trompeuse. Elle compare deux systèmes imaginaires : un
système BP avec une durée d’activité de 42,5 années et une durée de retraite de 17,5 ans (et donc
avec un espérance de vie de 20 ans à 60 ans) et un système dit «actuel », mais qui serait un
Régime général, qui s’appliquerait à tous, avec un taux de remplacement de 75 % sur le salaire
moyen des 25 dernières années, revalorisé selon le taux de croissance des salaires. Mais, ce
système n’a rien à voir avec le système actuel.
 BP semblent ignorer le fonctionnement effectif du système actuel : l’Agirc et l’Arrco fonctionnent
déjà par points, ce qui limite la nouveauté de leur réforme ; actuellement les taux de remplacement
diminuent avec le niveau de salaire ; le taux de remplacement de l’Agirc est plus bas que le taux de
remplacement Régime général plus Arrco. Ils cachent que leur système avec un taux de cotisation
fixe aboutirait à un taux de remplacement faible, qui diminuerait de façon insupportable au cours du
temps.
 La retraite n’est pas une épargne garantie, c’est aussi un élément du contrat salarial, qui a une
composante rétributive. Il n’est pas choquant de récompenser ceux qui ont eu une carrière
ascendante, surtout en dessous du plafond. Si l’objectif d’un système de retraite est de maintenir le
niveau de vie acquis par l’activité, il n’est pas choquant que, dans certaines limites et avec certaines
précautions, le niveau de la retraite dépende du dernier salaire autant que du salaire moyen. Si un
technicien est devenu ingénieur par la formation permanente ou la promotion interne, doit-il être
fortement pénalisé au moment de la retraite de ne n’avoir été que technicien durant ses premières
années d’activité ?

100
Retraite et âge de départ

Le système préconisé par BP a le défaut de faire fortement dépendre la
retraite de l’âge de départ, ce qui tend à favoriser les cadres à longue
espérance de vie. Un ouvrier qui part à la retraite à 60 ans après 40 ans
de travail et un cadre qui part à la retraite à 65 ans après 40 années de
travail ont la même espérance de durée de retraite, mais le système de BP
aboutirait à donner 25% de taux de retraite de plus au cadre.

Plaçons nous dans une situation où l’espérance de vie à 60 ans est
évaluée à 25 ans et l’espérance de vie à 65 ans à 21 ans. Un ouvrier
ayant commencé à travailler à 18 ans, partant à la retraite à 60 ans, dont
la salaire aurait évolué comme le salaire moyen aurait un taux de
remplacement de 42%. Un cadre ayant commencé à travailler à 23 ans,
partant à la retraite à 65 ans, dont la salaire aurait évolué comme le salaire
moyen aurait un taux de remplacement de 50 %.

Certes, le système de BP serait plus incitatif à la poursuite de l’activité que
le système actuel, mais les différentes catégories de salariés n’ont pas la
même capacité à répondre à cette incitation. Toute réforme des retraites
qui prétend retarder l’âge de départ, allonger la durée d’activité ou offrir
des possibilités de choix serait profondément injuste si elle ne tenait pas
compte des différences d’espérance de vie et de capacités à prolonger
son activité, selon la carrière effectuée.
101
Retraite et âge de départ

Certes, BP évoquent la possibilité de différencier dans le calcul de la retraite
l’espérance de vie selon la CSP. Mais, c’est illusoire. Aucun pays n’intègre la
différence d’espérance de vie selon la CSP dans leur calcul de la retraite. La
CSP n’est pas une catégorie légale. Comment traiter les personnes qui
changent de CSP au cours de leur vie ? Cela est, sans doute, difficile à mettre
en œuvre, socialement comme psychologiquement. Cela poserait de plus la
question de la disparité homme/femme.

Aussi, peut-on penser qu’un système qui impose une double contrainte pour le
départ à la retraite (durée de cotisations + âge) et qui ne tient pas compte de
l’âge de départ pour le calcul du niveau de la retraite est finalement plus juste.

