La biodiversité : enjeux - Espace Mendès

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FORÊTS
VIVANTES,FORÊT
VIVABLES….
Biodiversité, foresterie, les
grands enjeux
Alain PERSUY, Espace Mendès
France, 6 février 2014
Qu’est ce qu’une forêt ???
La forêt est, avant tout, un
écosystème.
• S’il est un milieu apparemment consensuel dans sa définition, c’est
bien celui-ci : une « grande étendue de terrain couverte
d’arbres »…juste bien sûr, cette description simplifie à l’extrême la
compréhension d’un écosystème qui ne peut se résumer à ses seuls
éléments dominants. Une forêt est un foisonnement de manifestations
végétales et animales, (3900 espèces végétales et 6800 espèces
animales estimées, dans les hêtraies d’Europe centrale), une mosaïque
de milieux associés et de micro biotopes, tissé de mystères et de
lumières. Champignons, mousses, sources et arbres creux, fûts
majestueux, taillis, combes secrètes, halliers hautains, on ne peut être
forestier si l’on n’est pas poète pour s’imprégner de ces dimensions ;
cela n’exclut ni la gestion, ni l’économie. Une forêt réduite à sa simple
expression de troncs et de mètres cubes n’est plus une forêt, c’est une
usine à bois : on n’y fait plus de la sylviculture mais de la ligniculture,
option qui peut être légitime, mais qui ne doit pas se confondre avec la
science du forestier, basée sur l’humilité, l’observation, et la patience.
Une forêt vivante est un refuge
de biodiversité
Le mot biodiversité est un néologisme construit à
partir des mots biologie et diversité. La biodiversité
désigne donc la diversité du monde vivant au sein de
la nature.
Le terme a été utilisé pour la première fois par
l'entomologiste E.O. Wilson en 1996, lors de la
publication du compte-rendu du premier forum
américain sur la diversité biologique, organisé par
le National Research Council.
Diversité=richesse=résilience
• « La Biodiversité est la diversité de toutes les
formes du vivant.
Pour un scientifique, c’est toute la variété du
vivant étudiée à
3 niveaux : les écosystèmes, les espèces qui
composent les écosystèmes, et enfin les gènes
que l’on trouve dans chaque espèce.
On parle donc ce biodiversité écosystémique,
spécifique (intra et inter espèces), génétique…»
.
Les principaux rôles biologiques de
la forêt
• -Protection des sols
• -Protection de la
ressource en eau
• -Stockage du CO2
• -Conservation
d’espèces animales et
végétales
• Régulation du climat
• Et par ailleurs,
productrice de bois, le
plus écologique des
matériaux, à la base
de ce que l’on appelle
désormais l’écohabitat
La forêt, par son fonctionnement naturel, assure indirectement
des « services » écologiques aux sociétés humaines, services qui
ne sont pas évalués par les mécanismes économiques classiques
du marché, mais dont l'importance pourrait être considérable.
Ces services incluent le maintien de la qualité de l'atmosphère et
la régulation du climat, le contrôle de la qualité de l'eau et du
cycle hydrologique, la formation et le maintien de la fertilité des
sols….Estimation de M Chevassus au Louis : 95O euros/ha/an…
La protection des sols
• La forêt est un
manteau vivant,
fixant le sol sur
les pentes, au
long du littoral,
près des rivières :
un m3 de sol
forestier renferme
quelques 100 km
de racines, dont
l’essentiel est
sous forme de
radicelles…la RTM,
restauration des
terrains en
montagne, y fait
largement appel…
Eaux et forêts : la protection de la ressource
•
• les arbres interceptent les
précipitations : La forêt constitue
donc un obstacle entre l’eau de pluie
et le sol. On distingue les eaux
d’interception qui restent sur les
feuilles par capillarité (environ 20%
de l’eau de pluie) ; les eaux
d’écoulement des troncs qui arrivent
au sol et qui profitent aux racines ; les
eaux qui arrivent plus ou moins
directement au sol (gouttes qui
tombent des feuilles). L’eau, une fois
au sol, ruisselle ou s’infiltre. Cette
infiltration est facilitée par la présence
d’une couche d’humus qui peut
absorber de 5 à 9 fois son poids.
Celle-ci empêche le ruissellement et
permet, suivant la nature et la
composition du sol, à l’eau de
rejoindre une nappe souterraine ou de
s’écouler en sous-sol. La mousse peut
jouer un rôle similaire à celui de
l’humus. Un hectare de mousse d’une
épaisseur de 10 cm peut retenir
jusqu’à 460 m3 d’eau . Le sol
forestier, très riche en bactéries, filtre
littéralement l’eau : elle arrive épurée
dans les nappes phréatiques…
Forêt : usine
naturelle à
dépolluer l’eau
Le stockage du C02
C’est à la fois une réalité et une incertitude. Réalité ; par la
photosynthèse,en présence de l’énergie lumineuse du soleil, et de l’eau du
sol sol, l’arbre constitue sa matière vivante, le carbone, en stockant le CO2
de l’atmosphère et en dégageant de l’oxygène, en journée ;un ha de jeune
forêt peut ainsi piéger 2 tommes de CO2 par an…; mais les vieilles forêts
jouent également en grand rôle ; le sol lui-même stockant ce CO2.
