LA DIMENSION TEMPORELLE DANS LES SERVICES
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Transcript LA DIMENSION TEMPORELLE DANS LES SERVICES
Les temps
du contrôle de gestion
Pour les budgets : temps long de la planification stratégique,
rythme annuel des prévisions budgétaires, rythme mensuel
du reporting
Pour le calcul et l’analyse des coûts : temps long des charges
de structures, horizon annuel pour les coûts standards et les
PCI, court terme pour les charges variables et réelles … mais
aussi calculs de coûts fondés sur les temps (H de MOD dans
les méthodes classiques, TD-ABC, etc.)
Pour la réduction des coûts : temps de la conception et de
l’analyse de la valeur des nouveaux produits, temps de la
production et du kaizen costing (courbes d’expérience)
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Le contrôle de gestion
des temps
Le temps des opérations au cœur de l’efficience locale dans
l’industrie classique (Taylor et le fordisme) : chronométrage,
benchmarking, standards, mise sous tension …
Le temps des processus au cœur de l’efficacité globale dans le
modèle industriel japonais du « juste à temps » (Ohno et le
toyotisme) : zéro stock, zéro délais, qualité totale …
Le temps dans les services trop peu étudié alors que les
services représentent les ¾ de l’emploi en France
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Plan
de l’intervention
1) Le nouveau contrôle de gestion
2) La spécificité des activités de service
3) Les outils emblématiques de la gestion des services
4) Dimension temporelle et performance servicielle
5) La gestion du temps dans la coproduction du service
6) L’instrumentation du contrôle du temps des services
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Vision classique
du contrôle de gestion
Classification d’Anthony (1965) : planification stratégique,
contrôle de gestion, contrôle des tâches
Otley (1999) : « Le contrôle opérationnel a été négligé car il était
clair que les différentes organisations utilisaient des pratiques
différentes au niveau opérationnel et Anthony s’est concentré sur
les éléments communs à toutes les organisations. Se focaliser sur
ces éléments communs permettait de développer un langage
universel capable d’englober tous les types d’activités
organisationnelles. (…) Bien qu’il ait été peut-être correct de se
concentrer initialement sur le cœur du champ « contrôle de
gestion », il est maintenant nécessaire d’accorder plus
d’importance aux aspects négligés de la stratégie et de
l’opérationnel. »
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Nouvelle approche
du contrôle de gestion
Le contrôle de gestion s’insère dans le Système de Pilotage de
la Performance (SPP) global de l’entreprise qui comprend :
Les objectifs et indicateurs finaux stratégiques
Les chaînes de causalité de l’opérationnel au stratégique
Les niveaux de performance fixés aux managers
Le système d’incitations liées à l’atteinte des résultats
Les flux d’informations indispensables top-down et bottomup
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La dimension
opérationnelle du contrôle
Bouquin (2006) : importance du contrôle d’exécution dans le
contrôle de gestion
Bouquin et Fiol (2006) : « Le contrôle de gestion se trouve
écartelé entre sa composante qui sert la direction générale (une
approche financière) et celle qui régule « le terrain » et ses
processus. Il est clair que c’est à ce deuxième niveau que se
perçoit la valeur ajoutée du contrôle, l’autre niveau le ramenant à
un simple reporting. (…) L’approche par les processus est
devenue une référence. Elle donne une méthodologie au
contrôle de gestion. Elle constitue le chaînon manquant entre la
stratégie et les centres de responsabilité. »
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Conséquences du
changement de focale
Vision plus large englobant le contrôle des activités et des
processus opérationnels
Dépasser la modélisation financière fondée uniquement sur la
valeur pour le propriétaire (indicateurs monétaires de la
comptabilité de gestion et des budgets) représentation
fondée sur les processus productifs créateurs de valeur pour le
client et le propriétaire (indicateurs physiques et financiers des
tableaux de bord opérationnels et stratégiques)
Vision contextualisée et contingente par nature car liée au
métier
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La nature
des services
4 caractéristiques distinctives des services (IHIP) :
Immatérialité des services (Intangibility)
Hétérogénéité des services (Heterogeneity)
Coréalisation du service avec le client (Inseparibily)
Ajustement temporel de l’offre à la demande (Perishability)
