Interview G. Mottier

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Transcript Interview G. Mottier

PORTRAIT
Interview de Monsieur Gabriel Mottier
Expert charpentier pour les championnats romands et
suisses, coatch pour les WorldSkills
Le dimanche 13 avril 2014, jour de la remise des prix
du championnat romand à Neuchâtel, nous avons
eu le plaisir de rencontrer Monsieur Gabriel Mottier
pour une courte interview sur sa fonction de chef
expert et le déroulement du championnat.
Cher Monsieur Mottier, pouvez-vous nous expliquer,
en quelques mots, votre parcours professionnel
et la manière dont vous êtes devenu chef expert
charpentier ?
Mon apprentissage a débuté en 2003 au sein de l’entreprise Swiss Chalet Henchoz Sàrl. En 2006, année des
examens, j’ai décidé de participer aux championnats romands, puis suisses en 2007. Ayant eu la chance de terminer premier, j’ai pu me rendre aux championnats d’Europe
en 2008 à Klagenfurt (Autriche). Par la suite, j’ai entrepris une formation de Technicien ES Construction bois
à Bienne puis poursuivi ma carrière dans la charpenterie
chez Hauenstein frères SA à Villars-sur-Ollon. J’ai alors été
sollicité par les experts de l’IBW Team pour devenir l’un
des leurs pour les sélections des différents championnats.
L’IBW Team est une organisaiton d’experts, chapeautés
par Holzbau Schweiz, qui choisit quelques membres parmi les anciens candidats pour entraîner et organiser les
championnats des jeunes au niveau romand, suisse et européen. Actuellement, pour coacher les candidats francophones, il y a trois romands qui font partie de ce Team :
J. Morerod, F. Bingeli et moi-même.
Que vous ont apporté les championnats auxquels
vous avez participé ?
J’ai pu rencontrer d’autres candidats qui sont, par la suite,
devenus des amis et avec lesquelles j’ai gardé contact
jusqu’à aujourd’hui. Participer aux championnats offre
aux jeunes la possibilité de développer leur réseau. Les
concours permettent aussi de rassembler les professionnels de toute la Romandie autour d’un projet commun
destiné aux jeunes qui se sont engagés dans le métier.
En quoi consiste votre rôle de chef expert
charpentier ?
Il s’agit d’effectuer, dans les grandes lignes, la planification
des championnats. Cela comporte la gestion des temps
de travail pour les différentes étapes des championnats,
l’organisation des concours (élaboration des maquettes,
listes de bois et ferrements, etc.), la supervision de la taxa-
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tion et le contrôle des notes. Cela permet également de
faire le lien entre les différents experts qui interviennent
lors des concours.
S’agit-il des mêmes tâches que pour les chefs
experts menuisier / ébéniste ou existe-t-il
des spécificités propres à la charpente ?
Les activités des experts des différents métiers du bois
sont semblables. Cela est également le cas pour les
entraîneurs. Par exemple, certains experts ont plusieurs
casquettes dans les championnats menuisiers, ébénistes
et charpentiers.
Qu’est-ce qui vous plaît le plus
dans cette fonction de chef expert?
J’aime particulièrement la possibilité de suivre et de gérer
l’exécution complète d’une tâche, le fait de créer un modèle rassemblant plusieurs difficultés, de le transcrire sous
forme de plan, puis de le voir être réalisé par des jeunes,
qui donnent leur temps et s’investissent pour les concours
que nous avons préparés. Pour moi, le plus beau est de
voir le résultat final créé par les jeunes et leur satisfaction
à la fin des championnats.
PORTRAIT
Est-ce facile de trouver de nouvelles idées de pièces
de concours chaque année ?
Non, c’est en réalité plutôt difficile. Il s’agit d’éviter la répétition, d’avoir des pièces cohérentes et d’anticiper les
compétences des jeunes que l’on a jamais entraînés ou
vus travailler. Il s’agit également, vis-à-vis du public et des
participants, d’avoir une pièce esthétique et intéressante
à exposer, mais aussi à réaliser.