L’incertitude tient dans les conséquences même du réchauffement
climatique : sans eau, pas de photosynthèse, pas de stockage de C02 : en
2003, les forêts ont rejeté du C02 !
L’utilisation de bois, dans l’ameublement et la construction bois, concourt
à stocker dans la grande durée ce stockage…une charpente peut durer des
siècles…de même que les meubles !
Ceci dit, que l’on ne vienne pas demander à la forêt de solutionner de
manière pérenne cette problématique de lutte contre le changement
climatique : en tout état de cause,elle ne pourrait stocker qu’une petite
partie du CO2 mondialement rejeté….sans oublier que sa destruction,
notamment en Asie, Afrique, Amérique du Sud, continue…
Prévoir le changement forestier !!!
Vrai problème, fausses solutions
•
•
•
Pour répondre aux atteintes du changement climatique, le meilleur comme le pire est écrit,
commenté, avancé, expliqué, affirmé : le meilleur, avec la promotion des mélanges d’essences
(FAITES LE PLEIN D’ESSENCES), une meilleure prise en compte de la fragilité des sols, le pire
avec l ’introduction brutale d’essences exotiques ( pin Taeda, voire eucalyptus…)…ou la
dynamisation à l’extrême de la sylviculture : raccourcissement des cycles d’exploitation, élimination
du sous étage, travail et fertiilsation du sol, etc.
Dans le domaine de l’énergie, au prétexte de substituer aux énergies fossiles, responsables d’une
partie de l’augmentation des GES, le bois énergie, certains ne voient plus dans la forêt qu’une source
de matière première : avec extraction des souches (comme en Aquitaine), coupes rases généralisées,
suppression du bois mort, ( récolte de tous les rémanents pour faire de la plaquette forestière…), etc
(Forêt : chimie verte). Au risque de détruire les équilibres biologiques, la fertilité des sols, et de faire
peser sur la forêt une pression bien trop forte : les grosses unités de production de chaleur bois,
exigeant des millions de mètres cubes, il y a des limites à ne pas franchir.
La forêt, conservatoire d’espèces
Mais des espèces parfois en
danger…
on enregistre ainsi un recul de -10 % des
effectifs d’oiseaux dits communs, sur la période
1989-2004 : la situation varie selon les espèces
considérées. Ainsi, les espèces septentrionales
ont vu leurs populations chuter de 20 % en
quinze ans. La tendance d’évolution sur cette
période indique un recul de 18 % pour les
espèces spécialistes des habitats forestiers (18
espèces suivies).
•
» Source : MNHN (CRPBO), avril 2005.
L’écosystème
La végétation de la forêt se répartit en strates, dont l’abondance détermine
la richesse en espèces , par la multiplication des niches écologiques
offertes. Pour faire simple; on, distingue :
-la strate muscinale, celle des mousses et des lichens
-la strate herbacée
-la strate arbustive
-la strate arborescente
A chaque strate, on trouve des espèces animales et végétales différentes :
plus il y de strates, plus la forêt est donc…biodiversifiée !
Une forêt comporte également ce que l’on appelle des milieux naturels
associés, dont le fonctionnement participe à l’économie générale de la
forêt : une forêt sans ces milieux, composée d’une seule strate d’arbres,
sans bois mort, etc, est une forêt déséquilibrée, fragile.
Une mosaïque de milieux naturels
associés
Landes, mares,
ruisseaux, pelouses
sèches, vallons,
éboulis, tourbières, font
partie intégrante de
l’écosystème forestier.
Lande à myrtille et
sorbiers des
oiseleurs, Lorraine
Tout un peuple de plumes, de poils et
d’écailles…
• Près de 200.000 collemboles au m2, 1200 espèces de mousses et de
lichens, 271 espèces de plantes vasculaires (où la sève circule dans des
vaisseaux), 10.000 espèces d’insectes, près de 55 espèces d’oiseaux sur
les 285 que compte l’avifaune française en Métropole, une quinzaine
d’espèces de chauves souris, plusieurs dizaines d’espèces de
mammifères : une forêt est riches de mille vies, plus ou moins
discrètes, chacune d’entre elle constituant une maille précieuse du
vaste manteau végétal. Aucune d’entre elle n’est négligeable…le geai
et l’écureuil sèment à l’envi des glands et noisettes oubliées, la
mésange consomme plus de 6000 chenilles en une saison d’élevage
des jeunes, les champignons mycorrhyziens permettent aux arbres de
vivre,une chauve souris de 20 gr dévore 4 Kg d’insectes dans son cycle
d’activité annuelle…
BOIS MORT ET LIERRE? AMIS ET ALLIES !!!
