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Molybdène et alliages par Fernand MARATRAY Directeur Technique Honoraire de la Climax Molybdenum SA 1. 1.1 1.2 Propriétés du molybdène....................................................................... Propriétés physiques................................................................................... Propriétés chimiques................................................................................... 2. Minerais de molybdène .......................................................................... — 2 3. 3.1 3.2 3.3 3.4 3.5 Métallurgie extractive ............................................................................ Enrichissement des minerais...................................................................... Grillage du concentré .................................................................................. Purification de l’oxyde technique............................................................... Réduction de l’oxyde purifié....................................................................... Production et utilisation de la poudre de molybdène .............................. — — — — — — 3 3 3 3 3 4 4. 4.1 4.2 4.3 4.4 Production de molybdène massif........................................................ Technique de frittage................................................................................... Molybdène électrofondu............................................................................. Transformation à chaud .............................................................................. Laminage à froid.......................................................................................... — — — — — 4 4 4 5 5 5. 5.1 5.2 5.3 5.4 Techniques de fabrication des produits finis................................... Mise en forme sans enlèvement de copeaux............................................ Usinage......................................................................................................... Assemblage.................................................................................................. Durcissement superficiel. Protection contre l’oxydation ......................... — — — — — 5 5 5 5 5 6. 6.1 6.2 Caractéristiques mécaniques du molybdène et de ses alliages . Fragilité au voisinage de la température ambiante .................................. Caractéristiques mécaniques à chaud ....................................................... — — — 5 6 6 7. 7.1 7.2 7.3 7.4 7.5 7.6 7.7 7.8 Utilisations industrielles........................................................................ Électricité et électronique............................................................................ Optique ......................................................................................................... Fours industriels .......................................................................................... Industrie du verre ........................................................................................ Élaboration et mise en forme des métaux ................................................ Rotors de turbines ....................................................................................... Industrie chimique....................................................................................... Dépôts superficiels ...................................................................................... — — — — — — — — — 8 8 8 8 8 9 9 9 9 M 2 374 10 - 1992 Pour en savoir plus........................................................................................... M 2 374 - 2 — 2 — 2 Doc. M 2 374 arl Wilhelm Scheele mettait fin, en 1778, à la confusion qui régnait sur la nature de la molybdénite et du graphite, en montrant que la molybdénite (MoS2 ), soumise à une attaque nitrique à chaud, laissait un résidu blanc, qu’il identifiait ensuite comme un oxyde acide, que nous savons être l’anhydride molybdique. En 1782, P. J. Hjelm séparait le métal, sous la forme d’une poudre fine, en chauffant l’oxyde avec du charbon de bois, et lui donnait le nom de molybdène. Il ne pouvait obtenir la fusion de cette poudre, et ce n’est qu’en 1893 que H. Moissan K Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Matériaux métalliques M 2 374 − 1 MOLYBDÈNE ET ALLIAGES ______________________________________________________________________________________________________________ réussit la fusion du molybdène en chauffant un mélange de dioxyde de molybdène et de charbon de bois au four électrique. Le métal obtenu contenait de nombreuses impuretés et titrait 92 à 96 % de molybdène. La première utilisation industrielle du molybdène est l’ajout de cet élément dans des aciers pour blindages, en 1894, aux usines Schneider du Creusot. La production industrielle du molybdène pur, sous une forme massive, est devenue possible, à partir de 1909, quand W. D. Coolidge montra que la technique de métallurgie des poudres, qu’il avait mise au point pour la fabrication de filaments de tungstène, était applicable au molybdène. Le fil de molybdène, utilisé dans la fabrication des lampes à incandescence, a été la première application industrielle importante. L’utilisation du fil s’est développée en métallisation et, avec le ruban, dans la fabrication des lampes radio et des contacts électriques. Ces applications ont constitué l’essentiel de la consommation de molybdène massif jusqu’au début de la Seconde Guerre mondiale. Dans les années 50, pour satisfaire à de nouvelles applications dans des secteurs industriels très variés, la production de semi-produits de grandes dimensions et plus performants a conduit à une véritable mutation technologique des procédés de fabrication, molybdène électrofondu (Climax Molybdenum 1953), pressage isostatique, accompagnée de la production de molybdène de plus haute pureté et de la mise au point d’alliages à durcissement par précipitation, et de durcissement de solution solide. 