Toxicomanie et anesthésie

Download Report

Transcript Toxicomanie et anesthésie

Toxicomanie et anesthésie

Dr Eric Dieye CHU Toulouse

Epidémiologie : France

2,2 millions de consommateurs de drogues illicites = 4% de la population (cannabis inclus) Consommateur occasionnel  peu de problème pour MAR Consommateurs « à problèmes » (≈ 170 000) Héroïne ( 160.000) = Plus de soucis de Santé Cocaïne (400.000), Excitants , Hallucinogènes Augmentation de la consommation + risque d’accidents périopératoires sévères voire mortels.

Polytoxicomanie

Fréquente voire constante, simultanée ou séquentielle Barbituriques et BZD

: potentialisent l’héroïne ou atténuent les effets du manque

Cocaïne ou Excitants

l’héroïne : pallient les effets sédatifs de

Opiacés de substitution légale ou non légale

: Subutex®, sulfate de morphine (Skénan®), codéine.

Cannabis et alcool +++

Prise en charge = Tâche difficile Peu ou pas de référence Articles américains récents

( interférences entre anesthésie et cocaïne)

En France : Problèmes majoritairement liés à l’héroïne. Pas de consensus ou d’études comparatives Attitude proposée

Analyse de la littérature Et l’expérience partagée.

(Services hospitaliers + ECIMUD)

Hospitalisation d'un héroïnomane

Patient

Source de problèmes

l'équipe soignante Angoissé Crainte de l'état de manque et douleur Réactions négatives Agressivité …

Etape préopératoire Fondamentale +++

Contrat de soins Consultation préanesthésique Prise en charge médicamenteuse

Préopératoire

Contrat de soins

Établir les objectifs de l'hospitalisation

· En acceptant de les limiter si le patient le désire à ce pourquoi il consulte.

L'équipe soignante s'engage

· A prévenir l'état de manque · A traiter la douleur et l'anxiété · A informer le patient (choix thérapeutiques, délais)

Le patient s'engage

. A la franchise lors de l'interrogatoire et des soins · A · · A A ne pas recourir à des produits non prescrits accepter un certain inconfort lors des phases d'adaptation thérapeutique ne pas entrer dans une logique de chantage

Préopératoire

Consultation préanesthésique

Urgences + souvent

(Abcès, fractures, plaies par arme blanche ou à feu) Interrogatoire Examen clinique Examens complémentaires -Ancienneté de la toxicomanie -Produits consommés, fréquence dosage des prises, heure de la dernière prise -ATCD pathologiques (infectieux +++) -Statut sérologique -Signes d'imprégnation ou d'état de manque -Signes de complications de la toxicomanie Aucun bilan paraclinique n’est obligatoire Fonction des données de l'interrogatoire, de l'examen clinique et la chirurgie envisagée.

Préopératoire

Examens complémentaires recommandés

ECG

: si absorption de cocaïne ou d'ecstasy,

Bilan hépatique

: si suspicion d'atteinte hépatique.

Bilan d’hémostase

: Thrombopénie induites par cocaïne + carence vit K )

Sérologies

avec accord du patient

Radiographie pulmonaire

: indications larges

ASP

: si suspicion d'ingestion de sachets (cocaïne)

TDM cérébral

: si troubles de la conscience,convulsions…

Toxiques

: si doute sur les consommations du patient

Préopératoire

Prise en charge médicamenteuse

Héroïnomane en phase aiguë d'intoxication Héroïnomane non traité en phase de sevrage Héroïnomane substitué Héroïnomane sevré

Préopératoire

Prérequis

Pas de sevrage volontaire ou non en prévision d’une chirurgie Ration morphinique de base pour pallier l'état de manque (dose « substitution ») ± ration nécessaire pour traiter la douleur Antalgiques périphériques systématiques BZD à ½ vie longue indispensable si co-intoxication (Σd sevrage sévère)

Préopératoire

Héroïnomane en phase aiguë d'intoxication

Préopératoire Aucune préparation à l'intervention Si overdose : Intubation + ventilation Proscrire naloxone

Préopératoire Héroïnomane non traité en phase de sevrage Estimation dose « réelle » quotidienne héroïne = Dose quotidienne héroïne consommée X 10 à 50% Titration par incréments de (5 à 8 mg) Jusqu’à sédation signes de manque et douleur Dose substitution de base morphine = Dose « réelle » quotidienne d’héroïne X 2 Fractionnée/4h : S/C, IM ± PSE Associer BZD Risque de surdosage Dose substitution de base morphine = Dose titrée/4h : S/C, IM ± PSE Associer BZD

