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Analyse et caractérisation
de matériaux de construction
par
Pierre WITIER
Gérard PLATRET
Hieu-Thao HUYNH
Fabienne FARCAS
Véronique BOUTEILLER
Daniel ANDRÉ
Yves MOUTON
Laboratoire central des Ponts et Chaussées, service Physico-chimie des matériaux, Paris
et
Jean-Marie ANTOINE
Membre du Laboratoire régional des Ponts et Chaussées de Nancy,
Centre d’études techniques de l’équipement de l’Est
1.
1.1
1.2
1.3
Matériaux d’origine essentiellement minérale ................................
Matériaux de base .......................................................................................
Coulis, mortiers et bétons...........................................................................
Autres matériaux .........................................................................................
2.
2.1
2.2
Aciers de construction ...........................................................................
Généralités. Définitions...............................................................................
Caractérisation des produits.......................................................................
—
—
—
7
7
8
3.
3.1
3.2
Matériaux organiques .............................................................................
Polymères organiques utilisés en construction ........................................
Bitumes et matériaux bitumineux..............................................................
—
—
—
10
10
16
4.
4.1
4.2
4.3
4.4
Matériaux composés ...............................................................................
Généralités ...................................................................................................
Peintures et produits assimilés ..................................................................
Produits de réparation et de protection du béton.....................................
Matériaux et complexes d’étanchéité ........................................................
—
—
—
—
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22
22
22
25
27
Pour en savoir plus ...........................................................................................
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6
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7
Doc. P 3 660
n projet de construction, qu’il s’agisse de faire du neuf ou de réparer de
l’ancien, fait nécessairement appel à des matériaux dont la définition entre
dans le cahier des charges. À ce niveau on peut se demander comment préciser
la commande, étant entendu que le concepteur s’intéresse d’abord à la fonction
constructive du matériau qu’il a choisi, ses propriétés mécaniques, protectrices,
voire esthétiques, et se fonde sur le postulat que le matériau en place remplira
correctement le rôle qui lui est imparti.
La réalité se charge de rappeler qu’il n’est pas possible de tout demander en
même temps à un matériau et qu’un minimum de connaissances sur sa structure physico-chimique s’impose. On peut s’adresser pour cela à des ouvrages
spécialisés mais il peut aussi rester des questions non résolues pour un usage
U
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ANALYSE ET CARACTÉRISATION DE MATÉRIAUX DE CONSTRUCTION
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donné. De bonnes méthodes d’analyse chimique ou physico-chimique s’avèrent
nécessaires pour compléter les essais de convenance dans certains cas difficiles.
Mais la véritable place de l’analyse, là où elle se révèle un allié puissant, c’est
pour vérifier que le matériau livré est bien celui que l’on attend, c’est-à-dire qu’il
peut être considéré comme identique à celui qui a été défini dans le projet : le
recours aux analyses chimiques part alors du principe que, si deux échantillons
sont de composition identique, ils ont de fortes chances d’avoir les mêmes propriétés d’usage.
Un deuxième apport important de l’analyse consiste en sa capacité à donner
des éléments pour comprendre ou anticiper, dans certains cas, le comportement
du matériau par analogie avec des cas semblables rencontrés antérieurement.
C’est l’étude des pathologies des matériaux d’une part, la caractérisation fonctionnelle (aptitude à remplir une fonction) d’autre part. La première application
est de pratique courante. La seconde requiert beaucoup de précautions de la part
de celui qui l’utilise.
Dans tous les cas, il convient de considérer les méthodes de caractérisation
des matériaux comme un ensemble où chaque élément doit trouver sa place, les
méthodes chimiques comme les essais mécaniques ou rhéologiques. Il n’est
généralement pas utile d’analyser complètement un produit pour le caractériser
dans le contexte où il est utilisé et même dans certains cas il est préférable
d’abandonner l’analyse pour un essai global basé sur une grandeur physique
pertinente et significative.
Les méthodes qui sont décrites ci-après tentent de répondre à ces prémisses,
famille par famille de matériaux. Si les paragraphes sont de longueur inégale
c’est que l’utilisation des méthodes décrites est plus ou moins courante, voire
remplacée par une autre procédure dans le plan qualité considéré. C’est le principe de complémentarité énoncé plus haut qui s’applique ici.
Nota : à propos du référentiel normatif, il faut préciser que l’activité déployée depuis une dizaine d’années par la normalisation européenne des produits de construction est considérable et arrive au point où de nouvelles normes sont publiées actuellement à un rythme très soutenu. Les références citées dans l’article en [Doc. P 3 660] sont donc datées et devront être
actualisées autant que de besoin.
Tableau des abréviations
AED (1)
ATD
Analyse enthalpique différentielle
Analyse thermique différentielle
ATG
Analyse thermogravimétrique
CLHP
Chromatographie liquide à haute performance
DCP
Direct Current Plasma (arc continu en plasma d’argon)
DRX
Diffractométrie de rayons X
DSC (1)
ICP
IR
Differential Scanning Calorimetry (calorimétrie différentielle à balayage)
Inductively Coupled Plasma (plasma induit à haute fréquence)
Spectrométrie d’absorption infrarouge
MEB
Microscopie électronique à balayage
RMN
Résonance magnétique nucléaire
SAA
Spectrométrie d’absorption atomique
SAM
Spectrométrie d’absorption moléculaire
SEC
Size Exclusion Chromatography (chromatographie d’exclusion stérique)
SFX
Spectrométrie de fluorescence X
TAC
Titre alcalimétrique complet
UV
Spectrométrie ultraviolette
(1) AED et DSC désignent la même technique
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1. Matériaux d’origine
essentiellement minérale
Pour les gravillons, elle est testée selon la norme P 18-591 et correspond à une absence de matières terreuses, d’argiles et de poussières provenant du concassage.
1.1.1.2 Caractérisation
1.1 Matériaux de base
1.1.1.2.1 Analyse chimique
L’analyse chimique peut être réalisée soit par voie chimique soit
par voie physique.
1.1.1 Granulats et sables
Les granulats utilisés dans les mortiers et les bétons sont appelés
fines, sables, gravillons, cailloux et graves en fonction de leurs
dimensions qui varient de 0 à 80 mm (XP P 18-540) [26].
La granularité est la distribution dimensionnelle des grains. Cette
dernière est déterminée par l’analyse granulométrique ou granulométrie. La norme P 18-560 permet de déterminer, au moyen d’une
série de tamis, la granularité de granulats de dimensions comprises
entre 0,063 mm et 80 mm.
Sauf dans le cas de la spectrométrie de fluorescence X, l’analyse
nécessite une mise en solution complète du matériau. Cette dernière est effectuée au moyen d’une fusion à l’aide de métaborate
et/ou de tétraborate de lithium, à 1 100 - 1 200 °C, soit en creusets de
graphite pyrolytique et de préférence dans un four à induction, soit
en creusets de platine iridié dans un four à moufle. La masse en
fusion est coulée dans une solution d’acide nitrique ou chlorhydrique dilué et sa dissolution sous agitation dure de 15 à 20 min. Sur
cette solution amenée à un volume connu, on prélève des aliquotes
pour le dosage des principaux constituants.
■ Analyse élémentaire par voie physique
1.1.1.1 Classification
En fonction de leurs teneurs en silice, alumine et chaux, les granulats peuvent être classés en quatre catégories (tableau 1).
Tableau 1 – Classification des granulats en fonction
de leur composition
(teneurs en % massique)
SiO2
CaO
Al2O3
Siliceux
70 à 90
0,1 à 1
1 à 10
Silico-alumineux
50 à 70
1à5
10 à 25
Silico-calcaires
15 à 20
15 à 30
3 à 10
Calcaires
2 à 10
30 à 50
0,5 à 2
Les différentes teneurs peuvent être déterminées en laboratoire
par diverses méthodes d’analyses. Les méthodes décrites au paragraphe 1.1.1.2.1 sont utilisables pour obtenir des analyses complètes
des granulats.
La formulation de bétons spécifiques a entraîné l’apparition de
granulats spéciaux qui sont essentiellement de deux types :
— des granulats légers, utilisés pour la confection de bétons
légers de structure, de chapes ou d’isolation. Les granulats les plus
usuels sont à base d’argile ou de schiste expansés (NF P 18-309) ou
de laitier expansé (NF P 18-307). Leurs masses volumiques varient
entre 400 et 800 kg/m3 et permettent d’obtenir des bétons de masse
volumique comprise entre 1 200 et 2 000 kg/m3. Les bétons d’isolation peuvent faire appel à des granulats comme le polystyrène
expansé, le liège et la vermiculite ;
— des granulats à hautes caractéristiques qui peuvent être soit
des sous-produits de l’industrie soit des produits élaborés spécialement suivant des critères spécifiques pour répondre à des besoins
particuliers comme des bétons lourds, des bétons présentant une
forte résistance à l’usure ou des bétons réfractaires, en utilisant des
granulats ayant cette particularité.
Les granulats et les sables doivent être propres. Cette propreté est
le garant d’une bonne adhérence avec les hydrates issus de l’hydratation du liant et elle est traitée par la norme XP 18-540. Pour les
sables, elle est déterminée par l’essai "d’équivalent de sable" selon
la norme P 18-598 et un essai au bleu de méthylène (P 18-592, P 18595).
Les méthodes physiques couramment utilisées sont au nombre
de trois : la spectrométrie d’absorption atomique (SAA), la spectrométrie d’émission atomique par plasma (ICP) et la spectrométrie de
fluorescence X (SFX).
Les spectromètres utilisés comportent tous une source lumineuse
(SAA) ou une source d’excitation (ICP et SFX), un monochromateur,
un système de comptage et très souvent un micro-ordinateur pour
l’acquisition et le traitement des données.
Ces méthodes physiques sont des méthodes comparatives qui
nécessitent des étalonnages réalisés soit à partir de matériaux étalons de composition connue avec précision, soit à partir de
mélanges synthétiques préparés avec des produits de pureté analytique ou bien encore en utilisant des solutions prêtes à l’emploi. Ces
étalons servent à l’établissement de courbes d’étalonnage qui permettent de déterminer la concentration de l’élément dans le produit
à analyser.
Pour les méthodes SAA et ICP, les analyses sont réalisées après
mise en solution des matériaux. Par contre, pour la SFX, les analyses sont effectuées directement sur les perles réalisées à partir de
fusions aux borates alcalins.
■ Analyse élémentaire par voie chimique
Parmi les méthodes chimiques utilisées en analyse, on peut citer
la gravimétrie, la complexométrie et la volumétrie. Cependant, ces
diverses méthodes sont de plus en plus abandonnées au profit des
méthodes physiques. De ce fait, elles ne seront que fort peu
développées dans ce document.
1.1.1.2.2 Analyse minéralogique
Elle a pour objet l’identification et le dosage des minéraux constitutifs du matériau. Son processus est très différent de celui de l’analyse chimique qui ne donne que la composition élémentaire des
matériaux, exprimée en oxydes, à l’exception de quelques cas où
les teneurs de certaines espèces minérales peuvent être calculées
directement à partir des données de l’analyse élémentaire (chlorures alcalins, carbonates de calcium).
L’analyse minéralogique utilise les résultats de plusieurs méthodes instrumentales qui sont utilisées pour caractériser un minéral
par :
— sa structure cristalline (répartition des atomes dans des
réseaux géométriques), qui est mise en évidence par la diffraction
de rayons X ;
— son réseau cristallin, qui peut être extrait du spectre de diffraction de rayons X obtenu sur l’échantillon pulvérulent (méthode de
Debye et Scherrer) ;
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— sa teneur dans un mélange, qui peut être déterminée, dans
certains cas par diffractométrie quantitative de rayons X, par les
méthodes dites de l’étalon interne, de l’étalon externe et d’addition ;
les choix des raies et des étalons peuvent parfois poser des problèmes délicats dans le cas de composés comportant plusieurs minéraux, ce qui entraîne une erreur relative souvent élevée sur les
résultats obtenus ;
— sa morphologie (taille et forme des particules), ainsi que ses
défauts (dislocation, joints de grains, etc.), qui peuvent être observés ou évalués par microscopies optique et électronique ;
— sa microcomposition élémentaire approchée, qui peut être
déterminée par l’analyse à la sonde électronique (dite sonde de Castaing) ou au microscope électronique à balayage équipé d’un spectromètre X soit à dispersion de longueur d’onde soit à dispersion
d’énergie ;
— son comportement thermique (polymorphisme en fonction de
la température, identification et dosage de certaines phases cristallines et surtout amorphes, états de l’eau dans les hydrates), qui peut
être mis en évidence principalement par analyse thermogravimétrique (ATG) , par analyse thermique différentielle (ATD), par analyse
enthalpique différentielle (AED) et aussi par dilatométrie ;
— les énergies de réaction, d’oxydation et de décomposition,
exprimées en variation d’enthalpie, qui peuvent être mesurées par
microcalorimétrie, par analyse enthalpique différentielle et même
par analyse thermique différentielle. Les énergies de liaison intramoléculaires et interatomiques peuvent être révélées, dans certains
cas, par la spectrométrie d’absorption dans l’infrarouge.
■ Calcul minéralogique
L’analyse minéralogique précédemment décrite peut être remplacée par une composition minéralogique quantitative obtenue en
combinant l’exploitation rationnelle des résultats de l’analyse chimique et des méthodes physiques (diffraction de rayons X, ATD,
ATG, etc.) et en informatisant le calcul suivant Deloye [1, 2]. Ce
calcul minéralogique aboutit à une plus grande justesse et à une
rapidité supérieure pour l’établissement de la composition minéralogique d’un matériau.
1.1.2.1 Classification des ciments et des chaux
1.1.2.1.1 Ciments
Les ciments se répartissent en cinq types selon la nature et la proportion des constituants et sont régis par la norme NF P 15-301 :
Ciments Porland : ................................... CPA-CEM I
Ciments Portland composés :................ CPJ-CEM II/A ou B
Ciments de haut-fourneau :................... CHF-CEM III/A ou B
CLK-CEM III/C
Ciments pouzzolaniques :...................... CPZ-CEM V/A ou B
Ciments au laitier et aux cendres :........ CLC-CEM V/A ou B
La proportion des constituants autres que le clinker est donnée
par les lettres A, B et C.
De plus, les ciments sont répartis en trois classes de résistance
notées 32.5, 42.5 et 52.5 qui sont définies par la valeur minimale de
la résistance normale du ciment à 28 jours.
1.1.2.1.2 Chaux
Les chaux sont de deux types (NF P 15-312 et NF P 15-311) :
Chaux hydrauliques artificielles : .......... XHA
Chaux hydrauliques naturelles : ........... NHL
1.1.2.2 Analyse chimique
L’analyse chimique des ciments et des chaux est destinée à la
détermination soit de leur composition élémentaire, soit de leur
composition minéralogique. Elle permet notamment :
— de déterminer la composition des crus de cimenterie utilisés
pour la fabrication de ciments d’une qualité requise ;
— de juger de la conformité d’un produit fini ;
— de prévoir l’utilisation rationnelle des matériaux.
La masse d’échantillon nécessaire est de l’ordre de 10 g. La limite
de détection et la précision des dosages varient en fonction des
espèces minérales présentes de 0,5 à 5 %.
Les ciments Portland, les chaux et les laitiers se dissolvent dans
les acides forts même dilués. Par contre, les fumées de silice, les
cendres volantes et les pouzzolanes ne sont que très partiellement
solubles dans les acides forts. Leur mise en solution est effectuée au
moyen d’une fusion selon le paragraphe 1.1.1.2.1.
1.1.2 Ciments, chaux, laitiers, cendres volantes,
fumées de silice et pouzzolanes
Les méthodes chimiques constituent la base de l’analyse normative (NF EN 196-2) des ciments et des composés apparentés (clinker,
laitiers, etc.). Les techniques utilisées sont la gravimétrie, la volumétrie et la photométrie.
Les ciments usuels contiennent du clinker et ce dernier est issu de
la cuisson à haute température (1 450 °C) dans des fours rotatifs
d’un mélange de calcaire et d’argile dans des proportions proches
de 80 % - 20 %. Du sulfate de calcium, essentiellement sous forme
de gypse (CaSO4, 2 H2O), est ajouté au clinker en faible quantité
pour réguler la prise.
Les chaux hydrauliques peuvent être soit naturelles soit artificielles.
Les laitiers sont des scories fondues issues de la fusion du minerai de fer dans un haut-fourneau.
Les cendres volantes sont des poussières fines produites par des
centrales thermiques brûlant du charbon pulvérisé.
Les fumées de silice sont des sous-produits de la fabrication du
silicium métallique et de divers alliages ferrosiliceux.
Les pouzzolanes sont des matières naturelles issues des volcans.
Elles sont formées d’une partie bien cristallisée et d’une partie
vitreuse qui est la phase réactive.
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Les méthodes physiques sont de plus en plus employées et, de
plus, elles ont fait la preuve qu’elles donnent des résultats équivalents aux résultats des méthodes de références (méthodes chimiques).
Les trois méthodes utilisées sont la fluorescence X (P 15-467) et
les spectrométries SAA et ICP dans les mêmes conditions que pour
les granulats. Pour les ciments et apparentés, l’analyse peut être
effectuée tant sur la solution provenant d’une attaque acide que sur
la solution issue d’une fusion.
Pour tous ces matériaux, l’analyse élémentaire consiste à déterminer les éléments tels que le silicium, l’aluminium, le calcium, le
magnésium, le fer, le titane, le sodium, le potassium. Les résultats
sont exprimés en oxyde correspondant. D’autres déterminations
sont réalisées comme la perte au feu, la teneur en résidu insoluble,
en sulfates, en soufre et en chlorures.