1. Propriétés du molybdène 1.1 Propriétés physiques Le molybdène, de masse atomique 95,94 ± 0,01, de numéro atomique 42 et de configuration électronique (Kr) 4 d 5 5 s 1, est le second membre du groupe VI de la classification périodique. Comme élément de transition, il peut prendre tous les degrés de valence de 2 à 6, les plus importants étant les degrés de valence 3, 5 et 6. Il cristallise dans le système cubique centré, et sa maille a comme paramètre à 25 oC : a0 = 0,314 72 nm. Les valeurs généralement acceptées des constantes physiques les plus usuelles sont les suivantes [1] [2] : Densité (théorique à 20 oC)................................... 10,22 Température de fusion .......................................... 2 617 oC Chaleur latente de fusion (2 617 oC) .................... 35,6 kJ · mol–1 Température d’ébullition (101,3 kPa) ................... 4 612 oC Enthalpie de vaporisation ..................................... 589 kJ · mol–1 Capacité thermique massique (0 à 100 oC)......... 251 J · kg–1 · K–1 Conductivité thermique (0 à 100 oC).................... 137 W · m–1 · K–1 Coefficient de dilatation (0 à 100 oC) ................... 5,1 × 10–6 K–1 Résistivité électrique (20 oC) ................................. 5,7 µΩ · cm Coefficient de résistivité ........................................ 4,35 × 10–3 K–1 Le molybdène est stable dans l’eau, s’oxyde lentement dans la vapeur d’eau, et rapidement à chaud quand la vapeur se dissocie. Le molybdène réduit certains éléments et composés : oxydes nitreux et nitrique, anhydride sulfureux, gaz carbonique, nitrites, nitrates, carbonates alcalins, oxydes de plomb et de cuivre, acide nitrique, et les halogènes. La réaction d’oxydation se produit à la température ambiante avec le fluor et l’acide nitrique dilué (l’acide nitrique concentré passive la surface), à 235 oC avec le chlore, à 1 200 oC avec le dioxyde de carbone. Le molybdène offre une bonne résistance à l’acide chlorhydrique dilué et concentré, et aux acides réducteurs, jusqu’à 190 oC dans les solutions à moins de 70 % en masse d’acide sulfurique, jusqu’à 270 oC dans l’acide phosphorique et jusqu’à 100 oC environ dans l’acide acétique. Il n’est pratiquement pas attaqué par les solutions alcalines à 50 % de potasse ou de soude, jusqu’à 100 oC. Le molybdène a une excellente tenue en présence de nombreux métaux à l’état liquide, alcalins, alcalino-terreux : sodium (1 030 oC), cuivre (1 300 oC), plomb (1 200 oC), mercure, aluminium (700 oC), zinc (400 oC). Le molybdène est inerte vis-à-vis du phosphore jusqu’à 1 400 oC et en présence d’hydrogène et d’azote à des températures très élevées. o Potentiel d’électrode E Mo 3+ /Mo .............................. – 0,200 V/EHN oC, Module d’Young (20 polycristallin)................ 324,8 GPa Module de Coulomb .............................................. 125,6 GPa Coefficient de Poisson ........................................... 0,293 1.2 Propriétés chimiques L’état de surface du molybdène reste inaltéré dans l’air à la température ambiante ; il commence à s’oxyder au-dessus de 370 oC, et se recouvre d’une couche intermédiaire d’oxyde MoO2 et d’une couche externe d’oxyde MoO3 . L’oxyde MoO3 se sublime quand la température dépasse 650 oC, et l’oxydation devient catastrophique. M 2 374 − 2 2. Minerais de molybdène Les principaux minéraux contenant du molybdène sont la molybdénite (MoS 2 ), la wulfénite (PbMoO 4 ), la molybdite (FeO3 , 3MoO3 + H2O), la powellite [Ca(Mo, W) O4] et quelques autres minerais qui sont sans intérêt économique. La molybdénite est le minéral le plus répandu, vient ensuite la wulfénite ; la powellite n’existe qu’en faible quantité, elle est parfois associée à la scheelite (CaWO4). Actuellement, seule la molybdénite est exploitée ; dans le passé, la wulfénite a contribué à une production substantielle de molybdène. Le molybdène est séparé des minerais de scheelite qui contiennent de la powellite au cours de la préparation de l’acide tungstique, mais ne représente qu’une fraction négligeable de la production. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Matériaux métalliques ______________________________________________________________________________________________________________ MOLYBDÈNE ET ALLIAGES La molybdénite est disséminée dans des porphyres granitiques et dans des porphyres cuprifères. La minéralisation s’est effectuée par un processus hydrothermal, à des périodes géologiques différentes pour le molybdène et le cuivre. Ces types de gisements assurent la majeure partie de la production, et sont localisés dans l’Ouest américain, particulièrement aux États-Unis, au Canada et au Chili. La molybdénite est aussi présente dans des filières des auréoles de métamorphisme en bordure de massifs granitiques. Les gisements de molybdène primaire sont exploités à des teneurs de l’ordre de 0,05 à 0,25 % et, dans les mines de cuivre, le molybdène est séparé à des teneurs comprises entre 0,05 et 0,1 %. Un peu moins de la moitié de la production de molybdène est assurée par les mines de molybdène primaire. L’évaluation des réserves et les productions mondiales sont données dans la fiche documentaire [Doc. M 2 374]. 3. Métallurgie extractive 3.1 Enrichissement des minerais Après extraction, le minerai des mines de molybdène primaire est concassé et broyé, pour libérer la molybdénite, et enrichi par flottation. Les opérations de broyage et de flottation sont répétées plusieurs fois pour obtenir un taux de récupération de l’ordre de 85 %. Le concentré obtenu a pour composition chimique : 70 à 80 % Mo, 0,25 à 2,5 % Cu, 0,1 à 0,9 % Pb, 0 à 3,0 % Fe, 0,5 à 1,5 % acides insolubles (SiO2 , Al2O3). La molybdénite est isolée des concentrés de cuivre par une série d’opérations de flottation qui séparent sélectivement la molybdénite des différents sulfures de cuivre [chalcopyrite (CuFeS2), chalcocite (Cu2S), covellite (CuS)] et de l’argile. Le taux de récupération est de l’ordre de 50 %, principalement en raison du fait que les circuits sont optimisés pour récupérer le maximum de cuivre. À l’exception d’une très faible quantité de concentré qui est destiné à être utilisé comme lubrifiant, après purification pour obtenir une teneur en MoS2 > 98 % avec du carbone comme principale impureté, la quasi-totalité du concentré est transformée en oxyde technique MoO3 . 