Le Régime général défavorise certes ceux qui ont commencé à travailler tôt en
ne prenant en compte que 40 années de cotisations, mais cette injustice
devrait s’atténuer avec l’allongement de la durée requise de carrière. Si celle-ci
passe à 42 ans, les salariés ayant commencé à travailler 18 ans pourront partir
à 60 ans ; ceux qui ont commencé à 23 ans devront attendre 65 ans. Ceci
compensera en grande partie les différences d’espérance de vie, ce que ne
ferait pas le système préconisé par BP.
102
Retraite et âge de départ

1.
2.
3.
Ceci pourrait être renforcé de trois façons :
Augmenter le taux de cotisation avec le salaire, puisque l’espérance de vie
est sans doute corrélée avec le niveau de salaire. Ceci existe déjà dans le
système actuel où le part des salaires supérieure au plafond supporte une
cotisation à la CNAV de 1,7% qui n’ouvre aucun droit. Ce taux pourrait être
augmenté jusqu’à 5%.
Les travaux pénibles devraient donner droit à une bonification de durée :
chaque année compterait pour 5 trimestres par exemple, de sorte qu’un
ouvrier ayant fait 20 années de travaux pénibles aurait 5 années de
bonification. BP refusent cette problématique : selon eux, la question des
travaux pénibles et usants doit être traitée indépendamment de la question
des retraites. Il faut lutter contre l’existence même de ces travaux au lieu de
chercher à les compenser quelque peu en aménageant la retraite de ceux qui
en ont été victimes. Cependant, il est utopique d’éradiquer ce type de travaux
dans un avenir proche ; la reforme proposée dégraderait fortement la situation
des personnes qui usées, ayant effectué des travaux pénibles seraient
contraintes de partir tôt.
Le système n’est pas parfait. La pénalisation des carrières courtes est
arbitraire et peu justifiée. Il faudrait valider pour la retraite les périodes de
chômage des jeunes n’ayant encore pas travaillé. Par contre, valider les
années d’étude favoriserait les cadres et rendrait absurde la stratégie
103
d’allongement de la durée de carrière.

La proposition de BP risque de laisser croire qu’il existe un moyen
magique d’équilibrer le système des retraites, alors que la seule solution,
si on refuse une trop forte hausse des cotisations, si on refuse que les
taux de remplacement net descendent au-dessous de 70 % pour les
salaires bas ou moyen, c’est la mobilisation sociale des entreprises, des
syndicats et des salariés pour allonger la durée des carrières, ce qui passe
par la modification des conditions de travail, c’est d’ailleurs ce qu’ils
reconnaissent d’ailleurs page 56-57. Cet allongement devrait être modulé
selon la pénibilité du travail, ce qui veut dire que notre système de retraite
doit devenir plus redistributif vers ceux qui ont des conditions de travail
plus difficiles.

BP proposent de mettre en œuvre progressivement la réforme de 2012 à
2032. Ceci poserait des questions délicates de transition car la réforme
devrait porter sur tous les régimes, que les droits devraient être recalculés
sur la base des salaires ou des cotisations passés, ce qui serait
conflictuel. Faut-il consacrer ces années à ce projet ou à la mobilisation
sociale ?
104
Quel plafond ?