L’analyse thermogravimétrique doit être préférée à la simple calcination à 1 000 °C car elle permet de quantifier l’eau, le CO2 et
éventuellement des matières organiques.
Pour les ciments, il est possible de calculer, à partir de l’analyse
chimique élémentaire, une composition minéralogique potentielle
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(c’est-à-dire celle qui serait atteinte à l’équilibre) selon la formule de
Bogue [5]. Selon la notation cimentière, on pose :
C = CaO
A = Al2O3
S = SiO2
S = SO 3
H = H 2O
F = Fe2O3
C = CO 2
Les sulfates, présents à des teneurs supérieures à celles tolérées
pour les eaux potables (250 à 350 mg par litre exprimés en SO 42− ),
risquent d’entraîner avec certains ciments la formation de sulfoaluminate tricalcique qui, cristallisant avec trente-deux molécules
d’eau, est expansif et peut provoquer des gonflements dans les
bétons. De telles eaux sont dites séléniteuses.
On calcule alors les teneurs en C3S, C2S, C3A, C4AF et chaux libre
pour le clinker, augmentées de celles en gypse et en calcite d’éventement pour le ciment.
L’excès de magnésie libre présente le danger de sa substitution
possible au calcium dans les cristaux qui se forment au cours de la
prise.
Le dosage de l’alumine est particulièrement important dans le cas
des ciments Portland, étant donné que les valeurs trouvées peuvent
être utilisées pour le calcul de la teneur en aluminate tricalcique C3A
suivant Bogue, pour les ciments prise-mer. Ce calcul donne en effet
la teneur potentielle du ciment en C3A par opposition à la diffractométrie quantitative de rayons X qui atteint les phases minéralogiques cristallisées réellement présentes (substitutions atomiques
comprises). Il s’ensuit, en particulier pour C3A, des écarts possibles
entre les valeurs obtenues soit selon Bogue soit par la DRX.
Les chlorures au-dessus du seuil de 250 mg/L peuvent entraîner la
corrosion des armatures métalliques.
1.1.3 Plâtre
1.1.4.2 Analyse chimique
Une température de 150 °C étant suffisante pour fabriquer du plâtre par déshydratation du gypse, ce matériau a été largement utilisé.
CaSO4 , 2 H2O
CaSO4 , 1/2 H2O
gypse
plâtre
(α et β)
Ce liant bon marché, à prise rapide, assure également une bonne
protection contre le feu.
Actuellement, les installations industrielles produisent essentiellement du semi-hydrate β. Les plâtres sont utilisés en construction
comme enduits tant intérieurs qu’extérieurs, ainsi que pour la
réalisation de cloisons, plaques de parement, etc.
1.1.4 Eaux de gâchage
Les matières organiques telles que les tensioactifs et les acides
humiques et fulviques peuvent provoquer un ralentissement ou une
inhibition de la prise. Des teneurs supérieures à 0,1 % constituent
une limite à ne pas dépasser.
Le pH des eaux de gâchage ne devra pas être inférieur à 5, car en
dessous de ce seuil, elles peuvent être considérées comme acides
tant vis-à-vis du béton que des armatures.
Elle est régie par un ensemble de normes :
— le pH est mesuré par une électrode de verre (NF T 90-008) ;
— le titre alcalimétrique est déterminé par volumétrie avec un
acide minéral dilué (NF EN ISO 9963-1) ;
— les sulfates sont dosés par gravimétrie sous forme de sulfate
de baryum (NF T 90-009) ;
— le magnésium et le calcium sont déterminés par absorption
atomique (SAA) [NF T 90-005) ;
— les ions chlorure sont dosés par une solution de nitrate
d’argent (NF T 90-014) ;
— les hydrocarbures peuvent être dosés par spectrométrie infrarouge (T 90-114) ou par chromatographie en phase gazeuse après
une extraction par un solvant approprié.
Il est également possible de doser les principaux anions inorganiques (chlorures, nitrates, sulfates,...) par chromatographie ionique.
1.1.5 Adjuvants et produits de cure
1.1.4.1 Spécifications
1.1.5.1 Adjuvants
Afin de ne pas gêner la prise, de ne pas corroder les armatures ni
d’altérer le béton, l’eau employée pour le gâchage des mortiers et
bétons doit être exempte d’éléments comme l’anhydride carbonique libre, les sulfates, la magnésie libre, les chlorures, les nitrates,
les tensioactifs et les acides humiques et fulviques.
Le CO2 libre en excès peut rendre l’eau agressive vis-à-vis du
béton. Dans une eau en équilibre, le calcium et l’anhydride carbonique sont liés par la réaction :
CO 2 + H 2 O + CaCO 3 £ Ca ( CO 3 H ) 2
Si la quantité de CO2 libre qu’elle contient est supérieure à la
quantité de CO2 équilibrant, l’eau sera agressive et dissoudra le carbonate de calcium et le béton pour former de l’hydrogénocarbonate
de calcium soluble. Dans le cas inverse, elle sera incrustante et laissera déposer du carbonate de calcium insoluble. Les déterminations
du pH et du titre alcalimétrique complet (TAC), correspondant à la
teneur de l’eau en alcalis libres, en carbonates et en hydrogénocarbonates, sur l’eau initiale (pH0 et TAC0) et sur la même eau après un
contact de 48 h avec de la poudre de marbre (pHs et TACs , s = saturation), permettent de déterminer si une eau est agressive ou non
[3]. Les trois cas suivants sont possibles :
si pHs > pH0 et TACs > TAC0
⇒ l’eau est agressive,
si pHs = pH0 et TACs = TAC0
⇒ l’eau est inerte ou en équilibre,
si pHs < pH0 et TACs < TAC0
⇒ l’eau est incrustante.
Des adjuvants sont de plus en plus souvent incorporés au béton,
à la dose maximale de 5 % par rapport au ciment, afin de modifier
ses propriétés à l’état frais ou durci.
Les adjuvants sont des composés organiques ou minéraux, présentés en général sous forme de solution aqueuse mais existent
aussi sous forme solide.
Il existe plusieurs familles d’adjuvants :
— les plastifiants et les fluidifiants ou superplastifiants, qui augmentent la maniabilité du béton ;
— les entraîneurs d’air, qui agissent sur la répartition et la forme
des bulles d’air occlus ;
— les hydrofuges, qui permettent de diminuer l’absorption
capillaire ;
— les accélérateurs et les retardateurs de prise et de durcissement.
Les principales déterminations effectuées sur les adjuvants sont
la teneur en extrait sec, pour les solutions aqueuses (NF EN 480-8),
le spectre infrarouge (NF EN 480-6), et la teneur en ions chlorure
(NF EN 480-10).
1.1.5.2 Produits de cure
Les produits de cure protègent les matériaux à base de ciment
venant d’être mis en place de l’évaporation trop rapide de l’eau.
Celle-ci entraînerait une baisse de résistance mécanique, la formation de fissures de retrait ainsi qu’une décohésion de la pâte de
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ciment et des granulats. Ces produits ne sont pas à proprement parler des adjuvants car ils sont pulvérisés à la surface du matériau, où
ils forment un film continu imperméable qui s’élimine de lui-même
après quelques semaines. Ce sont essentiellement des émulsions
aqueuses ou des solutions organiques de résines, de cires, de paraffines ou de caoutchouc chloré, avec parfois quelques pour-cent de
charge minérale.
Ces produits sont caractérisés par les essais suivants :
— analyse infrarouge selon NF P 18-370 (Annexe A) ;
— détermination de l’extrait sec selon NF EN ISO 3251 ;
— détermination du taux de cendres selon NF T 30-012 ;
— détermination du temps d’écoulement selon NF EN ISO 2431.
1.2 Coulis, mortiers et bétons
1.2.1 Définitions
Un coulis est un mélange de ciments, d’eau et d’adjuvants.
mettent en solution le ciment et les granulats calcaires, en altérant
au minimum les autres granulats [2] ;
— un dosage de la silice soluble : dès 1926, Florentin a choisi
comme traceur la silice soluble du ciment. Son dosage est effectué
soit par gravimétrie soit par les méthodes physiques (SAA ou ICP)
après une attaque du béton par un acide fort dilué (HCl ou HNO3)
1:50 [2] ;
— une désagrégation du béton par un traitement thermique suivi
d’un tamisage et de l’analyse chimique des différentes fractions.
Le principe de la méthode du Cembureau [4] consiste à admettre
que la fraction inférieure à 63 µm est uniquement constituée par les
hydrates du ciment déshydraté. L’analyse chimique est effectuée
après une mise en solution par une attaque par HCl (1:5) à froid
(entre 0 et 5 °C).
La méthode du CETIC [2] peut être considérée comme une
variante allégée de la méthode du Cembureau car elle repose sur le
dosage de la silice soluble de la fraction inférieure à 80 µm après
une attaque de cette dernière par HCl au voisinage de 0 °C.
1.2.2.2 Analyse minéralogique
Un mortier est un mélange de liant, de sable, d’eau et éventuellement d’adjuvants. Le liant utilisé peut être du ciment (mortiers de
ciment), de la chaux ( mortiers de chaux) ou un mélange de ciment
et de chaux (mortiers bâtards).
Comme dans le cas des granulats, elle a pour but d’identifier et de
quantifier les phases cristallisées contenues dans le béton, apportant ainsi des éléments qui permettront de reconstituer l’histoire du
béton depuis sa mise en place jusqu’au moment du prélèvement.
Le béton est un mélange de granulats (sables, gravillons ou
cailloux), de ciment, d’eau et éventuellement d’adjuvants [27].
Cependant, l’interprétation des résultats obtenus n’est pas toujours facile et Deloye a développé une méthode d’interprétation
informatique [2, 6], nommée calcul minéralogique qui, par l’examen
des bilans chimico-minéralogiques, permet de mettre en évidence, à
la vue de teneurs déficitaires ou excédentaires en certains éléments,
des phénomènes de dégradation du béton dus à des agressions
extérieures en dehors du seul vieillissement.
Les coulis et les mortiers sont donc des cas particuliers − plus simples − du béton. Dans la suite, seul le vocable béton apparaîtra.
1.2.2 Caractérisation des bétons durcis
■ Principe du calcul minéralogique
Les dosages respectifs des constituants du béton varient en fonction des propriétés mécaniques exigées. À titre d’exemple, un béton
d’ouvrage d’art est dosé à environ 1 100 kg de gravillons, 700 kg de
sable, 350 à 400 kg de ciment et 130 à 200 litres d’eau par m3.
L’ajout d’adjuvants, généralement en très faible quantité (inférieure à 5 % par rapport au poids de ciment), permet d’améliorer
certaines caractéristiques des bétons.
1.2.2.1 Teneur en ciment
Initialement, l’analyse du béton durci avait principalement pour
but de savoir si, lors de sa fabrication, le béton contenait la teneur
requise en ciment. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, le
béton durci n’est pas un matériau inerte. Qu’il soit le constituant
d’un édifice, d’un ouvrage d’art, d’une chaussée ou d’une canalisation, il subit des contraintes et l’épreuve du temps dans le milieu
plus ou moins agressif qui l’entoure. En fait, dans un béton durci, le
ciment n’est plus sous sa forme initiale, mais sous forme d’un
mélange de cristaux et de gels issus de l’hydratation du ciment.
L’analyse du béton durci cherche à dépasser le seul stade du dosage
en ciment pour aider à comprendre le devenir du liant, des granulats
et de l’eau dans le matériau au cours du temps.
Dans un béton, le ciment et les granulats (siliceux, silico-calcaires
et calcaires) sont constitués pratiquement par différentes combinaisons des mêmes oxydes (silice, alumine, magnésie, chaux). Une
analyse globale du béton ne pourra pas renseigner sur la teneur en
ciment du matériau.
Les méthodes de dosage de ciment dans un béton durci utilisent
soit :
— une attaque par les acides : l’attaque idéale ne devrait faire
passer en solution que le liant et laisser intacts tous les granulats.
Cette attaque idéale n’existe pas. Cependant, il existe des attaques
sélectives par des acides faibles (salicylique ou picrique en milieu
méthanol), ne mettant en solution que les silicates calciques, ou par
les acides forts très dilués (HCl ou HNO3) (1:50 soit 0.24 mol/L) qui
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Le calcul d’une composition minéralogique quantitative a pour
but d’établir celle-ci à partir de la composition minéralogique qualitative (diffraction de rayons X) et de l’analyse chimique élémentaire
de l’échantillon, le tout étayé par des données quantitatives annexes
données par l’ATG par exemple.
En partant du principe qu’aucune espèce minérale inconnue
n’existe dans un béton sain, on peut postuler a priori une composition minéralogique quantitative dite « virtuelle » fondée sur le
découpage entraîné par une attaque à l’acide nitrique (tableau 2).
Tableau 2 – Découpage entraîné par une attaque
à l’acide nitrique
Ciment anhydre
Liant
Eau d’hydratation
CO2 de carbonatation
Insoluble siliceux
Granulats
Calcite
Dolomite
Ce calcul est fondé sur la résolution d’un système d’équations
linéaires comprenant en général plus d’équations (relation existant
entre les différents oxydes dans chaque espèce) que d’inconnues
(nombres d’espèces).
Le fil conducteur consiste à construire les minéraux directement
dosés puis ceux pour lesquels une analyse chimique après attaque
ménagée a permis de connaître la teneur en oxyde spécifique et
enfin ceux dont les oxydes constitutifs n’ont pas été consommés
dans les constructions précédentes.
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Le programme demande donc l’analyse chimique élémentaire du
béton ainsi que celle du ciment utilisé ou, à défaut, une hypothèse
pour ce dernier, puis effectue dans l’ordre les déterminations des
sept espèces qui donnent la composition virtuelle :
Ciment anhydre : calculé par la silice soluble et une formule
itérative
phase liquide, ou bien à la pyrolyse couplée à la chromatographie
en phase gazeuse.
1.3 Autres matériaux
Insoluble siliceux : insoluble restant
Dolomite : calculée à partir de MgO soluble
■ Tuiles et briques
Calcite : calculée à partir de CaO restant
Les matériaux de terre cuite sont utilisés depuis plusieurs siècles
dans le bâtiment [28], principalement sous la forme de tuiles et de
briques. Ces matériaux sont fabriqués à partir d’argiles communes,
par cuisson à des températures variant en général de 900 à 1 050 °C.
Halite (NaCl) : calculé à partir de la teneur en chlorures
Eau basse température : après déduction de celle du ciment
CO2 de carbonatation : calculé par itération
et fournit une composition recalculée du ciment qui équilibrerait
chaque balance.
■ Investigations pour le calcul minéralogique
Avant de réaliser le calcul minéralogique, les échantillons de
béton doivent être soumis à différentes investigations, à savoir :
— un broyage à 315 µm ;
— une mise en solution par une attaque à l’acide nitrique au 1:50 ;
— une analyse chimique complète de la fraction soluble ;
— une analyse thermique différentielle et thermogravimétrique ;
— une analyse par diffractométrie de rayons X ;
— une analyse de texture par microscopie électronique à
balayage (MEB) ;
— une mesure de la densité et de la porosité.
■ Interprétation des résultats
Il faut rappeler que ce calcul fournit les résultats suivants :
— la teneur en ciment par deux méthodes indépendantes ;
— la répartition quantitative des granulats entre siliceux et
calcaires ;
— la teneur en eau d’hydratation du liant (eau basse
température) ;
— la teneur en CO2 de carbonatation ;
— la restitution de l’analyse probable du ciment employé ou la
confirmation de la validité de celle fournie par le dossier de
l’ouvrage.
Les méthodes utilisées pour la caractérisation des tuiles et briques sont similaires à celles utilisées pour les autres produits
minéraux :
— analyse élémentaire par ICP après fusion au tétraborate de
lithium ;
— analyse des phases cristallisées par diffractométrie de
rayons X, notamment pour le dosage du quartz ;
— analyse thermique ATD/ATG/dilatométrie.
■ Verres
Ce matériau trouve une large utilisation dans le bâtiment sous
forme de verre à vitre. Il existe différents types de vitrage et combinaisons de vitrages pour améliorer le confort thermique et acoustique ainsi que la résistance aux effractions. Nous ne traiterons pas ici
des nombreuses méthodes mécaniques, thermiques et optiques de
caractérisation des verres.
Pour l’analyse élémentaire des verres, il existe diverses méthodes
de référence : DIN 52 340, ASTM C 169-92, BS 2649.
Les méthodes traditionnelles d’analyse par chimie en voie
humide, après fusion alcaline ou acide, ont été remplacées par
l’analyse par ICP ou la spectrométrie de fluorescence X. Cette dernière technique nécessite des échantillons étalons et une courbe
d’étalonnage par type de matrice.
2. Aciers de construction
Le bilan et les balances d’oxydes sont normalement équilibrés
pour un béton présumé minéralogiquement sain.
Le bilan et les balances relatives à certains oxydes ne sont pas
équilibrés et présentent des restes positifs ou négatifs. Cela signifie
que le filtrat contient non seulement le liant d’origine et la partie calcaires des granulats mais aussi le résultat des interactions entre le
milieu et le béton. La nature et le sens des restes sont capables de
fournir des renseignements sur les origines de la dégradation.
On peut citer un certain nombre de types de dégradations :
— une activité sulfatique se traduit par un reste positif de SO3 ;
— une teneur anormale en halite accompagnée d’un manque de
Na2O indique la présence de chloroaluminates de calcium hydratés
dans le béton ;
— une réaction alcali-granulats induit un excès de silice soluble
accompagné parfois d’un reste d’alumine.
