Compte-rendu du forum 1 « Les séniors dans la commune »

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Compte-rendu du forum 1
« Les séniors dans la commune »
Présidence et animation :
Abbassia HAKEM, Vice-Présidente du CCAS de Nantes et administratrice de l’UNCCAS
Intervenants :
Martine Dechamp, présidente de la commission sanitaire et sociale de la Caisse Nationale
d’assurance vieillesse (CNAV)
Yves Dario, Fondation Roi Baudouin, responsable du projet « Penser plus tôt à plus tard »
Catherine Bergeret-Amselek, psychanalyste
Bruno Dujardin, directeur commercial d’Implicit
Gérard Vilain, président Générations Mouvement
Monique Boutrand, rapporteur de l’avis du CESE sur le projet de loi d’adaptation de la
société au vieillissement
Introduction de Madame Abbassia HAKEM
Les villes développent sur les territoires des actions pour répondre aux besoins des
personnes âgées (solidarité, lutte contre l’isolement etc…), ces actions sont une condition
nécessaire pour bien vieillir dans la ville. Les problèmes de santé sont la principale source
de remise en question de la possibilité de vivre dans le commune. Plus de 90% des séniors
privilégient le maintien à domicile. Concernant le projet de loi d’adaptation de la société au
vieillissement qui a été adopté en 1ère lecture à l’Assemblée Nationale, deux axes de travail
principaux : l’hébergement et l’aide à domicile. Une mobilisation citoyenne est un préalable
nécessaire pour un changement de regard sur les personnes âgées. Cependant demeure la
question des moyens et des limites de l’action notamment pour les élus. Le rôle des CCAS
dans ce cadre en tant que gestionnaires d’établissements et animateurs de la vie des
personnes dans la cité.
1. Madame Martine Dechamp, présidente de la commission sanitaire et sociale de
la Caisse Nationale d’assurance vieillesse (CNAV)
La CNAV se situe toujours dans un partenariat évolutif et positif avec l’UNCCAS. Au niveau
de l’action sociale, elle s’intéresse plutôt à des jeunes retraités mais également à des
personnes âgées en fragilité sans pour autant être déjà en perte d’autonomie complète. Ce
sont donc des personnes qui ne bénéficient par encore de l’APA.
L’âgé dans la cité, c’est plusieurs situations possibles : le jeune sénior, l’âgé proche d’une
rupture ou l’âgé fragile. A chacune de ces situations, la Cnav et son réseau de CARSAT se
mobilisent pour apporter des réponses adaptées à chacun. Le jeune retraité pourra retrouver
les forums santé, les ateliers d’aide au passage à la retraite, les incitations au bénévolat, la
promotion du sport adapté ou les actions intergénérationnelles parmi les projets que la
CNAV subventionne (1 348 en 2013, pour 8,5 millions d’euros). Lorsque des débuts de
fragilité apparaissent, la CNAV pourra proposer une adaptation du logement, des kits de
prévention, des heures d’aide ménagère, de l’aide aux aidants également ou un
accompagnement dédié. En 2013, 9 445 logements ont été adaptés grâce aux aides de la
CNAV, 20 572 kits distribués, 273 200 plans d’aide personnalisée ont été établis. Cette
présentation ne résume pas l’ampleur de l’action à mener. Sur ce point, les communes sont
les plus outillées pour agir sur cette question. Cependant, l’originalité de la CNAV consiste
en sa capacité de communication élargie (15/16 millions de retraités peuvent être informés et
un ciblage plus précis est possible pour certaines questions). La CNAV est donc un
partenaire des CCAS et des collectivités dans la définition locale de leurs politiques en lien
avec les priorités de sa COG. Par ailleurs, la CNAV travaille sur l’inter-régime par le biais
d’une convention signée par entre les CNAV, le MSA et le RSI, la mise des observatoires
des fragilités et la participation à des actions locales.
La loi d’adaptation de la société au vieillissement est en cours d’examen et la CNAV a une
nouvelle convention d’objectif et de gestion avec l’Etat. Plusieurs défis se posent dans le
cadre de la montée en puissance de la structuration des trois régimes de la Branche
Retraite, ce qui permet par ailleurs de renforcer nos capacités de ciblage des personnes
fragiles. La CNAV expérimente en ce moment les paniers de service pour assurer une offre
complète aux retraités. Le lancement du plan d’aide à l’investissement pour les logementsfoyers est aussi l’occasion d’ouvrir une réflexion sur notre politique à destination des lieux de
vie collectifs pour mieux les accompagner dans leur réhabilitation. Enfin, la CNAV souhaite
développer des contrats de territoire pour mieux coordonner les actions collectives de
prévention ;
2. Monsieur Yves Dario, Fondation Roi Baudouin, responsable du projet « Penser
plus tôt à plus tard »
La Fondation Roi Baudouin est une fondation philanthropique, indépendante et pluraliste,
active au niveau belge et international sur les différents domaines d’action suivant :
•
Pauvreté et justice sociale
•
Démocratie (Belgique / Balkans)
•
Patrimoine
•
Philanthropie
•
Santé
•
Leadership
•
Migration
•
Développement
•
Engagement sociétal
Les objectifs de la campagne « Penser plus tôt à plus tard » étaient les suivant :
-
Une conscientisation de la population à l’allongement de l’espérance de vie,
Une poussée vers l’auto-questionnement et le dialogue à partir de la question de
base suivante : 50+, qu’allez-vous faire de vos 30 prochaines années de vie ?
