RQGG-2009-A1- Prévention des complications de la dysphagie
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Transcript RQGG-2009-A1- Prévention des complications de la dysphagie
Prévention des complications de la
dysphagie du sujet âgé
Christine FEUILLET, orthophoniste
Denise STRUBEL, gériatre
Service de Gérontologie
CHU Nîmes
HYGIENE
RISQUES ET QUALITE
CHEZ LA PERSONNE AGEE
LYON 24 SEPTEMBRE 2009
Spécificités de la dysphagie chez
le sujet âgé
Grande fréquence des dysphagies du SA
Gravité des complications +++
Nombreuses pathologies en cause dont
certaines iatrogènes
Difficulté de diagnostic
méconnaissance fréquente
Prise en charge pluridisciplinaire
Données épidémiologiques
La prévalence de la dysphagie
augmente avec l’âge
Prévalence :
à domicile: 8-15%
en institution: 30-50%
en hospitalisation: 10-15%
Intergroupe de Pneumo-Gériatrie SPLF-SFGG Rev
Gériatrie 2009; 34: 187-208
Complications chez le sujet âgé
inhalations
dysphagie
retentissement
psychosocial
Atteinte
de la QDV
blocage
alimentaire
pneumopathies
de
déglutition
déshydratation
dénutrition
cachexie
décès
Complications aigues
Syndrome de pénétration par inhalation d’un
corps étranger avec suffocation, toux,
dyspnée, désaturation asphyxie
Syndrome de Mendelson par inhalation de
suc gastrique pneumopathie chimique
syndrome de détresse respiratoire
Pneumopathie d’inhalation avec toux, fièvre,
expectoration purulente, volontiers
récidivante
Déshydratation
Complications retardées
Carences sélectives
© Dénutrition protéino-énergique cachexie,
escarres
© Retentissement psychologique :
- anorexie,
Surmortalité
- dépression,
- repli,
- opposition à l’alimentation
- isolement social …
©
Etiologies
Affections neurologiques:
- pathologie vasculaire cérébrale
- syndromes parkinsoniens
- maladie de Charcot (SLA)
- maladie d’Alzheimer
- tumeurs
Maladies musculaires: myasthénie,
dermatomyosite, dystrophie oro-pharyngée
Dysphagie dans la pathologie
vasculaire cérébrale
Prévalence de 35 à 45% à la phase aigue, pour
les AVC ischémiques et hémorragiques,
corticaux ou sous-corticaux
Ils persistent chez 10 à 30% des malades audelà de 3 mois
La dysphagie existe souvent dans l’état lacunaire
et fait partie du tableau clinique du syndrome
bulbaire
Dysphagie dans la maladie de
Parkinson
Dysphagie fréquente, souvent fluctuente, se
majorant avec l’évolution
Etude de 71 maladies de Parkinson idiopathiques
en exploration vidéo-radiographie:
- 2 bilans normaux seulement
- anomalies: trouble de la mobilité laryngée,
stase des sinus piriformes, des vallécules,
aspiration supraglottique et glottique, anomalies
diverses de l’œsophage
Leopold et Kagel Dysphagia 1997
Dysphagie dans la maladie
d’Alzheimer
Troubles du comportement alimentaire :
boulimie, oubli de déglutir, succion…
Dysphagie haute : atteinte des phases
orale et pharyngée de la déglutition :
préhension, préparation, propulsion et
vidange
Apraxie de la déglutition
Etiologies
Etiologies iatrogènes :
- sonde trachéale, sonde naso-gastrique
- médicaments altérant la vigilance
- médicaments provoquant une xérostomie
(anticholinergiques)
- médicaments entraînant des dyskinésies
(neuroleptiques)
- médicaments perturbant la motricité
oesophagienne (antiCa, nitrés, BDZ)
Affections générales : états de déshydratation, fins de
vie, cachexie extrême
Etiologies
Affections stomatologiques:
- troubles odontologiques: édentation, prothèse
- xérostomie (souvent iatrogène)
Affections ORL:
- tumeur ORL
- candidose oropharyngée
- ostéophyte cervical géant ? (mal Forestier)
- dysfonctionnement du SSO (achalasie ou
indentation du cricopharyngien)
- diverticule de Zencker ++
- troubles moteurs oesophagiens
S’alimenter
Fonction vitale
Nutrition
Équilibre
Santé
Fonction sociale
Relations
interpersonnelles
Affects
PLAISIR
Vieillissement normal et
