Auteurs igbo (Nigeria) : les raisons du succès

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Auteurs igbo (Nigeria) :
les raisons du succès
Françoise Ugochukwu
Open University UK &
CNRS-LLACAN, Paris
Le pays igbo, au sud-est du Nigeria, est depuis une
cinquantaine d’années une pépinière d’écrivains
anglophones, romanciers pour la plupart, dont le plus
connu en France est Chinua Achebe, du fait, entre
autres, que son premier roman, traduit en 1966, a été
mis au programme de l’agrégation d’anglais en 1980.
Outre Achebe, plusieurs autres écrivains igbo ont été
traduits en français. Cette littérature, héritière d’une
riche tradition orale, s’est développée parallèlement à
une littérature en langue igbo peu connue et très peu
traduite. Plusieurs de ces écrivains ont été des
pionniers, réinventant les genres littéraires, mettant en
scène la culture igbo traditionnelle comme sa version
urbaine et révélant la vitalité de la langue.
Réédité plusieurs fois chez Longman, Omenuko
(1933), seul ouvrage de Pita Nwana (c.1881-1968) et
ancêtre de la littérature écrite igbo, reste le classique
le plus lu. Les manuels et recueils d’Ogbalu (19271991), écrivain prolifique et promoteur du
développement de l’igbo, ont eux aussi été au
programme des écoles depuis des décennies. Ubesie
(1949-1993), quant à lui, a publié cinq romans.
Achebe (né le 16 Novembre 1930), a créé une
nouvelle langue, mêlant anglais et igbo.
Nous comparerons ici ces quatre écrivains,
considérés comme des classiques, pour mettre en
lumière les raisons de leur succès, liées surtout à leur
profil et à la langue d’écriture choisie.
Quatre pionniers pour une littérature
L’écriture de fiction en igbo a fait d’énormes
progrès depuis 1970 : à l’époque, les publications
dans cette langue, freinées par la longue querelle
sur l’orthographe et les années de guerre, se
comptaient encore sur les doigts de la main, mais
en 1986, Azuonye recensait déjà (Ricard 1995:
105) soixante-dix romans, vingt-cinq pièces de
théâtre et onze recueils de poèmes publiés dans
cette langue. Achebe, Nwana, Ogbalu et Ubesie ont
tous les quatre choisi un chemin de pionnier,
Achebe en anglais, les trois autres en igbo.
Achebe a publié son premier roman à l’étranger,
visant un public international qui l’a sacré
‘classique africain’. Les trois autres ont choisi de
publier dans leur langue et sont pour l’instant très
peu connus hors du pays igbo.
Pita Nwana (c. 1881 – 5 sept. 1968) a écrit la première
œuvre de fiction en igbo. Avant lui, seuls étaient en
circulation les manuels et livres de lecture rédigés par
les missionnaires. Le roman de Nwana, publié après
avoir été primé au concours littéraire organisé par
l’Institut international pour les langues et cultures
africaines, put rester sur le marché grâce à ses éditeurs
qui sortirent une nouvelle édition à chaque nouveau
tournant de l’orthographe. Sa mise au programme des
écoles en pays igbo permit ensuite à des générations de
le lire et de l’étudier, assurant son succès sur le long
terme. Sa traduction française, en 2010, permet
aujourd’hui aux lecteurs de langue française de le
découvrir à leur tour.
Frederick Chiedozie Ogbalu (1927-1991), fondateur, en
1957, de l’imprimerie Varsity Press d’Onitsha, a
beaucoup publié, et il est autant connu pour son travail
d’éditeur que pour ses ouvrages personnels. Il a passé
des années, entre 1944 et 1991, à encourager l’écriture
et l’étude de l’igbo, rédigeant des manuels pour les
écoles primaires et secondaires, recueillant les genres
oraux (contes, proverbes, devinettes), publiant des
recueils de proverbes et un dictionnaire, encourageant
l’écriture de fiction, et parcourant le pays pour
rassembler les intellectuels igbo et leur insuffler le désir
de promouvoir et de développer la langue.