3.2 Grillage du concentré Le grillage de la molybdénite est effectué à l’air dans un four à soles superposées, équipé de racleurs (four Nichols-Herreshoff ou Lurgi). L’eau est évaporée et les huiles de flottation sont brûlées sur les soles supérieures qui sont chauffées. La majeure partie du soufre est éliminée sur les soles intermédiaires, suivant les réactions d’oxydation : 2MoS 2 + 7O 2 → 2MoO 3 + 4SO 2 MoS 2 + 6MoO 3 → 7MoO 2 + 2SO 2 2MoO 2 + O 2 → 2MoO 3 Comme les réactions d’oxydation sont très exothermiques, et que la température ne doit pas dépasser 600 à 650 oC pour éviter les pertes par sublimation de l’oxyde MoO3 , on régule la température en introduisant un excès d’air ou en pulvérisant de l’eau. La charge des dernières soles contient surtout de l’oxyde MoO2 ; la quantité de chaleur dégagée par la réaction d’oxydation est insuffisante pour assurer l’oxydation de MoO2 en MoO3 et les soles inférieures doivent être chauffées. Les fumées sont parfois traitées pour récupérer le rhénium. L’oxyde technique contient de 85 à 90 % de MoO3 ; la différence est surtout constituée d’oxyde de silicium et de fer. L’oxyde technique est utilisé pour les additions de molybdène dans les aciers et les fontes, la fabrication de ferromolybdène, de molybdate d’ammonium et d’autres composés chimiques ([Doc. M 2 374] pour la répartition des utilisations). 3.3 Purification de l’oxyde technique L’oxyde technique est purifié par voie sèche, en le sublimant, ou par voie humide, en passant par une transformation intermédiaire à l’état de molybdate d’ammonium suivie d’une calcination. La sublimation de l’oxyde est opérée en faisant passer, dans un four continu, une mince couche d’oxyde sous un élément chauffant à 1 100-1 200 oC. Les vapeurs d’oxyde sont entraînées dans un courant d’air et condensées. La fraction sublimée représente 60 à 70 % de la charge traitée, et le résidu, riche en molybdène, qui s’est enrichi en substances non volatiles venant de la gangue et en particules métalliques, est utilisé comme élément d’addition en aciérie. Dans la purification de l’oxyde par voie humide, les impuretés sont éliminées, en différentes étapes, au cours de la préparation du molybdate d’ammonium. Les impuretés alcalines, le potassium en particulier, sont d’abord éliminées par lavage de l’oxyde technique à l’eau à 75 oC ; après filtration, l’oxyde est attaqué dans une solution à 10 à 20 % en masse de NH4OH, à 80 oC, pour obtenir une solution de molybdate d’ammonium suivant la réaction : MoO3 + 2NH3 + H2O → (NH4)2 MoO4 La solution de molybdate est filtrée pour éliminer les insolubles venant de la gangue (silice et oxydes de fer), ensuite le cuivre et le nickel sont précipités sous forme de sulfures. La solution filtrée est évaporée et le bimolybdate (NH4)2Mo2O7 cristallisé. La solution mère qui s’enrichit en sodium, calcium, magnésium et aluminium au cours de l’évaporation est soutirée périodiquement. Le bimolybdate est extrait de la solution par centrifugation, séché et transformé en oxyde MoO3 par chauffage au-dessus de 450 oC. Les oxydes de molybdène produits par sublimation et à partir de bimolybdate d’ammonium ont respectivement un taux de pureté minimal de 99,8 et 99,95 %. Les teneurs en silicium, cuivre, fer et étain de l’oxyde préparé par sublimation sont un peu plus élevées que celles de l’oxyde issu du molybdate. 3.4 Réduction de l’oxyde purifié La poudre de molybdène est obtenue par réduction de l’oxyde MoO3 ou de bimolybdate en atmosphère d’hydrogène. Pour éviter la formation d’une phase liquide au cours de la réduction [fusion de l’oxyde MoO3 (800 oC) ou formation d’eutectique MoO2-MoO3] qui provoquerait une agglomération de l’oxyde et rendrait impossible l’obtention d’une poudre fine apte au frittage, la réduction est conduite en deux étapes à 550-600 oC pour obtenir l’oxyde MoO2 , et ensuite à 1 050 oC pour le réduire à l’état métallique. Les poudres obtenues à partir de l’oxyde sublimé ont une granulométrie (Fisher SSS) de 3 à 7 µm, et les poudres obtenues à partir du molybdate d’ammonium de 4 à 8 µm. La surface spécifique est de l’ordre de 0,1 à 1 m2/g. Les teneurs en impuretés sont mentionnées tableau 1. (0) Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Matériaux métalliques M 2 374 − 3 MOLYBDÈNE ET ALLIAGES ______________________________________________________________________________________________________________ Tableau 1 – Teneur en impuretés des poudres de molybdène obtenues par réduction d’oxyde sublimé et de molybdate d’ammonium (% en masse) Impureté Oxyde sublimé Teneur maximale (%) Al Ca Cr Cu Fe Pb Mg Mn Ni Si Sn Ti C 0,004 0,004 0,008 0,002 0,010 0,002 0,002 0,001 0,004 0,025 0,008 0,002 0,005 Moyenne (%) 0,002 0,001 0,001 < 0,001 0,009 0,001 < 0,001 < 0,001 < 0,001 0,012 0,003 < 0,001 0,002 Molybdate d’ammonium Teneur maximale (%) 0,001 0,003 0,005 0,001 0,005 0,002 0,001 0,001 0,001 0,003 0,003 0,002 Moyenne (%) < 0,001 < 0,001 0,001 < 0,001 0,003 0,001 < 0,001 < 0,001 < 0,001 0,002 0,001 < 0,001 La teneur en oxygène (adsorbé et à l’état d’oxyde) est de l’ordre de 100 à 500 mg/kg. Le degré de pureté de la poudre à 99,95 % est insuffisant pour certaines applications électroniques - transistors à effet de champ. Les impuretés indésirables, métaux alcalins Na, K, radioactifs U, Th et lourds Ni, Cu, etc., sont éliminées, après dissolution en milieu nitrique de la poudre à 99,95 %, par cristallisations successives et traitement sur résines échangeuses d’ions. Le taux de pureté après traitement est de 99,999 % de molybdène. 3.5 Production et utilisation de la poudre de molybdène La production de poudre de molybdène, dans les pays du bloc occidental, était de l’ordre de 6 710 tonnes en 1988. La répartition de la consommation entre les différents secteurs d’utilisation est donnée dans la fiche documentaire [Doc. M 2 374]. 