déglutition
- ralentissement des mouvements
- réflexes moins vifs
- de la force musculaire linguale et
pharyngée
- des sécrétions salivaires
- des perceptions sensitives et
sensorielles
hypophagie
Vieillissement pathologique et
déglutition
– Troubles de la vigilance
– Troubles de la posture (hémiplégie, position vicieuse…)
– Troubles du contrôle salivaire (stase, bavage)
– Troubles de la préhension labiale
– Troubles de la coordination linguo-masticatrice
– Troubles de la propulsion
– Troubles de la vidange buccale et/ou pharyngée
dysphagie
RISQUES
•
•
•
•
•
Déshydratation
Dénutrition
Pneumopathies
refus alimentaire
Surprotection par
l’entourage avec
angoisse de la FR
• Comportement à
risque de l’entourage
soignant et familial
OBJECTIFS
• Assurer la sécurité
respiratoire
• Maintenir l’hydratation
et une nutrition orale
quotidienne totale ou
partielle
• Maintenir
l’alimentation-plaisir
Reconnaître la dysphagie
Equipe
Pluridisciplinaire
Famille
REPERER
dysphagie
EVALUER
Orthophoniste
Repérage des troubles
dysphagiques
ATTENTION AU CARACTERE
VARIABLE DES TROUBLES
Troubles variables en intensité
Troubles fluctuants d’un jour à l’autre, d’un
moment à l’autre selon fatigue et vigilance
Troubles variables selon l’installation du
malade
Aggravation avec l’évolution de la maladie
Repérage des troubles
dysphagiques en dehors des repas
Encombrement bronchique fréquent
Pneumopathies inexpliquées à répétition
Pics fébriles à 37°8 – 38°
Perte de poids
Refus alimentaire
Repérage des troubles
dysphagiques aux repas
AUDIBLES
MAJEURS
- Toux violente isolée
- Toux récidivante
- Râclements
pharyngés
Qqs sec après déglut :
-Toux discrète
DISCRETS - Hemmage
- Modif de la voix : voix
voilée, voix mouillée
VISIBLES
- Suffocation, apnée
prolongée
- Changement coloration
visage, doigts, lèvres
- Stagnation en bouche
- Résidus oraux après la
déglutitions
- Doubles déglutitions
- Larmoiement
- Rhinorhée
Evaluation de la déglutition
Bilan effectué par l’orthophoniste
Objectifs :
* déterminer le mécanisme et la
sévérité de la dysphagie
* élaborer la CAT
adaptation des textures et
postures
information et éducation de la
famille et des soignants
Evaluation de la déglutition
Conditions : environnement calme, position
assise
Examen : état buccal, praxies oro-faciales
Evaluation TCFD de Bordeaux (test de
capacité fonctionnelle de déglutition)
- déglutition de volumes croissants de liquides
puis de solides (1/2 càc 1 càs), 4 fois
- déterminer la frontière entre déglutition
fonctionnelle et FR
La fausse route (FR) et la toux
FR = passage d’un corps
étranger dans les voies
aériennes
Toux = mécanisme réflexe de
protection des voies aériennes
La toux est un bon indicateur de fausse route
CAT devant une toux :
- évaluer la qualité et la fréquence de la toux
- ne pas minimiser les petites FR récurrentes
Les différents types de FR
FR avant
la
déglutition
FR pendant
la
déglutition
FR après
la
déglutition
défaut de contrôle oral du bolus
avec fuite postérieure du bolus
Épaissir les liquides
dans le larynx ouvert
- trouble de l’attention
- ingestion goulue
- prise de parole
Guidance verbale
Environnement et
ton apaisants
dysfonctionnement pharyngé
- espacer les bouchées
avec stases liquides ou solides - alterner les textures
qui vont déborder dans le larynx pour optimiser la
vidange
Autres troubles dysphagiques
- incoordination linguomasticatoire
Anomalie de la
- éparpillement du bolus
phase
dans la cavité buccale
préparatoire - résidus oraux
- préhension et préparation
Apraxie de la
déglutition
Textures
homogènes
- incitation verbale,
du bolus normales
gestuelle, mimique
- propulsion intermittente ou
- participation de la
impossible
main dominante du
- le malade garde en
patient
bouche
Principes de prise en charge
Adaptation de l’environnement
