Transcript psychose
PSYCHOSE
Maladie mentale grave atteignant globalement la personnalité du patient et justifiant le plus souvent une prise en
charge thérapeutique intensive avec parfois la nécessité d’une hospitalisation contre le gré du patient.
Le terme psychose reste général et est habituellement suivi de qualificatifs précisant :
L’évolution : aiguë ou chronique,
L’étiologie : organique, affective, etc.
La nature : schizophrénique, dépressive, etc.
Nous l’avons vu, le terme de névrose désigne les pathologies mentales les plus légères, celles dont le patient est
conscient ce qui permet de les traiter avec l’accord du sujet. Alors que les psychoses nécessitent souvent d’être
traitées contre la volonté du sujet.
La psychose se caractérise par rapport à la névrose. Les cas border-line ou états-limites se situent à cheval sur
cette frontière
Critères spécifiques de la psychose :
Gravité des troubles, déficiences importantes (qui conduisent quand elles sont définitives à un véritable handicap) ;
Absence de conscience de la morbidité des troubles (c’est ainsi qu’un délirant croit à la réalité de son délire et n’admet pas qu’il s’agit d’une
maladie nécessitant un traitement) ;
Etrangeté, bizarrerie des troubles ressenties par l’entourage avec un sentiment de malaise (dans la mesure où il n’est pas possible de leur
donner une explication ou d’en discuter avec le psychotique) ;
Difficulté de la communication, parfois même incommunicabilité totale du psychotique (celui-ci fuit souvent le contact, s’enfermant
dans son silence, quand il accepte de parler il utilise parfois un langage incompréhensible bourré de néologismes) ;
ce repli sur soi (pouvant confiner à l’autisme) s’accompagne d’une véritable rupture avec la réalité extérieure (qui est déniée et remplacée par
une néo-réalité personnelle au sujet, connue de lui seul, incommunicable à autrui). C’est cette perturbation profonde de la relation du sujet à
la réalité qui est le critère essentiel de la psychose. Cette altération du sens de la réalité au profit de la vie imaginaire et fantasmatique vient
donner corps à des manifestations psychiques telles que : hallucinations (visuelles, auditives, cénesthésiques …), délires, troubles du langage, ..
PSYCHOSE
Jacques André : si l’on demande à un enfant névrotique : « avec quoi tu vois ? », il répond « avec les yeux ». « Avec le
soleil » répond l’enfant psychotique.
« Avec quoi tu entends ? ». « Avec les oreilles dit l’un, « avec la musique » dit l’autre.
Je est un autre, un autre est je. Le psychotique ne sait pas où commence dedans, où finit dehors.
La psychose signe donc l’abolition des limites dedans-dehors et elle réactive des angoisses archaïques de
morcellement sous des formes diverses : angoisses d’intrusion, de persécution, d’éclatement, de
dispersion, etc.
Formes majeures des troubles psychotiques :
La schizophrénie
La paranoïa
La psychose maniaco-dépressive.
Genèse de la psychose : Leurs causes relèvent le plus souvent à la fois de l’organogenèse et de la psychogenèse
Du côté de l’organogenèse : (Rq : les facteurs ne sont jamais exclusifs)
Facteurs génétiques (le risque de psychose est accru dans la parenté d’un sujet psychotique par rapport à la population générale)
Facteurs chronobiologiques (notamment pour les psychoses maniaco-dépressives)
Facteurs immunologiques
Facteurs neuropsychophysiologiques (variations fines du volume cérébral)
Facteurs endocriniens (atteintes thyroïdiennes dans les psychoses mono et bipolaires)
Carences vitaminiques (en vitamines B6 et PP chez certains schizophrènes)
Infection possible par certains virus
Intoxications (en particulier avec des drogues comme le LSD, la mescaline, les amphétamines, etc.)
Mais surtout : hypothèses biochimiques : excès de dopamine, rôle des peptides opioïdes et plus généralement des neuromédiateurs
synaptiques.
Du côté de la psychogenèse :
La psychanalyse propose des éléments explicatifs concernant certaines opérations
mentales à l’œuvre dans la psychose : la projection délirante (Freud), la forclusion du
Nom-du-Père (Lacan), les clivages de l’objet et du moi (M. Klein). Ces éléments sont
utiles dans la psychothérapie des psychotiques mais ne peuvent à elles seules rendre compte
de l’apparition et du développement d’une psychose.
Forclusion du Nom-du-Père – Lacan : forclusion : terme emprunté au vocabulaire juridique signifiant la déchéance d’un
droit qui n’a pas été exercé dans les délais admis.
Le terme de forclusion est au centre de la théorie lacanienne des psychoses. Il marque le rejet du signifiant fondamental, pierre
angulaire sur laquelle se construit l’appareil psychique du sujet non psychotique.