Enfin, si l’analyse a porté sur plusieurs échantillons d’une même
carotte, l’examen des résultats peut mettre en évidence des
ségrégations ou le changement de fourniture de ciment lors d’une
reprise de bétonnage par exemple.
1.2.3 Identification et dosage des adjuvants
L’identification et le dosage des adjuvants dans les bétons durcis
ne sont pas possibles pour tous les adjuvants. Les principales
méthodes utilisées [7, 8] font appel à l’analyse des solutions d’attaque acide du béton par spectrométrie UV ou chromatographie en
2.1 Généralités. Définitions
Parmi les différents matériaux utilisés dans le domaine de la construction, l’acier intervient pour une part de plus en plus importante
(bâtiments, ouvrages d’art, etc.) dans la constitution des structures
[29].
Les produits sidérurgiques rencontrés appartiennent à trois grandes familles :
— les produits plats et longs laminés (bâtiments, ponts,
barrages) ;
— les armatures actives (béton précontraint) et passives (haute
adhérence pour béton armé) ;
— les produits d’équipement des superstructures (glissières de
sécurité, éclairage, signalisation verticale...).
On appelle acier un matériau dont le fer est l’élément prédominant, dont la teneur en carbone est généralement inférieure à 2 % et
qui contient d’autres éléments.
Les aciers sont caractérisés sur le plan physique par des essais
mécaniques tels que : dureté, résilience, traction, etc. ainsi que par
des examens métallographiques.
Sur le plan chimique, ils sont caractérisés par la détermination de
la teneur massique des différents constituants (composition centésimale).
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ANALYSE ET CARACTÉRISATION DE MATÉRIAUX DE CONSTRUCTION
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Les aciers peuvent être classés de 2 manières (NF EN 10020) :
— en fonction de la composition chimique (aciers non alliés,
alliés) ;
— en fonction des principales classes de qualité (aciers de base,
de qualité, spéciaux).
La délimitation entre aciers non alliés et aciers alliés est fonction
des teneurs limites des éléments figurant dans le tableau 3
(NF EN 10020).
Tableau 3 – Teneurs limites des éléments
pour les aciers non alliés
Éléments spécifiés
Symbole
Teneurs limites
(%)
Aluminium
Al
0,10
Azote
N
0,025
Bore
B
0,0008
Bismuth
Bi
0,10
Carbone
C
0,20
Chrome
Cr
0,30
Cobalt
Co
0,10
Cuivre
Cu
0,40
Manganèse
Mn
1,65
Molybdène
Mo
0,08
Nickel
Ni
0,30
Niobium
Nb
0,06
P
0,035
Phosphore
Plomb
Pb
0,40
Sélénium
Se
0,10
Silicium
Si
0,50
Soufre
S
0,030
Tellure
Te
0,10
Titane
Ti
0,05
Tungstène
W
0,10
Vanadium
V
0,10
Zirconium
Zr
0,05
Dans le domaine de la construction, on rencontre principalement
des aciers non alliés ou des aciers faiblement alliés. En fonction de
leur utilisation, les aciers devront respecter des compositions bien
définies (NF EN 10025 et NF EN 10113), pour ne citer que les normes
principales.
2.2 Caractérisation des produits
2.2.1 Analyse chimique
2.2.1.1 Méthodes d’analyse par voie sèche
Par opposition à la méthode par voie humide, décrite dans le
paragraphe 2.2.1.2, la méthode par voie sèche permet d’analyser
directement des échantillons massifs par spectrométrie d’émission
par étincelle, moyennant une préparation de surface préalable.
P 3 660 − 8
La qualité de l’analyse étant très dépendante de l’état de surface
de l’échantillon, celle-ci doit être plane, propre et homogène (sans
fissure, ni trou). De ce fait, il est nécessaire de préparer les étalons
et les échantillons de manière reproductible. Pour cela, il est recommandé de tronçonner l’échantillon pour obtenir une surface plane et
de réaliser un polissage à l’aide d’une surfaceuse à disque horizontal équipée d’un papier abrasif de grains 60. Ce dernier sera remplacé tous les 20 échantillons afin de garantir une qualité constante.
Une fois l’échantillon surfacé, on le retourne sur un papier doux
placé dans un dessiccateur afin d’éviter les agressions atmosphériques ultérieures (oxydation, etc...). L’analyse proprement dite est
alors réalisée à l’aide d’un spectromètre d’émission par étincelle.
Le diamètre de l’orifice où se produit l’excitation étant voisin de
15 mm, les dimensions minimales des pièces à analyser sont de
l’ordre de 15 mm x 15 mm. Toutefois, l’impact de l’étincelle ayant un
diamètre d’environ 5 mm, il est possible d’analyser des fils de 5 à
15 mm de diamètre à l’aide d’un accessoire (porte-fils), qui permet
de centrer parfaitement l’échantillon.
L’excitation de l’échantillon par l’intermédiaire d’un générateur à
haute fréquence provoque l’émission d’un signal lumineux global
qui est ensuite décomposé par un réseau holographique permettant
d’isoler les raies d’émission caractéristiques des éléments à analyser. Chaque raie spectrale est dirigée vers son propre photomultiplicateur d’électrons qui convertit la lumière reçue en courant
électrique proportionnel. Un programme analytique d’étalonnage
établit une corrélation entre le signal électrique obtenu et la concentration de l’élément dans le métal considéré.
L’appareillage est très évolutif (possibilité d’installer jusqu’à environ 50 lignes spectrales) et donc très souple d’utilisation. Des programmes analytiques, comprenant la mesure en mode simultané
d’une dizaine d’éléments, C − Si − Mn − P − S − Cr − Mo − Ni − Cu −
V, permettent de caractériser la majorité des aciers de construction.
Avec les appareils de dernière génération, il est également possible
de doser l’azote.
La calibration, réalisée à partir d’aciers étalons à teneurs certifiées, de compositions très voisines de celles des échantillons à analyser, est un facteur important de garantie de la fiabilité des résultats
obtenus.
Les déterminations les plus délicates des éléments courants concernent surtout le phosphore et le soufre, et à un degré moindre, le
carbone. De fait, les raies d’émission de ces éléments sont situées
entre 178 et 200 nm (UV lointain), rendant nécessaire la purge du
compartiment optique, soit par un courant d’azote, soit par le vide,
afin d’éliminer la présence d’oxygène, génératrice d’interférences.
Les logiciels de gestion des appareils sont conçus pour réaliser
plusieurs étincelles successives sur un même échantillon, permettant en cela de s’affranchir de la présence de possibles hétérogénéités au sein d’un matériau. Les calculs de moyenne des
paramètres mesurés sont effectués automatiquement après corrections des éventuelles interférences chimiques.
La sensibilité des mesures est très bonne, de l’ordre de 0,002 %,
tandis que la précision est voisine de 1 à 2 % pour la plupart des éléments courants et d’environ 5 à 10 % selon les teneurs rencontrées,
pour les éléments délicats (phosphore, soufre).
Du fait du temps de préparation restreint des échantillons et du
fonctionnement en mode simultané, l’appareil autorise une cadence
analytique importante.
Lorsque la taille de l’échantillon, ou sa géométrie, ne permet pas
de faire appel à la spectrométrie par étincelage, on a recours à la
spectrométrie d’émission à plasma d’argon.
À noter que, quelle que soit la technique analytique utilisée, les
aciers galvanisés doivent, au préalable, être dézingués par un
mélange acide chlorhydrique-chlorure d’antimoine.
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2.2.1.2 Méthodes d’analyse par voie humide
On entend par voie humide le fait de passer par une mise en solution de l’échantillon préalablement à l’analyse proprement dite.
Pour ce faire, l’acier à analyser est fraisé en fins copeaux, puis attaqué par des mélanges d’acides minéraux et des produits chimiques
appropriés selon les déterminations à réaliser.
En fonction des éléments à doser, on fait appel à différentes techniques analytiques :
— soit physiques :
• spectrométrie d’absorption atomique (SAA),
• spectrométrie d’émission à plasma d’argon (ICP et DCP) ;
— soit chimiques :
• spectrométrie d’absorption moléculaire (SAM),
• potentiométrie, oxydoréduction, gravimétrie, etc.
Les méthodes normalisées concernent très majoritairement les
méthodes de dosage par SAA et SAM (voir tableau 4).
Tableau 4 – Méthodes d’analyse des métaux
par voie humide
Éléments
Référence de la norme
Technique
courant continu (DCP) et ce, au détriment de la spectrométrie
d’absorption atomique.
Par rapport à cette dernière, elle offre plusieurs avantages :
— très grand domaine de linéarité des dosages (réduction des
dilutions) ;
— analyse d’éléments à fort potentiel d’ionisation du fait de la
température plus élevée de la source d’excitation (≈ 8 000 °C) ;
— grand choix de longueurs d’onde d’émission ;
— réduction des interférences interéléments du fait d’un meilleur
pouvoir séparateur.
Les performances analytiques obtenues sont bonnes : sensibilité
≈ 0,001 %, précision ≈ 1 %. Les résultats seront d’autant plus fiables
que l’on pratiquera un étalonnage compensé, c’est-à-dire en utilisant des aciers étalons de composition chimique aussi voisine que
possible de celle des échantillons à analyser, préparés dans des
conditions identiques de mise en solution, afin de réduire au maximum les interactions chimiques.
Il est toutefois important de souligner que cette technique ne permet pas de doser le carbone, élément essentiel pour la caractérisation chimique d’un acier, aussi doit-on avoir recours à une autre
méthode (gravimétrie après combustion : NF EN 10036 − Juin 1989).
Aluminium
NF A 08-364
Mars 1983
SAA
Arsenic
NF A 06-352
Octobre 1975
SAM
Azote
NF EN 10179
Juin 1989
SAM
Bore
NF A 06-356
Décembre 1984
SAM
Calcium
NF A 08-361
Septembre 1984
SAA
Cérium
NF A 06-358
Décembre 1985
Fluorimétrie
Chrome
NF EN 10188
Août 1989
SAA
Cobalt
NF A 06-311
NF A 08-349
Septembre 1987
Octobre 1984
SAM
SAA
— les essais statiques simples : traction, dureté, compression,
flexion, torsion et cisaillement ;
Cuivre
NF EN 24943
NF EN 24946
Août 1990
Août 1990
SAA
SAM
— les essais sous contraintes multiples : essais de flexion par
choc, c’est-à-dire essai de résilience sur éprouvette entaillée ;
Étain
NF A 06-347
Octobre 1986
SAA
Manganèse NF A 08-331
NF EN 10071
Novembre 1982
Juin 1989
SAA
Oxydoréduction
Molybdène
NF A 06-337
NF A 08-309
Août 1983
Avril 1985
SAM
SAA
Nickel
NF EN 10136
Juin 1989
SAA
Niobium
NF EN 10178
Juin 1989
SAM
Phosphore
NF EN 10184
Août 1989
SAM
Plomb
NF EN 10181
Juin 1989
SAA
Silicium
NF A 08-341
Juin 1987
SAA
Titane
NF A 06-313
NF A 08-311
Octobre 1987
Août 1983
SAM
SAA
Tungstène
NF A 06-310
Novembre 1988
Vanadium
NF EN 24947
Juin 1991
Zirconium
NF A 06-371
Septembre 1984
Gravimétrie
Potentiométrie
2.2.2 Essais physiques
2.2.2.1 Essais mécaniques
Ils peuvent être classés en différentes catégories :
— les essais dynamiques : essai de fatigue.
Les essais de traction, résilience et dureté, font partie des investigations les plus courantes.
L’essai de traction est réalisé à effort imposé ou à allongement
imposé sur des éprouvettes normalisées à section circulaire ou rectangulaire (NF EN 10002 - 1).
La résilience des matériaux métalliques est mesurée par le biais
d’un essai de flexion par choc sur éprouvette à entaille en V ou à
entaille en U (Charpy) (NF EN 10045 - 1).
L’essai de dureté est dans, la plupart des cas, réalisé par pénétration d’un élément appelé pénétrateur sous l’effet d’une charge
constante appliquée dans des conditions bien définies. La dureté est
caractérisée par la surface de l’empreinte ou par la profondeur de
pénétration (essai Rockwell NF EN 101109 - 1 ou essai Vickers
NF A 03-154).
SAM
2.2.2.2 Essais métallographiques
Sauf pour des éléments très spécifiques, les méthodes par voie
chimique sont de moins en moins utilisées, car souvent longues et
fastidieuses à mettre en œuvre, nécessitant la préparation de nombreux réactifs pour réduire les interactions chimiques.
Par voie humide, la technique physique la plus récente, qui tend à
se généraliser dans les laboratoires d’analyses, est la spectrométrie
d’émission à plasma d’argon, soit à couplage inductif (ICP), soit à
La macrographie permet un examen de la structure de l’acier, de
l’orientation des fibres du métal (empreinte Baumann).
La métallographie microscopique renseigne sur les structures
cristallines des métaux (impuretés, défauts de phase), ainsi que sur
les transformations dues aux traitements thermiques (recuit,
trempe).
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3. Matériaux organiques
3.1 Polymères organiques utilisés
en construction
Les principales utilisations des polymères organiques dans les
domaines du génie civil et du bâtiment sont indiquées dans le
tableau 5.
3.1.1 Classification des polymères organiques
Une matière plastique peut être définie comme l’assemblage d’un
polymère synthétique organique de base et de divers additifs (adjuvants et charges) destinés à modifier les caractéristiques du
polymère (souplesse, résistance à l’oxydation thermique et photochimique, résistance au choc, résistance au feu, etc). On peut distinguer trois grandes familles de polymères selon leurs propriétés
physico-chimiques [30] :
— les polymères thermoplastiques ;
— les polymères thermorigides (ou thermodurcis) ;
— les élastomères.
Les polymères thermoplastiques sont constitués de macromolécules de structure linéaire ou ramifiée. Elles sont liées entre elles par
des liaisons faibles (forces intermoléculaires de Van der Waals,
liaison hydrogène,...). Ces liaisons peuvent être rompues, soit par
élévation de la température, qui entraîne un ramollissement progressif réversible, soit par dissolution dans un solvant adéquat.
Après refroidissement ou évaporation du solvant, les liaisons se
rétablissent et le polymère retrouve son état solide initial (amorphe
ou partiellement cristallin). Les thermoplastiques sont donc faciles à
mettre en œuvre et recyclables.
En ce qui concerne les polymères thermorigides [31], les macromolécules peuvent se développer dans les trois directions de
l’espace lors de la réticulation en établissant des liaisons chimiques
covalentes entre certains sites réactifs des macromolécules, ce qui
correspond à la formation d’un réseau tridimensionnel. Il n’y a plus
d’individualité des macromolécules. L’élévation de la température
ou l’addition d’un solvant ne permettent pas de rompre ces liaisons
covalentes. Contrairement aux polymères thermoplastiques, le
matériau thermorigide (ou thermodurci) est un solide amorphe,
infusible et insoluble après réticulation. Il n’est donc pas recyclable.
Les élastomères sont obtenus à partir de polymères linéaires par
une réticulation (ou vulcanisation), dont la densité est beaucoup
plus faible que dans le cas des polymères thermodurcis, ce qui conduit à la formation d’une structure partiellement tridimensionnelle.
La vulcanisation (ou pontage) permet de transformer un polymère à
comportement plastique en un matériau à comportement élastique.
Du fait de la légère vulcanisation, ce matériau a de grandes
déformations élastiques réversibles qui peuvent atteindre 1 000 %.
Les élastomères ont une température de transition vitreuse inférieure à la température ambiante.
Les élastomères sont classés en trois familles principales [32] :
— les élastomères à usages généraux (caoutchouc naturel NR,
polyisoprène IR, copolymères butadiène-styrène SBR, etc.) ;
— les élastomères à usages plus spécifiques (polychloroprène
CR, copolymère acrylonitrile-butadiène NBR, etc.) ;
— les élastomères thermoplastiques (TPE).
Les élastomères thermoplastiques ne sont pas vulcanisés (ou réticulés) lors de la fabrication, mais ils possèdent, à la température de
service, des propriétés similaires à celles du caoutchouc vulcanisé.
Ces dernières disparaissent lorsqu’on les chauffe pour les mettre en
œuvre et réapparaissent, lorsque le matériau revient à la température de service. Les élastomères thermoplastiques présentent, en
P 3 660 − 10
général, des structures ayant deux phases non compatibles : une
phase thermoplastique dispersée dans une phase élastomère. Ils
sont mis en œuvre à haute température comme les autres polymères. Les élastomères thermoplastiques (TPE) sont :
— les copolymères séquencés (ou à blocs) à base de styrène
(butadiène-styrène SBS, styrène-isoprène SIS, etc.) ;
— les mélanges physiques de polymères (dérivés des polyoléfines TPO) ;
— les copolymères polyesters CPE ;
— les polyuréthannes thermoplastiques TPU ;
— les copolymères polyester-polyamide CPA.
3.1.2 Caractérisation des polymères
et des élastomères
3.1.2.1 Polymères thermoplastiques
■ État amorphe et état cristallin
Selon la morphologie du polymère [33], on distingue généralement deux états : l’état amorphe (désordonné et isotrope) et l’état
cristallin (ordonné). Lorsqu’il y a une régularité des motifs constitutionnels macromoléculaires (absence de ramifications), une stéréorégularité (disposition régulière des groupements latéraux le long
de la chaîne macromoléculaire : isotactique ou syndiotactique) ou
un refroidissement assez lent après la fusion, le polymère présente
alors une cristallinité partielle. Un composé macromoléculaire qui
est atactique ou comporte de nombreuses ramifications est un
polymère amorphe dont les chaînes macromoléculaires, lâchement
enchevêtrées, possèdent individuellement une conformation dite en
« pelote statistique ».