4. Production de molybdène massif La quasi-totalité du molybdène massif est obtenue par métallurgie des poudres ; le solde, 5 à 10 % environ, est électrofondu au four à arc à électrode consommable ou à bombardement électronique. Le pressage des pièces de petites dimensions, sur presses automatiques, utilise des granulés de poudre agglomérée pour faciliter l’écoulement vers le moule et bien contrôler son alimentation. La granulation est effectuée en pulvérisant une mixture de poudre de molybdène, en suspension dans un solvant contenant un liant organique en solution, dans une chambre chaude verticale. Le solvant s’évapore au cours de la pulvérisation et le liant organique agglomère les particules de poudre. Le pressage est effectué sous une pression de l’ordre de 200 MPa, ensuite le liant est éliminé par chauffage avant frittage. Les lingots de forge et de laminage (jusqu’à 5 t) sont pressés à froid, en conditions isostatiques, sous une pression de 100 à 300 MPa. La poudre est placée, avant passage, dans un container en élastomère scellé. Le pressage classique de pièces moyennes exige, en raison des frottements, une pression plus élevée, 150 à 500 MPa. L’énergie apparente d’activation de la diffusion en volume du molybdène, 405 kJ/mol, impose une température de frittage très élevée pour éviter une durée de maintien excessive à température. Le taux de densification [(masse volumique apparente/masse volumique du solide) 100] et, dans une moindre mesure, la dimension des porosités, leur forme et leur répartition ont une influence très importante sur la charge de rupture et la ductilité. Un taux de densification minimal de 90 % est suffisant pour certaines applications ; par contre un taux de densification de 94 à 97 % est nécessaire pour que le matériau puisse supporter une transformation thermomécanique. Le chauffage est effectué, en général, en atmosphère d’hydrogène, dans un four à résistance de tungstène. Le cycle thermique, d’une durée de 4 à 30 h, comprend généralement deux paliers, un maintien à température de préfrittage vers 1 190 oC, suivi d’un maintien à température de frittage (1 800 à 2 300 oC). Deux artifices permettent d’accélérer le frittage, le frittage en atmosphère humide et l’ajout d’éléments activants. ■ Le frittage en atmosphère d’hydrogène humide s’effectue dans des conditions où la réaction Mo + 2H 2 O !MoO 2 + 2H 2 peut s’effectuer. Les atomes de molybdène qui entrent en réaction ont une plus grande mobilité et peuvent ainsi favoriser une densification à plus basse température. On obtient après 2 à 3 h de maintien à 1 500-1 700 o C, dans une atmosphère d’hydrogène saturée en vapeur d’eau à 20-40 %, une densité de l’ordre de 10 g/cm3. ■ On utilise, comme activateur du frittage , un métal peu soluble dans le molybdène (Ni, Pd, Co), qui abaisse fortement la température du liquidus et du solidus et possède un coefficient de ségrégation très élevé. Le frittage est accéléré quand la vitesse de diffusion du molybdène dans la solution solide est plus rapide que l’autodiffusion du molybdène. Avec 0,33 % de nickel, le taux de densification à 1 000 oC est augmenté d’un facteur 10. L’addition supplémentaire de 1 400 ppm masse de silice augmente, en bloquant les joints des grains, le taux de densification de 67 %. Ces solutions ont des inconvénients : la première apporte de la fragilité en favorisant la formation d’oxydes intergranulaires, la seconde abaisse considérablement les caractéristiques de fluage. 4.2 Molybdène électrofondu 4.1 Technique de frittage La technique de frittage présente, en ce qui concerne le mode de pressage, trois variantes suivant la masse de la pièce et l’utilisation envisagée. M 2 374 − 4 Le molybdène est fondu sous vide, dans un four à arc à électrode consommable, sous forme de lingots de 500 kg à 1 t, en vue de la production de produits forgés ou laminés. La fusion par bombardement électronique est plus particulièrement destinée à des applications spéciales en électronique. Les lingots de molybdène électrofondu ont une structure basaltique à gros grains dans toute la section. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Matériaux métalliques ______________________________________________________________________________________________________________ MOLYBDÈNE ET ALLIAGES 4.3 Transformation à chaud Les lingots de molybdène électrofondu doivent être extrudés pour transformer la structure primaire et permettre toute autre opération de travail à chaud. L’extrusion est effectuée, suivant le procédé Séjournet (lubrification vitreuse), à une température de l’ordre de 1 270 oC ; un taux d’extrusion de 1,6 à 2,5 est nécessaire pour obtenir une plasticité permettant une transformation ultérieure. Les lingots de molybdène fritté peuvent être transformés à chaud par forgeage ou laminage, sans extrusion préalable. Les lingots sous forgés ou laminés à une température inférieure à la température de recristallisation dynamique (1 800 oC). Le dégrossissage est fait à des températures de l’ordre de 1 180-1 500 oC, avec des taux de réduction aussi élevés que possible, pour assurer un corroyage uniforme dans la section. La température de travail à chaud est abaissée progressivement, jusqu’à 900-700 oC, au fur et à mesure que la section diminue. Des taux de réduction de 90 % sont aisément obtenus avant recuit intermédiaire de recristallisation. Les produits sont fortement texturés, d’autant qu’ils sont généralement livrés à l’état écroui et détensionnés. Les caractéristiques mécaniques sont anisotropes, les pièces fabriquées à partir de produits longs sont contre-forgées au préalable, si elles doivent présenter des caractéristiques élevées dans le sens travers. Les tôles pour emboutissage profond subissent un laminage croisé, pour améliorer leurs caractéristiques mécaniques dans le sens travers long. Les caractéristiques dans le sens travers court sont généralement peu élevées. 4.4 Laminage à froid Le laminage à froid est pratiqué, sur des tôles laminées à chaud après recuit et décapage, avec un taux de réduction de l’ordre de 25 % entre recuits. Un excellent état de surface est obtenu quand le laminage est effectué entre 150 et 260 oC. Les épaisseurs sont comprises entre 0,5 et 0,025 mm en 300 mm de large. 