Les actions menées dans le cadre de la campagne :
-
-
Vérifier l’intuition du manque de perspective et de réflexion autour de cette période en
partenariat avec l’institut de sondage IPSOS. Pour les résultats, voir le Power Point.
Coaliser des partenaires : l’idée étant de ne pas travailler seuls sur cette question
Approfondir les connaissances à savoir la manière dont les médias mettent en avant
le vieillissement et les personnes âgées avec une représentation positive (cf. Power
Point Counter-frames 6 à 10) et des items négatifs (cf. Power Point Frames 1 à 5). Il
s’agit également d’apporter des outils pour permettre aux médias d’aborder cette
question de manière plus nuancée avec une attention particulière sur trois publics
spécifiques : personnes avec un handicap, personnes issues de l’immigration,
personnes en situation de pauvreté.
Communiquer vers le grand public : création d’outils telle qu’une petite boîte
comportant une série de questions afin d’impulser un échange avec des
professionnels ou avec l’entourage.
Les recommandations issues de cette campagne :
-
Il n’est jamais trop tôt,
L’autonomie, c’est organiser sa dépendance,
Dialoguer est essentiel
Il est nécessaire d’établir des recommandations spécifiques pour les publics fragilisés
3. Madame Bergeret-Amselek, psychanalyste
Membre de la société de psychanalyse freudienne, où elle anime un séminaire mensuel sur
la clinique analytique aux âges (clé de la vie), elle reçoit depuis 25 ans des analysant
adultes jeunes et vieux et ce large éventail de patients l’a amené à regarder autrement
l’avancée en âge.
De fait, on vieillit depuis notre naissance de manière invisible et on en prend conscience
seulement au milieu de la vie quand nous sommes confrontés à un changement de rapport
au corps et au temps qui ne fera que s’accentuer jusqu’au terme de la vie. Cette patientèle
de tous les âges a montré que nous évoluons non pas de façon linéaire mais de
métamorphoses en renaissances successives. Il en est ainsi depuis notre naissance, à
chaque étape du développement de notre enfance, lors de notre adolescence, de notre
parentalité naissante, de notre maturescence et de notre sénescence. Chacune de ces
étapes est une étape de notre développement qui impose un remaniement identitaire
susceptible de faire vaciller notre identité. Il ne s’agit pas d’une crise pathologique mais
hautement maturative. C’est ainsi que la sénescence qui démarre à 65/70 ans peut aussi
s’écrire « c’est naissance ». A chacune de ces étapes-clé nous effectuons un retour sur
l’enfant et l’adolescent qu’on a été. La clinique du sujet adulte et, a fortiori, celle d’un adulte
âgé demande d’écouter l’enfant dans l’adulte surtout qu’à partir de 80 ans, il a tous les âges
à la fois. Nous effectuons à chaque entrée dans un nouvel âge de la vie une régression
suivie d’un grand bond en avant. Ces étapes sont des points forts qui augmentent notre
vulnérabilité et qui nous offrent en même temps une immense occasion de grandir. C’est
pour cela que la formulation de Geneviève Laroque à la FNG était : « Vieillir c’est grandir ».