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1) Immatérialité
La prestation n’est pas tangible et sa qualité se révèle souvent
a posteriori
Le prestataire développe les attributs et essaie de reculer la
ligne de visibilité afin de rendre tangible l’intangible
On gère des opérations (l’utile) et une relation (l’agréable)
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2) Hétérogénéité
Activité plus orienté vers les hommes (divers) que vers les
choses (standardisables)
Il peut y avoir une hétérogénéité subie (variété des clients et
des situations) mais aussi une hétérogénéité voulue (choix du
sur mesure)
Importance de la dimension humaine contingente lors de la
phase de contact
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3) Interactivité
Importance variable de la phase de coproduction de la
prestation : services high contact ou low contact
Système productif des services ouvert par nature
Socialisation organisationnelle du client qui participe au
processus productif de la servuction
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4) Immédiateté
Ajustement temporel d’une offre de service à capacité limitée à
une demande généralement fluctuante
On n’a pas de stock de marchandises, on a des « stocks de
clients » dans les queues et files d’attente
Problème crucial des pointes d’activité ou « coups de feu »
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Des critères
remis en cause
Tous ces paramètres sont impactés par :
les évolutions des business models (low cost versus « tout
compris et sur mesure »)
l’accroissement des coopérations et partenariats des
prestataires (offres de valeur partagées et combinées)
le développement des technologies de l’information et de la
communication (automates et internet en self-service)
Développement d’une « Service Science Management and
Engineering (SSME) » avec des coopérations entre chercheurs
en gestion, en sciences sociales et en technologie
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Comment définir
les services ?
Usage sans possession, location, droit d’accès (Lovelock et
Gumesson, 2004)
Coproduction du service avec le bénéficiaire (Edwardsson et al.,
2005 ; Sampson et Froehle, 2006)
Service Dominant Logic insistant sur la création de valeur dans
l’acte d’achat par le client (Vargo et Lush, 2004)
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1) Identifier les unités
les plus efficientes
Une caractéristique des services : réseau d’unités ou d’agences
de terrain analogues coproduisant en contact avec le client
Méthode DEA permettant de mettre en évidence de façon
statistique les unités les plus efficientes : on identifie ainsi les
pratiques les plus productives
Nombreux travaux académiques dans le secteur de la banque
ou de la distribution mais moins d’applications professionnelles
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2) Généraliser les meilleurs
processus de servuction
Une fois identifié les unités les plus performantes, il faut
formaliser et standardiser les meilleures pratiques avant de les
généraliser
Rédaction de flow charts (Sasser, 1978) et de blueprints
(Shostack, 1992) modélisant les processus de servuction mis en
œuvre : back office, supports physiques, actions du personnel
en contact, actions du client
Ceci est très courant dans tous les services à la personne et
parfois codifié dans des codes déontologiques ou règles
professionnelles
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3) Gérer et contrôler
les temps et les délais
La dimension temporelle est très importante dans les services :
c’est perçu comme un coût ou une valeur, un défaut ou une
qualité
Possibilités d’agir en amont de la demande (préparation de la
prestation en back office) pour réduire le délai de délivrance du
service, d’impliquer le client pour réduire la durée de la phase
de coproduction, d’agir afin que le temps d’attente ne soit plus
du temps mort
On a dans les services beaucoup de techniques pour réduire le
temps d’attente ou changer sa perception (Durrande-Moreau,
1999) la gestion des files d’attente est maintenant banale
dans tous les services
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4) Gérer la demande
et adapter les capacités
Yield management quand on ne peut pas stocker, quand la
demande est variable face à une offre fixe, quand on peut
effectuer des ventes par réservation et quand les coûts
marginaux sont faibles
Pratique dépassant le cadre des fonction habituelles de
l’entreprise et si on arrive aux limites, il faut gérer la structure
de production (capacity management)
Très courant dans les transports, l’hôtellerie, la location, etc.