5. Techniques de fabrication des produits finis 5.1 Mise en forme sans enlèvement de copeaux Le molybdène peut être mis en forme par pliage, emboutissage, fluotournage, etc. La température de travail doit être comprise entre la température de transition et la température de recristallisation. On adopte en général une température de l’ordre de 200 oC pour une épaisseur de 0,5 mm, de 700 oC pour une épaisseur de 4 mm et de 1 000 oC pour une épaisseur de 10 mm. Les opérations de cisaillage et de découpage peuvent être faites à la température ambiante, jusqu’à une épaisseur de 0,25 mm ; les tôles plus épaisses doivent être préchauffées suivant la règle précédente, pour éviter un délaminage de la section. 5.2 Usinage Le molybdène et l’alliage TZM sont facilement usinés avec des outils en acier à coupe rapide ; la durée de vie des outils en acier à coupe rapide surcarburé est plus longue, mais nécessite néanmoins des réaffutages fréquents. L’utilisation d’outils en carbure de tungstène est recommandée pour toutes les opérations de coupe continue, ainsi que l’utilisation de fluides de coupe. À titre indicatif, la vitesse de coupe en tournage, avec un outil en carbure de tungstène de type C2, un angle d’affûtage de 15o, une avance de 0,23 mm/tour, une profondeur de coupe de 0,76 mm, est de 137 m · min–1. Le molybdène et ses alliages peuvent être usinés par électro-érosion avec des électrodes de graphite, cuivre, laiton, molybdène, tungstène-cuivre. La surface usinée a une certaine rugosité et peut présenter des microcriques susceptibles d’affecter la teneur en service, si la surface est soumise à des contraintes de tension. Les microfissures peuvent être enlevées par polissage mécanique, électrolytique ou usinage chimique. La rectification du molybdène ne présente pas de difficultés ; on obtient facilement une microgéométrie de 0,25 à 0,76 micromètre. Pour plus de détails sur les conditions d’usinage, consulter la référence [3] en [Doc. M 2 374]. 5.3 Assemblage Dans la mesure du possible on évite les assemblages soudés et brasés en recourant au rivetage ou à l’agrafage. Le soudage du molybdène présente de sérieuses difficultés dues à une température de fusion et à une conductivité thermique élevées, à un grossissement excessif du grain au-dessus de la température de recristallisation et à une grande affinité pour l’oxygène et l’azote à l’état liquide. La pression partielle de ces éléments doit être inférieure à 0,5 Pa au cours du soudage, et les joints doivent être parfaitement propres pour éviter la formation de phases fragilisantes ou de porosités. Les techniques les plus couramment utilisées sont le procédé TIG, le soudage par bombardement électronique et, dans l’industrie électronique, le soudage par résistance (articles spécialisés dans le traité Génie mécanique). Le brasage permet, avec des brasures à température de fusion inférieure à la température de recristallisation, d’éviter le grossissement du grain [brasure Au-Ni (965 o C), Ag-Cu-Pd (1 120-1 220 o C), Ni-Mn-Pd (1 125 oC), Pd-Ni (1 250 oC)]. 5.4 Durcissement superficiel. Protection contre l’oxydation Le molybdène peut être durci superficiellement par cémentation, nitruration et boruration pour assurer une meilleure résistance à l’usure. De nombreux revêtements ont été proposés pour protéger le molybdène contre l’oxydation, pour satisfaire à des applications aéronautiques. Les revêtements à base de siliciure de molybdène et de siliciures complexes Si-Cr-Fe et Si-Cu-Al assurent une protection, limitée dans le temps, jusqu’à une température de l’ordre de 1 500 à 1 600 oC. 6. Caractéristiques mécaniques du molybdène et de ses alliages La production de molybdène et d’alliages de molybdène permettant d’assurer de bonnes conditions de mise en forme, et de tenue en service, pose deux problèmes majeurs au métallurgiste, éviter la fragilité au voisinage de la température ambiante et assurer des caractéristiques mécaniques à chaud aussi élevées que possible. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Matériaux métalliques M 2 374 − 5 MOLYBDÈNE ET ALLIAGES ______________________________________________________________________________________________________________ 6.1 Fragilité au voisinage de la température ambiante La température de transition du molybdène est voisine de la température ambiante, la rupture est transgranulaire dans le domaine ductile, intergranulaire dans le domaine fragile, et mixte dans la zone de transition. Le faciès de rupture, à basse température, du molybdène de haute pureté présente un mélange de ruptures intergranulaires et de clivages. La présence de ces deux modes de rupture s’explique par l’influence de la structure des joints de grains sur leur résistance. Les joints des grains de faible résistance, convenablement orientés dans la direction de l’effort, cèdent avant qu’un clivage ne se produise. Les interstitiels fragilisent le molybdène ; ils imposent, à de très faibles teneurs, la prédominance de la rupture intergranulaire et, aux teneurs plus élevées, dès qu’ils précipitent dans les joints des grains sous forme d’oxyde MoO2 , de carbure Mo2C et de nitrure MoN, la température de transition augmente très rapidement (figure 1). D’autres facteurs, la grosseur du grain et la vitesse de déformation, ont une forte influence sur la ductilité. Notons que l’augmentation du rapport surface/volume atténue l’influence des interstitiels, quand la grosseur du grain diminue. Les conditions industrielles de fabrication conduisent à des valeurs élevées de la température de transition, à une faible valeur de la limite d’élasticité et de la charge de rupture du molybdène à l’état recristallisé ; en fait, le molybdène est généralement utilisé à l’état écroui et détensionné. L’écrouissage abaisse la température de transition, suivant une relation à peu près proportionnelle au taux de réduction (figure 2), et relève la limite d’élasticité, la charge de rupture et la dureté, mais on est limité dans cette voie par l’influence