Le père en tant que symbole, « le Nom-du-Père », constitue ce signifiant fondamental qui permet l’accès au stade symbolique. La
mère exerce un rôle privilégié dans la transmission à son enfant de ce premier symbole qu’est la fonction paternelle. L’exclusion
de cette représentation précipite le développement d’un fonctionnement psychotique, marqué par le défaut de symbolisation.
Exclu du fonctionnement symbolique, le sujet psychotique se réfugie dans le réel et dans l’imaginaire, prélude aux hallucinations
et au délire.
C’est dans son article « D’une question préliminaire à tout traitement possible de la psychose » que Jacques Lacan étaye sa théorie de la
forclusion et affirme que « ce qui a été forclos dans le symbolique apparaît dans le réel ». La castration apparaît alors non plus
comme une représentation symbolique mais comme une menace réelle.
Du côté de la psychogenèse : suite
Facteurs socio familiaux : pris en compte par une branche de la psychanalyse et par l’approche systémique.
L’approche systémique fait de la famille un véritable système autorégulé avec deux fonctions contradictoires : la tendance à
l’homéostasie d’une part et la capacité de se transformer de l’autre.
Homéostasie : "principe préservant la continuité de l'organisme humain dans des conditions environnementales en changement constant ... et maintenant l'équilibre dynamique
de l'individu avec son environnement social".
L’école de Palo Alto centre l’étiologie de la psychose sur un trouble de la communication : le double lien (situation dans laquelle un
partenaire émet simultanément deux messages contradictoires).
Les membres de l'équipe croyaient alors que le problème de la personne schizophrène venait de ce qu'elle a été soumise dans son enfance à une répétition de messages où le
contenu logique était contredit par le contenu affectif et relationnel, et où les messages relationnels étaient souvent confus et contradictoires, sans qu'elle ait le droit de demander
des informations. Ils reconnurent plus tard que cette hypothèse de causalité principale n'était pas fondée, même si les problèmes relationnels et de communication jouent un rôle
important chez plusieurs schizophrènes.
L’école de Lyman Wynne met l’accent sur les concepts de pseudo-mutualité et de pseudo-hostilité comme générateurs de dissociation
et de psychose à l’intérieur d’une famille.
Pseudo-mutualité : règle exigeant que dans les échanges tous les membres doivent agir comme s'ils étaient d'accord quoi qu'il se passe, au détriment de la différentiation des
personnes.
Pseudo-hostilité : règle favorisant des échanges apparemment opposés et même hostiles, mais superficiels et devant s'arrêter aussitôt qu'une certaine limite est atteinte.
Autre concept : "frontière de caoutchouc" entre les membres : frontière en constant mouvement en fonction non pas des événements vécus mais de la relation à maintenir, avec
des rapprochements et des distanciations imprévisibles et inexplicables si on ne regarde que les faits. Ce qui entraîne de la confusion, de la rigidité et l'aliénation des membres.
La psychose reste multiple à la fois dans son étiologie, dans sa structure psychopathologique et dans ses
formes nosologiques (formes conduisant à l’apparition de la maladie).
Il vaut mieux parler de psychoses et admettre un faisceau de facteurs
prédisposants et déclenchants pour expliquer l’apparition et le développement
d’une psychose chez un sujet.
Psychose maniaco – dépressive
Maladie mentale caractérisée par des dérèglements de l’humeur, qui évolue par accès se détachant plus
ou moins franchement les uns des autres et de l’état normal.
: répétition, l’alternance, la juxtaposition ou la coexistence d’états d’excitation et de dépression. Des états
maniaques, des états dépressifs et des états mixtes.
La définition de la psychose maniaco-dépressive inclut aussi les patients qui n’ont présenté que des épisodes
dépressifs, cette forme est appelée psychose maniaco-dépressive unipolaire. La psychose maniacodépressive bipolaire comporte la succession d’accès dépressifs et d’accès d’excitation.
C’est une maladie cyclique.
La psychose maniaco-dépressive est considérée comme une psychose endogène constitutionnelle dont
l’évolutivité serait peu influencée par les facteurs psychologiques et environnementaux.
L’accès maniaque :
Manie = état d’excitation. Le début est souvent brusque, le malade devenant exubérant, hyperactif et insomniaque. L’accès maniaque est parfois
marqué d’un signe prémonitoire.
Crise :
malade déambulant sans cesse, négligé dans sa tenue, tantôt hargneux, tantôt jovial.
le malade ne peut se fixer à une tâche, même routinière ; les activités se succèdent rapidement + crises d’agressivité et de colère.
logorrhée sans fin, marquée de jeux de mots, d’ellipses et d’onomatopées.
les signes physiques rendent compte du degré d’agitation : tendance à la déshydratation, tachycardie, fièvre.
dans cette agitation, les comportements instinctuels sont souvent perturbés : alcoolisation massive, hypersexualité avec exhibitionnisme.