Le système de BP aboutit à un taux de remplacement uniforme, ne dépendant pas du niveau de
salaire.
BP proposent de plafonner le montant de salaire soumis à cotisations à 2 fois le plafond de la
Sécurité sociale, soit 5 554 euros par mois (contre 8 fois actuellement). Ils utilisent deux
arguments contradictoires : il serait injuste de verser de fortes retraites publiques à des cadres
de longues espérances de vie : les cotisations retraite inciteraient ces cadres supérieurs mobiles
à quitter la France. Ces cadres de haut niveau ne verraient donc pas l’avantage que la retraite
publique représente pour eux, compte tenu de leur longue espérance de vie ?
En sens inverse, il faut rappeler que les cadres paient 1,7 point de cotisations CNAV sur la
totalité de leur salaire ; la plafonnement des cotisations retraites serait un argument pour
plafonner aussi les cotisations maladie (12,05 points) et famille (5,4 points).
La tranche C, de 4 à 8 plafonds, a été créée par les partenaires sociaux, à la demande des
syndicats de cadres… Peut-on la supprimer sans négociation ? Elle ne donne droit à des
prestations à taux plein qu’à partir de 65 ans, ce qui limite la force de l’argument sur l’aubaine
pour les cadres à longue durée de vie. On pourrait certes limiter l’assiette à 4 fois le plafond,
mais l’enjeu financier est très faible.
Le risque d’un plafond fixé trop bas est qu’il inciterait les cadres supérieurs à réclamer à leurs
entreprises des systèmes de retraites sur-complémentaires et à l’État des avantages fiscaux
pour leurs primes. Cela ferait l’affaire des assurances privées... Et une fois que ces cadres
auraient des caisses autonomes pour leurs retraites, pourquoi n’en réclameraient-ils pas aussi
pour la maladie ou le chômage ou la famille ?
105
Et la fonction publique ?



Selon BP, un système unifié entraînerait de fortes baisses du niveau des
retraites dans la fonction publique qui serait alignée sur le privé. Est-ce
vrai ? Actuellement, les fonctionnaires ont un taux de remplacement de
75 % du dernier salaire indiciaire, soit, avec un taux de prime moyen de
20 %, un taux de remplacement de 62,5%,
le même taux
approximativement que le privé… Ce taux passe à 50 % pour les hauts
fonctionnaires dont le taux de prime est de 50 %. La marge de baisse est
faible.
BP écrivent que les fonctionnaires de catégorie A connaissent de fortes
progressions salariales en toute fin de carrière. Mais, est-ce vrai ? Ont-ils
des références précises ? La plupart des fonctionnaires de catégorie A, les
attachés ou les enseignants du primaire ou du secondaire, n’ont guère de
promotion après 45 ans. La pratique actuelle de geler le point de la
fonction publique fait que de nombreux fonctionnaires subissent 10 à 15
années de baisse de salaire réel avant leur retraite.
Il est saugrenu d’écrire : « les marges financières sont considérables et
pourraient permettre une compensation salariale de grande ampleur : à
long terme une progression de 40 % du salaire brut des fonctionnaires
pour une dépense de l’État inchangée ». Pour quelle baisse des retraites ?
106
Faut-il un rééquilibrage automatique ?

Le rééquilibrage peut se faire sur les cotisations ou sur les prestations.

L’automaticité peut réduire les efforts pour augmenter l’emploi.

La France a un mécanisme structurel d’équilibrage puisque la durée
requise d’activité doit augmenter comme l’espérance de vie.

La Suède et la Finlande ont un mécanisme structurel d’équilibrage
puisque la pension, à un âge donné, dépend de l’espérance de vie de la
cohorte.

L’Allemagne a introduit un ajustement structurel puisque la retraite baisse
quand se dégrade le ratio retraités/actifs.

Un mécanisme qui dépend trop rapidement des réserves/recettes et des
engagements est dangereux surtout si les réserves sont investies sur les
marchés financiers.

Il est normal que le système soit déficitaire en période de mauvaise
conjoncture.
107
Le rééquilibrage automatique en Suède

Le système suède est en principe équilibré puisque le rendement des
cotisations est revalorisé au taux de croissance du salaire. Les pensions sont
revalorisés comme les salaires -1,6%.

Il existe un premier mécanisme d’équilibrage structurel qui est que, à âge et
carrière donné, le niveau de la pension baisse comme l’espérance de vie, ce
qui tend à obliger les actifs à travailler plus longtemps.

