Les nouveaux enjeux du cancer de prostate en 2011

Download Report

Transcript Les nouveaux enjeux du cancer de prostate en 2011

JIABS 16 -17 juin 2011
Problématique du dépistage du
cancer de la prostate en 2011 :
Entre dépistage controversé
et sur-traitement avéré
C. EGROT
Hôpital Tenon, PARIS
Cancer de prostate et dépistage : un peu d’histoire
1860 : Première idée du dépistage par Sir Henry THOMPSON (TR)
1938 : Les GUTMAN découvrent les PAP
1979 : Ming C.
WANG caractérise et
purifie le PSA
1970 : Richard J. ABLIN
met en évidence un Ag
spécifique de prostate
différent des PAP
1986 : La FDA
autorise le dosage du
PSA dans le suivi des
KP traités
2002 : L’AFU recommande le
dosage du PSA dans le
dépistage du cancer de
prostate
1987 : Thomas A. STAMEY
PSA : Marqueur tumoral
1992 : L’ACS recommande le
dosage du PSA dans le
dépistage du cancer de
prostate
2009 : L’ERSPC
objective la notion de
sur-traitement
Le PSA : 1er marqueur tumoral plasmatique
- Glycoprotéine de 237 acides aminés, d’un poids de 34kDa
- Sécrétée par les cellules épithéliales de la glande prostatique
- Enzyme protéolytique de la famille des kallicréines humaines (= hk3)
- Présente dans le sperme à des concentrations élevées (0,3 à 3 mg/mL)
- Fonction : clivage des séménogélines I et II et fibronectine, et liquéfaction
du coagulum séminal
- Présente dans le sang à des concentration 105 à 106 fois inférieures (de
l’ordre du nanogramme par mL)
- Sous deux formes : PSA libre (30%) et PSA lié : 1-antichymotrypsine (70%)
et 2-macroglobuline.
Biologie du PSA : standards et harmonisation
1999
2005
1985
1990
1994
Standard de Yang (Pros-Check PSA)
Standard Hybritech (Tandem-R PSA)
Standard de Stanford (90:10)
Hybritech = Yang x 0,55
90:10 = Hybritech x 0.80
Actualité du cancer de prostate (1)
En 2010 :
71 577 nouveaux cas
8791 décès
1990 - 2010 :
Incidence : + 305%
Mortalité : - 37%
Actualité du cancer de prostate (2)
1er cancer en fréquence
34% des cancers de l’homme (19,5% de tous les cancers)
Touche 1 homme sur 6 entre 60 et 79 ans
3ème cause de décès par cancer chez l’homme
Coût : 600 à 700 millions d’Euros par an
7 à 8 millions de dosages du PSA en France en 2010
Dont 30% sont prescrits après 75 ans…
2009, une année charnière
26 Mars 2009, New England Journal of Medicine
ERSPC
182 000 hommes de 55 à 74 ans
1993 – 2003
2 bras : dépistés vs « contrôle »
PSA dosé tous les 4 ans
Seuil pour BP : 3 ng/mL
Suivi médian : 9 ans
PLCO
73 693 hommes de 55 à 74 ans
1993 – 2001
2 bras : dépistés vs « contrôle »
PSA & TR/an pendant 6 & 4 ans
Seuil pour BP : 4 ng/mL
Suivi médian : 7 ans
Deux études discordantes
ERSPC
PLCO
Mortalité spécifique : - 20% dans
le sous-groupe des 55-69 ans
(- 30% en tenant compte des noncompliants et des contaminations
du bras contrôle)
Pas de différence en mortalité
spécifique à 7 ans
Incidence : + 71% (bras dépisté)
Incidence : + 17% (bras dépisté)
Stades avancés : - 41%
Stades avancés : pas de différence
SUR-TRAITEMENT
- 1410 hommes à dépister et 48
à traiter pour éviter un décès
- 30% de cancers insignifiants
PLCO : de nombreux biais
1- Population américaine largement soumise au dépistage par le PSA
= contamination du bras « contrôle » :
PSA : 34% avant inclusion ; 40 à 52% au cours du suivi…
2- Pas de standardisation de la prise en charge
(Test de dépistage positif non suivi de prise en charge)
3- Publication trop précoce des résultats à 7 ans
Lancet Oncol, 2010 : Bras suédois de l’ERSPC
32 898 hommes
de 50 à 64 ans
1995 - 2008
Bras dépisté vs contrôle
PSA dosé tous les 2 ans
Seuil pour BP : 3 ng/mL
Suivi médian : 14 ans
Diminution de près de 50% de la mortalité spécifique à 14 ans de
recul entre le bras dépisté et le bras contrôle
= 1 décès évité pour 12 cancers détectés chez 293 hommes dépistés
Hugosson J, Carlsson S, Aus G, Bergdahl S, Khatami A, Lodding P, Pihl CG, Stranne J, Holmberg E, Lilja H. Mortality results from the Göteborg
randomised population-based prostate-cancer screening trial. Lancet Oncol 2010 Aug;11(8):725-32
Les nouvelles données du cancer de prostate
Le taux de PSA avant 50 ans serait un excellent facteur prédictif de cancer
de prostate à long terme, jusqu’à 30 ans:
Taux de PSA avant 50 ans
Risque de cancer de la prostate
< 0,5 ng/mL
1 - 7,5%
0,5 < PSA < 1
x 2,5
2 < PSA < 3
x 19
Lilja H, Ulmert D, Björk T, Becker C, Serio AM, Nilsson JA, Abrahamsson PA, Vickers AJ, Berglund G. Long-term prediction of prostate cancer