Selon Emenanjo, Tony Uchenna Ubesie (1949-1993), « le
diegwu de l’École des Études igbo de Lagos, a prouvé au
monde de la création littéraire que l’igbo est à même
d’apporter sa contribution à tous les genres, que ce soit
la fiction ou les productions radiotélévisées » (2001
Ahiajoku Lecture, Owerri). Aujourd’hui, Ubesie, qui a eu
le temps, avant sa mort prématurée, de produire cinq
romans et un précieux manuel sur la culture igbo, est
célébré jusque sur l’Internet, comme en témoigne ce
message laissé sur YouTube : « Les Igbo devraient
immortaliser les icônes de la musique comme Osadebe,
Sr. Warrior, Oliver de Coque et Mike Ejeagha. Un homme
comme Tony Uchenna Ubesie mérite d’être mentionné
pour ses […] merveilleux romans en igbo »
Chinua Achebe (né le 16 novembre 1930), le seul à avoir
publié à la fois en igbo et en anglais, est aussi le plus
connu. Son premier roman, Things Fall Apart (1958),
récit de la réussite du riche fermier Okonkwo et de son
exil – trajectoire rappelant celle du héros de Nwana traduit en français sous le titre Le Monde s’effondre en
1966, obtient le prix Margaret Wrong et on en vend plus
de 300 000 exemplaires dès les premières années. En
2008, le cinquantenaire de la publication de ce premier
roman a donné lieu à des dizaines de manifestations –
colloques et publications – dans le monde entier.
Des œuvres enracinées dans la culture
L’œuvre de ces auteurs est solidement enracinée dans la culture
igbo. Les textes de Nwana et d’Achebe par exemple, s’appuient
l’un comme l’autre sur la tradition de louange des grands
hommes et le respect dont est entourée la réussite individuelle.
Le décor choisi par les auteurs pour la majorité de leurs romans
est celui des villages traditionnels igbo. La période couverte par
le roman de Nwana témoigne de l’énorme intérêt porté par les
Igbo à l’écriture de leur histoire : le récit débute à la fin du dixneuvième siècle et se termine avec le retour du héros chez lui à
la fin octobre 1918, le dernier chapitre se fermant sur une
évocation de la dépression de 1929, ce qui permet de dater la fin
du récit de 1930. On retrouve ces mêmes marqueurs
traditionnels dans le premier roman d’Achebe, dominé par la
haute stature d’Okonkwo et qui retrace un autre moment de
l’époque coloniale.
La culture igbo, c’est aussi l’art de la parole, auquel on
s’initie dès l’enfance, à l’écoute des contes, puis à l’âge
adulte, par la participation aux innombrables réunions
familiales et locales, dont l’issue « dépend principalement
de la force émotionnelle et morale du langage utilisé et
en partie de l’intelligence du raisonnement et de son
soutien empirique » (Nwala 1985 : 154). Tous les auteurs
considérés ici ont été nourris d’oralité. Ils ont participé
aux soirées de contes organisées au village les nuits de
lune et en saison sèche et ont admiré les discours des
anciens, émaillés de proverbes.
Le seul à avoir tenté de mettre par écrit, telles quelles,
ces traditions orales, est Ogbalu. Si nul n’a jamais établi
une liste complète des proverbes igbo, son recueil de
proverbes, Ilu Igbo, publié en 1965, est à ce jour l’ouvrage
le plus complet sur le sujet, avec plus de mille entrées,
pour la plupart en igbo sans traduction. Ogbalu a
également publié des recueils de contes, dont Mmuo
Mmuo (n.d.), Nza na Obu (n.d.), et Mbediogu (1975), plus
spécialement consacré aux contes de tortue. Héritiers de
cette tradition, les autres auteurs, spécialement ceux
écrivant en igbo, ont intégré les genres oraux dans leurs
romans et adopté l’approche didactique caractéristique
du récit igbo.
L’Omenuko de Nwana comme l’Ukpaka miiri onye ubiam d’Ubesie
ont gardé la structure de la narration orale, avec un auteur-conteur
qui ne cesse d’intervenir à la première personne dans le récit pour
expliquer les actes de ses personnages et tel ou tel détail du décor ;
le style lui-même est proche de l’oral, avec ses tournures familières,
son usage des proverbes et l’importance donnée au discours et aux
débats publics. Comme le conte, le récit de Nwana donne la
préférence à l’action et ne brosse qu’un portrait rapide de ses
personnages ; il reste également fidèle au modèle du livre de
lecture missionnaire, avec son côté didactique et moralisateur. Tony
Ubesie est l'un des auteurs igbo les plus appréciés en raison de sa
remarquable maîtrise de la langue et de son usage fréquent et
élégant des proverbes, très prisés pour leur valeur philosophique
et la maturité qu'ils supposent. Les titres de ses quatre premiers
romans sont eux-mêmes des proverbes – un modèle qui a depuis
inspiré de nombreux auteurs de romans igbo.