En fait, il existe un deuxième « mécanisme automatique d’équilibrage » On
calcule le ratio : « Réserves+cotisations à recevoir/ pensions à verser ». Si le
ratio est inférieur à 1, il réduit la croissance des droits acquis et le niveau des
retraites déjà liquidées. Il n’y a pas d’ajustement sur les cotisations.

En 2009, la croissance des salaires est de 0,3% ; celles des prix de -0,3% ; le
ratio a chuté à 0,9672. Les retraites devraient baisser de -1,3 %-3,2%=-4,5%.
En fait, elles ne baisseront que de 3%. Les cotisations notionnelles subissent
une perte de 1,7%. Le mécanisme automatique aboutit à répercuter
rapidement sur les pensions les fluctuations de l’activité et des marchés
financiers.

Le système suédois n’est pas un modèle parfait.
108
Quelles réformes ?

Page 74, BP proclament que leur système sera automatiquement équilibré. « La réforme
que nous proposons permet de facto de mettre en place un système de retraite
financièrement équilibré à long terme ». Mais ceci suppose que les salariés acceptent des
retraites beaucoup plus faibles ou qu’ils travaillent plus longtemps (et que les entreprises
acceptent de les maintenir au travail). Méfions-nous des vendeurs de recettes miracles.

Les projets de système par points ou de comptes notionnels visent à permettre la
poursuite de la baisse du taux de remplacement.

Il faut augmenter l’emploi des seniors par la mobilisation sociale et l’action dans les
entreprises plutôt que par la pression sur les salariés et l’arbitrage individuel ; par la durée
de cotisations requise plutôt que par l’âge.

Il faut indexer la hausse requise de la durée de cotisations sur la situation de l’emploi des
seniors.

Il faut tenir compte de la pénibilité de l’emploi, de l’usure, de la différence d’espérance de
vie.

Il faut garantir le taux de remplacement et non mettre sur pied un système où le niveau
des retraites sera la seule variable d’ajustement.

Dans ce cadre, faire converger les régimes un système uniforme à points, oui, mais avec
des garanties fortes sur le niveau des taux de remplacement, leur évolution (donc
salaire/salaire), avec la possibilité d’augmenter les cotisations et avec un taux de
rendement qui tient compte de la durée de cotisation, et pas de l’âge. L’objectif pourrait
être un taux de remplacement net de 75% sous le plafond, de 45 % au dessus. Soit, en
brut, 2% par année sous le plafond, 1,2% au dessus.
109
Débats au COR.









Le débat porte essentiellement sur la CNAV, en oubliant les régimes de fonctionnaires
et les régimes spéciaux. Ce sera délicat politiquement.
La question : « comment serait gérer un régime unique » n’est pas abordé.
La question du pilotage est passée sous silence : faut- il ajuster par une baisse
automatique des prestations ? Faut-il garantir un taux de remplacement et ajuster par
les cotisations, en dernier recours ? Comment concilier mobilisation pour l’emploi des
seniors et ajustement automatique ?
Les simulations réalisées avec Prisme montre que l’on peut passer à un système par
points, qui distribuerait le même montant de prestations.
Elle suppose que tous les mécanismes de solidarité serait retranscrits dans le
nouveau système. Mais ceci ne va pas de soi.
La simulation suppose que la décote persiste, donc la notion d’annuité…Est-ce
compatible ? La surcote est supprimé. Le gain à la poursuite d’activité est réduit.
Il a été choisi le système prix/prix et pas salaire/salaire. Ceci n’est pas dans la logique
du système et nuit aux personnes à carrières longues. Le système salaire/prix
entraînerait une dérive permanente. Il faut un système salaire/salaire.
Le réforme favoriserait les personnes à carrières courtes et poly-pensionnés. Les
carrières longues ne sont pas gagnantes (en raison du systèmes prix/prix). Pour les
carrières normales, le taux de remplacement serait de 38,9% (au lieu de 41,5% et
jadis de 50%).
Le passage à un régime en comptes notionnels permettrait une baisse de 7% des
pensions en 2050, (hors équilibrage automatique).
110
Les jeunes et la retraite…