négative de l’écrouissage sur la température de recristallisation (figure 3). Le traitement de détente relaxe les contraintes internes, la striction augmente, et les autres caractéristiques de traction restent inchangées. L’écrouissage, effectué à tiède, correspond au taux de réduction appliqué après recuit, et le traitement de détensionnement à un maintien de 4 heures à une température de l’ordre de 900 oC. 6.2 Caractéristiques mécaniques à chaud L’écrouissage améliore la résistance à chaud aux températures inférieures à la température de recristallisation où l’on retrouve les caractéristiques de l’état recristallisé (figure 4). Pour maintenir la résistance à chaud à des températures plus élevées, on procède à une dispersion des microparticules non métalliques de silicate de potassium, ou d’alumino-silicate de potassium (dopage), qui inhibe le grossissement du grain jusqu’à une température de l’ordre de 1 650 oC, suivant un mécanisme qui s’apparente à celui observé avec les tôles magnétiques au silicium. Figure 1 – Influence fragilisante de l’oxygène, de l’azote et du carbone sur le molybdène Figure 2 – Température de transition de l’alliage TZM en fonction du taux de réduction M 2 374 − 6 Figure 3 – Relation entre la température donnant une recristallisation complète après 1 h de maintien et le taux de réduction Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Matériaux métalliques ______________________________________________________________________________________________________________ MOLYBDÈNE ET ALLIAGES Figure 5 – Influence de la température de recuit sur la dureté du molybdène, du molybdène dopé et de l’alliage TZM Figure 4 – Influence de la température sur la résistance à la traction de tôles de 1 mm d’épaisseur (0) Tableau 2 – Molybdène et principaux alliages de molybdène industriels Les caractéristiques mécaniques à chaud, du molybdène et du molybdène dopé, sont comparables avant recristallisation (figure 5) ; pour augmenter simultanément la résistance à chaud et la température de recristallisation, on procède soit à un durcissement par précipitation de carbures, soit à un durcissement de solution solide. La composition chimique des principaux alliages industriels est indiquée dans le tableau 2. Les alliages à durcissement par précipitation (TZM, TZC, ZHM et MHC) contiennent du carbone avec du titane et du zirconium ou du titane et du hafnium ; le durcissement est assuré par des carbures mixtes de ces éléments qui donnent une précipitation cohérente ou semi-cohérente avec la matrice. L’alliage TZM, qui est le plus couramment utilisé, a un taux de réduction de 60 % et, après une heure de maintien à température, une température de début et de fin de recristallisation de 1 310 et 1 460 oC, soit environ 250 oC de plus que le molybdène non allié. Les alliages TZC et ZHM, qui contiennent plus de carbures que le TZM, ont une température de recristallisation supérieure d’environ 140 oC à celle de ces derniers. Les figures 4 et 5 montrent le domaine de températures où l’alliage TZM conserve des propriétés à chaud intéressantes. Les alliages de molybdène à durcissement de solution solide les plus couramment utilisés sont les alliages molybdène-tungstène et molybdène-rhénium. Le molybdène et le tungstène forment une solution solide en toutes proportions et les caractéristiques des alliages molybdène-tungstène suivent la loi des mélanges. La température de solidification, de recristallisation, la résistance à la traction, la limite d’élasticité, le module d’élasticité et la résistance à la corrosion dans le zinc liquide augmentent quand la teneur en tungstène augmente. Le molybdène forme avec le rhénium, qui a une structure hexagonale, une solution cubique centrée jusqu’à environ 50 % de rhénium. L’addition de rhénium favorise la déformation par maclage et présente l’avantage d’augmenter la résistance, tout en améliorant la ductilité et la température de transition. La température de transition des alliages à 50 % de rhénium est inférieure à – 254 oC à l’état recristallisé. Désignation Éléments d’alliage Mo ............................ Mo dopé au silicate de potassium ........... Mo dopé à l’alumino-silicate de potassium ........... TZM .......................... MHC ......................... ZHM.......................... TZC ........................... MoWHfC .................. Mo-W ....................... Mo-Re....................... Mo-Ta....................... Mo-Nb ...................... Composite Mo-Cu Spécification ASTM B386-85 (1) MM 360 à 365 PM 361 0,005 à 0,1 % K 0,005 à 0,1 % Si 0,01 à 0,2 % O2 K 1,6 g/kg Al 0,03 g/kg Si 2,0 g/kg 0,01 à 0,04 % C 0,5 % Ti, 0,08 % Zr 0,04 à 0,2 % C 0,5 à 2,0 % Hf 0,1 % C, 0,4 % Zr 1,2 % Hf 0,06 à 0,2 % C 1,0 à 1,5 % Ti 0,2 à 0,35 % Zr 25 à 45 % W 0,9 à 1,0 % Hf C ≈ 0,1 % 5%W 30 % W 3 % Re 41 % Re 50 % Re 3 % Ta 3 % Nb 30 % Cu 50 % Cu MM 363 PM 364 MM 366 Cermet Mo Zr O2 ..... (1) MM Électrofondu. PM Métallurgie des poudres. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Matériaux métalliques M 2 374 − 7 MOLYBDÈNE ET ALLIAGES ______________________________________________________________________________________________________________ 7. Utilisations industrielles Les applications industrielles du molybdène et de ses alliages tirent parti d’une ou de plusieurs de ses caractéristiques physiques, chimiques et mécaniques ; les secteurs d’utilisation sont très diversifiés [4]. Les éléments chauffants résistors, suscepteurs pour le chauffage par induction, et les équipements, écrans thermiques, creusets, nacelles, supports, tubes de couples thermoélectriques, sont en molybdène ou en alliage TZM (figure 7). Les couples thermoélectriques Mo-5 Re/Mo-41 Re permettent de mesurer les températures jusqu’à 1 800 oC. 7.4 Industrie du verre 7.1 Électricité et électronique Le molybdène permet, dans la fabrication des lampes à halogènes et des tubes électroniques, de réaliser des scellements étanches sous vide avec le quartz et des verres borosilicatés. Le scellage s’effectue à 2 100 oC environ ; le molybdène présente l’avantage