Héroïnomane substitué

Éviter ou limiter BZD Méthadone chirurgie réglée Urgence Voie orale impossible Subutex ALR prévue Chirurgie peu douloureuse (EVA ≤4) AG prévue Chirurgie douloureuse Voie orale impossible Dose habituelle le matin Morphine aux mêmes doses si voie orale impossible Fractionnée/4h : S/C Doses habituelles le matin ± supplement de buprénorphine S/C Morphine S/C Fractionnée/4h

Héroïnomane sevré

Risque réel de voir réapparaître une dépendance ( 20 %) Risque + important avec morphiniques de forte affinité Privilégier ALR Eviter morphiniques Utiliser analgésiques non morphiniques Utiliser clonidine, neuroleptiques ou BZD Eviter BZD ½ vie longue (Tranxène® 50, Rohypnol®)

Peropératoire

Etape peropératoire

Difficultés d'abord veineux

-Induction sévoflurane -indications larges VVC si chirurgie moyenne ou majeure.

Prévention des accidents par exposition au sang

-Pas de réalisation systématique de sérologies -Strict respect des précautions universelles

Appareil d'anesthésie protégé par filtre antibactérien et antiviral efficace.

Choix de l’anesthésie

Peropératoire

Choix de l’anesthésie

En urgence tout toxicomane =

Estomac plein

que soit l'heure de sa dernière prise alimentaire.

(Effet des opiacés, stress et douleur, tabac). quelle

Préférer ALR si possible

Permet de dissocier le traitement de l’état de manque et celui de la douleur Effet analgésique per et surtout postopératoire Privilégier ALR avec cathéter postop si chirurgie importante Eviter produits adrénalinés si prise récente de cocaïne (réaction adrénergique)

Anesthésie générale

Si indispensable pour l’acte Chirurgical Si acte bref et peu douloureux Si désir du patient de dormir Privilégier morphiniques de forte Affinité ( Alfentanil, sufentanil)

Chez le cocaïnomane

Eviter les Situations d‘hypercatécholaminémie circulante Risque HTA, Angor, IDM, Trouble du rythme, dissection aortique Patients anxieux, algiques ou agités Anesthésie légère Anesthésiques arythmogènes (halothane) ou sympathomimétiques (kétamine) Administration de catécholamines exogènes (éphédrine, infiltration d'adrénaline)

Etape postopératoire

Si AG Titration morphine + Dose titrée/4h S/C, IM ± PSE + Propacétamol + AINS ± BZD Si ALR Maintenir cathéter si douleur importante + Morphine ration de base + Propacétamol + AINS ± BZD Retour progressif ration morphine de base Reprise du traitement substitutif habituel (Méthadone + Subutex) + Analgésiques non morphiniques Equipe spécialisée + psychiatre

Conclusion

La prise en charge périopératoire d'un patient toxicomane est médicalement et psychologiquement difficile Cette dernière s'est considérablement dédramatisée depuis la généralisation des programmes de substitution En définitive, elle repose surtout sur la formation et l'information de tous les intervenants concernés

Anesthésie et VIH

Anesthésie et interférences médicamenteuses

2 familles d’antirétroviraux Inhibiteurs de la transcriptase inverse

Zidovudine (AZT, Rétrovir®) Didanoside (ddI, Videx®) Zalcitabine (ddC, Hivid®) Lamivudine (3TC, Epivir®), Stavudine (d4T, Zérit®) Analogues nucléosidiques

Antiprotéases

Ritonavir (Norvir®) Saquinavir (Invirase®) Indinavir (Crixivan®) Nelfinavir (Viracept®).

Inhibiteurs de la transcriptase inverse

Peu d'interactions médicamenteuses en dehors de l‘AZT AZT  métabolisme hépatique avec glucuroconjugaison Eviter médicaments inhibant la glucuroconjugaison de l‘AZT  Potentialisation des effets indésirables

Antibiotiques Antifongiques Anticonvulsivants Quinidine AINS Uricosurique Hypnotiques

Pénicilline G, amoxicilline, pipéracilline, céfopérazone, chloramphénicol, vancomycine, rifampicine Miconazole Phénobarbital, carbamazépine, phénytoïne, acide valproïque Phénylbutazone, kétoprofène Probénécide Propofol (Aucun cas de retentissement clinique rapporté dans la littérature)

Antiprotéases

Potentiel d'interaction avec tous les médicaments Peu de médicaments de l'anesthésie testés. Inhibiteurs du cytochrome P4503A4 (CYP3A4) +++ Et autres cytochromes (CYP2D6, CYP2C19 , P450

Médicaments interdits Avec toutes les antiprotéases

Rifampicine, cisapride et alcaloïdes de l'ergot de seigle,

midazolam

et triazolam, astémizole et terfénadine

Avec le ritonavir

Mépéridine, piroxicam, propoxyphène,

diazépam

et

zolpidem amiodarone

, encainide, flécainide, propafénone, quinidine et dérivés, bépridil, clorazépate,

Principaux effets indésirables des inhibiteurs de la transcriptase inverse Hématologique

Anémie, leucopénie,thrombopénie

Digestif Neurologique

Nausées, vomissements, ulcérations buccales,douleurs abdominales, diarrhée, pancréatite, hépatotoxicité Myopathie, neuropathies périphériques

Principaux effets indésirables des Antiprotéases Digestif Neurologique

Nausées, vomissements, diarrhée,douleurs abdominales, pancréatite, hépatotoxicité Paresthésies périphériques et péribuccales Perturbations du goût.