L’insomnie est de règle, elle n’entraîne aucun épuisement.
le malade perçoit une accélération du temps.
dans ce contexte d’expansivité, les initiatives exubérantes sont nombreuses : changer d’activité professionnelle pour une autre immédiatement,
changer de résidence, partir en voyage, faire des achats inconsidérés …
Psychose
L’accès mélancolique :
Un accès dépressif de plus ou moins forte intensité succède souvent à un accès maniaque.
Généralement, c’est en quelques jours ou quelques semaines que se constitue l’accès mélancolique.
maniaco – dépressive
Crise :
l’intérêt porté aux loisirs, au travail, à la famille, à la vie sociale se dégrade.
Le sommeil se dégrade, le patient se plaint de fatigue que le repos ne répare pas.
Une inquiétude, une irritabilité, une difficulté à vivre apparaissent,
Le découragement, l’indécision, l’appréhension anxieuse de l’avenir imprègnent progressivement le déroulement de la vie quotidienne.
Sentiment pénible de tristesse constante, pessimisme pathologique dominé par le sentiment d’impuissance, d’incapacité et de dégoût de la vie.
Le sentiment d’inutilité et de mésestime de soi créent une angoisse vive.
Le temps donne l’étrange impression d’être immuable.
L’anesthésie affective, l’indifférence pour ce qui peut advenir d’heureux ou de malheureux, alterne avec des moments d’hypersensibilité
douloureuse.
L’anhédonie,. ou incapacité d’éprouver du plaisir, caractérise les instincts du déprimé
Dérèglements somatiques, troubles du sommeil, amaigrissement important. Une fatigue de plus en plus intense imprègne chaque instant de la
journée.
Sur le plan intellectuel : tout effort de concentration, d’attention ne peut être tenu et entraîne une absence totale d’initiative.
Sur le plan moteur : marqué par le ralentissement. Tous les actes de la vie quotidienne sont pénibles et sont assurés avec effort.
Les sentiments d’indignité et d’autoaccusation peuvent être responsables d’impulsions auto agressives particulièrement redoutables.
risque de suicide : dans son désespoir, et persuadé de faire souffrir les autres, le déprimé devient convaincu que seule la mort peut
être une délivrance.
Différentes formes de l’accès mélancolique :
Mélancolie délirante.
Hypocondrie
Dépressions masquées (fatigue intense, troubles du sommeil résistants aux hypnotiques, maux de tête)
Psychose maniaco – dépressive
Les états mixtes:
Au cours de ces états, des éléments d’excitation et des éléments
dépressifs sont mêlés. Humeur changeante, oscillant de la joie à
l’abattement profond.
Ces états sont intermédiaires lorsque l’humeur s’inverse après
un accès mélancolique ou un accès maniaque.
Traitement :
Neuroleptiques pendant l’accès maniaque
Antidépresseurs pendant l’accès mélancolique
+ travail psychothérapeutique : psychothérapies, les
psychothérapies comportementales et collectives semblent être
efficaces pendant la phase dépressive.
+ importance du traitement préventif des rechutes
Schizophrénie
Du grec Schizein , « fendre », et phrên, « esprit » : fractionnement de l’esprit.
Psychose grave survenant chez l’adulte jeune, habituellement chronique, cliniquement caractérisée par de signes de
dissociation mentale, de discordance affective et d’activité délirante incohérente, entrainant généralement une
rupture de contact avec le monde extérieur et un repli autistique.
Les symptômes minimaux :
La discordance ou dissociation intrapsychique : perte de l’harmonie, de l’unité et de la continuité de toute
activité mentale entrainant l’émancipation des processus psychiques qui vont de relier au hasard d’associations
fortuites. Incapacité à oublier les pistes non-primordiales créant un état de concomitance de plusieurs pensées et/ou
états psychiques
Manifestations :
Absence de rapport entre les symptômes qui semblent ainsi incohérents,
Défaut d’harmonie entre les contenus de la pensée et du vécu émotionnel et leur expression psychomotrice, gestuelle et mimique.
Niaiserie, maniérisme, rires immotivés, mouvements stéréotypés et catatoniques viennent parasiter le discours déjà peu cohérent
Langage discordant : indépendance entre l’expression verbale et l’activité intellectuelle. Les mots et les phrases exprimés n’expriment plus
véritablement la pensée du malade. C’est l’ « émancipation du langage » avec stéréotypies verbales, proverbiages répétés et néologismes fréquents.
La pensée devient « égarée », de plus en plus désorganisée : ralentissement, barrages ; son incohérence relève du « déraillement » dans
l’enchaînement logique.