d’être stable à haute température en présence du quartz, de résister à la pression exercée au cours de l’opération et, comme les coefficients de dilatation sont compatibles, les contraintes thermiques sont négligeables. Les filaments de tungstène sont spiralés sur des mandrins en molybdène, on sépare, après spiralage, le filament du mandrin par dissolution sélective du molybdène. La fusion du verre et des émaux est obtenue par effet Joule, le courant électrique est conduit au bain de fusion par des électrodes en molybdène. Le molybdène présente une excellente résistance à la corrosion par les verres liquides, à l’exception des verres oxydants, et l’oxyde de molybdène n’altère pas la couleur du verre. Les spécifications imposent une teneur maximale en carbone de 50 ppm masse pour éviter la formation de bulles dans le verre et une grosseur de grain comprise entre 50 et 150 µm pour éviter la déformation et la rupture des électrodes en service. Des creusets en molybdène sont utilisés dans la fabrication des tubes de quartz et des monocristaux de saphir (θ ≈ 2 100 oC). Le molybdène est utilisé, pour sa bonne résistance aux sollicitations thermiques, dans la fabrication des supports, crochets et œillets de serrage des lampes à filaments de tungstène, des anodes, des grilles, des supports de getters et de cathodes et dans celle des tétrodes à ondes courtes et à haute puissance (figure 6). La bonne résistance à l’érosion à l’arc électrique et l’inertie chimique du molybdène en présence du mercure (θ < 700 oC) permet son utilisation dans la fabrication des interrupteurs à mercure, des relais téléphoniques et des contacteurs spéciaux. Le molybdène a une place privilégiée dans la fabrication des redresseurs, diodes, thyristors, transistors et microprocesseurs ; son coefficient de dilatation, identique à celui du silicium, et ses caractéristiques thermiques permettent d’éviter les contraintes internes et de dissiper facilement l’énergie calorifique. La codéposition par pulvérisation cathodique de molybdène et de silicium, de ultra-haute pureté, donne des films de MoSix qui permettent d’obtenir des circuits intégrés à faible capacitance parasite. L’arbre de rotation des tubes à rayons X, à anode tournante, utilisés pour les examens médicaux, est en molybdène ou en alliage TZM. Figure 6 – Grilles finies et semi-finies en molybdène pour des tubes émetteurs (doc. Plansée) 7.2 Optique La possibilité d’obtenir avec le molybdène un poli spéculaire, inaltérable dans l’atmosphère, avec un pouvoir réflecteur élevé dans un large spectre du rouge à l’infrarouge lointain (de l’ordre de 46 % pour λ = 0,5 µm et 98 % pour λ = 10,6 µm), combinée avec un coefficient de transmission thermique, un module d’élasticité élevés et un faible coefficient de dilatation qui assure la stabilité thermique dimensionnelle, permet d’utiliser le molybdène dans la fabrication de miroirs réflecteurs pour rayons lasers. 7.3 Fours industriels Le pressage isostatique à chaud des superalliages, des aciers alliés, le frittage des métaux, alliages, céramiques de haute pureté, oxydes d’uranium, de plutonium, le brassage des métaux, utilisent des fours qui travaillent sous vide, en atmosphère neutre ou d’hydrogène, à des températures qui peuvent atteindre 1 800 oC. M 2 374 − 8 Figure 7 – Creusets en molybdène pour la fabrication de tubes électroniques Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Matériaux métalliques ______________________________________________________________________________________________________________ MOLYBDÈNE ET ALLIAGES 7.5 Élaboration et mise en forme des métaux Le tungstène a une excellente résistance à la corrosion dans le zinc liquide, mais est extrêmement difficile à usiner ; le molybdène a une assez bonne résistance à la corrosion et son usinage est relativement aisé. L’alliage de molybdène à 30 % de tungstène réalise un bon compromis entre la résistance à la corrosion et l’aptitude à l’usinage. Les producteurs de zinc et l’industrie de la galvanisation utilisent des pompes à zinc liquide, des agitateurs, des buses de coulées, etc. en alliage Mo-30 W. Le molybdène ne forme pas d’alliage avec le cuivre et le magnésium et peut rester immergé dans ces métaux à l’état liquide sans être attaqué. Le molybdène est soluble dans l’aluminium liquide et forme de nombreux composés intermétalliques ; il est attaqué après une immersion suffisamment prolongée, mais la valeur élevée du coefficient de transmission thermique du molybdène permet, dans la mesure où l’énergie thermique à évacuer n’est pas trop importante, d’assurer la solidification quasi immédiate d’une couche superficielle d’aluminium qui évite la corrosion par l’aluminium liquide. Figure 8 – Douilles de guidage pour l’étirage du cuivre par immersion Le coefficient de transmission thermique et la température de recristallisation élevés et un faible coefficient de dilatation confèrent à l’alliage TZM une excellente résistance aux chocs thermiques. L’ensemble de ces qualités permet d’utiliser en fonderies d’alliages cuivreux, de magnésium et d’aluminium des supports de noyaux, des refroidisseurs et des moules de moulage sous pression en alliage TZM (figures 8 et 9). Les performances des aciers à outils de travail à chaud sont insuffisantes pour travailler à des températures de l’ordre de 875 à 1 200 oC. Pour le forgeage isotherme, dans le domaine superplastique, du titane et des superalliages on utilise des matrices en alliage TZM ou TZC et HfC, et des filières en alliage TZM pour l’extrusion des alliages cuivreux (figure 10). 