Droits des minorités ethniques en Chine

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Transcript Droits des minorités ethniques en Chine

Droits des minorités ethniques
en Chine
Ting-sheng Lin, UQAM, le 9 juillet 2012
Mise en contexte historique
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Dynastie des Qin : de -221 à -206 avant J.-C.
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Dynastie des Han : de -206 avant J.-C. à 220 après J.-C.
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Han de l'Ouest : de -206 avant J.-C. à l'an 9 après J.-C.

Han de l'Est : de 25 à 222 après J.-C.
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Epoque des Trois Royaumes (Wei, Shu et Wu) : de 220 à 265
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Dynastie des Jin et Dynasties Nord/Sud : de 265 à 581
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Dynastie des Sui : de 581 à 618

Dynastie des Tang : de 618 à 907

Song du Nord : de 960 à 1126; Song du Sud : de 1126 à 1279

Dynastie des Yuan : de 1279 à 1368

Dynastie des Ming : de 1368 à 1644

Dynastie des Qing : de 1644 à 1912

La Chine impériale a été conquise au moins 5
fois par une minorité:
a.
Wei du Nord 386-534: le Tobas
Liao 907-1125: les Khitan
Chin: 1115-34: les Jurchen
Yuans: 1260-1368: les Mongols
Qing: 1644-1911: les Mandchous
b.
c.
d.
e.

Version officielle: ils ont gardé le pouvoir parce
qu’ils se sont eux-mêmes assimilés à la culture
chinoise- vision des historiens chinois, qui
ramène la perspective que tous les non-Han ne
pouvaient que vouloir s’assimiler aux Han,
supérieurs
Les minorités en Chine
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Les minorités nationales occupent 64% du
territoire chinois et ne constituent en tout
que 8,5% de la population chinoise (117,7
millions sur 1370 millions)
Elles sont concentrées surtout dans 12
provinces de l’Ouest
Les minorités constituent un enjeu
politiquement beaucoup plus important que
leur poids démographique le suggère: elles
sont associées à des questions d'unité du
territoire et de sécurité
La politique d’intégration en Chine
Au début du PCC, avant qu’il soit au pouvoir, entre 1925 et
1935, perception que le Tibet, le Xinjiang et la Mongolie
étaient des États autonomes qui s’uniraient volontairement à
la Chine dans une république fédérée. Le PCC reconnaît le
droit à l’autodétermination
 La Constitution du Soviet du Jiangxi met l’accent sur l’égalité
des minorités, leur droit à l’auto-détermination dans le cadre
chinois y compris celui de se séparer complètement de la
Chine et de former des États indépendants. Langage copié
sur celui de la Constitution d’URSS, reflétant la vision de
Lénine sur les nationalités
 Après 1949: position de Mao. Il garde le langage de la
Constitution du Jiangxi mais uniquement pour rallier les
minorités (contre le Guomindang) et les apaiser et donc, n’a
pas du tout l’intention de mettre en œuvre le droit à l’autodétermination et à la sécession
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
Vision de Mao: les minorités auraient des droits
égaux à ceux des Han, seraient encouragées à
développer leur propre culture, ne seraient pas
forcés d’apprendre le chinois, pourraient
contrôler leurs affaires intérieures tant qu’elles
resteraient partie d’un État unifié
La Mongolie extérieure s’est séparée de la Chine
en 1945 et elle est devenue un État tampon entre
la Chine et l'URSS (Conférence Yalta)
Ce précédent de séparation a fait peur à Mao,
qui redoutait que Staline n’incite le Xinjiang à faire
de même. C’est dans ce contexte que le régime
d’autonomie ethnique régionale a vu le jour,
solution du PCC à la menace de séparation
Unifier la nation en élargissant la
famille chinoise
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Rhétorique de la libération, présentation des frères aînés
chinois venus aider les minorités, frères plus jeunes, à
développer leurs langues, coutumes et religions + les libérer
du «féodalisme»
Création des régions autonomes vient de la promesse
bafouée du droit à l’auto-détermination
Vision du PC comme quoi les régions autonomes allaient
pacifier les minorités en attendant que l'immigration Han
change la composition de la population
Donc on leur donne un droit limité de s’auto-gouverner, de
maintenir leurs coutumes, traditions , langues et religions
On voit émerger la rhétorique du fardeau de l’Homme Han:
aller éclairer les peuples arriérés : Les Han sont à l’avantgarde de la révolution
Le statut de minorité
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Le statut de minorité est conféré par l’État.
Il est enregistré à l’état civil / il est même possible de
changer d’ethnie si on déclare cela au bureau qui émet les
hukou (livret de résidence, comme un carnet de famille)
On a vu plusieurs non-Han se faire enregistrer comme Han
pour échapper à la persécution et plusieurs Hans
s’enregistrer comme «ethniques» pour bénéficier de la
politique des naissances plus avantageuse
Le travail de regroupement des minorités a été effectué par
un groupe de chercheurs, des sciences sociales, qui se sont
appuyés sur la définition de Staline et ont regroupé les
minorités en 55 groupes. Les Han forment le 56e
Staline (1913) : «la nation est une communauté stable,
historiquement constituée, de langue, de territoire, de vie
économique et de formation psychique qui se traduit dans la
communauté de culture»
Les mesures importantes (‘50)
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Le recrutement de cadres issus des minorités
La nomination des élites des minorités à des postes en vue dans l’appareil
d’État (à l’APN) et à la Conférence Consultative…(entre 1954 et 1964,
12,2 % en 1954 et 14,5% des membres de l’APN étaient issus des
minorités)
Jusqu’au milieu des années 1950, politique prudente du PCC sur la
transformation des institutions économiques et sociales des minorités, les
réformes agraires etc.
Politiques fiscales et économiques préférentielles pour les régions
ethniques
L’État se lance dans des projets économiques d’envergure ..qui se
traduisent entre autres par la relocalisation d’entreprises de machineries
dans le Sud-Ouest et le Nord-Ouest afin d’accélérer l’industrialisation
Politique d’affirmative action pour l’admission dans les collèges et
universités , octroi prioritaire de bourses aux étudiants issus des minorités
Effort d’amélioration de la santé publique des minorités
Recension des arts et traditions, langues, littératures, vêtements, diètes
alimentaires, mariages, religions…
La lutte des classes (fin ‘50 – fin ‘70)
Arguments idéologiques justifiant la destruction de
l’identité culturelle : les questions ethniques
deviennent des questions de classe
 L’ethnicité et la religion ont été condamnées, taxées
de «révisionnistes» et abolies (interdiction de
pratiquer la religion)
 Les diètes, cultures, costumes et minorités sont
présentées comme arriérées (campagne contre les 4
vieilleries) et interdites
 Les gouvernements des régions autonomes , pourvus
en personnel issu des minorités, perdent leur
influence et pouvoir au profit de la domination du
comité du Parti et du Secrétaire du Parti et ensuite,
par les Gardes Rouges