Les futures générations vivront plus longtemps. Elles auront le choix entre cotiser beaucoup plus ;
accepter une forte baisse du niveau de vie à la retraite ou partir plus tard à la retraite. Ce choix doit être
effectué quelque soit le système.
Le système français est un système public, social, basé sur la répartition. La société s’engage à
assurer un niveau de vie satisfaisant aux salariés âgés que les entreprises ne veulent plus employer,
niveau de vie équivalent à celui des actifs. C’est un plus du Modèle social français : le salarié (du moins
celui de salaire faible ou moyen) n’a pas à épargner pour sa retraite, comme il n’a pas à épargner pour
la maladie ou l’éducation de ses enfants. C’est un contrat social particulier, une chaîne entre les
générations : chaque génération reçoit une retraite correspondant à celle qu’elle a assurée à ces
parents. Chaque génération est gagnante puisqu’elle vit plus longtemps que ces parents.
Le système peut être adapté aux circonstances. A chaque période, la société a le droit de revoir le
calcul des pensions pour maintenir un ratio satisfaisant entre pension et salaire et de revoir les
conditions de départ à la retraite (à condition de fournir un emploi aux travailleurs seniors jusqu’à l’âge
de la retraite). Il n’y a donc pas de poids excessif à l’avenir sur les futures générations : il faudra
simplement partager équitablement le PIB et assurer un emploi pour les seniors qui ne seront pas à la
retraite.
La rentabilité de la retraite par répartition est égale à celle du taux de croissance de l’économie plus le
taux de croissance de la durée moyenne de retraite, soit de l’ordre de 2,25% par an, en terme réel pour
les années à venir. L’allongement de la durée de vie ne réduit pas la rentabilité du système. Le taux de
cotisation est plus fort mais le système assure une retraite satisfaisante durant une retraite plus longue.
Face à l’allongement de la durée de vie, un système par capitalisation pose les mêmes problèmes
qu’un système par répartition. Chacun doit faire individuellement le même choix : cotiser plus, travailler
plus longtemps, courir le risque d’avoir une faible retraite.
Avec la capitalisation, la rentabilité est incertaine puisqu’elle dépend des fluctuations des marchés
financiers. Sur une longue période, on peut espérer une rentabilité de 3,5% en terme réel (pour un
portefeuille 50% action de rentabilité 6,5% et 50% obligations de rentabilité 2%-0,75% de frais), mais
avec une forte volatilité. La répartition fait courir un risque politique, mais celui-ci est limité.
111
Les jeunes et la retraite…





La génération qui remettrait en cause le système serait spoliée puisqu’elle devrait à la fois
assurer une retraite à ses parents et se constituer un capital pour financer sa retraite par
capitalisation. Chaque génération doit savoir qu’elle supportera à son tour les remises en
cause des retraites qu’elle imposerait à ses parents. Elle a donc plutôt intérêt à maintenir
le contrat social inter-générationnel.
Le risque n’est donc pas dans la suppression brutale du système, mais dans sa
dégradation progressive.
Le contrat inter-générationnel est donc particulier puisqu’il est imposé à la nouvelle
génération, qui en hérite. En sens inverse, la génération active investit dans l’élevage de
ses enfants. Aucune génération n’a le droit de dire : je refuse l’héritage du contrat social,
dette et retraite, de même qu’aucune ne peut dire : je refuse d’élever des enfants.
C’est le rôle de l’Etat que de garantir le système, d’assurer l’équité inter-génerationnelle
et d’éviter qu’une génération ne brise la chaîne.
Les jeunes actifs peuvent avoir l’illusion qu’ils payent actuellement à fonds perdus pour
les retraites et les dépenses de santé de leurs parents. Mais leurs cotisations leur ouvrent
des droits socialement garantis : ceux d’avoir à leur tour des prestations vieillesse, santé
et dépendance. Le système va perdurer. En, sens inverse, imaginons que ce système
public n’existe pas : les actifs devraient payer des primes pour se constituer une retraite
par capitalisation et pour couvrir leurs dépenses de santé (actuelles et celles qu’ils auront
à supporter pendant leur retraite) et pour le risque de dépendance : quelle serait le niveau
des primes que demanderait une assurance privée pour couvrir les dépenses de santé et
de dépendance jusqu’au décès et pour offrir une prestation retraite qui couvrirait le risque
d’allongement de la durée de vie et celui des fluctuations boursières ? Le système social
ne pèse pas plus sur les jeunes actifs qu’un système privé.
112
Les jeunes et la retraite…