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5) Mesurer la qualité
de service
Qualité du service délivré mesurée par des indicateurs « durs »
mais perception de la valeur perçue par le client plus complexe
Outil de mesure de la qualité perçu du service par le client :
SERVQUAL (Parasuraman, Zeithaml et Berry, 1985) avec 5
critères : effectivité, fiabilité, réactivité, assurance, empathie
Très courant dans tous les services
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6) Mettre sous tension
l’entreprise de service
Pilotage de la performance de l’entreprise par une balanced
scorecard : 4 axes (finance, satisfaction client, process
productifs, connaissances et savoirs faire) reliés par des
chaînes de causalité
Lien entre la dimension opérationnelle (valeur perçue par le
client) et la performance financière (valeur pour le
propriétaire)
Très courante dans les entreprises en général et très adaptée
aux services
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Articulation
de ces dimensions
3 dimensions fondamentales des SPP dans les services :
La recherche et la généralisation des meilleures pratiques
opérationnelles dans le réseau des unités de terrain
L’ajustement permanent aux fluctuations de la demande
dans le temps
L’alignement de toutes les composantes de l’entreprise vers
la valeur créée pour le client
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Delivery time
et waiting time
Pour l’entreprise, la dimension temporelle de la production de
services inclu le temps de préparation en back office et le temps
de coproduction avec le client en front office
Il existe de nombreuses techniques pour réduire le temps de la
coproduction en préparant les choses en amont ou en
recourant au « travail du consommateur » (Dujarier, 2008)
Le client perçoit lui le temps d’attente (Maister, 1985) puis le
temps de la coproduction avec le personnel en contact
Les méthodes pour réduire la perception négative de l’attente
sont elles aussi innombrables (tickets, animations, organisation
dynamique des files d’attente, etc.)
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La phase de coproduction
avec le client
Le client est un acteur du processus de coproduction du service
Ce qui compte à cette occasion c’est autant les conditions de
réalisation de la coproduction (le comment) que le résultat de
l’interrelation (le quoi)
L’expérience vécue par le consommateur (le temps de la
coproduction) détermine la qualité perçue et sa satisfaction
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Coût et valeur du temps
pour l’entreprise
et le consommateur
Pour l’entreprise : le temps est un coût quand il consomme des
ressources productives ; il est de la valeur créée pour elle si on
facture la prestation de service en fonction du temps passé
avec le client
Pour le client : le temps est un coût quand il « gaspille » une
ressource rare de l’individu ; il est perçu comme une valeur s’il
répond à ses besoins exprimés, si l’interrelation se passe bien
ou si des besoins non totalement formulés sont identifiés et
satisfaits
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1) Diminuer
le temps improductif
Tous les temps inutiles, les
comportements du personnel
valeur doivent être éliminés
contrôle des tâches et de la
management, etc.)
