CONVERSION SAINT PAUL - Paroisse catholique francophone

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LA CONVERSION DE SAINT PAUL
2ème version, 1600-1601, Rome
1600-1601
Huile sur toile,
230 x 178 cm
Chapelle Cerasi,
Santa Maria del Popolo,
Rome
LA CONVERSION DE SAINT PAUL
2ème version, 1600-1601, Rome
• Conçu pour faire
pendant sur les murs
de la chapelle au
Crucifiement de Saint
Pierre, ce tableau n'est
pas moins
rigoureusement
concentré.
LA CONVERSION DE SAINT PAUL
2ème version, 1600-1601, Rome
• Vue actuelle de la
Chapelle Cerasi en
l’église Sainte-Marie
du Peuple à Rome.
LA CONVERSION DE SAINT PAUL
2ème version, 1600-1601, Rome
• Les personnages sont aussi
massifs et présentés en
raccourci, les couleurs sont
dans les mêmes tons de
terre, et le protagoniste
central, impuissant lui
aussi, et en train de passer
d'une vie à l'autre, du
service de l'Etat à celui de
Dieu.
• Cependant la composition,
l'effet et la signification de
l'œuvre sont très différents.
LA CONVERSION DE SAINT PAUL
2ème version, 1600-1601, Rome
• Cependant la
composition, l'effet et
la signification de
l'œuvre sont très
différents.
• L'artiste a eu recours à
un certain nombre de
procédés
psychologiques pour
amener celui qui
regarde à s'identifier
avec le saint.
LA CONVERSION DE SAINT PAUL
2ème version, 1600-1601, Rome
• La pose de Saül, étendu sur
le sol, le visage offert de
trois-quatre à une vue d'enhaut et le corps présenté
sur une diagonale
plongeant à quarante-cinq
degrés dans la profondeur
du tableau obligent le
spectateur à tendre le cou
en tournant la tête pour
essayer de croiser le regard
du soldat tombé.
• L'effort reste vain mais il
suffit à créer une
exceptionnelle impression
d'union avec la scène.
LA CONVERSION DE SAINT PAUL
2ème version, 1600-1601, Rome
• En outre, la courbe en
forme de parabole que
dessinent les bras
tendus creuse l'espace
au-dessus de la
diagonale en
profondeur du corps
étendu, nous
entraînant au centre
même de l'image et au
cœur de l'action.
LA CONVERSION DE SAINT PAUL
2ème version, 1600-1601, Rome
• Enfin la lourde masse
du cheval qui emplit la
moitié supérieure du
tableau pèse aussi
lourdement sur celui
qui regarde que la
lumière divine sur Saül.
LA CONVERSION DE SAINT PAUL
2ème version, 1600-1601, Rome
• Il est inconcevable que ce cheval de trait ait été assez nerveux
pour désarçonner un jeune soldat musclé comme Saül.
• Pourtant il est là à terre, impuissant, les yeux fermés, les bras
tendus en un geste de suppliant.
• Il faut donc bien qu'il soit tombé.
LA CONVERSION DE SAINT PAUL
2ème version, 1600-1601, Rome
• L'explication est fournie par
la lumière surnaturelle qui
correspond au récit que
Paul lui-même a fait de sa
conversion, même si
l'obscurité de l'arrière-plan
est en contradiction avec la
déclaration de Paul
affirmant que le miracle a
eu lieu au milieu de la
journée.
LA CONVERSION DE SAINT PAUL
2ème version, 1600-1601, Rome
• Sans les bras levés on
pourrait penser qu'il a
perdu connaissance ; non,
on l'imagine en extase.
• L'image, au lieu d'être la
représentation d'un
incident banal — un
homme a fait une chute
inexpliquée d'un cheval de
trait — se transmue en
révélation divine.
LA CONVERSION DE SAINT PAUL
2ème version, 1600-1601, Rome
• Le Caravage accentue la
réalité en chair et en os du
cheval, la gaucherie du
valet d'écurie, la robustesse
massive de Saül, et même
la riche pâte de la peinture
de façon à rendre plus
intense l'effet de la lumière
surnaturelle qui inonde ce
petit monde massif de son
flot divin.