On conçoit que le cas des polymères totalement cristallins soit
rare. On observe cependant des polymères semi-cristallins caractérisés par une organisation partielle, juxtaposition de zones critallines (cristallites), où les chaînes se replient sur elles-mêmes pour
donner naissance à des cristaux dont les formes géométriques extérieures peuvent refléter l’arrangement cristallin, et de zones amorphes où les chaînes macromoléculaires sont enchevêtrées et
disposées en désordre.
■ Masse moléculaire
Les propriétés du polymère dépendent de la longueur de la
chaîne, donc de sa masse moléculaire. Les composés macromoléculaires présentent généralement une hétérogénéité de masse. Ce
sont des composés polymoléculaires. La masse moléculaire
moyenne ainsi que la distribution des masses moléculaires ont une
influence considérable sur les caractéristiques techniques (module
d’élasticité, résistance à la rupture, résistance au choc, etc.) et les
conditions de mise en forme des polymères. Les méthodes les plus
courantes pour déterminer les masses moléculaires moyennes en
nombre sont [34, 35] :
— l’osmométrie, mesure de la pression osmotique d’une solution
diluée de polymère (technique permettant de déterminer des masses moléculaires moyennes en nombre de plusieurs centaines de
milliers) ;
— la tonométrie, mesure de la diminution de la pression de
vapeur du solvant pur dans une solution macromoléculaire diluée
(méthode précise pour des masses moléculaires ne dépassant pas
5 000 et acceptable pour des masses moléculaires inférieures à
20 000) ;
— la cryométrie, mesure de l’abaissement du point de congélation de la solution diluée de polymère, et l’ébulliométrie, mesure de
l’élévation du point d’ébullition du solvant pur contenu dans une
solution diluée de polymère ; ces techniques sont utilisées pour des
masses moléculaires inférieures à 15 000 environ.
La technique de choix pour déterminer les masses moléculaires
moyennes en poids est la diffusion de la lumière. La technique
d’ultracentrifugation est très peu utilisée en caractérisation des
polymères.
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Tableau 5 – Polymères dans le génie civil et dans le bâtiment
Domaine d’application
I - Routes
II − Ouvrages d’art
III − Protection
de l’environnement
IV − Bâtiment
Produit
Principaux polymères
Plaques translucides
Polycarbonate, poly(méthacrylate de méthyle), poly(chlorure de vinyle)
Poteaux
Polypropylène
Panneaux
Polyester insaturé/fibre de verre
Remblais légers
Polystyrène expansé ou extrudé, polypropylène, poly(chlorure de vinyle)
Colles
Résines époxydes
Gaine de protection (toron ou câble en acier)
Polyéthylène haute densité
Produits de réparation
Résines époxydes, polyuréthannes, polyacrylamides,
résines de méthacrylate de méthyle, polyesters insaturés,
résines vinylesters
Peintures
Caoutchouc chloré, copolymère acrylique ou vinylique
en émulsion aqueuse, copolymère acrylique en solution,
époxydes, polyuréthannes, poly(fluorure de vinylidène),
polyamide
Géomembranes
• Poly(chlorure de vinyle) plastifié, polyéthylène haute
densité, polyéthylène basse densité, polyéthylène chloré
• Bitumes modifiés aux polymères (copolymère styrène/
butadiène, copolymère éthylène/acétate de vinyle)
• Élastomères : terpolymère éthylène-propylène-diène
(EPDM), copolymère d’isobutylène et d’isoprène,
polyéthylène chlorosulfoné, mélange EPDM / polypropylène
Géotextiles
Polyesters, polypropylène
Tuyaux
Poly(chlorure de vinyle), poly(chlorure de vinyle) chloré,
polyéthylène
Câbles
Poly(chlorure de vinyle)
Colles
Époxydes, mastic-colle à base de polyuréthanne, mastic
silicone
Fenêtres
Poly(chlorure de vinyle)
Joints
Mastic polyuréthanne, mortier à base de résine époxyde,
mastic élastique au silicone, mastic à base de caoutchouc
polysulfure
Produits d’isolation thermique
Polystyrène expansé, polyuréthanne (mousse rigide)
Produits de réparation
Mastic à base de résines acryliques, résine époxyde
d’injection, coulis époxyde pour scellements
Produits de revêtement
Époxydes, époxy-polyuréthanne, poly(chlorure de vinyle),
vinylesters
Les méthodes viscosimétriques (mesure de viscosité intrinsèque)
permettent de déterminer les masses moléculaires moyennes viscosimétriques. Cette dernière est généralement comprise entre les
masses moléculaires moyennes en poids et en nombre. Elle est plus
proche de la masse moléculaire moyenne en poids que de la masse
moléculaire moyenne en nombre.
La chromatographie d’exclusion stérique (SEC) permet de séparer
les molécules suivant leur encombrement stérique ou «volume
hydrodynamique» par élution à travers un gel de porosité définie et
de déterminer la courbe de distribution des masses moléculaires
[36].
■ Masse volumique
La masse volumique est souvent utilisée pour suivre les variations de la structure physique de différents lots d’un même matériau, ainsi que pour déterminer la quantité de matière nécessaire
afin d’obtenir un objet de volume donné. Il existe un certain nombre
d’essais normalisés pour déterminer la masse volumique réelle
(masse volumique de la matière à l’état compact) [37] :
— détermination de la masse volumique des produits à l’état
solide à l’exclusion des produits alvéolaires (NF T 51-063) ;
— détermination de la masse volumique en fonction de la température par immersion (T 51-561) ;
— détermination de la masse volumique des résines liquides par
la méthode du picnomètre (NF ISO 1675) ;
— mesure de la masse volumique des dispersions aqueuses de
polymères et de copolymères (NF T 51-251) ;
— détermination de la masse volumique des tubes et raccords en
matières thermoplastiques (NF T 54-022).
Il y a également une méthode d’essai pour déterminer la masse
volumique apparente (masse volumique de la matière en poudre ou
en granulés) des polymères (NF T 51-003).
■ Taux de cristallinité
Pour les polymères semi-cristallins, la technique la plus couramment utilisée pour déterminer le taux de cristallinité [33], c’est-à-dire
la fraction de masse de polymère engagé dans la phase cristalline,
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∆H f
enthalpie de fusion mesurée par unité de masse,
∆H f0
enthalpie de fusion d’un polymère parfaitement
cristallin.
Il existe une nouvelle technique d’analyse enthalpique différentielle modulée MDSC (marque déposée par TA Instruments) qui permet de déterminer la cristallinité initiale des polymères en
sélectionnant convenablement les paramètres expérimentaux (la
vitesse moyenne de chauffe, l’amplitude de modulation et la
période de modulation) [9]. Son principe est d’imposer, simultanément à une vitesse de chauffe linéaire (DSC classique), une oscillation (modulation) sinusoïdale en température.
Flux de chaleur (mW)
avec
Le taux de cristallinité peut être également déterminé par d’autres
méthodes telles que [38] :
— la diffraction des rayons X : le taux de cristallinité est lié au rapport de l’intensité diffractée (par la fraction cristalline représentée
par un ensemble de pics discrets dans un diffractogramme) à
l’intensité totale transmise ;
— la spectrophotométrie infrarouge [39] : on se fonde sur les
intensités des bandes d’absorption spécifiques de la phase cristalline qui sont plus fines et beaucoup mieux définies que les bandes
spécifiques de la phase amorphe ;
— la spectrométrie par résonance magnétique nucléaire (RMN)
1H et 13C en phase liquide par mesures des temps de relaxation et
RMN 13C haute résolution dans les solides par mesures CP/MAS
(polarisation croisée et rotation à angle magique) [40, 41].
■ Point de fusion
Les polymères ne présentent pas normalement de point de
fusion, mais une plage de température de fusion. Cette dernière
dépend d’un certain nombre de paramètres : masse moléculaire et
sa distribution, pourcentage de cristallinité. Si on est amené à caractériser cette plage de température par une seule température, il convient de préciser qu’il s’agit d’une température conventionnelle de
fusion qui est définie comme le maximum de l’endotherme de
fusion, c’est-à-dire la température à laquelle la transformation
solide-liquide est la plus rapide.
La température conventionnelle de fusion des polymères est
déterminée par analyse enthalpique différentielle (AED) à partir du
thermogramme de fusion correspondant selon la norme T 51-507-3.
Elle peut être également déterminée par analyse thermique (ATD et
DSC) selon la norme NF T 51-223.
Le comportement à la fusion (température de fusion ou plage de
température de fusion) des polymères semi-cristallins peut être
déterminé soit par les méthodes d’analyse thermique [42, 43], soit
par des méthodes optiques. La norme NF EN ISO 3146 décrit les différentes méthodes :
— la méthode au tube capillaire (méthode A), fondée sur le changement de forme du polymère lors du chauffage d’une éprouvette ;
— la méthode au microscope polariseur (méthode B), fondée sur
la disparition de la biréfringence des zones cristallines du polymère
au point de fusion ;
— la méthode C, fondée sur l’analyse thermique différentielle
(ATD) et l’analyse enthalpique différentielle (DSC) permet de déterminer la température initiale de fusion et la température finale de
fusion du polymère à partir des thermogrammes de fusion ATD ou
DSC enregistrés (la fusion se traduit par un pic endothermique, ce
qui permet de localiser la température de fusion).
Parmi les méthodes citées ci-dessus, c’est l’analyse enthalpique
différentielle (DSC) qui fournit les résultats les plus reproductibles.
Lorsque les polymères ne présentent pas de fusion franche, on
détermine la température de ramollissement Vicat décrite dans la
norme NF EN ISO 306.
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Réaction endothermique
dH
dt
3,75
Teg = 112 °C
2,5
Tg = 104 °C
Ti = 82 °C
1,25
Tig = 98 °C
Exo
x c = ∆H f /∆H f0
Endo
est l’analyse enthalpique différentielle (AED). Le taux de cristallinité
des polymères semi-cristallins est calculé à partir de la formule :
Ti
Tig
Teg
Tg
0
30
50
70
90
110
130
150 170 190
Température (°C)
température initiale
température de début de transition
température de fin de transition
température conventionnelle de transition vitreuse
Figure 1 – Points caractéristiques de la transition vitreuse
d’un polymère
■ Température de transition vitreuse
Les polymères semi-cristallins et surtout les polymères amorphes
présentent la transition vitreuse (transition de la phase amorphe
correspondant au passage de l’état solide vitreux à basse température à l’état solide non rigide ou caoutchoutique à température élevée) d’une manière nette. La méthode d’analyse enthalpique
différentielle (DSC) [43], qui est décrite dans les normes
NF EN ISO 11357-1 et T 51-507-2, permet de déterminer les températures conventionnelles de transition vitreuse des polymères amorphes ou partiellement cristallisés à partir du diagramme d’un flux de
chaleur en fonction de la température (figure 1). On peut également
utiliser la méthode de dilatométrie par mesure de volume spécifique
en fonction de la température pour déterminer la température de
transition vitreuse correspondant à l’intersection des deux pentes
de la courbe.
■ Caractéristiques diverses
On peut déterminer l’indice de fluidité à chaud en masse (MFI) et
en volume (MVI) des polymères thermoplastiques par mesure de la
masse ou du volume de l’échantillon traversant une filière normalisée sous l’action d’une pression exercée par une force définie appliquée sur le piston, pendant un temps donné et à une température
fixée selon la norme NF T 51-016.
La tension superficielle des dispersions aqueuses de polymères
et copolymères, qui influence directement la mouillabilité d’un
liquide sur un substrat donné, est mesurée par la méthode dynamique par immersion de la lame décrite dans la norme NF T 51-252.
La détermination de l’extrait sec à 105 °C des dispersions
aqueuses des polymères et copolymères fait l’objet de la norme
NF T 51-054.
Par ailleurs, les résines thermoplastiques peuvent être soumises à
un certain nombre d’essais afin de déterminer les propriétés
mécaniques tels que les essais de traction (méthodes décrites dans
la norme NF EN ISO 527-1), les essais de compression selon la
norme NF EN ISO 604, les essais de fluage en traction selon la
norme NF EN ISO 899-1, etc.
3.1.2.2 Polymères thermorigides
Les principaux matériaux thermorigides utilisés en génie civil
sont :
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____________________________________________________________________________ ANALYSE ET CARACTÉRISATION DE MATÉRIAUX DE CONSTRUCTION
—
—
—
—
—
les poly(méthacrylates de méthyle) (PMMA) ;
les polyesters insaturés (UP) ;
les vinylesters ;
les époxydes (EP) ;
les polyuréthannes (PUR).
La détermination des masses moléculaires moyennes en nombre
(Mn) ou en poids (Mw) ainsi que la polymolécularité des résines peut
être effectuée par chromatographie d’exclusion stérique, après étalonnage de l’appareil avec des étalons de masses moléculaires
connues tels que le polystyrène (PS) et le polypropylène glycol
(PPG) ; cette méthode est décrite dans la norme T 51-505.
La répartition des oligomères, qui permet de caractériser le type
de résine, est déterminée par chromatographie en phase liquide à
haute performance (CLHP), selon la norme T 51-506. Le système de
séparation usuel est la chromatographie à polarité de phase inversée.
3.1.2.2.1 Poly(méthacrylates de méthyle) (PMMA)
Le poly(méthacrylate de méthyle) et les copolymères associés
[44] sont issus de mélanges de monomères et d’oligomères acryliques ou méthacryliques que l’on fait durcir par polymérisation initiée au moyen de catalyseurs (peroxydes organiques). La
polymérisation peut être réalisée en masse, en solution, en émulsion aqueuse ou en suspension. Le méthacrylate de méthyle ayant
la formule :
CH2
C
CO
OCH3
CH3
peut être conservé sous forme monomère par addition d’un inhibiteur de polymérisation (hydroquinone ou diphénylamine par exemple).
Ces matériaux sont caractérisés par l’indice de viscosité (exprimé
en mL/g) qui est calculé à partir des mesures du temps d’écoulement du solvant et d’une solution de polymère de concentration
prescrite à l’aide d’un viscosimètre à tube capillaire du type
Ubbelohde selon les normes NF ISO 1628-1 et NF ISO 1628-6.
L’indice de viscosité IV est calculé selon la formule suivante :
IV = (t − t0)/t0c
avec
t
(s) temps d’écoulement de la solution,
t0
(s) temps d’écoulement du solvant,
c
(g/mL) concentration de la solution.
Dans le cas d’une dilution infinie, l’indice limite de viscosité ILV,
qui est la valeur limite de l’indice de viscosité IV, peut être calculé
selon la formule suivante :
ILV = IV/ [1 + (K × IV × c)]
où K est une constante comprise entre 0,2 et 0,3 et prise conventionnellement égale à 0,3.
3.1.2.2.2 Polyesters insaturés (UP)
Un polyester insaturé (UP) [45] est un système contenant une
base (prépolymère polyester insaturé présentant des doubles
liaisons éthyléniques essentielles pour la réticulation du système)
en solution dans un diluant réactif insaturé (styrène le plus souvent)
qui agit lors de la copolymérisation [10] comme agent de réticulation par addition, au moment de l’emploi, d’un catalyseur (peroxyde
organique en général) et d’un accélérateur éventuel (sels de cobalt
ou amine tertiaire en général) permettant d’opérer à température
ambiante [11, 12]. Le prépolymère polyester insaturé s’obtient généralement par polycondensation en masse d’un ou plusieurs diacides
et/ou d’anhydrides avec un ou plusieurs diols (ou glycols) mis en
excès en présence d’un inhibiteur (quinones ou hydroquinones en
général) pour éviter des effets de prise en masse prématurée. Par
exemple, la polycondensation du glycol et de l’anhydride maléique
donne un prépolymère polyester comportant des doubles liaisons
éthyléniques de formule :
CO
CH
CH
CO
O
CH2
CH2
O
n
La base (prépolymère polyester insaturé) peut être caractérisée
par diverses méthodes classiques qui sont souvent normalisées telles que :
— la détermination de la masse volumique au moyen d’un pycnomètre (NF ISO 1675) ;
— la détermination de la viscosité au moyen d’un viscosimètre
rotatif (viscosimètre à cône et plateau ou à cylindres coaxiaux) à
gradient de vitesse de cisaillement défini (NF EN ISO 3219) ou de la
viscosité Brookfield à l’aide d’un viscosimètre rotatif Brookfield de
types RV, HA et HB (NF T 51-210) ;
— la détermination de la durée de gélification à 25 °C qui donne
des indications sur les possibilités de catalyse à froid des polyesters
insaturés en présence de cobalt (NF T 51-512) ;
— la détermination conventionnelle de la réactivité à 80 °C, permettant de donner une indication sur le comportement à la transformation des résines de polyesters insaturés à chaud (NF T 51-514) ;
— la détermination conventionnelle de la réactivité à 130 °C, permettant d’indiquer les possibilités de réticulation des résines polyesters non saturés à haute température (> 100 °C) (T 51-518) ;
— la détermination de la teneur conventionnelle en matières
volatiles des résines non polymérisées de polyesters non saturés
(T 51-515) ;
— la détermination de l’indice d’acide partiel IAp (méthode A) qui
est défini comme l’indice d’acide correspondant à la neutralisation
de tous les groupes carboxylés terminaux et acides libres, et de la
moitié des groupes anhydride libres, et de l’indice d’acide total IAT
(méthode B), défini comme l’indice d’acide correspondant à la neutralisation de tous les groupes carboxylés terminaux et acides
libres, et de tous les groupes anhydride libres (NF EN ISO 2114) ;
l’indice d’acide est défini comme la masse (exprimée en milligrammes) d’hydroxyde de potassium (KOH) nécessaire pour neutraliser
un gramme de résine ;
— la détermination de l’indice d’hydroxyle défini comme la
masse (en milligrammes) d’hydroxyde de potassium (KOH) nécessaire pour neutraliser l’acide acétique qui se combine par acétylation à 1 g de résine de polyester insaturé (NF T 51-513) ;
— la détermination des principales fonctions des résines et leur
identification par spectrophotométrie infrarouge (T 51-500). L’interprétation qualitative consiste en une comparaison entre le spectre
de l’échantillon et celui d’un produit connu en se fondant sur quelques bandes d’absorption caractéristiques du spectre de l’échantillon.