A partir de ce constat, pour être dans le sujet du présent colloque « Les CCAS au cœur des
solidarités » et plus précisément encore dans le sujet du forum : « Les séniors dans la
commune », il est important de souligner que même si nous ne sommes pas tous vieux au
même âge et si la vieillesse n’est pas une maladie un certain nombre d’événements viennent
rompre le sentiment continu d’exister parmi lesquels : départ à la retraite, départ des enfants
de la maison, perte d’un proche, hospitalisation, veuvage, divorces tardifs etc.. ce qu’à,
d’ailleurs, précédemment énoncé Madame Déchamp. Dans ces périodes –choc, ce dont une
personne a besoin une personne, c’est d’un environnement qui lui permettent de s’appuyer
sur une multitude de tuteurs de résilience. Or, un CCAS comporte le mot « communal » et
le mot « action sociale ». Par conséquent, il s’agit d’un interlocuteur privilégié qui peut être à
même à travers le réseau de soins et de lieux d’accueil dont il dispose, aussi bien dans les
structures d’accueil dédiées aux enfants qu’aux personnes âgées de proposer des actions
intergénérationnelles qui peuvent rétablir la solidarité intergénérationnelle que prévenir
l’isolement des vieux. L’isolement est un facteur délétère qui fait le lit des maladies
dégénératives, de la dépendance et de la dépression, voire du suicide. La vie d’un quartier
dans une commune est l’environnement premier en dehors de l’habitat équipé qui va être
porteur pour une personne âgée. C’est ce que propose Carole Gadet, chargée de
l’intergénérationnel au niveau européen au Ministère de l’Education nationale, à travers ses
actions via son association « Ensemble demain »,ou encore l’action exemplaire de
l’association Monalisa qui propose un rapprochement entre les générations par des
associations réunies en collectif, des institutions, des organismes et des pouvoirs publics
pour lutter contre l’isolement des âgés. Ces exemples sont une voie concrète pour retrouver
une éthique et redonner du sens à la vie dans une société qui valorise l’individualisme, le
culte de l’image, de la rapidité et de la rentabilité. Une commune est une mini société de tous
les âges qui doit pouvoir rester vivante et donc permettre les échanges.
Il y a toute une prévention de la délinquance, du décrochage scolaire, de la maltraitance qui
peut être bénéfique aux jeunes enfants et aux adolescents quand on se donne la peine de
penser un projet intergénérationnel. Il y a toute une prévention de la dépression et des
processus de somatisations et de décompensations qui peut se mettre en œuvre pour les
grands âgés. Les enfants et les ados sont les vieux de demain. La transmission d’un
patrimoine culturel, d’une histoire mais aussi la capacité de jouer, de profiter de la culture
numérique, autant de voie à cultiver bénéfiques pour chaque génération. Le vieux qui
transmet son histoire et son savoir- faire et son savoir-être devient un éclaireur de vie pour le
jeune.
Au sein d’une commune bien sûr il faut équiper matériellement les rues, mais ce qui semble
important c’est que les vieux puissent avoir les moyens d’être acteur dans leur ville, leur
village. Cette solidarité humaine d’échanges et de partage me semble d’ailleurs plus en
vigueur dans les villages ruraux que dans les grandes villes.
Ecoles, clubs de retraités, foyers-logements, crèches, unités de vie doivent être des lieux
ouverts sur la vie extérieure tant au niveau architectural qu’au niveau de l’esprit des
personnes qui y travaillent.
Par une action sociale bien menée, on peut lutter efficacement contre le racisme anti-âge, et
c’est un combat urgent à mener d’autant que la longévité annoncée nous annonce plus de
retraités que d’actifs dans très peu d’années. Un environnement social accueillant peut
contribuer à rétablir un sentiment continu d’exister que tous ces événements-choc viennent
rompre. Il est également important de former les soignants, les aidants professionnels et
familiaux aux processus qui se développent et s’intègrent en temps de sénescence entre 70
et 100 ans. On peut tout à fait entreprendre un travail analytique après 70 ans mais cela
demande au psychanalyste de travailler en réseaux, et de réviser non seulement son
dispositif, (divan-fauteuil), mais aussi sa disposition intérieure
4. Monsieur Bruno Dujardin, directeur commercial d’Implicit
« Quand on dispose de bons outils, c’est plus facile de soutenir les seniors ».
Groupe coopératif, partenaire de l’UNCCAS, expert dans l’émission des solutions prépayées
et dans l’édition de solutions informatiques, le Groupe Chèque Déjeuner imagine et
développe des solutions complémentaires pour le pilotage des dispositifs sociaux.
Cela passe nécessairement par :

la modernisation des outils existants,

le contrôle d’effectivité,

la mise en place de solutions de communication pour l’usager.
Implicit, par son accompagnement quotidien auprès des CCAS et CIAS, est très présent
dans l’action des Collectivités à destination des séniors.
Ces solutions contribuent directement à l’optimisation de la gestion des services
d’accompagnement mis en place par les CCAS pour les personnes âgées de la commune.
Pour faire un retour sur le Réseau Public d’Aide à Domicile du Gers qui a souhaité mettre en
place un outil de mutualisation du Dossier Médical et Social Partagéen vue du partage de
documents et de pratiques ainsi que d’une centralisation des échanges et de la production
de statistiques. L’idée était de créer une passerelle entre le médico-sociale et la santé pour
fluidifier le parcours de prise en charge des usagers.