LA CONVERSION DE SAINT PAUL
2ème version, 1600-1601, Rome
• Ainsi le message
qu'exprime le tableau
n'est pas la puissance
de la foi de Saint Pierre
— quelle que doive
être la grandeur du
témoignage en faveur
de la foi porté plus tard
par Paul — mais celle
du pouvoir de la
volonté divine.
LA CONVERSION DE SAINT PAUL
2ème version, 1600-1601, Rome
• Le Caravage a utilisé
des sources variées
pour sa Conversion :
– le cheval vient d'une
gravure de Durer de
1505 : Le grand cheval ;
– la pose de Saint Paul, de
l'esclave dans le grand
Miracle de Saint Marc
du Tintoret
LA CONVERSION DE SAINT PAUL
2ème version, 1600-1601, Rome
• Le Caravage a utilisé des
sources variées pour sa
Conversion :
– et l'idée de présenter le saint
isolé de ses compagnons de
la Conversion de Moretto da
Brescia qui est à l'église
Santa Maria presso San Celso
de Milan ou du tableau de
Parmigianino, à présent au
Kunsthistorisches Museum
de Vienne.
LA CONVERSION DE SAINT PAUL
2ème version, 1600-1601, Rome
• Le résultat final était trop
révolutionnaire.
• Il n'existe pas de copie
contemporaine de cette
toile et il y a peu de
commentaires la
concernant, au dixseptième siècle, en dehors
de la critique de Bellori qui
la trouve « totalement
dépourvue d'action ».
LA CONVERSION DE SAINT PAUL
2ème version, 1600-1601, Rome
• Cette appréciation nous
éclaire sur la complète
incompréhension de ses
contemporains en ce qui
concerne un aspect
essentiel de l'art du
Caravage : son choix de
moments d'inaction
(s'accordant au caractère
statique de la peinture) qui
sont assez révélateurs pour
lui permettre d'atteindre le
cœur de la psychologie des
événements.
Méditer et prier avec ce tableau…
LA CONVERSION DE SAINT PAUL
Pour méditer…
La bête, la bête superbe !
Et aussi dans un splendide
fracas de rouge, de vert
et d'or, d'acier brûlant,
l'homme atterré, la tête
en bas, les bras
ouverts.
Mais d'abord la bête.
LA CONVERSION DE SAINT PAUL
Pour méditer…
Avant même la bête, sa
puissance, son éclat.
Elle n'occupe pas tout le haut
du tableau, elle le possède.
Ses jambes de cheval de
labour promu destrier
portent en haut à gauche la
croupe formidable, un
monde en soi, avec la
queue, ombreuse toison
coulant des fesses jusqu'au
sol.
LA CONVERSION DE SAINT PAUL
Pour méditer…
Ces fesses elles-mêmes, énormes,
rondes et puissantes, comme des
dômes, s'offrent, mais pas plus
que l'énorme ventre, non moins
puissant qu'énorme, tout de
muscles et de chairs au-dessus du
gouffre, pont solide, vivant,
capable de résister à tout ; puis,
au-delà du ventre, une coulée
blanche de l'échiné au sabot levé,
coulée de force et de lumière qui
glisse, mais sans rien abandonner
de sa domination, vers la
chevelure, aussi sombre que la
queue, chevelure-crinière
tombant le long de la tête de la
bête comme un torrent.
LA CONVERSION DE SAINT PAUL
Pour méditer…
La bête étincelante est la clef de
voûte du monde.
La lumière coule sur elle, la caresse,
s'enchante des muscles, des os,
de la chair, transfigure le corps
tout entier en paysage de
déserts, de forêts et d'îles.
Du sommet des fesses, à la source
de la forêt lisse de la queue, une
île blanche brille, comme
l'échiné, et comme, entre deux
nouvelles noires forêts, le haut
de la tête et les naseaux
éclatants.