La quantité de styrène présente dans la résine peut être déterminée par analyse thermogravimétrique (ATG) [13].
3.1.2.2.3 Vinylesters
Les vinylesters se rapprochent des polyesters insaturés par leur
mode de copolymérisation. Ces résines résultent de la dissolution
d’un prépolymère constitué de chaînes portant une double liaison à
chaque extrémité dans un diluant réactif non saturé (styrène le plus
couramment), qui agit en tant qu’agent de réticulation. On ajoute,
au moment de l’emploi, un catalyseur (un peroxyde organique en
général) et éventuellement un accélérateur (sel de cobalt le plus
souvent), pour obtenir un degré de réticulation satisfaisant à température ambiante.
Le prépolymère s’obtient par addition de 2 molécules d’acide carboxylique insaturé (acide méthacrylique en général) sur une résine
époxyde qui est généralement de type bisphénol A (cf. figure 2) ou
novolaque en présence d’un inhibiteur (quinone ou hydroquinone
en général) permettant de réduire la réactivité de la résine au cours
du stockage [46].
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ANALYSE ET CARACTÉRISATION DE MATÉRIAUX DE CONSTRUCTION
____________________________________________________________________________
O
CH2
C
C
O
CH3
O
CH3
CH2
CH
CH2
O
O
C
CH3
OH
CH2
n
CH
CH2
O
C
CH2
C
CH3
OH
Figure 2 – Prépolymère vinylester à base de bisphénol A et d’acide méthacrylique
OH
CH3
CH2
CH
CH2
O
O
C
O
CH2
CH2
n
O
CH3
O
CH2
O
C
O
CH2
CH
OH
O
CH2
CH
H
CH2
n
H
O
C
O
CH2
H
b
CH2
O
prépolymère DGEBA
H
CH
C
CH3
a
CH2
CH
CH3
CH
CH2
O
prépolymère DGEBF
Figure 3 – Formules des prépolymères DGEBA et DGEBF
Les vinylesters sont caractérisés par des méthodes d’analyse
identiques à celles pratiquées sur les polyesters insaturés, telles que
celles donnant les caractéristiques suivantes :
— la masse volumique ;
— la viscosité ;
— la durée de gélification à 25 °C ;
— la réactivité à 80 °C et 130 °C ;
— la teneur conventionnelle en matières volatiles ;
— l’indice d’acide ;
— l’indice d’hydroxyle ;
— l’identification des résines et le dosage de leurs principales
fonctions chimiques.
3.1.2.2.4 Époxydes (EP)
Les résines époxydes (EP) se composent d’une base et d’un durcisseur [47]. Les bases les plus utilisées sont le diglycidyléther du
bisphénol A (DGEBA) et le diglycidyléther du bisphénol F (DGEBF).
Ce dernier est plus fluide que le DGEBA et présente une meilleure
résistance aux solvants après durcissement.
La résine DGEBA est obtenue par polycondensation du diphénylolpropane (ou bisphénol A) avec l’épichlorhydrine en milieu basique. C’est un prépolymère portant un groupe époxyde (ou oxyrane)
à chaque extrémité de la chaîne (figure 3 a).
De même, le prépolymère DGEBF porte un groupe époxyde à chaque extrémité de la chaîne (figure 3 b).
Les formulations utilisées en construction peuvent être des
mélanges des 2 résines DGEBA et DGEBF.
La viscosité de ces résines augmente avec l’indice n ; pour la
DGEBA :
— si n < 1, la base est liquide ;
— si 1 < n < 1,5 , la base est très visqueuse ;
— si n > 1,5, la base devient solide.
Cet indice n dépend du rapport molaire entre l’épichlorhydrine et
le bisphénol A.
P 3 660 − 14
La réticulation de la résine époxyde (base), en un composé
macromoléculaire tridimensionnel, est effectuée par addition, au
moment de l’emploi, d’un durcisseur réagissant avec les groupes
époxydes (ou oxyranes) et/ou les groupes hydroxyles.
Les principales familles de durcisseurs sont des polyamines aliphatiques, aromatiques, des polyamidoamines, les polyacides et
leurs anhydrides ainsi que les polysulfures utilisés comme durcisseurs flexibles en association avec des durcisseurs aminés. Les amines aliphatiques qui sont plus réactives que les amines aromatiques
donnent des réticulations très rapides à température ambiante mais
les caractéristiques thermomécaniques sont plus faibles. En revanche, les amines aromatiques nécessitent l’emploi d’accélérateurs ou
une cuisson à température élevée pour assurer une réticulation
convenable des bases.
■ Caractérisation des bases époxydes
La détermination de la teneur conventionnelle en matières volatiles des résines époxydes non polymérisées liquides ou solides fait
l’objet de la norme NF T 51-525.
L’analyse fonctionnelle des résines est effectuée par les différentes méthodes normalisées suivantes :
— la détermination de l’indice d’époxyde (exprimé en mol/kg et
défini comme le nombre de groupements époxydes contenus dans
1 kg de produit) dont le principe est l’ouverture des cycles oxyranes
par l’acide chlorhydrique (ou iodhydrique) et dosage en retour des
fonctions époxydes par potentiométrie (ou par iodométrie) selon la
norme NF P 18-812 ;
— la détermination de l’équivalent époxyde EE (exprimé en
g/mol) qui est défini comme la quantité de substance qui contient
une mole de groupe époxyde (NF T 51-522).
La masse moléculaire peut être déterminée par osmométrie ou
tonométrie, mais la chromatographie d’exclusion stérique donne la
répartition de masse moléculaire et le degré de polymérisation de la
résine. On peut aussi caractériser les résines par chromatographie
liquide à polarité de phase inversée (figure 4).
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a
Shell 828
indice d'époxyde = 5
b
c
Shell 1001
indice d'époxyde = 2
Shell 1004
indice d'époxyde = 1
Figure 4 – Analyse par chromatographie de partage à polarité de phase inversée de résines époxydes de degré de polymérisation variable
La détermination des principales fonctions des résines et leur
identification sont effectuées par spectrophotométrie infrarouge
(T 51-500). Cette méthode d’analyse permet également de déceler
les additifs et parfois même de les identifier.
■ Caractérisation des durcisseurs
L’analyse quantitative fonctionnelle des durcisseurs est effectuée
par les méthodes suivantes.
● Le dosage de la somme des fonctions amine des durcisseurs
aminés par potentiométrie permet de déterminer l’indice de basicité
totale (exprimé en mol/kg), qui est défini comme la quantité d’acide
perchlorique nécessaire à la neutralisation des fonctions amines en
milieu acide acétique d’un gramme de produit (NF P 18-813).
Le dosage des amines tertiaires peut être effectué par l’acide
perchlorique en milieu acétique après acétylation des amines primaires et secondaires par l’anhydride acétique.
nes en milieu acétique et de la somme des fonctions amine et soufrées non thiophéniques [14].
3.1.2.2.5 Polyuréthannes (PUR)
Les polyuréthannes sont obtenus par polycondensation des polyisocyanates avec des polyols (base) [48]. Avec un diisocyanate aliphatique et un diol, on a la réaction :
n O
C
N
(CH2)p
N
C
O
+ n HO
(diisocyanate)
O
CO
(CH2)q
OH
(diol)
NH
(CH2)p
NH
CO
O
(CH2)q
O
n
●
● La somme des fonctions amine primaire, secondaire et tertiaire
peut également être dosée en milieu acétonitrile par une solution
d’acide perchlorique dans le dioxane. Le dosage des amines secondaires et tertiaires peut être effectué par l’acide perchlorique en
milieu acétonitrile après complexation des amines primaires par le
formaldéhyde. Les fonctions amine primaire sont alors déterminées
par différence entre les dosages en milieu acétonitrile avant et après
complexation.
Le dosage différentiel des amines primaires et secondaires ne
peut être fait que si les résultats des dosages en milieu acétonitrile
et en milieu acétique sont identiques. Ceci est valable dans le cas
des polyamines aliphatiques ou aromatiques. Dans le cas contraire,
seule la somme des amines primaires et secondaires peut être indiquée. Tous les résultats sont exprimés en milliéquivalents par
gramme (méq/g).
●
● Les durcisseurs des résines époxydes peuvent également
contenir des polysulfures. La teneur en soufre correspondant au
polysulfure peut être déterminée par dosage potentiométrique en
milieu acétique avec l’acide perchlorique après complexation des
mercaptans par l’acétate mercurique.
● Dans le cas d’un mélange polyamine-polysulfure, ce dosage
cité ci-dessus détermine alors la somme des fonctions amine et soufrées non thiophéniques. La teneur en soufre correspondant au
polysulfure est donnée par la différence entre les titrages des ami-
Les polyols sont généralement soit des polyesters, soit des polyéthers.
■ Caractéristiques diverses
La masse moléculaire des polyéthers et des polyesters est déterminée par tonométrie selon la norme T 52-120 ou ébulliométrie
selon la norme T 52-121. Ces deux méthodes ne sont pas applicables aux mélanges de polyols et aux polyols avec additifs (prémélanges).
La masse volumique des polyéthers et polyesters est déterminée
par la méthode du pycnomètre de Hubbard décrite dans la norme
NF T 52-111. La détermination de la masse volumique des isocyanates purs, de leurs prépolymères et des isocyanates bruts ou des
mélanges s’obtient par lecture sur un aréomètre selon la norme
NF T 52-131.
La détermination de la teneur en matières solides dans les isocyanates bruts peut être effectuée par centrifugation selon la norme
NF T 52-139.
■ Analyse fonctionnelle
L’analyse fonctionnelle des polyisocyanates, des polyéthers et des
polyesters est effectuée par les différentes méthodes normalisées
suivantes :
— dosage des fonctions isocyanate par titrage (visuel ou
potentiométrique) en retour dans les isocyanates purs et leurs prépolymères (NF T 52-132 ou NF EN ISO 9369) ;
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— dosage (méthode « à chaud ») des fonctions isocyanate par
titrage (visuel ou potentiométrique) dans les isocyanates non rectifiés ou les mélanges contenant au moins un isocyanate brut
(NF T 52-133) ;
— détermination de l’acidité des isocyanates bruts ou modifiés
qui peuvent être des dérivés du toluylènediisocyanate, du
méthylène-bis (4-phénylisocyanate), des polyméthylènes polyphénylisocyanates ou de leurs mélanges par méthode potentiométrique (NF T 52-137) ;
— détermination de la teneur en isomères 2,4 et 2,6 dans le toluylènediisocyanate par spectrophotométrie infrarouge (NF T 52-134) ;
— détermination de la teneur en chlore hydrolysable dans les
toluylènediisocyanates 2,4 et 2,6 ainsi que dans leurs mélanges
(NF T 52-135) ;
— dosage du chlore total dans les toluylènediisocyanates purs et
bruts et les méthylène-bis (4-phénylisocyanates) purs et bruts
(NF T 52-138) ;
— détermination de l’acidité des toluylènediisocyanates 2,4 et 2,6
purs et de leurs mélanges par méthode potentiométrique (NF T 52136) ;
— dosage du toluylènediisocyanate libre, volatil et toxique, dans
les prépolymères par chromatographie en phase gazeuse (NF T 52140) ;
— détermination de l’indice d’hydroxyle des polyéthers (défini
comme la masse, exprimée en milligrammes, d’hydroxyde de
potassium KOH nécessaire pour neutraliser l’acide phtalique qui se
combine par estérification à 1g de polyéther activé ou non) par le
dosage de la fonction hydroxyle primaire ou secondaire dans les
polyéthers (NF T 52-112) ;
— détermination du taux d’insaturation des polyéthers pour polyuréthannes (NF T 52-116) ;
— détermination de l’indice d’hydroxyle des polyesters (défini
comme la masse, exprimée en milligrammes, d’hydroxyde de
potassium nécessaire pour neutraliser l’acide acétique qui se combine par estérification à 1g de polyesters) par le dosage de la fonction hydroxyle dans les polyesters selon la méthode A à
température relativement élevée et la méthode B à température
ambiante (NF T 52-113).
3.1.2.3 Élastomères
Les bitumes sont aussi utilisés en isolation phonique et thermique
ainsi que dans les peintures et vernis (protection contre l’humidité
ou la corrosion).
Dans ce paragraphe, nous ne traiterons que des bitumes routiers,
qui sont utilisés pour la fabrication d’enrobés bitumineux (à un
dosage d’environ 6 %) ou d’enduits superficiels. Ces bitumes peuvent être utilisés soit tels quels, soit sous forme d’émulsion
aqueuse, ou sous forme fluxée ou fluidifiée, ou bien être modifiés
par des polymères.
3.2.1 Bitumes purs
3.2.1.1 Caractéristiques chimiques et physico-chimiques
Les bitumes sont des mélanges extrêmement complexes. C’est
pourquoi on a ressenti très tôt la nécessité de les fractionner en
familles de caractéristiques chimiques relativement bien définies et
appelées groupes génériques. On a pratiqué des séparations souvent complexes fondées sur des opérations d’extraction, de chromatographie, de précipitations sélectives, etc., dans le but d’obtenir
des composés mieux définis, sur le plan analytique et fonctionnel,
que le matériau de départ. Parmi ces méthodes, les techniques de
chromatographie d’adsorption occupent une place de choix.
Il est très rare que la séparation par chromatographie d’adsorption soit effectuée sur le bitume tel quel et on commence généralement par isoler les asphaltènes et les maltènes. Les asphaltènes
sont définis par leur insolubilité dans les hydrocarbures paraffiniques normaux à faible point d’ébullition tels que le pentane ou
l’heptane. Les maltènes constituent la fraction soluble de cette séparation et c’est essentiellement sur eux que se sont développées les
techniques de fractionnement par chromatographie d’adsorption.
En France, les asphaltènes sont précipités au n-heptane selon la
norme NF T 60-115.
■ Séparation par chromatographie d’adsorption
Dans le cas des caoutchoucs vulcanisés, la méthode la plus utilisée pour déterminer la masse volumique est la pesée dans l’eau et
dans l’air. La norme NF T 46-030 décrit deux méthodes :
— méthode A dont les mesurages sont effectués au moyen d’une
balance ;
— méthode B au moyen d’une balance et d’un pycnomètre.
L’identification des caoutchoucs bruts ou sous forme de mélanges
vulcanisés ou non peut être réalisée par spectrophotométrie infrarouge décrite selon la norme NF T 46-054. La spectrométrie Raman
[49] est une méthode d’analyse complémentaire de la
spectrométrie IR. En effet, elle est bien adaptée à la caractérisation
et au dosage des doubles liaisons des polymères insaturés car
l’intensité des bandes de vibration de valence n (C C), qui est faible en IR, est importante en Raman. L’étude de la vulcanisation des
élastomères est également bien appréciée par spectrométrie Raman
car l’intensité des bandes d’absorption correspondant aux vibrations C S et S S est importante en Raman [50].
3.2 Bitumes et matériaux bitumineux
Les bitumes dérivent de l’industrie du pétrole et sont constitués
d’un mélange complexe de molécules aliphatiques, naphténiques et
aromatiques plus ou moins fonctionnalisées, de point d’ébullition
très élevé. Selon leur origine et leur mode de fabrication, les bitumes ont des caractéristiques chimiques, physico-chimiques et rhéologiques différentes.
P 3 660 − 16
Il est important de distinguer les bitumes routiers utilisés en génie
civil [51, 52] des bitumes industriels qui sont des résidus très fortement soufflés et oxydés principalement utilisés dans le bâtiment
pour la réalisation d’étanchéités [53, 54, 55] (§ 4.4).
Les maltènes peuvent être fractionnés en fonction de la polarité
ou du caractère ionique (acide, base, amphotère, neutre) des
composés.
C’est la méthode de fractionnement sur colonne d’alumine mise
au point par Corbett [15], qui a servi de base à la séparation des bitumes en fonction de la polarité des composés. Cette chromatographie schématisée sur la figure 5 sépare les constituants des bitumes
en quatre groupes génériques (méthode SARA) :
Saturés
Aromatiques
Résines
Asphaltènes
Ces techniques de fractionnement sur colonne présentent l’inconvénient majeur de mauvaises répétabilité et reproductibilité.
On préfère maintenant effectuer une séparation sur une baguette
de silice, selon la méthode IATROSCAN, du nom de l’appareil utilisé.
Cette technique ne nécessite pas impérativement une séparation
préalable des asphaltènes et des maltènes.
Une quantité déterminée de bitume est déposée sur une baguette
de silice poreuse. Les quatre familles sont éluées comme en chromatographie sur couche mince par des solvants de polarité croissante. Dans le cas présent, ces solvants sont :
— le n-heptane qui permet la migration des huiles saturés ;
— un mélange toluène/n-heptane (80/20) pour les aromatiques ;
— un mélange dichlorométhane/méthanol (95/5) pour les résines.