Things fall apart, publié après le People of the City (1954)
d’Ekwensi, signale un retour à la tradition orale : Achebe, s’il se
sert de la langue anglaise comme véhicule de sa pensée, la mêle
à l’igbo pour forger une nouvelle langue plus à même de traduire
la culture. Il adapte la forme romanesque à l’art de la parole cher
aux Igbo, illustré dans son œuvre par un usage abondant des
genres oraux : chants, proverbes, devinettes, formules de
salutation et de louange, dialogues et discours. Il a non
seulement truffé son premier roman de proverbes mais y a
inséré un conte, avant de publier deux albums pour enfants,
adaptations de contes traditionnels. L’œuvre d’Achebe dans son
ensemble est enracinée dans le terroir : on y découvre non
seulement le passé et ses guerres intestines entre villages, mais
l’évocation des pratiques traditionnelles – cycles agraires, droit
coutumier, palabres de mariage, prière sur la noix de kola et
croyance à la réincarnation.
Un fonds similaire
Après la publication du roman de Nwana en 1933, il faut attendre
1963 pour voir paraître Ije Odumodu jere de Bell-Gam, situé lui
aussi à la fin du dix-neuvième siècle, et où l’on retrouve l’influence
d’Omenuko : le héros, Odumodu, se hisse progressivement
jusqu’au sommet de l’échelle sociale et voyage à l’étranger avant
de rentrer chez lui pour moderniser sa communauté. Le Monde
s’effondre peut néanmoins être considéré comme le vrai
successeur d’Omenuko, les deux textes offrant une réflexion
parallèle sur le sujet de l’exil au sein d’une même aire culturelle et
linguistique, tout en en faisant ressortir les différentes facettes. Le
premier de ces romans, présente le visage de l’exil vu du côté de
l’immigrant – un mouvement en avant, tandis que le second, écrit
en anglais et publié vingt-cinq ans plus tard, met l’accent sur sa
face émigrée et sa douloureuse nostalgie.
Les deux auteurs ont le même concept du héros, inspiré
du légendaire père Tortue, mâle à la fois autoritaire et
rusé, roublard et imaginatif en même temps que
vindicatif et égoïste. Au-delà de ce qui les sépare, les
deux héros se ressemblent par bien des aspects :
d’humble extraction, ils ont réussi à la force de leurs
poignets et, ayant atteint la maturité, sont devenus des
leaders hautement respectés dont on écoute les paroles.
Leur parcours est plus ou moins similaire : des débuts
difficiles, un succès remarquable, une carrière
interrompue par une catastrophe suivie de la fuite.
Accueillis dans un village ami, ils y restent quelque temps
mais finissent l’un et l’autre par avoir le mal du pays et
rentrer au village.
Il importe de souligner, comme l’a fait un Nigérian sur
un forum en ligne, que “Les proverbes du Monde
s’effondre et de La Flèche de Dieu d’Achebe, romans
tous deux écrits des dizaines d’années plus tard, se
trouvaient déjà tous dans Omenuko. Et vous trouverez
que nos parents qui se sont servis de proverbes dans
leurs histoires, comme John Munonye (The Only Son),
Flora Nwapa (The Concubine), Cyprian Ekwensi, Tony
Ubesie (Isi Akwu Dara N’Ala; Ukwa Ruo Oge Ya O Daa),
et bien d’autres, ont dû lire Omenuko. » Ce n’est donc
pas tant le sujet ni le fonds de ces textes qui expliquent,
à eux seuls, la différence entre le profil local de l’un et la
célébrité internationale de l’autre. D’autres facteurs
sont en cause ici, qui seront maintenant examinés.
L’appui de l’Éducation nationale
Toutes les œuvres pionnières en igbo ont été lancées par
des concours littéraires : l’Omenuko de Nwana comme
l’Akpa Uche d’Ekechukwu et Udo Ka Mma, une pièce de
théâtre de Chukwuezi ; le premier roman d’Achebe luimême avait obtenu le prix Margaret Wrong en 1958. Ces
concours ont d’abord rendu possible la publication de
ces œuvres en encourageant les éditeurs. Ces concours
ont en outre propulsé ces œuvres vers les salles de
classes et contribué à faire connaître des auteurs qui ont
tous, en outre, entretenu des liens avec l’enseignement
public.