La réforme de 2003 n’a donné aucune garantie aux salariés sur l’évolution du taux de
remplacement. De 2002 à 2009, le pouvoir d’achat des retraites n’a pas augmenté.
Aucune garantie n’a été donnée quant au financement du système de retraite : la loi ne
s’engage pas à augmenter, si nécessaire, les taux de cotisation. Les jeunes générations
peuvent donc craindre que le niveau de leur retraite sera extrêmement faible ; ceci peut
développer chez elles, le sentiment de cotiser pour rien, d’être exploité par les
générations les plus âgées et peut les pousser à se tourner vers la capitalisation.

Les dispositifs de retraite par capitalisation (le Perp et le Perco) peuvent constituer une
menace pour le système par répartition, d’autant plus que des avantages fiscaux
exorbitants ont été donnés au Perco, qui bénéficie aux salariés stables et bien payés des
grandes entreprises privées. Les banques et les assurances continuent des campagnes
de publicité visant à semer le doute sur le montant futur des retraites. Mais la crise
financière de 2007-2008 a décrédibilisé la retraite par capitalisation. Celle-ci ne peut
constituer qu’un complément de retraite pour les cadres à haut revenus.

La généralisation de la retraite par capitalisation obligerait à un fort taux d’épargne
aujourd’hui qui pèserait sur les ménages (en réduisant la consommation) ou sur les
entreprises (qui supporteraient une partie des primes). Elle obligerait à un prodigieux
développement des marchés financiers. Pour financer entièrement sa retraite par
capitalisation, chaque salarié devrait accumuler environ 12 fois son salaire annuel au
moment de son départ ; les fonds de pension devraient accumuler 6,8 fois le PIB. La crise
a bien montré qu’une telle accumulation induirait une formidable instabilité financière.
113
Et la capitalisation ?


Fin 2007, le Fonds de réserves des retraites (FFR) n’avait accumulé que 34,5 milliards
d’euros. Le FRR a comme ressources 65 % du prélèvement de 2 % sur les revenus de
placement et de patrimoine, éventuellement les excédents de la CNAV et du FSV (mais
celles-ci sont actuellement déficitaires) et des recettes exceptionnelles ; soit 1,5 milliards
d’euros par an en 2006 et 2007. Le FRR place ses fonds pour 60 % en actions, 30 % en
obligations. La rentabilité de ses placements étant, en principe, supérieure aux taux
d’intérêt payés sur la dette publique, on pourrait concevoir que l’Etat s’endette pour
financer le FRR. Mais comme les avoirs du FRR ne viennent pas en déduction de la dette
publique (au sens de Maastricht), le gouvernement hésite à se lancer dans cette stratégie
spéculative (peu rentable de plus si la Bourse n’est pas dynamique). Fin 2008, le fonds
n’avait plus que 27,7 milliards, puis 28,8 milliards à la mi-2009 ; sa performance
annualisée n’est que de 0,9 %, soit -0,7% l’an en terme réel. La répartition fait courir un
risque politique, mais celui-ci est limité. En 2020, le FRR devrait avoir accumulé au mieux
6 % du PIB, qu’il dépenserait en 30 ans, soit une contribution de 0,2 point de PIB par an
au financement des retraites, un montant trop faible pour être significatif.
Le gouvernement a sagement écarté la capitalisation comme solution au problème des
retraites. Comme il faut de toute façon payer les retraites en cours et celles dues aux
actifs qui ont déjà cotisé, l’introduction massive de la capitalisation obligerait les actifs
d’aujourd’hui à cotiser deux fois : une fois pour payer les retraites de la génération
précédente, une deuxième fois pour constituer le capital nécessaire pour financer leur
propre retraite. De plus, après la chute de la Bourse en 2001-2002, la capitalisation
apparaissait risquée et peu rentable. La crise financière actuelle rend cette option encore
moins attrayante. Par contre, la Loi de 2003 facilitait la constitution de compléments de
retraite par capitalisation. Ces compléments peuvent intéresser les cadres et les nonsalariés, dont les taux de remplacement sont relativement bas, mais pas les travailleurs
menacés de ne pouvoir atteindre la durée de cotisation pour une retraite à taux plein.
114
Et la capitalisation ?