opérations redondantes, les
en contact ne créant pas de
on est dans le cas classique du
chasses aux gaspillages (lean
On peut procéder à une réflexion à froid sur des blueprints avec
un bureau des méthodes et en utilisant les nouvelles
technologies de l’information et de la communication
Ceci diminue les coûts pour l’entreprise et pour le client
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2) Accroître l’efficience
du temps productif
C’est une démarche progressive prenant en compte la diversité
des situations rencontrées et la généralisation des meilleures
pratiques
On doit identifier et standardiser les règles de comportement et
les modes de fonctionnement permettant d’accroître la
productivité dans le déroulement des opérations
On veut diminuer les coûts pour l’entreprise sans toucher à la
valeur perçue par le client
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3) Investir dans
la relation avec le client
Pour que le client puisse être intégré sur le long terme comme
un acteur fiable de la coproduction du service, il faut l’initier au
bon déroulement des opérations dans la phase de contact :
c’est la socialisation organisationnelle du client
Si le service est complexe, nécessite un apprentissage, il faut
former le client à être un coproducteur averti ce qui lui
facilitera l’usage du service
Le temps passé va créer de la valeur sur le long terme pour
l’entreprise et pour le client
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4) Investir dans
l’autonomisation du client
On est ici dans le cas où l’interface entre le client et l’entreprise
va être amené à se réduire : on veut développer les techniques
et usages autonomes du client (automates et internet)
L’entreprise va économiser du temps en transférant une partie
des tâches au client (développement du self-service)
On crée de la valeur pour l’entreprise avec un coût immédiat
pour le client (mais souvent une valeur dans l’usage futur)
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1) Contrôle de gestion
et temps improductif
Il faut réduire systématiquement les temps improductifs dans
les transactions et les aspects opérationnels de la prestation
Mesure des coûts cachés (Savall et Zardet), mesure de la nonqualité, mesure du coût des opérations redondantes ou
inutiles, etc.
Mise en place de règles de fonctionnement et de procédures
impératives à respecter par le personnel en contact
(reengeniering)
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2) Contrôle de gestion
et temps productif
Il faut améliorer progressivement l’efficience des processus
productifs dans les transactions et les aspects opérationnels de
la prestation
Il faut combiner les mesures quantitatives de productivité et
qualitatives de qualité perçue
C’est ici que les démarches de benchmarking et d’échanges
d’expériences seront les plus utiles
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3) Contrôle de gestion
et investissement
dans la relation
Il faut améliorer progressivement l’efficacité des rapports au
client et les aspects relationnels de la prestation
C’est un champ délicat de mesure entre les coûts à court terme
(dans l’interface) et les gains à long terme (sur la durée de la
relation)
Importance des mesure qualitatives de satisfaction perçue
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4) Contrôle de gestion
et investissement
dans l’autonomisation
On peut chiffrer assez facilement l’économie réalisée par le
transfert des processus productifs à la charge du client et la
satisfaction induite
Il y a un coût à court terme dans l’interface et une économie à
long terme (sur la durée de la relation)
Mesure assez aisée : c’est un investissement comme un autre
avec un retour évaluable
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La dimension temporelle
est au cœur des activités
de service
Pour gérer le temps de la coproduction du service, il faut
prendre en compte le coût et la valeur pour l’entreprise et le
client
Il y a des transactions et une relation, des coûts et des
économies à court terme, des investissements et des retours
sur investissement à long terme
Des questions nouvelles apparaissent : comment gérer les
clients difficiles et le temps qu’ils font perdre ? quels impacts
temporels des nouvelles technologies de self-service ?
dimensions temporelles des coproductions partagées entre
clients sans personnel en contact ?
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Durrande-Moreau (1999) : « Waiting for Service: Ten Years of
Empirical Research », International Journal of Service Industry
Management, 10 (2)
Dujarier (2008) : Le travail du consommateur, La découverte
Ferreira et Otley (2009) : « The Design and Use of Performance
Management Systems: An extended Framework for Analysis »,
Management Accounting Research 20 (4)
Goureaux et Meyssonnier (2011) : « Business models et contrôle
opérationnel dans les services : le cas de la gestion conjointe
des coûts, de la qualité et des délais dans la restauration
commerciale », Recherches en Sciences de Gestion 82
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Maister (1985) : The Psychologie of Waiting Lines, The Service
Encounter.
Meyssonnier (2012) : « Le contrôle de gestion des services :
réflexion sur les fondements et l’instrumentation »,
Comptabilité-Contrôle-Audit, 18 (2).
Meyssonnier et Tahar (2011) : « Le contrôle des temps et des
délais dans les services publics communaux », Congrès de
l’Association Francophone de Comptabilité (Montpellier).
Vargo et Lusch (2004) : « Evolving to a New Dominant Logic for
Marketing. » The Journal of Marketing 58 (2).
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