Ordonnance - Radio Cocotier

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T R I B U N A L D E GRANDE I N S T A N C E D E P A R I S

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ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ rendue le 20 février 2014

N° RG :

13/58918

N° : 3/FF 1 Assignation du : 24 Octobre 2013 par

Marie-Claude HERVÉ

, Vice-Présidente au Tribunal de Grande Instance de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal, Assistée de

Audrey LE BOT

, Greffier.

DEMANDERESSE S.A.R.L. PACIFIQUE PRESSE COMMUNICATION (PPC)

41-43 rue de Sébastopol Immeuble le Surcouf Centre-Ville 98800 NOUMEA représentée par Me Frédéric DESCOMBES, avocat au barreau de NOUMEA (avocat plaidant) et Me Agnès IOOS ESPECEL, avocat au barreau de PARIS - #J0076 (avocat postulant)

DÉFENDERESSE S.A.R.L. MAXIWEB

6 rue Barrau Résidence SUN BAY ORPHELINAT BP 8276 98807 NOUMEA CEDEX représentée par Me Vianney FERAUD, avocat au barreau de PARIS - #C1456

Copies exécutoires délivrées le: DÉBATS

A l’audience du 23 Janvier 2014, tenue publiquement, présidée par

Marie-Claude HERVÉ

, Vice-Présidente, assistée de

Audrey LE BOT

, Greffier,

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Nous, Président, Après avoir entendu les parties comparantes ou leur conseil,

EXPOSE DU LITIGE

: La société Pacifique presse communication édite le quotidien “Les Nouvelles calédoniennes” et le site Internet “inc.nc”.

La société Maxiweb est une société calédonienne ayant pour activité la presse internet et le développement informatique.

Le 22 août 2013, la société Pacifique presse communication a fait établir par huissier de justice un procès-verbal constatant la reproduction de divers articles de presse publiés dans Les Nouvelles calédoniennes sur le site Internet “radio cocotier”, le jour même de leur publication dans le journal et la reproduction des mêmes articles sur la page Facebook “radio cocotier”. Par ailleurs une vidéo intitulée “le film d’un braquage” mise en ligne sur le site “inc..nc” était reproduite sur le site Youtube.com avec l’indication radio cocotier.

Considérant que tout ou partie du contenu payant du site inc.nc et du journal Les Nouvelles calédoniennes était accessible gratuitement sur les sites Internet exploités par la société Maxiweb, le 24 octobre 2013, la société Pacifique presse communication a fait assigner la société Maxiweb devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris afin d’obtenir sur le fondement des articles 808 et suivants du code de procédure civile, une mesure de retrait des articles en cause et la publication d’un communiqué sur le portail d’accès des sites de la défenderesse et sur la page Facebook radio cocotier. Elle sollicite en outre la condamnation de la société Maxiweb à payer une indemnité de 1 500 €, sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

A l’audience du 23 janvier 2014, la société Pacifique presse communication déclare tout d’abord que le procès-verbal de constat du 22 août 2013 est valable et probant. Elle relève qu’il établit les faits de reproduction illicite qu’elle reproche à la défenderesse. Elle ajoute que les articles reproduits sont d’accès payant et que leur mise à disposition du public à titre gratuit constitue également des actes de concurrence déloyale. Elle écarte l’application de l’exception de courte citation alors que les articles sont intégralement reproduits. Elle fait également valoir que la défenderesse qui n’effectue pas de traitement des informations qu’elle tire des Nouvelles calédoniennes et qui n’emploie pas de journaliste, ne peut revendiquer le statut de service de presse en ligne. Elle conclut donc à l’existence d’un trouble manifestement illicite et demande qu’il soit enjoint à la société Maxiweb de cesser ses agissements.

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La société Pacifique presse communication s’oppose, en outre, à la demande reconventionnelle de la société Maxiweb fondée sur des photographies de la page Facebook radiococotier, reproduites dans les Nouvelles calédoniennes. Elle fait valoir que la société Maxiweb ne justifie pas être titulaire des droits d’auteur sur les photographies en cause et qu’au surplus la reproduction litigieuse qui servait à illustrer un fait de société, était traitée de façon journalistique et entrait dans le champ d’application de l’article L122-5- 3°a du code de la propriété intellectuelle.