Les asphaltènes restent au point de dépôt.
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Bitume
Précipitation
au n -heptane
Asphaltènes
Bitume + chloroforme (20 g/L)
Préparation des échantillons
Maltènes
C
H
R
O
M
A
T
O
G
R
A
P
H
I
E
1) n -Heptane
Saturés
Solution
bitumineuse
2) Benzène
Solvant :
– n-heptane
– toluène/n-heptane (80/20)
– dichlorométhane/méthanol (95/5)
Aromatiques
3) Méthanol/Benzène
4) Trichloroéthylène
Dépôt
Elution
Séparation des familles
Résines
Figure 5 – Séparation d’un bitume en groupes génériques [15]
Saturés
Ces différentes étapes de la séparation sont schématisées sur la
figure 6.
Les familles ainsi séparées sont révélées, comme en chromatographie en phase gazeuse, par un détecteur à ionisation de flamme.
Le signal électrique qui en résulte est proportionnel à la concentration. On obtient alors un chromatogramme illustré sur la figure 7.
L’intérêt des méthodes citées ci-dessus est de permettre de calculer un indice d’instabilité colloïdale. En effet, dans les bitumes, les
résines viennent s’adsorber sur les asphaltènes, et permettent leur
dispersion dans le mélange de molécules saturées et aromatiques.
Le bitume est alors un milieu colloïdal complexe dans lequel les
molécules isolées constituent la phase continue, les micelles et les
agglomérats la phase dispersée (figure 8). Il se crée un équilibre :
molécules ↔ micelles ↔ agglomérats
Cet équilibre est caractérisé par un indice d’instabilité colloïdale,
défini par la relation :
( % asphaltènes ) + ( % saturés )
IC = ----------------------------------------------------------------------------------( % résines ) + ( % aromatiques )
Aromatiques
Détecteur
Résines
Flamme
Asphaltènes
Chromatogramme
Brûlage
Lecture et dosage des familles
Figure 6 – Séparation d’un bitume en groupes génériques
par la méthode IATROSCAN
Réponse
du détecteur
Cet indice permet de déterminer l’état de la structure colloïdale
des bitumes. Plus la valeur de l’indice d’instabilité colloïdal est élevée, moins les asphaltènes sont peptisés dans la phase malténique.
Aromatiques
Résines
Récemment, Branthaver [16] a séparé les fractions de bitume en
fonction de leur caractère ionique (acide, base, amphotère, neutre)
(figure 9).
■ Chromatographie d’exclusion stérique (SEC)
■ La chromatographie d’exclusion stérique est une technique qui
permet de séparer les molécules d’un mélange en fonction de leur
taille moléculaire. Le mélange à analyser est injecté dans une
colonne remplie d’un gel poreux dont la taille des pores est contrôlée. Cette technique peut également être appliquée à la caractérisation des bitumes. La SEC s’est avérée intéressante pour identifier les
Asphaltènes
Saturés
0,1
0,2
0,3
0,4
0,5
Temps (min)
Figure 7 – Chromatogramme d’un bitume routier séparé
par la méthode IATROSCAN
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P 3 660 − 17
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Milieu intermicellaire
(huiles saturées
et aromatiques)
Agglomérats
d'asphaltènes
Résines
Milieu intermicellaire
(huiles saturées
et aromatiques)
Micelles individuelles
d'asphaltènes
Agglomérats
d'asphaltènes
Micelles
individuelles
d'asphaltènes
Figure 8 – Représentation du modèle de structure colloïdale
des bitumes
Bitume dissous
dans un mélange :
benzène, THF et EtOH
Temps
Benzène
+ acide formique
MP 1
absorbé sur polymère
échangeur d'anions
Acides forts
Figure 10 – Chromatogramme d’un bitume routier
dans des conditions de « SEC ultrarapide »
R
S
Échantillon
Benzène
+ propyl-1 amine
MP 50
absorbé sur polymère
échangeur de cations
0
Bases fortes
E
0
tR
P
Étalonnage
tR
Courbe
de distillation
Benzène
+ acide formique
MP 1
absorbé sur polymère
échangeur d'anions
0
Acides faibles
Benzène
+ propyl-1 amine
MP 50
absorbé sur polymère
échangeur de cations
Bases faibles
THF : tétrahydrofuranne
EtOH : éthanol
MP 1 résine échangeuse d'anions
MP 50 résine échangeuse de cations
Figure 9 – Séparation d’un bitume sur résines échangeuses d’ions
[16]
tR
0
t R temps de rétention
R réponse du détecteur
S aire cumulée du chromatogramme
E
E point d'ébullition
P pourcentage distillé
Figure 11 – Principe de la distillation simulée par chromatographie
en phase gazeuse
précise et reproductible de la répartition apparente de l’encombrement moléculaire des entités constitutives du bitume (figure 10).
■ Spectrométrie infrarouge
La spectrométrie infrarouge est bien adaptée à la détermination
des fonctions carbonyles et sulfoxydes et au suivi de leur évolution
lors du vieillissement du matériau.
■ Distillation simulée
bitumes en fonction de leur origine et de leur mode de fabrication
[17].
L’analyse des bitumes dans des conditions particulière de SEC à
grande vitesse (débit élevé de 3,5 mL/min et forte concentration de
30 g/L) [18] exalte les phénomènes d’association cités plus haut et
présente l’avantage d’obtenir en une dizaine de minutes une image
P 3 660 − 18
La technique de distillation simulée par chromatographie en
phase gazeuse permet de calculer la courbe de distillation d’un produit à partir de son chromatogramme [19]. Elle est fondée sur
l’hypothèse que les constituants individuels d’un échantillon sont
élués dans l’ordre de leur point d’ébullition (figure 11). Cela n’est
vrai que si l’échantillon est constitué d’hydrocarbures non polaires
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et si la colonne elle-même contient une phase stationnaire non
polaire.
De la même manière que le temps de rétention est utilisé comme
l’équivalent de la température de distillation, l’aire cumulée du chromatogramme est proportionnelle à la quantité d’échantillon récupérée lors d’une distillation normale.
Les limites pratiques d’emploi, de 620 °C (correspondant au point
d’ébullition de n-C60) avec les colonnes remplies et de 800 °C (correspondant au point d’ébullition de n-C140) avec les colonnes capillaires, ne permettent pas d’obtenir une élution totale des bitumes.
Toutefois, cette méthode permet de différencier les bitumes entre
eux et de détecter d’éventuelles pollutions par des produits plus
légers.
■ Déterminations diverses
Indépendamment des types de fractionnement et de caractérisation dont nous venons de parler, il est possible d’effectuer, sur les
bitumes, un certain nombre d’analyses visant à la détermination
d’entités précises :
— analyse élémentaire : C, H, O, N, Ni, V... (les teneurs en nickel
et vanadium sont reliées à l’origine géochimique du bitume) ;
— indices fonctionnels (acide (NF T 66-013), base) ;
— teneur en paraffines.
3.2.1.2 Caractéristiques physico-mécaniques et autres
caractéristiques des bitumes routiers
Les bitumes routiers sont couramment caractérisés au moyen
d’un certain nombre d’essais normalisés :
— point de ramollissement (NF T 66-008) ;
— pénétrabilité (NF T 66-004) ;
— point de fragilité FRAASS (T 66-026) ;
— densité relative à 25 °C (NF T 66-014) ;
— perte de masse au chauffage (NF T 66-011) ;
— ductilité (NF T 66-006) ;
— point d’éclair (NF EN 22592) ;
— solubilité dans le tétrachloroéthylène (NF T 66-012) ;
— teneur en paraffines (NF T 66-015).
Seuls les essais de pénétrabilité à 25 °C, de mesure de point de
ramollissement et de point de fragilité FRAASS, décrits ci-dessous,
sont utilisés pour déterminer les différentes classes de bitumes
définies dans les tables de spécifications (T 65-001).
■ Point de ramollissement bille et anneau (NF T 66-008) : c’est la
température (TBA) pour laquelle une bille d’acier s’enfonce à travers
un disque de bitume contenu dans un anneau de métal dans des
conditions normalisées.
■ Pénétrabilité à l’aiguille (NF T 66-004) : exprimée en dixièmes de
millimètre, la pénétrabilité est une mesure de l’enfoncement d’une
aiguille normalisée dans un bitume maintenu à une température
donnée au bout de 5 s sous une charge définie. La pénétrabilité la
plus couramment utilisée est celle mesurée à 25 °C sous un poids de
100 g.
À une température donnée, plus un bitume est dur, plus sa pénétrabilité est faible.
■ Point de fragilité FRAASS (T 66-026) : on détermine la température à laquelle la fissuration apparaît sur un film de liant étalé sur
une lame d’acier. Cette lame est soumise à des flexions successives
dans des conditions de refroidissement déterminées.
— un vieillissement physique qui se traduit par une augmentation de la viscosité sans modification des constituants ;
— un vieillissement chimique, de loin le plus important et le plus
complexe, qui correspond à des réactions d’oxydation, de cyclisation et d’aromatisation. Il conduit également à un durcissement du
bitume dont la cause majeure est l’oxydation par l’oxygène de l’air.
Le vieillissement du bitume comporte deux étapes distinctes :
— lors de l’enrobage ;
— une fois en place sur la route.
Des méthodes de récupération du liant de l’enrobé rendent possible la caractérisation des bitumes juste après l’enrobage et après
plusieurs années sur route [20] (XP T 66-041).
La méthode d’extraction la plus utilisée consiste à solubiliser le
liant bitumineux dans du trichloroéthylène [20]. La solution est alors
centrifugée afin d’éliminer les particules minérales présentes. Le
solvant est ensuite évaporé au rotavapor.
Lors de la fabrication et de la pose des enrobés (enrobage,
mélange, compactage et refroidissement), le bitume, réparti en film
mince sur des granulats, est chauffé à une température de 160170 °C en présence d’air, ce qui entraîne un vieillissement rapide
essentiellement chimique. Les réactions d’oxydation qui interviennent à ce stade sont simples et touchent les fonctions alcène, carbonyle, carboxyle et sulfoxyde [21].
Afin de prévoir l’évolution du bitume pendant l’enrobage, une
méthode de simulation du vieillissement a été mise au point et normalisée, le Rolling Thin Film Oven Test (RTFOT) (T 66-032).
Les tables de spécifications comportent des indices de vieillissement qui indiquent les bornes acceptables pour le durcissement des
bitumes, en fonction de leur grade. Ces indices de vieillissement
sont calculés à partir des valeurs de TBA et de pénétrabilité avant et
après RTFOT et sont définis par la variation de la TBA, et la pénétrabilité résiduelle.
Si l’essai de vieillissement artificiel RTFOT simule correctement le
vieillissement du bitume lors de l’enrobage en centrale, il n’en est
pas de même pour la simulation du vieillissement sur route.
Dans le cadre du programme de recherche américain SHRP (Strategic Highway Research Program) sur de nouvelles spécifications,
un essai de simulation du vieillissement des bitumes a été mis au
point : le Pressure Ageing Vessel (PAV) (SHRPB-005). Les bitumes,
après avoir subi l’essai de RTFOT, sont placés dans une enceinte à
100 °C sous une pression de 2 MPa pendant 20 h. Cet essai est sensé
simuler le vieillissement in situ durant les cinq premières années de
service.
3.2.2 Bitumes polymères
3.2.2.1 Généralités et analyse
Les caractéristiques particulières de composition chimique et de
structure colloïdale des bitumes font que leur modification ne peut
pas être obtenue par mise en œuvre de n’importe quel polymère. Ils
ne peuvent être modifiés que par certains copolymères thermoplastiques.
Ces liants sont utilisés pour des enduits superficiels améliorés,
des enrobés spéciaux, des joints de dalles en béton, ainsi que pour
la fabrication de feuilles d’étanchéité pour le bâtiment et les travaux
publics.
Le vieillissement des bitumes sur route se traduit par des
détériorations de la chaussée (fissuration, orniérage, ...) provoquées
par des changements de comportement rhéologique du liant.
Les copolymères thermoplastiques mis en œuvre pour la modification des bitumes sont essentiellement des copolymères du styrène et du butadiène (SBS), de l’éthylène et de l’acétate de vinyle
(EVA), de l’éthylène et d’un acrylate (EMA)... En général, ces liants
ont une structure biphasique constituée par une phase de polymère
gonflé et une phase regroupant les constituants du bitume n’intervenant pas dans la solvatation.
Le bitume subit différents types de vieillissement, distincts par
leurs mécanismes :
Le type de copolymère présent dans le bitume peut en général
être identifié par examen du spectre infrarouge du matériau
3.2.1.3 Vieillissement des bitumes
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P 3 660 − 19
ANALYSE ET CARACTÉRISATION DE MATÉRIAUX DE CONSTRUCTION
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bitumes purs (pénétrabilité à l’aiguille, point de ramollissement et
point de FRAASS, durcissement simulé au RTFOT), mais aussi par
les essais spécifiques suivants.
Transmission (%)
Stabilité au stockage
110
La méthode d’essai dite du « tube de dentifrice » parfois nommée
« essai de décantation » remonte à une proposition de Zenke. Le
principe est de maintenir le tube contenant le liant en position verticale pendant un temps déterminé, de le refroidir brusquement et de
procéder au découpage en trois parties égales. La séparation éventuelle des phases est appréciée par la détermination de certaines
caractéristiques (en premier lieu la TBA) sur les parties supérieures
et inférieures.
100
90
80
70
60
1 739
50
1 242
Observation microscopique
40
La microscopie optique d’épifluorescence [22] permet d’étudier la
structure biphasique des liants. Elle est fondée sur le principe que
les polymères gonflés par certains composants des bitumes auxquels ils sont ajoutés sont fluorescents lorsqu’ils sont éclairés par
une lumière UV (issue d’une lampe de type HBO) : ils réémettent
une lumière jaune-vert alors que le bitume reste noir.
30
20
10
0
4 000
3 500
3 000
a
2 500
2 000
1 500
1 000
Nombre d'onde (cm –1)
copolymères de type EVA
Les observations sont effectuées sur des échantillons opaques
résultant de fractures qu’on peut aisément réaliser à froid (température < − 20 °C).
Essais de traction directe et de « force ductilité »
Transmission (%)
Le principe de la méthode est d’imposer à une éprouvette de géométrie donnée (haltère normalisée) une vitesse d’élongation constante à une température déterminée. On mesure la force nécessaire
en fonction de l’allongement.
80
70
60
50
966
699
Recouvrance et « retour élastique »
40
La méthode la plus connue est celle qui utilise le ductilimètre
habituel aux bitumes (T 66-040). On étire un fil de liant jusqu’à
20 cm, on le coupe immédiatement après l’étirement et on mesure
la dimension des deux parties après un temps de repos de 30 à
60 min.
30
20
10
0
4 000
La normalisation française propose de codifier la géométrie de
l’éprouvette et les conditions de l’essai de traction directe (T 66-038)
ainsi que le calcul (T 66-039), à partir des résultats des essais ainsi
pratiqués, d’une énergie conventionnelle permettant de comparer
entre eux des bitumes polymères.
3 500
3 000
b
2 500
2 000
1 500
1 000
Nombre d'onde (cm –1)
copolymères de type SBS
Les nombres d'ondes correspondent aux bandes d'absorption
caractéristiques des polymères
Les bitumes polymères sont également caractérisés par des
essais de rupture comme :
— l’essai de traction directe à basse température qui donne des
informations intéressantes sur la fragilité à froid des bitumes
polymères et permettent de les comparer à des bitumes non
modifiés ;
— la cohésivité au mouton-pendule (T 66-037).
Le principe de l’essai est de provoquer la rupture d’un film mince
de liant sous l’effet d’un choc.
Figure 12 – Spectres infrarouges de mélanges bitume-SBS
et bitume-EVA
3.2.3 Émulsions de bitumes
(figure 12). Il est alors possible d’en déterminer la teneur par
mesure de l’intensité d’une bande caractéristique du polymère,
après mise en solution du matériau dans le sulfure de carbone, en
utilisant un étalon approprié.
Si on désire procéder à une identification plus fine du modifiant,
il est possible en général de l’isoler par chromatographie d’exclusion stérique semi-préparative. On peut ensuite déterminer la composition exacte du copolymère par mesure de rapports de bandes
d’absorption dans l’infrarouge.
3.2.2.2 Caractéristiques physico-chimiques
Les bitumes polymères sont non seulement caractérisés par les
essais normalisés couramment utilisés pour la caractérisation des
P 3 660 − 20
3.2.3.1 Généralités et analyse
Une émulsion est une dispersion fine d’un liquide dans un autre
liquide avec lequel il n’est pas miscible. Dans le cas des émulsions
routières de bitume, la phase hydrocarbonée discontinue est dispersée dans une phase aqueuse continue qui comporte un émulsifiant,
ce qui permet la mise en œuvre du bitume sous forme fluide à température ambiante [23].
Selon la nature de l’émulsifiant, on distingue les émulsions anioniques et les émulsions cationiques. Seules ces dernières, qui représentent 98 % des tonnages annuels consommés, seront traitées ici.
Les tensioactifs cationiques employés pour l’émulsification du
bitume sont des produits aminés (polyamines, amido-amines, imidazolines) salifiés généralement par l’acide chlorhydrique.