Trois dispositifs ont été mis en place. Le PERP permet aux actifs d’épargner individuellement pour leur
retraite ; les sommes investies sont exonérées de l’IR en échange d’une sortie obligatoire en rente
viagère imposable. Cette formule a trois avantages : elle ne réduit pas les ressources de la Sécurité
sociale ; elle n’introduit pas de distorsion entre les salariés ; elle ne fournit pas d’avantages fiscaux
excessifs. Par contre, son succès est problématique car les Français répugnent aux placements
viagers, qui les privent de la liberté d’utiliser ou de léguer leur capital et l’avantage est limité par rapport
à l’assurance-vie.

Le PERCO, plan d’épargne retraite collectif, est alimenté par des versements des salariés et par un
abondement de l’employeur dans la limite de 4 600 euros par an. Cet abondement bénéficie
d’exonérations de cotisations sociales. Les plans ne sont pas soumis à imposition à la sortie en cas de
sortie en capital. Ces mêmes exonérations de cotisations sociales sont confirmées pour les PERE et
les régimes sur-complémentaires, mais dans ce cas les rentes sont imposables.

Les exonérations fiscales accordées sont justifiées dans le cas du PERP; plus importantes dans le cas
des PERE (les fonds échappent aux cotisations sociales) et exorbitantes dans le cas de l’abondement
du PERCO (ni cotisations sociales, ni IR). Ces deux derniers dispositifs privent de ressources la
Sécurité sociale, jouissent d’une rentabilité forte mais artificielle (obtenue grâce à la non-imposition
sociale), creusent l’écart entre les salariés des grandes entreprises privés (qui en bénéficient) et les
autres (salariés des PME ou salariés du public) qui en sont exclus. Le développement de ces plans
risque de saper la retraite par répartition.

La logique de la convergence public-privé et l’équité fiscale voudraient que tous les éléments de
rémunération soient soumis aux cotisations sociales.

Fin 2007, 3 millions de contrats individuels (PERP ou PREFON) ont été souscrits, 1,3 million de contrat
Madelin (pour les professions indépendantes), 450 000 contrats PERCO-PERE et 3 millions de
contrats de type retraite-entreprise. Mais les sommes investies sont relativement faibles : en 2007, le
total des versements a représenté 10,5 milliards contre 225 milliards pour les cotisations aux régimes
obligatoires. Ces contrats ont versé 4 milliards de prestation contre 233 pour les régimes obligatoires.
115
Quatre priorités