LA CONVERSION DE SAINT PAUL
Pour méditer…
La puissance énorme est
délicate ; la bête forme une
conque brillante ; de la
fesse droite à la bouche,
elle s'éloigne de nous avant
de revenir vers nous dans la
vertigineuse descente de la
tête, qu'équilibre une autre
tête en retrait, quoique
brillante, une tête
d'homme celle-là, qui,
comme celle de la bête,
regarde ce qui se passe en
bas et rétablit l'équilibre
horizontal, que la glissade
de la bête vers l'en-bas eût
sinon perdu.
LA CONVERSION DE SAINT PAUL
Pour méditer…
La bête énorme et
splendide, la bête
étincelante, la bête
élégante, est au tableau
ce que le ciel visible est
au monde, mais un ciel
qui, au lieu d'être un
ciel d'éther, serait un
ciel de chair.
LA CONVERSION DE SAINT PAUL
Pour méditer…
À ce ciel qu'est la bête,
qui se penche vers l'enbas, l'homme en retrait
fait humblement
équilibre.
Il aide aussi la bête à se
soutenir comme ciel.
LA CONVERSION DE SAINT PAUL
Pour méditer…
Aux deux jambes d'elle qu'on voit,
posées sur le sol comme les piliers du
monde, se joignent les deux jambes
de l'homme, nues comme nus sont ses
pieds, solides toutes deux, autant que
celles de la bête, mais, autant que les
siennes, animales, plus même, si l'on
voit, à la droite extrême, la jambe
gauche de l'homme, toute brillante,
avec, du bout du pied au genou, la
forte veine en relief, gonflée de sang.
LA CONVERSION DE SAINT PAUL
Pour méditer…
Et les deux mains de l'homme
empoignent moins le mors
de la bête qu'elles
n'entourent sa bouche qui
hume l'en-bas ; et son
regard d'homme n'est pas
plus étonné que celui de la
bête devant le mystère sur
lequel, sans le percer ni l'un
ni l'autre, tous deux se
penchent.
LA CONVERSION DE SAINT PAUL
Pour méditer…
L'homme est traité sans méchanceté
ni volonté d'abaissement.
Il regarde comme un homme, un
homme simple, un homme
pauvre aux pieds nus, mais un
homme.
Il regarde comme un homme, et la
bête regarde comme une bête.
Mais leurs deux regards, différents
selon l'ordre de l'homme et celui
de la bête, ont en commun
d'être des regards paisibles, des
regards placides, unis dans
l'incompréhension, sans inimitié
ni inquiétude, d'un en-bas dont
le sens leur échappe, dont il leur
échappe même qu'il ait un sens.
LA CONVERSION DE SAINT PAUL
Pour méditer…
La bête et l'homme en retrait,
pour différents qu'ils soient,
sont unis dans leur soutien
animal et puissant du monde
visible, comme en l'équilibre
qu'à eux deux ils lui donnent,
unis encore dans leur placide
incompréhension d'un en-bas
où s'opère un mystère aussi
inouï qu'invisible, dont ils ne
perçoivent que l'apparence,
celle d'un homme à terre.
LA CONVERSION DE SAINT PAUL
Pour méditer…
Mais, dans cette union
paisible des créatures de
chair qui font le monde
visible, la place de choix,
celle de la plus grande
force, de la plus grande
beauté, de la plus grande
intelligence selon son ordre
charnel, est naturellement
offerte à la plus charnelle
des deux, à la bête.
LA CONVERSION DE SAINT PAUL
Pour méditer…
Mais l'en-bas ?
Éclat du rouge, du vert, de l'or, de l'acier, de la plume, du casque.
Entre son casque et son glaive, sur son manteau écarlate, l'homme est
atterré, la tête vers l'abîme, ses grands beaux bras levés, écartés en un
geste qui est celui, non de la victoire, mais de l'accueil, d'un accueil aussi
vaste que le monde, car l'envergure des mains tendues a presque celle
de l'univers.
LA CONVERSION DE SAINT PAUL
Pour méditer…
Les bras du jeune soldat ne sont pas
seuls écartés : ses cuisses le sont
aussi.