Le lierre n’est pas un parasite : il protège le tronc des
coups de soleil, nourrit maints oiseaux, accueille des
insectes auxiliaires, n’a jamais fait mourir un arbre sain et
vigoureux…le bois mort est extrêmement utile, en donnant
de l’humus, en permettant la maintenance de populations
d’insectes équilibrées entre prédateurs et
déprédateurs…Plus il y en a, mieux la forêt s’en
porte.(chiffre souhaitable : 25M3/ha)
Vents modérés et fraîcheur….
• La forêt joue un rôle important de régulatrice du climat : il y fait plus
frais en été, plus chaud en hiver ; elle ralentit les vents, si bien entendu
elle ne peut stopper des tempêtes ; l’évapotranspiration des massifs
forestiers (transpiration des végétaux, évaporation des sols) assure une
plus forte pluviométrie et une meilleure répartition des pluies en zones
boisée.
• Par ailleurs, la forêt épure l’air : un ha de forêt même dégage entre 10
et 20 tonnes d’oxygène annuellement.
……La forêt n’a pas besoin de l’homme pour se
bien porter, c’est l’homme qui en besoin pour, entre
autres, se mieux porter !
Source de richesse biologique, la forêt est aussi source de richesses économiques :
la sylviculture soutenable consiste à prendre en compte au même niveau
d’importance le social, l’économique, l’environnemental… Une forêt
biodiversifiée est résiliente, c’est-à-dire capable de se régénérer après une
perturbation écologique, (tempête, maladie, accident climatique, incendie…). En
sylviculture, un certain nombre de préconisations sont aisément observables pour
assurer cette résilience :
-conserver le sous étage
-privilégier la régénération naturelle
-mélanger les essences, à tous les étages, si la station le permet
-conserver du bois mort sous toutes ses formes
-conserver de 2 à 6 arbres sénescents et /ou à cavités /ha, toutes questions de
sécurité considérées.
-veiller au maintien d’une faune diversifiée et en même temps, assurer l’équilibre
sylvo-cynégétique
-conserver et gérer si besoin les milieux naturels associés
-
Au-delà des arguments scientifiques…
•
•
•
•
Quand bien même aurions nous des
forêts très productives, qu’en serait il si
elles étaient vides de vies animales et
végétales ?? Des forêts sans faune ?? La
biodiversité en forêt, c’est aussi comme
la peinture, la musique, la littérature : ce
qui fait le sel de la vie, la couleur des
jours, la source des émotions et le refuge
de l’âme.
La forêt est encore un lieu de détente, de
récréation, de parcours sportifs, l’accueil
du public, qui n’est pas forcément chose
aisée, ne pourrait se faire en l’absence de
cette capacité à se ressourcer.
Produire ne doit se faire en effaçant ce
qui fait de nous des êtres sensibles.
L’écologie est l’alliée de l’économie.
Une nécessité : des forêts libres
•
Exploiter ici en prenant en compte espèces et milieux, (promouvoir partout la
gestion dite multifonctionnelle) et laisser ailleurs de grandes réserves
intégrales : projet de parc national de Champagne, avec 3000 ha en évolution
libre ; RBI de Chizé, avec 2500 ha ; RBI des hauts plateaux du Vercors., etc
Des solutions à toutes échelles
•
•
Ce qui relativement « simple » en forêt domaniale l’est beaucoup moins en
forêt privée : devant la quasi impossibilité de grandes réserves intégrales, la
création d’îlots dits de sénescence , entre 0,5 et 3 ha, est recommandée pour
améliorer la biodiversité générale des massifs…
En monocultures de résineux, la création ou le maintien d’îlots de feuillus, ,
d’autre part, permet le retour d’une dose de biodiversité ; retour de la huppe
fasciée, du coucou, prédateurs de la chenille processionnaire, perturbation du
déplacement du papillon de cette processionnaire ; diminution des attaques de
parasites (fomès, pyrale des troncs…) en même temps que la monotonie du
paysage est rompue. (programme de recherches Islandes, de l’INRA
Bordeaux Cestas)
Quelques autres
feuilles…à lire.
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-Expansion et nature, Robert Hainard, le Courrier du Livre
-Un arbre, une vie, D. Suzuki, Boréal, 2006
-La peur de la nature, F.Terrasson, Sang de la Terre
-Biodiversité, C.Levêque et JC Mounolou, Dunod
-Un éléphant dans un jeu de quilles : l’homme dans la biodiversité,
R.Barbault, Seuil, 2006
• La forêt naturelle, A.Persuy,Belin/Eveil nature, 2008
• A la découverte de la France sauvage, A.Persuy, Le sang de la Terre,
2013