La société Maxiweb immatriculée au registre du commerce et des sociétés le 15 mars 2013, déclare tout d’abord qu’elle n’a pas de lien avec le site www..indiscret.nc et que la page Facebook radiococotier existe depuis 2010 et est administrée par une dizaine de personnes dont son gérant mais qui agit à titre personnel. Elle expose qu’elle a créé le site www.radiococotier.com.

www.radiococotier.nc

en juillet et août 2013, consacré à l’actualité de la Nouvelle Calédonie et elle explique que les contributions figurant sur la page Facebook radiococotier sont automatiquement reproduites sur le site La société Maxiweb conteste tout d’abord le caractère probant du procès-verbal de constat et demande à ce qu’il soit écarté des débats. Elle relève donc que la preuve des faits illicites allégués par la demanderesse n’est pas rapportée.

La société Maxiweb fait ensuite valoir que la société Pacifique presse communication ne rapporte pas la preuve qu’elle est titulaire des droits d’auteur sur la vidéo et les articles en cause.

Elle ajoute que la société demanderesse ne peut invoquer des droits d’auteur qu’autant que les vidéo et textes sont originaux. Elle relève en outre que les articles tels que reproduits en colonne, ne sont pas lisibles. Elle conteste donc l’existence d’un trouble manifestement illicite en l’absence d’actes d contrefaçon ou de concurrence déloyale alors que la demanderesse n’établit pas le caractère payant de l’ensemble des article figurant sur son site Internet.

La société Maxiweb soutient ensuite qu’il ne peut être demandé le retrait de textes qui ne figurent plus ou qui ne figurent pas sur son site et elle invoque les exceptions de courte citation et de revue de presse de l’article L125 du code de la propriété intellectuelle. Elle ajoute que la demande de publication excède les pouvoirs du juge des référés.

Reconventionnellement, elle demande que la société Pacifique presse communication soit condamnée pour avoir publié sans son autorisation des photographies initialement diffusées sur la page Facebook radiococotier. Aussi dans l’hypothèse où il serait fait droit à la demande de la société Pacifique presse communication, elle sollicite également la publication d’un communiqué dans les Nouvelles calédoniennes. Elle réclame enfin la somme de 2 500 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

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MOTIFS DE LA DÉCISION

: Le 22 août 2013, maître Jean-Marie Fandoux, huissier de justice à Nouméa, s’est fait assister d’un informaticien afin de réaliser un procès-verbal de constat sur Internet. La lecture du procès-verbal fait apparaître que certaines opérations notamment de contrôle de l’installation informatique ont été réalisées par ce technicien, lequel a remise à l’huissier de justice une note descriptive de la procédure exécutée, laquelle fait partie du procès-verbal. Dans la mesure où l’huissier de justice a contrôlé les opérations du technicien et que les opérations telles la configuration du pare-feu, l’identification de l’adresse IP et de l’adresse MAC, la synchronisation de la date et de l’heure du poste de travail ont donné lieu à des captures d’écran intégrées au procès-verbal, il y a lieu d’admettre que les règles exposées par la norme AFNOR Z67-147 ont été respectées.

Il convient ensuite de relever que pour accéder aux articles en cause sur le site Internet radio cocotier, l’informaticien sous le contrôle de l’huissier de justice, a entré dans le bandeau de r e c h e r c h e d e G o o g l e l e s a d r e s s e s h t t p : / / w w w . r a d i o c o c o t i e r . n c / h o r r e u r - 2 0 1 3 8 0 6 / , h t p p : / / w w w . r a d i o c o c o t i e r . n c / 6 3 4 7 8 0 9 8 8 5 7 8 9 / , h t p p : / / w w w . r a d i o c o c o t i e r . n c / 6 3 9 9 0 8 9 3 6 2 3 7 1 / htpp://www;radiococtier.nc/filesfaussesnotes-201230806/ et htpp://www.radiococtier.nc/jaitestpourvous-20130801/selon les indications fournies par Christel Moulin, directrice financière de la société demanderesse.