Après le révolution culturelle

Renaissance des croyances religieuses + rituels des minorités permettant
aux clergés, notamment tibétain et musulman, de reconquérir en partie
leur influence sociale perdue

Politique du PCC et de l’État d'augmenter la représentation des minorités
dans les instances

2.8 millions de membres du PCC sont issus des minorités en 1990 mais
cela représente en fait 5.7 % du membership total (5.5 % en 1957)

Par rapport aux cadres, augmentation significative: avant 1980 moins de 3%
des cadres venaient des minorités, en 1990 on parle de 6%

Pratique d’«affirmative action» - on n’applique pas la politique des
naissances, on forme des cadres des minorités (quotas pour accès à
l’éducation supérieure, emplois réservés…)

Durcissement envers le Tibet - 1988, émeutes à Lhassa, 2008, émeutes y
compris dans le Tibet historique

Durcissement au Xinjiang depuis 1997 (émeutes de Yining) + émeutes de
juillet 2009 (Document No. 10)
Loi sur l’autonomie régionale
nationale de 1984 (révisée en 2001)

Position du PCC: cette loi confère aux régions autonomes plus de
pouvoirs que la Constitution n’en confère aux provinces

Référence à l’unité de la nation chinoise, la subordination au gouvernement
central

Les organes d’auto gouvernement des régions autonomes doivent
maintenir l’unité du pays et garantir la mise en œuvre de la Constitution et
autres lois dans lesdites régions
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Les organes d’auto gouvernement des régions autonomes doivent placer
les intérêts de l’État au dessus de tout

Tous les gouvernement populaires des régions autonomes sont des
organes administratifs de l’État sous la direction unie du Conseil d’État et
lui sont subordonnés
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Les règlements relatifs à l’exercice de l’autonomie régionale doivent être
soumis au CP de l’APN pour approbation avant d’être mis en application
Critères pour mesurer le degré
d’autonomie
un pouvoir législatif indépendant
 un exécutif élu localement
 un pouvoir judiciaire indépendant
 les arrangements de partage du pouvoir
avec le gouvernement central dans les
domaines comme les ports, l’exploitation
des ressources naturelles , les pouvoirs
policiers…
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La campagne du développement de
l’Ouest (xibu kaifa) - 2000
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Clairement inclut le Tibet historique et le Xinjiang, aux
populations et religions très diverses
Officiellement: Chongqing, Gansu, Guizhou, Qinghai,
Shaanxi, Sichuan,Yunnan + les 5 régions autonomes
Images véhiculées: région sous-développée, peuplée de
minorités + concentration de grande pauvreté (or,
variation dans ces données entre les composantes de
l’Ouest)
Formes de l’aide: infrastructures, restructuration
industrielle, éducation, transferts technologiques
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En pratique, les investissements de l’État se sont
concentrés sur les infrastructures de transports : voies
ferrées, rénovation d’aéroports , autoroutes….
Mise sur pied de politiques préférentielles fiscales etc,
pour attirer les investissements d’autres parties de la
Chine et de l’étranger
Groupes chinois présents: China Petroleum, China
National Electric Power Corporation , China Unicom
Groupes occidentaux: Shell (réserve de gaz dans bassin
de l'Ordos au Xinjiang, co-exploitation avec China
Petroleum, IBM qui a investi dans le parc industriel de
Xian
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Les confrontations entre le pouvoir central et les
minorités, depuis le début des réformes, ont impliqué
uniquement les tibétains et les ouighours (donc, 53
minorités sont en paix avec le pouvoir central)
Les dirigeants chinois continuent de voir l’autonomie
régionale pour les minorités comme la seule solution à
la question ethnique, et cette vision a été renforcée par
l’éclatement de l’URSS en 1991
Les priorités de Beijing: accélérer le développement
économique des régions autonomes ethniques et
maintenir la stabilité et l’unité nationale
Pour Beijing, la prospérité des minorités est l’élément
central de l’autonome régionale depuis 1978 mais ce
développement économique ne tient pas compte des
dégâts environnementaux, à l’instar de ce qui se fait
dans le reste de la Chine