Quels médicaments choisir pour l'anesthésie ?

Médicaments n'interférant par avec le métabolisme des analogues nucléosidiques et des antiprotéases.

Eviter Utilisables Thiopental Kétamine ; Fentanyl, alfentanil, sufentanil Morphine, (AZT) BZD ( diazépam, midazolam ++) Bupivacaïne Propofol Etomidate Oxazépam, flunitrazépam, lorazépam Desflurane ++ Atracurium et cisatracurium Lidocaine ALR déraisonnable si neuropathie périphérique (complication fréquente des traitements par analogues nucléosidiques)

Quand interrompre et reprendre le traitement antirétroviral Pas de consensus

Arrêt  Ascension rapide de la charge virale Mais reprise du traitement  retour à l'état antérieur.

En l'absence de stratégie validée

Continuer les antirétroviraux jusqu'à la prémédication Réintroduction des antirétroviraux dès la reprise du transit si l'arrêt du transit se prolonge  AZT IV éventuel

RISQUE INFECTIEUX AU BLOC OPÉRATOIRE Grande susceptibilité des patients VIH + vis-à-vis d'infections nosocomiales

Règles rigoureuses d'asepsie

Infections opportunistes ( tuberculose)

transmission aérienne

. Intercaler filtre bactérien et antiviral efficace Changer matériel de ventilation y compris circuits après l’AG Éviter le passage en SSPI

Prévention des accidents d’exposition aux sang

Respect des précautions universelles Si chimioprophylaxie indiquée : délai le +court possible (< 6 h)

Risque de transmission virale VIH VHC VHB

0,3 % après effraction cutanée 0,04 % lors d'une projection sur une muqueuse 3 % (10 fois supérieur) 30 % la charge virale du patient semble un élément important .

Conclusion

Nombreuses interférences médicamenteuses avec les antirétroviraux Eviter l’arrêt des antirétroviraux autant que possible Prévention des risques infectieux

Héroïne et grossesse

Tant la poursuite de la consommation d'héroïne que le sevrage sont dangereux  Avortements spontanés   Sevrages fœtaux in utero et à la naissance, Retards de croissance intra-utérins. la substitution améliore le pronostic obstétrical.

 1 000 et 2 000 grossesses par an sous Subutex®  160 à 320 sous méthadone Nombreuses inconnues  Choix du produit de substitution  Traitement du sevrage du nouveau-né  Allaitement Accouchement ou la césarienne  Maintenir la substitution + relais par morphine si besoin.  Proposer analgésie péridurale chaque fois que possible.

Equivalences

8 mg subutex 60 mg méthadone 60 mg morphine 30 mg héroïne

Produit

Méthadone

Spécialité Présentation

Sirop monodoses 5;10;20;40;50 mg

Doses usuelles

40-80 mg/j 1 prise/jour Début 20-30 mg/j adapter

Cadre d'utilisation

AMM pour la substitution Primoprescription uniquement dans centre de substitution agréé Buprénorphine Sulfate de morphine Codéine Codéine + paracétamol Subutex ® Moscontin Skénan ® Néocodion ® ® Efferalgan ® , Dafalgan-codéine ® Cp sublinguaux 0,4 ; 2; 8 mg Cp 10;30;60;100 mg Gel 10;30;60;100 mg Cp 15 mg Sirop 16 mg Cp 22,5 mg codéine + 500 mg paracétamol Début 0,8 à 2 mg/j Entretien 0,8 à 16 mg 1 (2) prises/j 60 à 120 mg/j 2 (3) prises/j 0,9 à 1,8 g/j 3 à 4 prises/j AMM pour la substitution Primoprescription par tout médecin Pas d'AMM pour la substitution Tolérés pour le sevrage ambulatoire en médecine de ville Automédication tolérée Automédication. Toxicité hépatique du paracétamol

La mise à disposition d'agonistes par voie orale (méthadone, morphines orales de cinétique longue et brève) pour la période périopératoire pourrait résoudre en partie ces difficultés, mais elle ne dispose pas de cadre légal et n'est pas documentée actuellement