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— la teneur en eau (NF T 66-023) est déterminée par entraînement azéotropique à l’aide d’un solvant. La teneur en bitume est
obtenue par différence ;
— la pseudo-viscosité (NF T 66-020) est mesurée à l’aide d’un viscosimètre à écoulement. Elle est définie par le rapport de la durée
d’écoulement de 200 ml d’émulsion à une température donnée sur
la durée d’écoulement dans le même viscosimètre de 200 ml d’eau
à la même température ;
— l’adhésivité sur granulat du film résiduel de bitume après rupture de l’émulsion est appréciée visuellement et exprimée en pourcentage de surface recouverte de bitume (NF T 66-018). Par
immersion de granulats secs dans l’émulsion, on vérifie qu’un film
primaire de liant se forme sur la surface minérale et qu’il n’est pas
ensuite déplacé par l’eau.
E(mV)
+ 250
+ 150
x
x
HCl en excès
+ 50
– 50
– 150
– 250
x
0
1
2
3
x
HCl fixé sur
une diamine
4
5
6
7
8
V (mL)
V volume de KOH alcoolique 0,1 N
Figure 13 – Dosage de la phase aqueuse d’une émulsion
La nature et la quantité du liant et de l’émulsifiant déterminent les
propriétés physiques et physico-chimiques de ces émulsions :
répartition granulométrique des globules de bitume, viscosité, stabilité, vitesse de rupture et adhésivité.
Il est possible de contrôler la teneur en émulsifiant ainsi que la
quantité d’acide chlorhydrique excédentaire. Sur la phase aqueuse
extraite de l’émulsion après insolubilisation du bitume par addition
d’alcool éthylique, on détermine :
— la quantité d’acide chlorhydrique en excès et celle correspondant à la neutralisation de l’émulsifiant (sous forme acide) par
dosage avec de la potasse alcoolique (figure 13) ;
— le poids du chlorhydrate de l’émulsifiant par évaporation d’une
partie aliquote de la phase hydroalcoolique extraite.
On peut alors calculer le poids d’émulsifiant par différence entre
le poids de chlorhydrate et le poids d’acide chlorhydrique combiné.
L’émulsifiant peut être également identifié par le spectre infrarouge
de son chlorhydrate.
3.2.3.2 Caractéristiques physico-chimiques
Les émulsions sont classées selon leur viscosité (fluide, semifluide ou visqueuse) et leur vitesse de rupture (rapide, semi-rapide
ou lente). Ces deux critères sont prépondérants pour le choix des
émulsions en fonction de leur emploi : réparations, enduits superficiels, imprégnation, enrobés denses à froid, graves émulsion ou
préenrobage.
La caractérisation des émulsions comporte des essais de contrôle
de réception destinés à établir la conformité aux spécifications en
vigueur :
— l’indice de rupture (T 66-017) permet d’évaluer le comportement d’une émulsion vis-à-vis d’un matériaux siliceux. Il est déterminé par ajout, dans des conditions normalisées, de fines
siliceuses de granularité définie dans 100 g d’émulsion et ce,
jusqu’à rupture de l’émulsion. L’indice de rupture correspond au
rapport de la quantité de fines introduites au poids d’émulsion ;
— l’homogénéité par tamisage (NF T 66-016) est appréciée par
pesée des quantités de bitume retenues par passage sur deux tamis
de 630 µm et 160 µm ;
En plus de ces essais réglementaires, un certain nombre de déterminations permettent de caractériser une émulsion :
— la mesure du pH ;
— la stabilité au stockage déterminée par un essai de décantation
pendant sept jours (T 66-022) ;
— la granularité qui est la caractéristique la plus importante
d’une émulsion car elle détermine sa viscosité, sa stabilité et même
son adhésivité.
On peut mesurer les tailles des globules de bitume par deux types
de méthodes :
— par des méthodes globales (opacité, hématimétrie), qui ne
donnent que le diamètre moyen ;
— par des méthodes de dénombrement (comptage avec l’appareil Coulter par exemple), qui permettent d’obtenir la distribution
granulométrique dont on peut déduire le diamètre médian et l’écarttype.
3.2.4 Bitumes-goudrons
Les goudrons sont formés lors de la carbonisation de la houille à
haute température (1 000 à 1 200 °C) en vase clos. Une telle température favorise le craquage des produits à chaîne linéaire et la formation des composés aromatiques. Les produits de la cokéfaction
sont distillés et on récupère un certain nombre de coupes huileuses
(généralement caractérisées par leur intervalle de distillation et le
nom du constituant chimique majoritaire : l’huile naphtalénique par
exemple) et un résidu de distillation appelé brai. Les liants routiers
appelés goudrons sont fabriqués industriellement par mélange de
brai et d’huile de houille.
Les goudrons peuvent être caractérisés par chromatographie en
phase gazeuse sur colonne capillaire, couplée éventuellement avec
la spectrométrie de masse.
Les goudrons ne sont pratiquement plus employés à l’état pur en
technique routière. Par contre, on utilise des mélanges de bitume et
de goudron, généralement dans les proportions 60/40, pour la
réalisation d’enduits superficiels. Pour déterminer le rapport pondéral des deux constituants, il existe diverses méthodes :
— la spectrométrie infrarouge par mesure de rapports de bande ;
— le dosage par chromatographie en phase gazeuse d’un des
constituants du goudron, par exemple le naphtalène ou l’anthracène, dans le mélange ;
— la séparation par SEC couplée à l’adsorption sur un gel de
Sephadex LH 20 selon la norme NF T 66-028.
Les deux premières méthodes nécessitent de disposer des constituants du matériau alors que la dernière permet de s’affranchir de
cette contrainte.
3.2.5 Bitumes fluidifiés et fluxés
Afin d’abaisser la viscosité des bitumes pour faciliter la mise en
œuvre, tout en retrouvant ses caractéristiques avant la mise en ser-
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vice, on utilise différents diluants. Après application, le diluant doit
disparaître pour laisser en place le bitume d’origine.
techniques, permet de l’identifier et de vérifier la qualité du fractionnement.
La figure 15 indique la démarche à suivre pour l’analyse d’un produit complexe.
Fluxant
200
E
620 E (°C)
point d'ébullition
Figure 14 – Distillation simulée d’un bitume fluxé
On distingue les bitumes fluidifiés, où le diluant est une fraction
pétrolière légère (kérosène par exemple), des bitumes fluxés, obtenus par mélange de bitume et d’huile de houille. Contrairement au
kérosène, une partie des huiles de fluxage reste associée au bitume.
Les bitumes fluidifiés et fluxés sont caractérisés par des essais
spécifiques, tels que :
— la distillation fractionnée jusqu’à 360 °C selon la norme
NF T 66-003 ;
— la pseudo-viscosité selon la norme NF T 66-005 ;
— leur point d’éclair en vase clos selon la norme NF T 66-009.
Il est possible de caractériser les fluidifiants et les fluxants par
spectrométrie infrarouge et chromatographie en phase gazeuse. La
technique de distillation simulée (figure 14) permet en outre d’obtenir leur courbe de distillation et de les doser dans le mélange.
4. Matériaux composés
4.1 Généralités
Les matériaux composés dont il sera question dans ce paragraphe sont soit des produits définitivement élaborés, soit des produits
formulés prêts à l’emploi, destinés à un usage particulier. Beaucoup
d’entre eux comportent à la fois des constituants organiques et
minéraux.
La diversité et la complexité des produits formulés sont telles
qu’il est très difficile de fixer un mode opératoire précis pour leur
analyse. Tout au plus peut-on définir un schéma type que l’analyste
doit adapter pour chaque catégorie de produit en utilisant les techniques les plus appropriées pour permettre l’identification et le
dosage des constituants du mélange.
L’identification est la phase la plus importante car elle conditionne
le choix des déterminations à effectuer pour l’analyse quantitative.
Elle nécessite la mise en œuvre de techniques de séparation et
d’identification.
Avant d’effectuer le fractionnement d’un mélange inconnu, il est
souvent utile d’effectuer son spectre infrarouge qui permet en général d’identifier les principaux constituants. Ce spectre IR oriente le
choix des techniques à utiliser pour obtenir une bonne séparation.
Le spectre IR de chaque fraction, associé éventuellement à d’autres
P 3 660 − 22
Lorsque les produits comportent un mélange de constituants
organiques et minéraux, on essaye en général de les séparer par
centrifugation après dispersion dans un solvant. ll est également
intéressant de déterminer la perte au feu, c’est-à-dire d’effectuer une
calcination dans l’air à une température de 450 °C, qui détruit la totalité des produits organiques en laissant en général intacts les constituants minéraux. La perte au feu effectuée sur une charge minérale
extraite permet aussi de juger de la qualité d’une extraction par solvant. On peut également calciner l’échantillon dans l’air à une température comprise entre 900 °C et 1 000 °C, afin de déterminer la
teneur en cendres. La différence entre la teneur en cendres et la
perte au feu est en général liée à la décarbonation des produits
minéraux.
Terminons en ajoutant que des normes différentes peuvent
s’appliquer pour l’analyse de produits de composition chimique
similaire, selon leur destination.
4.2 Peintures et produits assimilés
Les peintures et produits assimilés (enduits à froid ou à chaud) ne
sont pas à proprement parler des matériaux de construction mais
leur utilisation en complément de ces derniers est très importante,
aussi font-ils l’objet d’un paragraphe dans ce document.
Les peintures sont utilisées en revêtements d’acier ou de béton
pour des raisons de protection et/ou d’esthétique. Elles sont également largement rencontrées sur les routes en tant que produits de
marquage et leur fonction est alors d’augmenter le confort et la
sécurité.
Une peinture est une matière fluide qui va en séchant sur le subjectile former un feuil solide, adhérent et opaque.
4.2.1 Constituants des peintures
Une peinture est constituée :
— d’un liant (résine acrylique, époxyde, polyuréthanne...) ;
— de matières pulvérulentes (pigments et matières de charges) ;
— éventuellement d’un véhicule (le solvant, l’eau).
Une classification des peintures d’après la nature chimique de
leur liant est donnée dans la norme NF T 36-005. Les pigments et les
matières de charges sont répertoriés dans la norme T 36-002.
Les peintures peuvent être monocomposantes ou bicomposantes. Dans ce dernier cas, la peinture est dite réactive : c’est le
mélange entre la « base » et le « durcisseur » dans certaines proportions qui va conduire au produit à appliquer. Le mélange possède habituellement un temps de mûrissement et une durée
pratique d’utilisation dont il faut tenir compte lors de l’application.
Donnons quelques exemples d’ordre général :
— les peintures acryliques en émulsion sont monocomposantes ;
— les peintures polyuréthanne peuvent être monocomposantes
(le durcissement de la résine se fait alors au contact de l’humidité de
l’air), mais le plus souvent elles sont bicomposantes (réaction
d’addition entre des isocyanates et des polyols par exemple).
4.2.2 Analyse des peintures
Une peinture est analysée selon la démarche présentée dans le
schéma de la figure 16. Si la peinture est bicomposante, ces analyses sont à faire séparément sur chacun des composants.
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Produit à analyser
Spectre IR
Constituants organiques
Dosage des groupements
fonctionnels
Constituants organiques et minéraux
Fractionnement
distillation
extraction par solvant
solide-liquide
liquide-liquide
chromatographies
d'adsorption
sur gel perméable
Traitement par solvant
centrifugation
filtration
soluble
Partie organique
insoluble
Partie minérale
Identification
Analyse centésimale
Fractions
Spectre IR
Teneur
Identification
Chromatographie
en phase gazeuse
sur couche mince
liquide à hautes performances
Figure 15 – Schéma d’analyse d’un mélange
complexe
PEINTURE =
Liant + Matières pulvérulentes + « Véhicule »
Caractéristiques d'identification rapide – masse volumique (NF T 30 020)
– extrait sec (NF EN ISO 3251)
– taux de cendres (NF T 30 012)
Analyse chimique
Composition (NF T 30 074 ou NF T 30 094) :
Liant (%)
Nature chimique (P 18 809)
+
Matières
Identification des pigments (NF T 34 553)
pulvérulentes (%)
Perte au feu (1 000 °C, 2 h)
+
« Véhicule » (%)
Figure 16 – Schéma d’analyse d’une peinture
4.2.2.1 Détermination des caractéristiques d’identification
rapide
Les peintures peuvent être identifiées, de manière conventionnelle, à partir des trois paramètres suivants (NF P 98-633) :
— la masse volumique qui est obtenue à l’aide d’un pycnomètre
en pesant un certain volume de peinture (NF T 30-020) ;
— l’extrait sec en masse (ou la teneur en matières non volatiles)
qui s’exprime comme le rapport entre les masses de peintures restante et initiale après une évaporation dans une étuve à ventilation
forcée pour une température et un temps de séchage donnés
(NF EN ISO 3251) ;
— le taux de cendres qui est obtenu après calcination à 900 °C
pendant 2 h suivant la NF T 30-012. Cette information permet
d’apprécier la teneur en matière minérale des peintures.
4.2.2.2 Caractéristiques chimiques générales
Les teneurs en liant, en matières pulvérulentes et en véhicule
d’une peinture peuvent être déterminées.
Si la peinture est en phase solvant, le liant et les matières pulvérulentes sont séparés par centrifugation (NF T 30-074) puis pesés.
Si la peinture est en phase aqueuse, la détermination de la teneur
en liant et en matières pulvérulentes se fait après calcination et par
pesée (NF T 30-094). Si l’on cherche à isoler le liant, il faut essayer
soit une séparation par centrifugation ultrarapide, soit une extraction dans un solvant non miscible à l’eau. Toutefois, ces deux techniques ne donnent qu’une valeur par défaut de la teneur en liant.
Que la peinture soit en phase solvant ou en phase aqueuse, la
détermination de la teneur en véhicule s’obtient par différence
(100 − % liant − % matières pulvérulentes).
Le véhicule peut aussi être distillé sous vide selon la norme
NF P 98-630.
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La détermination du rendement volumique en feuil sec selon la
norme NF T 30-085 permet de calculer pour une épaisseur de feuil
sec et une surface données la quantité de peinture à mettre en
œuvre.
4.2.3 Méthodes d’analyse des liants extraits
La caractérisation analytique d’un liant est constituée de trois étapes à savoir la réalisation d’un spectre infrarouge du liant extrait en
vue de connaître les résines principales, la caractérisation des résines et des analyses spécifiques.
L’inventaire des méthodes d’analyse des liants organiques est
donné dans la norme NF P 98-620.
4.2.3.1 Identification des résines principales
par spectrophotométrie d’absorption infrarouge
Cette technique s’applique aux produits à base de liants synthétiques, avant leur mise en œuvre, et plus précisément lorsqu’il s’agit
de bi-composants, à chaque composant avant leur mélange.
La nature chimique du liant extrait peut être déterminée assez
rapidement en réalisant son spectre d’absorption infrarouge
(P 18-809). Les bandes d’absorption obtenues permettent l’identification des résines principales : époxyde, acrylique, polyuréthanne...
4.2.3.2 Caractérisation des résines
La détermination des teneurs des différentes résines et additifs
organiques est principalement effectuée par chromatographie :
— chromatographie sur gel perméable semi-préparative
(NF P 98-621) ;
— chromatographie solide-liquide semi-préparative (NF P 98622).
Les résines sont séparées, pesées puis identifiées par spectrophotométrie infrarouge.
4.2.3.3 Analyses spécifiques
■ Les résines alkydes peuvent être analysées par chromatographie
en phase gazeuse (NF P 98-625).
■ Dans les résines polydiéniques, les plastifiants pas ou peu polaires peuvent être identifiés par sulfonation sur colonne (NF P 98623). Le mélange de résine polydiénique et de plastifiant est introduit dans une colonne remplie de gel de silice imprégné d’acide sulfurique. La résine est sulfonée et retenue sur la colonne. Les
plastifiants sont élués au cyclohexane puis analysés par spectroscopie infrarouge.
■ Les composés tels que l’anhydride phtalique, le chlore et le
peroxyde de benzoyle peuvent être dosés comme suit :
● Dosage de l’anhydride phtalique (NF P 98-624)
Le liant est saponifié par la potasse en milieu alcoolique, puis :
— soit on titre le phtalate formé par une solution d’acide chlorhydrique en milieu alcoolique et le dosage est suivi par
potentiométrie ;
— soit on procède à une extraction liquide-liquide et on dose le
sel d’acide phtalique par chromatographie liquide.
● Dosage du chlore (NF P 98-627, NF T 30-230)
Le chlore, une fois transformé en chlorures, est dosé à l’aide d’une
solution titrée de nitrate d’argent. Le passage du chlore aux chlorures peut s’effectuer suivant diverses méthodes :
— méthode de Schöniger : le liant est brûlé dans l’oxygène et
l’acide chlorhydrique formé est recueilli dans une solution diluée
d’eau oxygénée ;
— méthode au diphénylsodium : l’échantillon est mis en solution
dans du toluène. Le chlore organique est réduit à l’état de chlorures
P 3 660 − 24
par addition d’une solution de diphénylsodium. Après destruction
de l’excès de diphénylsodium, les chlorures sont dosés ;
— méthode par fusion alcaline oxydante : le liant est minéralisé
par fusion alcaline oxydante. Le milieu est repris par de l’eau et les
chlorures sont dosés. Cette méthode est également applicable à la
peinture telle quelle (il n’est pas nécessaire d’extraire le liant).
● Dosage du peroxyde de benzoyle (NF P 98-628)
Le peroxyde de benzoyle contenu dans la partie durcisseur des
peintures et des enduits à froid bicomposants réagit quantitativement en milieu acide avec l’iodure de potassium en libérant de
l’iode qui est alors dosé par une solution de thiosulfate.