7.6 Rotors de turbines Le nucléaire utilise des rotors de turbine en alliage TZM qui travaillent en atmosphère d’hélium. La possibilité d’utiliser des disques et ailettes de turbines à gaz en alliage TZM dans l’industrie aéronautique est explorée. Le rotor et les aubes doivent être protégés contre l’oxydation par un revêtement de siliciure de molybdène, qui lui-même doit être protégé contre l’érosion par un revêtement d’alumine. L’expérience a montré qu’un rotor de turbine pouvait travailler à 1 343 oC pendant une période limitée (environ 7 h). Figure 9 – Axes en TZM 7.7 Industrie chimique L’industrie chimique utilise dans des milieux acides réducteurs à des températures relativement élevées des équipements en molybdène, réacteurs, échangeurs thermiques, séparateurs, réservoirs, tubes, raccords, membranes, trémies, etc. 7.8 Dépôts superficiels Le molybdène est déposé en couches minces sur les aciers de construction par différentes techniques (chalumeau oxyacétylénique, torche à plasma). Les dépôts au chalumeau oxyacétylénique sont très utilisés dans l’industrie automobile pour leurs propriétés Figure 10 – Forgeage isothermique avec des matrices en TZM Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Matériaux métalliques M 2 374 − 9 MOLYBDÈNE ET ALLIAGES ______________________________________________________________________________________________________________ de frottement (segments de piston, bagues de synchronisation, fourchettes de changement de vitesse). Cette technique est également utilisée pour réparer les parties usées d’organes mécaniques. Le molybdène est utilisé comme couche intermédiaire pour assurer l’adhésion entre le support et la couche d’acier déposé. Les techniques d’évaporation sous vide de métaux et de composés chimiques sur des verres d’optique, papiers, matières plastiques, métaux, utilisent des nacelles d’évaporation en molybdène à cause de sa température de fusion élevée et de sa faible pression de vapeur (figure 11). Figure 11 – Nacelles en molybdène pour évaporation M 2 374 − 10 Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Matériaux métalliques P O U R Molybdène et alliages par E N Fernand MARATRAY Directeur Technique Honoraire de la Climax Molybdenum SA Données économiques Prix Le prix de la poudre de molybdène en 1992 était de l’ordre de 15 à 20 $ ; les difficultés de fabrication et la mise au mille augmentent considérablement le prix des demi-produits laminés quand le diamètre ou l’épaisseur diminue (figure A). Réserves et production Évaluation des réserves en 1992 Gisements de molybdène exploités 1 265 × 103 t Gisements de molybdène non exploités 3 036 × 103 t Gisements de molybdène associé exploités 2 316 × 103 t Gisements de molybdène associé non exploités 1 142 × 103 t Total des réserves 7 759 × 103 t Nota : molybdène associé : sous-produit de la mine de cuivre. Répartition des utilisations (tableau B) (0) Tableau A – Production de molybdène en 1990 Origine Primaire (en 103 t) P L U S Total États-Unis .................. Canada ....................... Chili ............................ Mexique ..................... Pérou.......................... 36,3 6,5 ........................ 0,2 ........................ CEI .............................. Iran ............................. Chine (1)..................... Mongolie (1) .............. ........................ ........................ ........................ ........................ ........................ ........................ ........................ ........................ Recyclage catalyseurs................. ........................ ........................ 2,5 Total production mondiale ................................................ ... 120 43,0 Figure A – Influence du diamètre et de l’épaisseur e des produits laminés sur le coefficient d’augmentation des prix K Sous-produit 25,5 5,7 14,0 2,0 2,4 61,8 12,2 14,0 2,2 2,4 49,6 92,6 8,6 0,9 13,6 1,8 (1) Valeurs estimées. Doc. M 2 374 10 - 1992 (0) Tableau B – Répartition des utilisations du molybdène (1990) Aciers de construction............................................................... Aciers inoxydables..................................................................... Aciers à outils............................................................................. Fontes et aciers moulés............................................................. Alliages à base de molybdène et superalliages ...................... Composés chimiques ................................................................ 35 % 26 % 9% 6% 12 % 12 % TOTAL ......................................................................................... 100 % Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. − © Techniques de l’Ingénieur, traité Matériaux métalliques S A V O I R Doc. M 2 374 − 1 P O U R MOLYBDÈNE ET ALLIAGES Bibliographie Références [1] E N ______________________________________________________________________________________________________________ [2] [3] [4] NORTHCOTT (L.). – Molybdenum. Butterworth’s Sc. Publ., éd., 222 p. (1956). Molybdenum Metal. – Climax Molybdenum Company, 109 p. (1960). TIMMONS (G.). – Machining Molybdenum. Amax Specialty Metals Corporation, 16 p. (1982). Applications industrielles des métaux réfractaires. Doc. Plansée. Ouvrages S A V O I R P L U S AUBRY (J.) et MALAPRADE (L.). – Molybdène. Nouveau Traité de Chimie Minérale, XIV Masson & Cie (1959). Molybdenum and Molybdenum Compounds. Ullmann’s Encyclopaedia of Industrial Chemistry VGH (1990). SUTULOV (A.). – Intermet Molybdenum Yearbook. Santiago de Chile (1982). SUTULOV (A.). – International Molybdenum Encyclopaedia. No 1778-1978, vol. II, Intermet Publications, Santiago de Chile (1979). McHUGH (L.F.) et SALLADE (P.L.). – Molybdenum Conversion Practice. Paper no 86, 154 SME Annual Meeting, New Orleans, LA, 2 - 6 mars 1986. The Metal Molybdenum. ASM (1956). Physical Metallurgy and Technology of Molybdenum and its Alloys. Proceedings of a Symposium, Amax Materials Research Center, oct. 1984. BRIGGS (J.Z.) et BARR (R.Q.). – Arc-Cast Molybdenum-Base Alloy - Properties and Applications. High Temperature - High Pressure, p. 363 à 409 (1971). Molybdenum for Nuclear Energy Applications. 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GTE Sylvania ............................................................................................... ADM (1) Oxyde purifié Poudre ★ ★ ★ ★ ★ ★ ★ (1) ADM bimolybdate d’ammonium. Doc. M 2 374 − 2 Laminés Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. − © Techniques de l’Ingénieur, traité Matériaux métalliques ★ ★ ★