up to 25 years before diagnosis of prostate cancer using prostate kallikreins measured at age 44 to 50 years. J Clin Oncol, 2007
Notion de population à risque : En cas de parents d’origine africaine ou
d’antécédent familial de cancer de prostate, un PSA compris entre 0,7 et
2,5ng/mL est associé à un RR = 14,6 de cancer de prostate chez les hommes
de 40 à 50 ans
Loeb S, Roehl KA, Antenor JA, Catalona WJ, Suarez BK, Nadler RB. Baseline prostate-specific antigen compared with median
prostate-specific antigen for age group as a predictor of prostate cancer risk in men younger than 60 years old. Urology, 2006
Les nouveaux enjeux du dépistage
Les nouveaux enjeux du cancer de prostate
ORIENTER LE DÉPISTAGE : ciblé sur les populations à risque
LIMITER LE SUR-TRAITEMENT : identifier les cas relevant d’un
traitement curateur conventionnel ; proposer des alternatives
thérapeutiques :
-Surveillance active : Option thérapeutique curative qui déplace le
moment du traitement tout en restant dans la fenêtre de curabilité.
- Watchfull waiting (abstention-surveillance) : Option thérapeutique
palliative (patients EV < 10 ans)
- Traitements focaux
Orienter le dépistage (1) : Définir les populations à risque
Deux entités génétiques de cancers de prostate :
- Forme multifactorielle (95%), qui comprend certaines formes familiales (20%)
résultant d’une combinaison défavorable de variants hérités du père et de la
mère.
Définition : Au moins 2 cas de cancer de prostate chez des apparentés du 1er ou
du 2nd degré
- Forme héréditaire (5% des cancers de prostate, 15% des cancers avant 55 ans),
résultant d’une mutation génétique héritée du père ou de la mère à l’origine
d’un risque très élevé (80%) de cancer de prostate ou d’un autre cancer….
Définition : Au moins 3 cas de cancer de prostate chez des apparentés du 1er ou
du 2nd degré, OU au moins 2 cas diagnostiqués avant 55 ans.
Orienter le dépistage (2) : Recommandations de l’AFU 2010
Dépistage biologique :
Pas de modification des modalités de dépistage depuis 2002 ; cependant :
Evaluation plus fine du risque de cancer :
Ex1 : Si avant l’âge de 50 ans,
- PSA < 0,5 : risque de KP < 7,5%
- PSA compris entre 2 et 3 = risque de KP x 19!
Ex2 : Si à 60 ans le PSA < 1 = Risque de décéder d’un KP = 2%
De nouvelles perspectives :
- 45 – 54 ans : Dépistage organisé pour les groupes à risque
- 55 – 69 ans : Dépistage organisé, annuel si PSA > 1, tous les trois ans si <1
- 70 – 75 ans : Dépistage individuel
- Après 75 ans : Dépistage non recommandé
NB :
- Les différentes isoformes du PSA libre sont encore à l’étude.
- L’utilisation de la densité de PSA n’est pas recommandée.
- Le test urinaire PCA3 n’est pas recommandé en pratique clinique.
Limiter le sur-traitement (1) : Surveiller
QUELS CRITÈRES POUR LA SURVEILLANCE ACTIVE? :
Critères de sélection : Cancers de prostate à (très) faible risque évolutif (âge > 70)
- PSA < 10 ng/mL ; Gleason < 7 ; T2a (d’Amico 1)
- 1 à 2 BP + sur au moins 10 prélèvements
- +/- longueur tumorale < 3mm
- +/- IRM à la recherche d’un T3 (15 à 20%)
Risque : La sous-évaluation initiale
Modalités de la surveillance
- PSA / 3 ou 6 mois
- TR / 6 à 12 mois
- Re-biopsies entre 6 et 18 mois
Traitement curateur si PSADT < 3 ans OU Grade 4 ou 5 sur re-biopsies
QUELS CRITÈRES POUR L’ABSTENTION-SURVEILLANCE (WATCHFULL WAITING) ? :
Cancer de prostate d’Amico 1 (à bon pronostic) ; patients à EV < 10 ans
Limiter le sur-traitement (2) : Et les traitements focaux?
Traitements conventionnels:
Incontinence
Impuissance
Autres
5 - 10%
70%
Sténose anastomotique 3%
RTE
< 5%
40 - 60%
Cystite radique : <5%
Rectite radique : 5%
Sténoses urétrales : 5%
K de vessie radio-induits
Curiethérapie
< 5%
10%
Rétention : 10 - 15%
Urétrite radique
Sténose urétrale
Rectite radique
Chirurgie
Traitements focaux:
- Curiethérapie
- HIFU (Ablatherm)
- Cryothérapie
- PDT (Photodynamic Therapy)
Conclusion
Conséquences du dépistage :
- Augmentation de l’incidence du cancer de prostate
- Augmentation des diagnostics précoces et KP à bon pronostic
- Diminution des formes avancées
- Diminution de la mortalité spécifique > 30% sur 20 ans
- Sur-traitement, surcoût du dépistage, anxiété masculine
Problématique du dépistage : Les cancers de prostate latents
Les enjeux :
- Dépister de manière ciblée
- Mieux caractériser (IRM, PCA3, marqueurs tissulaires)
- Surveiller, Stadifier (Protocoles Leibowitz, Cussenot)
Cussenot O, Comperat E, Bitker MO, Roupret M. From active surveillance to the concept of secondary prevention. Eur Urol, 2011