La contrefaçon implique une communication de l’oeuvre au public et le procès-verbal doit faire apparaître que les textes litigieux étaient accessibles par le cheminement qui serait adopté par n’importe quel internaute. Or en l’espèce le technicien est parvenu sur les pages en cause en ayant indiqué une adresse précise qui n’est pas connue de l’internaute moyennement informé. Or la société Maxiweb a elle-même versé aux débats des copies d’écran réalisées après inscription de ces adresses dans la barre du navigateur, qui font apparaître un message “page not found”.

Aussi ce procès-verbal n’établit pas de façon suffisamment certaine que les pages litigieuses ont été communiquées au public et ne constitue donc pas une preuve des faits de contrefaçon allégués.

L’huissier de justice avec l’assistance du technicien s’est par ailleurs rendu sur le site www.maxiweb.info

Pacifique presse communication . mais il n’a pas constaté la présence d’articles de presse revendiqués par la société S’agissant de la page Face book accessible à l’adresse htpps://www.facebook.com/ radio.cocotier, il appartient à la demanderesse de justifier que la société Maxiweb est responsable de son contenu dès lors que celle-ci en conteste être l’éditeur.

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Enfin, s’agissant du site youtube.com, l’huissier de justice a constaté la présence d’une vidéo intitulée “braquage d’un commerçant à Yaoundé” avec à la fin, l’apparition du logo radio cocotier. Cependant cette vidéo n’est pas versée aux débats, ce qui met le juge dans l’impossibilité d’en apprécier l’originalité alors que selon les indications de la défenderesse, il s’agirait d’une vidéo enregistrée par une camera de surveillance.

En toutes hypothèses, la contrefaçon n’existe qu’autant que les textes en cause constituent des oeuvres de l’esprit protégeables par le droit d’auteur, ce qui suppose qu’ils portent l’empreinte de la personnalité de leur auteur.

Cette condition n’est pas remplie lorsqu’un article de presse est constitué de la simple relation, dans un style banal, d’un fait d’actualité.

La société Pacifique presse communication a versé aux débats quatre articles intitulés “une ado violée à Termba”, “une question de dates”, “le film d’un braquage” et “j’aurai pu y passer” publiés sur son site Internet, qui font le récit de comportements délictueux ou criminels.

La société Pacifique presse communication ne fait mention d’aucun élément permettent d’apprécier en quoi ces articles sont révélateurs de la personnalité de leur auteur. S’agissant des autres articles dont le titre est cité : La course au Sésame, Pédophilie en sourdine, Affrontement à Rivière salée” ils ne sont pas versés aux débats, ce qui ne permet d’apprécier ni leur originalité ni l’existence d’une reprise.

La société Pacifique presse communication entend également agir sur le fondement de la concurrence déloyale en faisant valoir que la société défenderesse rend accessible gratuitement des articles dont elle -même fait payer l’accès.

Outre que la réalité de la communication au public des textes litigieux par la société Maxiweb n’est pas établie, il convient de relever que la demanderesse n’a versé aux débats aucune pièce relative aux conditions d’accès de son propre site Internet.

Enfin en dernier lieu la société Pacifique presse communication demande le retrait des articles de presse publiés dans le quotidien Les nouvelles calédoniennes, sans préciser lesquels. Or, une telle mesure ne peut être prononcée sur le fondement de l’article 809 du code de procédure civile que dans la mesure où les articles clairement indiqués sont encore en ligne et il ne peut être ordonné une mesure générale pour le futur alors que l’appréciation de la contrefaçon doit s’effectuer pour chacun des articles.

Aussi au vu de l’ensemble de ces éléments, il n’y a pas lieu à référé sur les demandes principales.

La société Maxiweb forme une demande reconventionnelle tendant à voir faire figurer un message particulier si le juge des référés ordonnait une publication.

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Outre que la société Maxiweb ne justifie pas de sa qualité de titulaire des droits d’exploitation ni de l’originalité des photographies en cause, il y a lieu de constater que cette demande est sans objet.

Il n’y a pas lieu de faire application de l’article 700 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

: Statuant publiquement par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en premier ressort, Disons n’y avoir lieu à référé, Disons n’y avoir lieu à application de l’article 700 du Code de procédure civile, Condamnons la société Pacifique presse communication aux dépens.

Fait à Paris le

20 février 2014

Le Greffier, Le Président, Audrey LE BOT Marie-Claude HERVÉ

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