L’ambivalence ou dislocation des facultés sensibles participant à la vie affective et sentimentale. Cette ambivalence se manifeste dans les
trois registres des sentiments, de la volition et de l’intelligence.
C’est la tendance à considérer dans le même instant, sous leur double aspect positif et négatif, les diverses actions psychiques. C’est une sorte d’unité
paradoxale de jugements opposés, d’idées ou de sentiments contraires qui normalement ne pourraient pas être vrais en même temps.
L’autisme : c’est à la fois un repli sur soi et une évasion de la réalité. Il apparait sous un double aspect : négatif (désinvestissement progressif de la
réalité extérieure avec perte du contact affectif, indifférence, désintérêt) ou positif (exagération de l’imagination, production délirante, etc.). u
dislocation des facultés sensibles participant à la vie affective et sentimentale. Cette ambivalence se manifeste dans les trois registres des sentiments, de
la volition et de l’intelligence.
Schizophrénie
Troubles caractéristiques :
Idées délirantes bizarres : délire d’influence, divulgation de la pensée, imposition de la pensée, vol de
la pensée.
Délire somatique
Délire de grandeur, délire religieux ou nihiliste, (ex : superstitions, idées de télépathies, 6ème sens, etc.)
Délires de persécution ou de jalousie
Hallucinations : hallucinations auditives (dans lesquelles les voix commentent les actes ou les pensées
du sujet, ou conversent entre elles)
Incohérence, associations sans aucun rapport, pensée fortement illogique,
Emoussement affectif, retrait affectif,
Catatonie ou comportement général inadapté
Symptômes résiduels :
Isolement social,
Inadaptation marquée dans le domaine du travail, des études, de la maison, (inattention)
Inadaptation quant aux soins personnels, (ex : toilette et hygiène négligées)
Traitement :
Neuroleptiques (ne guérissent pas), certains sont à action prolongée (agissent 15j – 1 mois)
+ travail psychothérapeutique : 3 catégories : psychanalytique (avec la mise en place de règle spécifiques à ce type de pathologie), thérapies
familiales (au moins pour éviter les facteurs de rechute), thérapies comportementales. Importance de la cothérapie (au moins pour séparer le
rôle du psychothérapeute de celui du médecin qui prescrit les médicaments et prend les décisions contre l’avis du malade).
Sociothérapie : accompagner la réadaptation du malade : foyers de post-cure, appartements thérapeutiques, centres d’aide par le travail, etc.
Parfois, il faudra maintenir le schizophrène dans un milieu protégé.
PARANOIA
Psychose chronique caractérisée par un délire
généralement bien construit et systématisé
s’accompagnant de troubles du jugement et de la
perception mais sans détérioration intellectuelle ni
atteinte des fonctions instrumentales
La paranoïa se manifeste par l’évolution continue d’un système délirant, durable et impossible à ébranler, qui s’instaure avec une conservation
complète de la clarté et de l’ordre de la pensée, de la volonté et de l’action.
Les délires à structure paranoïaques se caractérisent par le développement systématique et cohérent d’un drame persécutif, l’argumentation
irréductible, pénétrable et même contagieuse, la tonalité affective et agressive fondamentale, l’absence d’affaiblissement psychique notable.
Les deux grandes formes cliniques de la paranoïa :
Les délires passionnels : l’érotomanie, le délire de jalousie, le délire de revendication.
L’érotomanie : illusion délirante d’être aimé par un objet le plus souvent inaccessible (vedette, homme politique, médecin, prêtre, avocat, 8 fois /
10 l’érotomane est une femme). L’affection évolue selon 3 phases : une phase d’espoir souvent prolongée, puis la phase de déception (durant
laquelle les sollicitations sont de + en + importunes pour l’objet) puis la phase de rancune (chantage, conduites agressives, tentatives de meurtre).
Le délire de jalousie : jalousie amoureuse morbide. Elle est souvent l’expression d’une passion amoureuse inconsciente pour le rival.
Le délire de revendication : est caractérisé par le besoin prévalent et la volonté irréductible de faire prévaloir une demande que la société se
refuse à satisfaire. Le patient à la conviction inébranlable de détenir la vérité et d’être d’une entière bonne foi. Ex : délire de filiation (fille du tsar
échappée du massacre).
Les délires d’interprétation : la forme la plus fréquente est
le délire de persécution. Ce délire à interprétations multiples,
s’étend en réseau et envahit peu à peu toutes les activités du
patient. Il s’accompagne parfois d’hallucinations.
Les conduites agressives y sont très fréquentes :
dénonciations, plaintes non-justifiées à la police et au
procureur, coups, blessures et parois meurtre du ou des
« persécuteurs ».