Adaptation de la posture
Adaptation des textures
Aspects médicaux de prévention
Adaptation de l’environnement
Environnement calme, sans élément
distracteur
Encouragement verbal et/ou par la
mimique, aide si nécessaire
Adaptation des ustensiles (cuillère à café)
Adaptation des postures
Le soignant doit adapter sa position au
patient (même hauteur ou plus bas)
Alimentation en position assise
Anté-flexion de la tête pour les liquides
Adaptation des textures
Choisir la texture la plus appropriée à la
personne à un moment donné
Epaissir les liquides pour les ralentir
Couper, lier et hacher les solides (sauce,
beurre) pour les faire glisser ou les mixer
Piler les médicaments
Aliments à risque
Aliments
à
grains
Aliments
qui
s’émiettent
Riz
semoule
Biscottes
Croissants
Biscuits durs Brioche
Pain
Sauf trempés
Aliments
Légumes
secs
fibreux
Sauf trempés
et croûtes
enlevés
Salade verte
Fenouil
Céleri
Épinards
branche
Légumes
à
enveloppes
Petits pois
Pois chiche
Haricots secs
Maïs
Tomates avec
peau
Fruits
à
jus, à peau
et à pépins
Orange
Ananas
Raisin
Description des menus
Dysphagique strict
Dysphagique large
Aliments mous qui s’écrasent à la
fourchette
Aliments souples à mastiquer
Petit pain au lait beurré
Betteraves écrasées très cuite
Maquereau mayonnaise
Légumes tendres cuits sans peau
Pizza à pâte molle
Raviolis
Pâté, mousse de foie
Jambon coupé à petits bouts
Œuf dur mayonnaise
Omelette moelleuse
Pâtes bien cuites
Camembert
Pomme cuite
Courgettes
Carottes sautées
Chou fleur
Pomme de terre
Omelette nature
Poisson en sauce
Quenelles béchamel
Boudin sans peau
Pavé frais, demi sel, crème de gruyère
Laitages et compotes
Banane écrasée
Épaississement des liquides
Liquides
Épaississement 1
Épaississement 2
Épaississement 3
Consistance « nectar »
consistance « crème »
Consistance « gelée »
Boissons
chaudes à base
de lait
+ blédine
+blédine
+blédine
2 cuillères à soupe dans 4 cuillères à soupe dans 6 cuillères à soupe dans
1bol de 250 ml
1bol de 250ml
1bol de 250 ml
potage
Potage mixé
+ purée
3 c à s dans 1/3 de bol
+ purée
6 c à s dans 1/3 de bol
Eau
+ compote
1 c à s dans 1 verre de
100 ml
+ compote
2 c à s dans 1 verre de
100 ml
+ compote
3 c à s dans 1 verre de 100
ml
Boissons
fraîches
Amidon commercial
1 dose
Amidon commercial
2 doses
Amidon commercial
3 doses
Ou eau gélifiée
Aspects médicaux de prévention
Revoir liste médicaments
Soins dentaires ++
Vaccinations (pneumocoque)
Indications chirurgicales (rares)
Gastrostomie per-endoscopique (GPE)
indiquée si :
- pathologie vasculaire cérébrale
- maladie de Charcot
Pas indiquée dans la démence sévère
Conclusion
La dysphagie est grave par ses complications
Le repérage précoce des troubles permet de
limiter les complications
L’évaluation du mécanisme permet :
d’informer, éduquer et impliquer l’entourage
familial et soignant
d’adapter les textures
Objectifs : Maintien d’une fonction de déglutition
optimale
Maintien de la qualité de vie
Observations de cas de
dysphagie
Observation de Mme A…
Obs de Mme A.. 72 ans
AVC ischémique sylvien D en sept 2007
sur FA paroxystique hémiplégie G
massive avec dysarthrie (droitière)
Patiente célibataire, ancienne tabagique
Pathologie associée : maladie bipolaire
traitée par Modecate* au long cours
Entrée en SLD en oct 2007 en raison
d’une absence de récupération
neurologique
Obs de Mme A.. 72 ans
Evolution en SLD :
Episodes de bradycardie sous Cordarone
Cordarone
Holter : épisodes de ACFA paroxystiques
maintien des AVK
Pemphigoide bulleuse en janvier 2009
traitement cortisone locale
Poids : 62 kg lors AVC, 53kg en avril 2009,
55,5 kg en sept 2009
Madame A.
1er bilan orthophonique
AVC ischémique massif , ½ plégie gauche
Paralysie faciale, dysarthrie
Bilan à J 3 : Patiente somnolente, réveillable
mais peu réactive.
Encombrée. Bouche sale.