■ Les résines peuvent également être caractérisées par leurs indices chimiques :
— indice d’époxyde (NF P 98-629, NF P 18-812) ;
— indice d’isocyanate (NF P 98-629, NF T 52-132) ;
— indice de basicité (NF P 98-629, NF P 18-813) ;
— indice d’hydroxyle (NF T 52-112, NF T 52-113, NF T 30-403) ;
— indice de saponification (NF T 30-401). Cet indice désigne la
quantité d’hydroxyde de potassium, exprimée en milligrammes
nécessaire à la saponification d’un gramme de produit. La saponification est un processus chimique provoquant en milieu basique la
scission des fonctions esters et acides (et anhydrides éventuellement) présentes dans le milieu. Par conséquent, l’indice de saponification est égal à la somme des fonctions esters et acides ;
— indice d’acide (NF T 30-402). Cet indice désigne la quantité
d’hydroxyde de potassium, exprimée en milligrammes, nécessaire
à la neutralisation des acides libres contenus dans un gramme de
produit. Le dosage est suivi à l’aide d’un indicateur coloré (la phénol-phtaléine).
4.2.3.4 Analyses thermiques
Les peintures peuvent être caractérisées par des analyses thermiques.
L’analyse enthalpique différentielle (AED ou DSC) permet de déterminer les températures de transition vitreuse et de fusion des résines. Elle permet également de suivre la cinétique de réaction d’une
peinture bicomposante, la cinétique de séchage d’une peinture...
L’analyse thermogravimétrique (ATG) fournit des renseignements
sur les températures de dégradation des résines. Lorsque l’appareil
d’ATG est couplé à un spectrophotomètre infrarouge ou à un spectromètre de masse, les composés de dégradation peuvent être identifiés. Cette technique permet donc de réaliser une
« carte
d’identité » du produit.
Les analyses thermomécaniques (TMA) et les analyses
mécaniques dynamiques (DMA), plus récentes, permettent aussi de
caractériser des peintures.
4.2.4 Méthodes d’analyse des matières
pulvérulentes
Après la séparation du liant des matières pulvérulentes (NF T 30074 et NF T 30-094), la teneur en matières pulvérulentes est obtenue
après une calcination à 1 000 °C pendant 2 heures.
Les matières pulvérulentes sont réduites en poudre fine avant
analyse.
4.2.4.1 Analyse des matières pulvérulentes des peintures
anticorrosion
Les pigments anticorrosion les plus couramment rencontrés sont
le zinc métal, l’oxyde de fer et le phosphate de zinc.
La teneur en zinc métal est déterminée sur les matières pulvérulentes extraites suivant la norme NF T 34-553 partie 4, qui comprend
2 méthodes :
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— la méthode titrimétrique, qui consiste en l’attaque du zinc par
une solution de sulfate de cuivre avec formation d’un cément de cuivre métallique. Ce cément est oxydé et dissous par une solution de
sulfate de fer (III). Le sel de fer (II) formé est dosé en milieu acide par
le permanganate de potassium ;
— la méthode thermogravimétrique, qui permet de doser le zinc
métal en suivant l’oxydation sous courant d’oxygène selon la
réaction : Zn + 1/2 O2 → ZnO.
La teneur en oxyde de fer est déterminée sur les matières pulvérulentes extraites suivant la norme NF T 34-553 partie 5, par spectrométrie d’absorption atomique (SAA). Précisons que l’oxyde de
zinc (ZnO) est très souvent associé comme pigment à l’oxyde de fer
et le mode opératoire par SAA permet les deux dosages successifs.
La teneur en phosphate de zinc est déterminée sur les matières
pulvérulentes extraites suivant la norme NF T 34-553 partie 7 par
gravimétrie. Le dosage consiste à effectuer une détermination gravimétrique du phosphomolybdate de quinoléine précipité, après mise
en solution des matières pulvérulentes dans de l’acide nitrique.
Les teneurs en zinc total, en oxyde de fer et en phosphate de zinc
peuvent également être déterminées par spectrométrie d’émission
atomique à plasma induit par haute fréquence (ICP). La mise en
solution des matières pulvérulentes est réalisée comme pour la SAA
et l’étalonnage est réalisé à partir de solutions étalons compensées
en tétraborate de lithium. La norme NF T 34-553 partie 6 donne
toutes les indications utiles pour l’utilisation de cette méthode.
4.2.4.2 Analyse des matières pulvérulentes des peintures
blanches
Les pigments les plus utilisés dans les produits blancs de marquages routiers peuvent contenir les éléments suivants : SiO2,
Al2O3,TiO2, CaO, MgO, ZnO, BaSO4...
Ces pigments se rencontrent également dans les peintures blanches utilisées en finition sur les systèmes de protection multicouches.
Ils peuvent être analysés par des méthodes chimiques, par spectrométrie d’absorption atomique (SAA) ou par spectrométrie
d’émission atomique à plasma induit par haute fréquence (ICP).
Méthode par voie chimique
Les matières pulvérulentes sont mises en solution par fusion au
tétraborate de lithium et reprise acide de la perle de fusion. La
reprise avec de l’acide sulfurique permet après filtration de récupérer le BaSO4 précipité et de doser sur le filtrat en parallèle tous les
autres constituants.
La norme NF P 98-631 donne tous les modes opératoires pour
réaliser les dosages de ces constituants.
Méthode par SAA ou par ICP
La perle de fusion est reprise par de l’acide nitrique jusqu’à dissolution complète, le dosage se fait ensuite en parallèle pour tous les
constituants.
Les normes NF P 98-632 pour la SAA et la NF P 98-635 pour l’ICP
donnent tous les modes opératoires à utiliser.
4.2.4.3 Analyse des matières pulvérulentes des peintures
colorées
Il est très difficile de donner des modes opératoires pour l’analyse
des pigments et des charges contenus dans les peintures de
couleur ; en effet les pigmentations font appel à toutes les possibilités de la chimie organique et minérale.
Les règles suivantes peuvent toutefois servir de guide :
— les pigments organiques sont identifiés par spectrométrie
d’absorption infrarouge ; ces pigments sont très souvent associés à
TiO2 et à BaSO4 dosés comme ci-dessus après mise en solution et
précipitation du sulfate de baryum ;
— les pigments minéraux sont identifiés par des méthodes chimiques classiques après séparation des charges comme BaSO4 ou
CaCO3.
4.3 Produits de réparation
et de protection du béton
■ Les produits utilisés pour la réparation des ouvrages en béton
peuvent être classés en trois catégories selon que le liant qui assure
la cohésion de l’ensemble est de nature hydraulique (ciment), organique réactif (résine synthétique) ou mixte, c’est-à-dire à la fois
hydraulique et organique réactif.
● Les produits à base de liants hydrauliques peuvent eux-mêmes
se subdiviser en :
— produits à base de liants hydrauliques avec ajouts (LHA) constitués principalement :
• d’un liant,
• de granulats (roulés ou concassés),
• d’ajouts
(autres
que
des
polymères
organiques)
éventuellement ;
— produits à base de liants hydrauliques modifiés par des
polymères organiques (LHM) qui se présentent sous l’une des deux
formes suivantes :
• monocomposant : le polymère est sous forme de poudre
mélangée au liant,
• bicomposant : le composant A contient le polymère et l’eau
nécessaire à l’hydratation du ciment ; le composant B contient le
ciment, le sable et les fines inertes ainsi que les additifs éventuels
(fibres, fumée de silice...).
La caractérisation de ces matériaux avant emploi fait appel à
l’analyse classique des constituants d’un mortier ou d’un béton, en
l’occurrence l’analyse minéralogique et la détermination de la composition potentielle selon Bogue (norme P 18-808) qui comprend : la
détermination de la composition du liant à partir de l’analyse chimique effectuée à l’aide d’une attaque par l’acide nitrique dilué à
1,2 mol/L (analyse minéralogique), la composition potentielle en
C3S, C2S, C3A, C4AF, carbonates et gypse qui s’en déduit par les formules dites de Bogue et le dosage en liant actif (P 18-805) qui
s’exprime par :
LA = 100 − ( INS + PF + 1,27 AC)
avec
LA
liant actif,
INS
fraction insoluble après attaque à l’acide nitrique
dilué,
PF
perte au feu,
AC
teneur en anhydride carbonique déterminée au
cours de l’analyse.
On notera que le dosage en liant actif peut être utilisé en tant
qu’essai rapide d’identification de la quantité de liant hydraulique
réactif effectivement présent dans le produit. Sa détermination ne
demande pas l’ensemble des mesures utilisées pour l’analyse minéralogique complète.
On détermine également la distribution granulométrique selon la
norme P 18-806.
La caractérisation du polymère organique (composant A des
bicomposants) s’effectue de la manière habituelle en pareil cas :
réalisation de l’extrait sec de la dispersion aqueuse (donnée quantitative) et enregistrement du spectre infrarouge de cet extrait sec
(donnée qualitative).
● Les produits à base de résines synthétiques diffèrent essentiellement les uns des autres par leur mode de polymérisation. Leurs
modes de caractérisation sont donc spécifiques aux familles considérées.
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ANALYSE ET CARACTÉRISATION DE MATÉRIAUX DE CONSTRUCTION
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D’une manière générale, on caractérise systématiquement ces
produits avant réaction en effectuant sur chaque composant l’enregistrement du spectre infrarouge selon la norme P 18-809, qui prévoit une séparation des charges minérales éventuelles et un bilan
massique des séparations. Après quoi, selon les besoins, on peut
être amené à effectuer des déterminations supplémentaires pour
caractériser le produit plus finement.
1:
spectre IR
fonctions amine et amide
2 : extraction éther / eau
phase aqueuse + HCl
3 phases
extrait sec
alcool éthylique
Du point de vue quantitatif on complète la caractérisation par des
dosages spécifiques.
insoluble
chlorhydrate de
diéthylènetriamine
Les résines époxydes (EP) résultent de la polycondensation d’une
base polyépoxyde sur un durcisseur qui est en général une polyamine dans les applications de ces produits en construction. Elles se
présentent alors comme un système bicomposant :
— la base époxyde que l’on caractérise par son indice d’époxyde
(Iép ) selon la norme NF P 18-812 ;
— le durcisseur que l’on caractérise par l’indice de basicité totale
(INH) selon la norme NF P 18-813.
Durcisseur
Pour les produits chargés, on détermine la perte au feu à 450 °C et
la teneur en cendres à 950 °C selon la norme P 18-807.
phase intermédiaire
Enfin, on peut noter que la détermination de la réactivité des systèmes époxydes rapides par la mesure de la « durée pratique
d’utilisation » (selon la norme NF P 18-810), délai dont dispose l’utilisateur pour mettre en œuvre le produit dans les conditions optimales, peut être considérée dans certains cas comme une méthode
d’identification du système lui-même.
Pour approfondir la détermination de la composition des durcisseurs, diverses méthodes sont utilisables :
— les méthodes de complexation décrites plus haut, afin de différencier les différents types d’amines (primaires, secondaires et tertiaires). Toutefois, ces méthodes ne conviennent pas avec des
durcisseurs de composition complexe contenant par exemple des
phénols ou des prépolymères époxy-amine ;
— les méthodes d’extraction liquide/liquide, qui permettent d’isoler certains constituants des durcisseurs (cf. exemple sur la
figure 17) mais ne permettent pas en général d’effectuer des déterminations quantitatives ;
— la chromatographie en phase liquide avec détection UV, pour
séparer et doser les amines aromatiques et les phénols ;
— la chromatographie en phase gazeuse (figure 18), qui permet
de séparer et de doser la plupart des amines usuelles [24].
Les résines polyuréthannes (PUR) au sens strict résultent de la
polycondensation d’une base polyol sur un durcisseur polyisocyanate Elles se présentent alors comme un système bicomposant :
— la base polyol que l’on caractérise par son indice d’hydroxyle
(IOH) ou son équivalent hydroxyle (EH)(IOH × EH = 56,1), dont la
détermination dépend de la structure de la chaîne entre les fonctions OH : la méthode − estérification et dosage de l’acide en excès
dans les deux cas − n’est pas la même selon qu’il s’agit d’un polyéther ou d’un polyester ;
— le durcisseur isocyanate que l’on caractérise par le dosage des
fonctions isocyanate (réaction avec la n-butylamine et titrage en
retour par l’acide chlorhydrique).
On considère aussi dans cette famille les polyuréthannes monocomposants réticulant avec l’humidité de l’air. Il s’agit en réalité de
polyurées, les fonctions isocyanate du produit mis en œuvre réagissant avec l’eau pour donner des fonctions urée.
Les résines acryliques de type PMMA résultent de la polymérisation (ou plus généralement de la copolymérisation avec divers
modificateurs) d’une base méthacrylate de méthyle (MAM) à l’aide
de «catalyseurs» appropriés.
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amide à chaîne grasse
hydrolyse acide
extraction par éther
Lorsque le durcisseur du système époxyde n’est pas de type polyamine (polythiol par exemple), il faut faire appel à une méthode spécifique.
Par ailleurs les formulations actuelles font apparaître des composants en dispersion dans l’eau. Dans ce cas, l’extrait sec de l’échantillon s’impose dans les essais de caractérisation.
soluble
chlorhydrate
d'aminopropylcyclohexylamine
phase aqueuse
chlorhydrate de
diéthylènetriamine
phase éther
phase solvant
acide gras
mélange alcool benzylique
– huile de pin
3 : chromatographie en phase gazeuse, confirmation de la
présence de :
diéthylènetriamine
alcool benzylique
huile de pin
aminopropylcyclohexylamine
diaminodiméthyldicyclohexylméthane
4 : dosage de la basicité totale, en milieu acétique.
Figure 17 – Exemple d’analyse d’un durcisseur
Le matériau polymérisé peut être caractérisé par son indice de
viscosité, rapport de la viscosité d’une solution diluée à celle du solvant pur à la même température.
Les résines polyester insaturé (UP) sont occasionnellement utilisées pour les réparations des structures en béton et plus volontiers
pour la protection des structures métalliques.
Le mélange de départ peut être caractérisé par un indice d’acide
et dans certains cas par un indice d’hydroxyle.
● Les produits mixtes à base de ciment et de résine synthétique
réactive, en l’occurrence les époxy-ciment, sont considérés comme
donnant lieu à l’enchevêtrement des deux réseaux macromoléculaires, le minéral (silicates) et l’organique (époxy-amine) avec des cinétiques différentes et des propriétés complémentaires intéressantes.
Les 3 composants de départ peuvent être caractérisés à l’aide des
méthodes décrites précédemment.
■ Les produits de protection des bétons sont utilisés après une
réparation ou parce que la nécessité s’est imposée de faire appel à
eux pour résister à la pénétration de l’eau, aux agressions atmosphériques, aux sels de déverglaçage, aux attaques acides, sulfatiques ou par d’autres agents agressifs (bactéries...).
Plusieurs familles de produits sont proposées pour tenter de
résoudre ces problèmes :
— les hydrofuges de surface (polymères silico-organiques ou
fluorés) ;
— les minéralisateurs (métasilicates et dérivés) ;
— les peintures, revêtements minces (à base de liants hydrauliques ou de résines synthétiques) ou revêtements plastiques épais.
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© Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation
____________________________________________________________________________ ANALYSE ET CARACTÉRISATION DE MATÉRIAUX DE CONSTRUCTION
TEPA
DETA
PEHA
TETA
EDA
4
8
12
EDA éthylènediamine
16
20
24
DETA diéthylènetriamine
28
32
36
TETA triéthylènetétramine
40
44
48
52
56
Temps (min)
TEPA tétraéthylènepentamine
PEHA pentaéthylènehexamine
Figure 18 – Analyse d’amines aliphatiques par chromatographie en phase gazeuse sur colonne capillaire apolaire en programmation
de température (d’après [24])
Dans l’état actuel des choses, les deux premières de ces familles
ne font pas l’objet de caractérisation systématique et aucune
méthode d’analyse ne peut être recommandée. Pour les revêtements plastiques par contre, on peut se reporter utilement au paragraphe 3.1.
4.4 Matériaux et complexes d’étanchéité
Comme matériau, on utilise couramment de l’asphalte pour la
confection des chapes d’étanchéité d’ouvrages d’art et de bâtiment
ainsi que pour le revêtement des trottoirs. C’est un mélange de liant
bitumineux et de charges minérales (fines et granulats). Ces produits sont appliqués à chaud, sans nécessité de compactage.
Les géomembranes sont définies (NF P 84-500) comme des produits adaptés au génie civil, minces, souples, continus, étanches aux
liquides même sous les sollicitations de service.
Les matériaux de base utilisés sont de deux types :
— des polymères : thermoplastiques, élastomères et élastomères
thermoplastiques ;
— des bitumes modifiés ou non.
Les géomembranes contiennent également divers additifs aux
matériaux de base, tels que des charges minérales, des agents stabilisants, du noir de carbone, des agents fongicides, herbicides...
Elles peuvent être renforcées par une armature (polyester, polypropylène, verre...).
Les méthodes générales applicables à la caractérisation de ces
divers matériaux dépendent de leur nature chimique ; on pourra
donc se reporter aux paragraphes correspondants du paragraphe 3,
ainsi qu’aux références des Techniques de l’Ingénieur [53, 54, 55],
essentiellement pour les essais technologiques.
Pour déterminer la composition d’une feuille d’étanchéité bitumineuse, on peut utiliser une méthode d’extraction au toluène chaud
combinée avec un entraînement azéotropique de l’eau, qui permet
d’obtenir la teneur en liant, la teneur en eau, la teneur en charges
minérales ainsi que la masse des armatures [25].
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