5. Monsieur Gérard Vilain, Président de Générations Mouvement
Il y a près de 40 ans, les agriculteurs ont commencé à percevoir une retraite ce qui a
contribué à l’établissement de clubs ruraux tels que les Aînés Ruraux qui comptait il y a
environ dix ans 750000 adhérents. Aujourd’hui, se pose la question du rajeunissement
inhérent à l’évolution de personnes âgées. Il s’agit donc de trouver des activités nouvelles et
de redynamiser ces clubs. C’est ce qui a conduit à l’évolution vers Générations Mouvement,
créateur de lien social sur les territoires. Les séniors dans une commune, c’est une chance
et non pas une charge. En effet, ils constituent un public disponible, expérimenté et avec une
capacité d’action qui souhaitent être acteur de la société. C’est à partir de ce constat qu’ont
été définis les quatre A de Générations Mouvements.
Il est d’ailleurs possible d’établir un parallèle avec les trois A du projet de loi d’adaptation de
la société au vieillissement : anticipation, adaptation et accompagnement.
Focus sur l’aide aux aidants qui constitue un problème de société notamment lorsque
l’aidant fatigue plus vite que l’aidé voir décède plus vite.
Encouragement en cette période de renouvellement à travailler ensemble sur la question des
aidants : UNCCAS et Générations Mouvement.
6. Madame Monique Boutrand, rapporteur de l’avis du CESE sur le projet de loi
d’adaptation de la société au vieillissement
La population française connaîtra dans les années à venir une importante avancée en âge
avec l’arrivée à la retraite des générations du « baby-boom » et l’augmentation de
l’espérance de vie. Les personnes âgées de 60 ans ou plus passeront ainsi de 21 % en 2007
à 31 % de la population française d’ici 2035. L’enjeu de l’adaptation de la société dans son
ensemble au vieillissement est donc apparu au CESE comme un axe particulièrement
intéressant. Changer de regard est essentiel : la grande majorité des personnes âgées sont
actives et bien portantes, et contribuent aux solidarités entre les générations. Le
vieillissement ne devrait pas être traité isolément mais de façon transversale et pris en
compte par toutes les politiques publiques.
Les enjeux :

Changer notre regard sur les âgés

Faire du domicile la priorité des politiques publiques
Il faut d’ailleurs insister sur un point : tous les âgés ne sont pas dépendants. Il n’y a pas un
parcours linéaire. Environ 60% des personnes âgées décèdent chez elles. Aujourd’hui, seuls
17% des plus de 80 ans sont dépendants.
Concernant la priorisation du domicile, il faut une volonté de politique publique et une
campagne d’information mais, en France, à ce jour, rien n’est fait. Il serait don c souhaitable
de s’inspirer de l’intervention de Monsieur Dario.
Près de 30 % des seniors et personnes âgées résident dans les villes-centres, 40 % en
périphérie des pôles urbains et 25 % dans les zones rurales. Selon l’ANAH, le nombre de
logements à adapter est de 2 millions. Seuls 6 % des logements sont adaptés au handicap.
Pour répondre aux enjeux du vieillissement et faciliter les mobilités, il faut que les
collectivités territoriales soient incitées à inscrire ces données démographiques et
sociologiques dans l’élaboration des documents d’urbanisme à l’instar de la démarche
« Villes amies des aînées » prônée par le projet de loi (telle que précédemment citée par
Madame Déchamp), qu’elles identifient les « zones favorables au vieillissement » disposant
à proximité de commerces, de transports en commun et d’espaces verts, sécurisent les
déplacements pédestres via de micro-adaptations, et développent les intermodalités et le
transport à la demande. Exemple du vieux Nice qui est très pentu donc peu accessible.
Les seniors doivent être encouragés à penser leur projet de vie, leur logement, leur mobilité
dès l’âge de la retraite avec l’aide des caisses de retraite qui essaient de proposer des
diagnostics habitat-mobilité. L’effort d’adaptation des logements existants doit être renforcé,
avec une ouverture plus large au microcrédit, et le vieillissement doit être pris en compte
dans les constructions neuves en promouvant la prise en compte du « design universel » par
les promoteurs. Le « label Habitat Seniors Services » doit être encouragé dans le parc
social, les bailleurs sociaux devant former leur personnel au vieillissement. Les CCAS
peuvent coordonner la réflexion autour de ces questions (ex : Charte Rhône Plus).
Il faut également poursuivre cette réflexion nouvelle en France sur la question d’ « habiter
autrement » (ex : colocation séniors en Allemagne). Sur cette réflexion, les CCAS peuvent
être moteur comme sur l’habitat intergénérationnel déjà lancé dans certaines communes
mais qui doit être développé. En ce sens, le projet de loi soutient les résidences autonomie :
vivre chez soi ce n’est pas forcément le lieu où on est né où l’on a vécu pendant des
dizaines d’années mais éventuellement dans d’autres formes d’habitat.