La première est de lancer une vaste mobilisation sociale pour l’emploi des 55-60 ans
aujourd’hui ; des 60-62 ans dans 10 ans ; des 62-65 ans dans 20 ans. Les limites d’âge
dans les offres d’emplois doivent devenir illégales ; toutes les professions doivent être
repensées pour permettre des carrières jusqu’à 62 ou 65 ans, en ménageant les
reconversions nécessaires. Les syndicats doivent réclamer que les entreprises
s’engagent dans des politiques d’embauche et d’emploi des seniors. Il faut augmenter
l’emploi des seniors par la mobilisation sociale et l’action sur les entreprises plutôt que par
la pression sur les salariés ; par la durée de cotisations requise plutôt que par l’âge.
Il faut éviter que la réforme des retraites ne place dans des situations difficiles des
travailleurs seniors que les entreprises ne voudraient pas embaucher et qu’un nombre
important de travailleurs ne soit contraint de partir à la retraite sans avoir droit à la retraite
à taux plein. Aussi, faudrait-il aussi différencier les conditions de départ à la retraite selon
la pénibilité du travail, l’usure et l’espérance de vie et lier l’allongement de la durée de
cotisations à l’état de l’emploi des 55/65 ans.
Il faut garantir la situation relative des titulaires du minimum vieillesse et fournir certains
gains de pouvoir d’achat aux retraites, en particulier les plus faibles. Il faut uniformiser et
simplifier le système des prestations non-contributives mais maintenir la réversion, les
avantages familiaux. Il faut donner des garanties solides aux jeunes générations sur le
niveau futur des retraites, en fixant un niveau cible de taux de remplacement différencié
selon le niveau de salaire.
Pour garantir parfaitement le système des retraite par répartition, le gouvernement et les
partenaires sociaux doivent annoncer clairement que c’est par la hausse des cotisations
que le système sera si besoin équilibré, une fois effectués les efforts nécessaires en
matière de recul de l’âge de fin d’activité, à taux de remplacement globalement fixe.
116
A1.Taux de cotisation sociale en janvier 2009
Plafond =2859 euros.
CSG-CRDS
Sécurité Sociale :
•Maladie-maternité
•Vieillesse (sous plafond)
•Vieillesse (sur plafond)
•Famille
Accident du Travail (taux
moyen)
ARRCO/AGFF(sous plafond)
AGIRC/AGFF (sur plafond)
Chômage et AGS
CSAPAH
Divers
Total (sous plafond)
Total (sur plafond)
… Patronale
… Salariale
7,76
12,80
9,90
1,60
5,40
0,75
6,75
0,10
2,30
5,70
3,80
4,1
0,30
3,05
43,55
2,44
14,16
43,71
8,75
21,50
20,83
117
A2. Dépenses (en milliards d’euros) et effectifs (en milliers) des régimes en
2006
Régimes…
Minimum vieillesse
Régime général
Régimes comp.salariés
ARRCO
AGIRC
IRCANTEC
Fonctions publiques
Fonctionnaires Etat
CNRACL
Ouvriers de l’Etat
Régimes spéciaux
SNCF
IEG
Mines (CANSSM)
Marins
RATP
Autres
Régimes agricoles
Exploitants agricoles
Salariés agricoles
Non salariés
Organic
Cancava
Cnavpl-CBNF
Total
Pensionnés
directs
Pensionnés
dérivés
Bénéficiaires/
Cotisants
609
16 740
10 200
850
0,64
18 060
3 684
2 512
8 109
1 686
1 345
3 049
428
305
0,53
0,52
0,60
2 455
1881
54
478
165
143
10
39
44
77
1 468
591
61
747
189
109
207
74
32
136
348
62
26
334
110
41
158
45
13
17
0,67
0,33
1,4
1,9
1,5
0,90
28,6
2,5
0,87
1,9
593
659
1 773
1 839
73
539
3,1
3,2
750
607
566
785
564
161
211
238
41
1,30
1,39
0,33
Prestations
Cotisants
2,7
77,5
55,3
35,4
18,3
1,6
49,7
39,0
9,1
1,6
13,2
4,7
3,3
1,9
1,1
0,8
1,4
14,3
8,9
5,4
8,7
3,9
3,4
1,4
166,1
118