Entre les bras et les cuisses, le torse
juvénile est recouvert d'or
martial.
Son visage, son beau visage,
n'exprime rien.
Encore faut-il le bien regarder pour
voir qu'il est beau, car il se donne
renversé, et ses paupières sont
closes : la seule chose qu'on voie
vraiment d'abord en son visage
est que ses paupières sont
closes.
LA CONVERSION DE SAINT PAUL
Pour méditer…
À le bien regarder, on devine
que sa bouche est
entrouverte, et l'on voit
que son beau visage
n'exprime rien, ne sait rien,
ne voit rien.
Rien qui ne soit intérieur, mais
si profond, si intime, que
seul convient à sa
révélation le voile de
l'inexpression parfaite.
LA CONVERSION DE SAINT PAUL
Pour méditer…
Ce que voit le jeune
soldat est assurément
la lumière absolue,
celle qui s'oppose, en
sa nature même, à celle
que voient nos yeux de
chair lorsqu'ils sont
ouverts.
LA CONVERSION DE SAINT PAUL
Pour méditer…
Ses yeux de chair à lui, désormais,
sont fermés.
C'est qu'il vient d'être mis à bas de la
chair triomphante, de la chair qui
domine le monde, de la chair qui
est le monde.
Il vient d'être mis à bas de son
cheval, c'est-à-dire à bas de sa
puissance, à bas des œuvres de la
puissance.
Il ne sait pas que ces œuvres sont en
train de se venger de lui, car le
sabot de la bête, en suspens audessus de son sexe, va, l'instant
qui vient, le broyer.
LA CONVERSION DE SAINT PAUL
Pour méditer…
Ses cuisses ouvertes s'ouvrent à la destruction des
œuvres de chair, comme ses mains ouvertes
s'ouvrent à la lumière incréée, celle du Christ, que
ses yeux, clos au monde mais soudain ouverts à la
vérité, contemplent pour toujours.
LA CONVERSION DE SAINT PAUL
Pour méditer…
« Il faisait route et approchait
de Damas, quand soudain
une lumière venue du ciel
l'enveloppa de sa clarté.
Tombant à terre, il entendit
une voix qui lui disait : "
Saül, Saül, pourquoi me
persécutes-tu ? — Qui estu, Seigneur ?" demanda-til. Et lui : "Je suis Jésus que
tu persécutes" »
(Ac 9, 3-5).
LA CONVERSION DE SAINT PAUL
Pour méditer…
Saül va demeurer aveugle
pendant trois jours, avant
de recouvrer la vue.
Trois jours pour contempler la
seule lumière incréée.
Lorsqu'il retrouvera ses yeux
de chair, la lumière du
Christ, de laquelle il sera
devenu l'intime en ces trois
jours d'aveuglement, c'està-dire d'illumination,
l'habitera pour toujours et
imprégnera pour lui toutes
choses visibles.
LA CONVERSION DE SAINT PAUL
Pour méditer…
Mais n'en est-il pas déjà ainsi au
moment qu'il vient de tomber,
en ce moment-ci, où la chair va,
en sa chair, écraser à jamais sa
puissance, où l'Esprit va
illuminer à jamais son esprit ?
Tout l'univers est éclairé d'en haut
à droite, par une source de
lumière si discrète qu'à peine
discernée au premier regard.
LA CONVERSION DE SAINT PAUL
Pour méditer…
C'est elle pourtant qui
illumine tout, et la bête
splendide, et l'homme
debout, et l'homme
atterré.
C'est de cette source
presque invisible que le
monde, même le
monde le plus
puissamment charnel,
reçoit son éblouissante
splendeur.
LA CONVERSION DE SAINT PAUL
Pour méditer…
Et c'est cette humble lumière
visible qui nous permet de
deviner, sur le visage de
Saül, les abîmes sans fond
de la lumière véritable, qui
seule, par la conversion,
c'est-à-dire par la mort des
puissances de la chair,
permet de contempler et
d'assumer la Vie, de La
revêtir pour le seul combat
qui vaille : le Sien.