Par le biais de la tâche de concours,
quelles compétences cherchez-vous à tester
chez les candidats ?
Plusieurs qualités sont recherchées, parmi lesquelles avoir
des bonnes notions dans l’espace (3D), savoir développer
un trait de charpente, connaître les mathématiques et la
trigonométrie, ou encore être bon dans la taille. Concernant cette dernière aptitude, je pense qu’il s’agit d’un don
que certains candidats ont naturellement, même s’il faut
travailler dur pour l’entraîner. De plus, il faut également
savoir gérer la pression du public et des experts, avoir une
grande motivation personnelle, ainsi qu’un esprit de compétition sur le long terme.
Quel lien peut-être fait entre les tâches effectuées
lors du concours et le travail quotidien
d’un charpentier professionnel ?
Certains points se retrouvent de manière semblable entre
les concours et l’emploi en charpenterie, comme par
exemple la matière, la précision d’exécution, le soin apporté au travail ou encore la propreté. En ce sens, l’entraînement de ces qualités lors des concours peut servir aux
jeunes dans leur emploi. Néanmoins, les concours sont
plus artistiques et diffèrent des activités professionnelles
par le fait qu’ils ne sont pas liés à la pression économique
ou au rendement. De plus, les championnats permettent
des réalisations qui ne sont que rarement effectuées dans
le travail quotidien et que certains professionnels ne maîtrisent pas en raison de leur technicité. Les tâches choisies reprennent et mettent en valeur les fondamentaux
et les bases du métier de charpentier. La charpenterie a
beaucoup évolué, surtout grâce à l’utilisation de machines
technologiques très performantes, ce qui a peut-être été
au détriment du travail artisanal manuel et artistique. Les
concours permettent ainsi de perpétuer la tradition de la
charpente dans ce qu’elle a de plus beau.
Quel bilan tirez-vous du championnat romand
à Neuchâtel ?
L’organisation pour les candidats a été très bonne et le
concours s’est bien déroulé. L’ambiance entre les candidats a été très chaleureuse et un esprit d’équipe s’est rapidement créé malgré la compétition.
Quelles étaient les spécificités de la pièce
de concours ?
La pièce avait de grosses sections et de grandes longueurs, pour être au plus proche de la réalité. La taille
se rapprochait ainsi de celle des maquettes du concours
suisse (niveau supérieur des championnats). Cela a permis de tester la précision et surtout la qualité des coupes
des candidats. De manière générale, la maquette était
plus simple que lors des championnats de 2012. Les résultats ont été assez disparates, mais tous les candidats
ont pu monter leur maquette, donc le niveau était globalement bon cette année.
Quelles étapes d’exécution ont posé le plus
de problèmes aux candidats ?
Ce fut l’épure (retranscription du plan donné) qui a engendré le plus de problèmes, surtout en raison d’erreurs de précision et du manque de concentration des
candidats. Il s’agit de la première étape et également la
plus importante pour le concours. Les autres étapes du
championnat ne comportaient pas autant de difficultés.
Le championnat s’est déroulé sur deux sessions et il y a
eu passablement de différences entre les deux : lors de
la première partie, un des candidats avait de l’avance et
a réussi à tirer en avant toute l’équipe pour que chacun
donne le meilleur de lui-même. Par contre, la deuxième
session a été un peu plus dure au niveau de la motivation
des candidats.
Quels conseils donneriez-vous aux candidats
sélectionnés pour les SwissSkills de septembre
à Berne ?
Il faudrait qu’ils continuent à se passionner pour le
concours et à développer leurs connaissances sur le trait
de charpente. Je leur conseille aussi de toujours chercher
la précision et la perfection.
Nous remercions chaleureusement
Monsieur Gabriel Mottier pour sa participation
sympathique et souriante lors de cet entretien,
ainsi que pour le temps qu’il nous a consacré.
Nathalie Bocherens
J’ai trouvé particulièrement enrichissant le fait de pouvoir
effectuer le championnat au sein d’une foire où le public
était présent, même si le local mis à disposition n’était
pas tout à fait conforme aux attentes (espace de travail).
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