Test de déglutition avec compote: garde en
bouche. Stop essai.
Madame A
2eme bilan orthophonique
Bilan à J 10 : Amélioration de l’état
général et de la vigilance.
Soins de bouche.
Test de déglutition avec compote: petit
retard au déclenchement du réflexe de
déglutition , fatigabilité, mais pas de
fausse route.
CAT après le 2eme bilan
Reprise alimentaire prudente à la c.à café
Eau gélifiée touillée, desserts puis mixé
progressivement
Médicaments pilés fin
Madame A
3eme bilan orthophonique
Bilan à J 20 : évaluation des liquides :
Fausses routes immédiates, même pour les
petits volumes.
évaluation des solides :
Difficulté à la manipulation du bolus, recrache
les petits morceaux.
CAT après le 3eme bilan
Liquides épaissis E2 (jus de fruits,
soupe, café…) l’épaississement
correspond à celui d’un yaourt à boire.
Epaississement 1, 2 ou 3: faible,
moyen ou fort.
Poursuite alimentation mixée.
Madame A
4eme bilan orthophonique
La patiente est très demandeuse de boire. Elle a peu à
peu repris la déglutition des liquides. Mais, des fausses
routes intermittentes aux liquides persistent.
Toux grasse. Problème de posture du côté ½ plégique
Bilan à 6 mois : évaluation des liquides : toux
intermittente, après la déglutition, au bout de plusieurs
gorgées, en fin de verre. Voix voilée après la déglutition.
évaluation des textures avec
morceaux solides souples: préparation et propulsion du
bolus OK, mais résidus oraux joue gauche après la
déglutition.
CAT après le 4eme bilan
Liquides autorisés sous surveillance : pétillants,
glacés ou chauds et en salle à manger, sinon
liquides épaissis E1. Posture assise, tronc calé,
anté-flexion de la tête.
Texture solide adaptée: mise en place d’un
menu dysphagique avec aliments souples
homogènes, écrasables à la fourchette.
Observation de Mme R…
Obs de Mme R. 72 ans
Consultation mémoire juin 2008 : déficit cognitif
progressif depuis 1 an diagnostic de maladie
d’Alzheimer (MMS 14)
Installation assez rapide de troubles du langage
et déficit cognitif évolutif de type « déclineur
rapide » malgré le traitement par donézépil
complété par mémantine
Entrée en SLD en juin 2009 devant l’aggravation
à domicile et la survenue de fugues
Obs de Mme R. 72 ans
Evolution clinique : aggravation des
troubles du langage quasi-mutisme
avec dysarthrie majeure anarthrie
Perte de poids progressive de 4 kg
Pas de perte d’autonomie motrice
(déambulation ++) ni de trouble du
comportement
Madame R
1er bilan orthophonique
Stases salivaires orales et bavage ainsi que
stases salivaires pharyngées (voix brouillée) ef
fausses routes à la salive par hypodéglutition.
Lors de la prise alimentaire, comportement de
précipitation (bouchées trop vite enchaînées)
Résidus linguaux après la déglutition (risque
de FR avant la déglutition)
CAT après le 1er bilan
Ralentir le rythme: espacer les bouchées pour
permettre la double déglutition et ainsi la
vidange buccale.
Aide d’un soignant qui lui donne ou qui retient
sa main.
Alimentation mixée à la c. à café, eau gélifiée
soigneusement touillée médicaments pilés fin.
Madame R
2eme bilan orthophonique
Bilan réalisé 4 mois plus tard : Très nette aggravation
de la dysphagie.
Apraxie bucco-faciale majeure avec défaut de
vidange spontanée de la salive, bavage permanent et
fausses routes salivaires.
Lors de la prise alimentaire, persistance d’un
comportement de précipitation.
Test de déglutition avec compote: incoordination
des gestes de préparation, propulsion et apnée: bruit
à la déglutition, résidus oraux, bavage, toux après la
déglutition.
CAT après le 2eme bilan
L’alimentation orale ne peut plus être
assurée en sécurité.
La gastrostomie per-endoscopique est
envisagée.
PEC des fausses routes salivaires.
Conclusions
Repérage des troubles par tout soignant et
sensibilisation des aidants
Evaluation pluridisciplinaire avec rôle de
l’orthophoniste+++ pour l’évaluation
PEC pluridisciplinaire (soignants et
diététicienne) pour éviter les complications
aigues et subaigues qui entraînent une
surmorbidité et une surmortalité