Le succès des écrivains igbo est en effet, depuis l’Indépendance,
inextricablement lié à l’enseignement de leur langue, et au soutien
des Églises, universités, écoles et autres organisations. Les
publications en igbo disposent en outre d’un vaste marché
potentiel, puisque dans tout le sud-est du pays, l’igbo est depuis
longtemps – au moins officiellement - le medium d’instruction
dans les premières classes du primaire avant de devenir une
matière d’enseignement .
Le roman de Nwana, redécouvert depuis le développement de
l’enseignement de l’igbo dans les années 1970, doit sa popularité
et son succès à sa mise au programme des écoles où il est
systématiquement étudié depuis des générations. L’enseignement
de la langue et de la culture igbo, qui a permis aux auteurs
considérés d’accéder à un public scolaire et universitaire de plus en
plus nombreux, a été facilité par la Société pour la promotion de la
langue et de la culture igbo (SPILC).
La rencontre entre l’œuvre et ses lecteurs, au Nigeria, est en outre
traditionnellement renforcée par le profil des auteurs. Comme le
notait Hanson (1968 : 145), en pays igbo, « ce n’ [est] pas
seulement ce qui est dit qui est important, mais qui l’a dit », et le
succès de ces auteurs, qui ont tous été des enseignants, est
intimement lié à la réputation acquise du fait de leurs études, de
leur carrière, de leur position, des postes de responsabilité occupés
et de leurs publications, qui leur ont donné une crédibilité accrue.
Si Ubesie est mort trop jeune, les autres ont tous acquis le profiltype de l’homme mûr traditionnel, orateur renommé doublé d’une
personnalité activement engagée dans sa communauté, adonnée à
la bienfaisance et donnée en exemple pour son ardeur au travail et
sa réussite familiale et professionnelle. Aujourd’hui encore, comme
le prouvent le profil de maint universitaire igbo, il n’y a pas de
séparation entre l’art de l’écrivain et son engagement public au
service de la communauté.
La question de la langue
En fin de compte, c’est le choix de la langue qui a fait la
différence entre Achebe et les trois autres auteurs
considérés ici. Il n’est, pour le prouver, que de considérer
la différence entre la diffusion restreinte du recueil d’Aka
Weta et celle de Things Fall Apart. Aka Weta, une
anthologie de poèmes rédigés en igbo, parue à Nsukka
en 1982 et éditée par Achebe et Udechukwu, est divisée
en deux parties : la première rassemble des chants
traditionnels et modernes, la seconde des poèmes de
différents auteurs, dont deux poèmes d’Achebe. Ce
recueil est peu connu et n’a jamais été traduit ; peu de
gens savent par ailleurs qu’Achebe y a contribué.
Il est possible que la diffusion d’Aka Weta ait été gênée
par le fait que la langue de ses poèmes reflète la variété
des dialectes d’Anambra, Imo et Abia, et même des
parlers locaux d’Ohafia, Mbaise ou Onitsha, choix qui va
à l’encontre de la défense du standard promu par la
SPILC. En éditant Aka Weta, Achebe, qui a toujours
milité en faveur des dialectes, a usé de son influence et
misé sur sa popularité pour affirmer sa préférence.
En fin de compte, le succès d’un auteur n’est pas
seulement dû à ce qu’il dit, mais au public auquel il
s’adresse, déterminé par la langue d’écriture choisie,
comme le révèle encore une comparaison entre le
roman de Nwana et celui d’Achebe.
L’une des différences fondamentales entre les deux
romans est celle du lectorat visé – tandis que Nwana
s’adresse aux Igbo, Achebe écrit non seulement pour
ces derniers, mais aussi et peut-être surtout pour des
lecteurs plus éloignés et originaires de tout le monde
anglophone, comme en témoigne le traitement des
mots et expressions igbo dans son ouvrage. Achebe a
été le premier, avant même l’indépendance du Nigeria,
à répondre à l’Empire britannique, en se servant de la
langue même de ces colons, et c’est bien là ce qui a
d’abord fait sa réputation.
Un fossé qui se creuse entre
Igbophones et Anglophones
On touche là à la résonance politique de la littérature
nigériane – trait que celle-ci partage avec la plupart des
œuvres littéraires africaines. A l’heure où se multiplient,
en pays igbo, les efforts pour sauvegarder une langue
considérée comme en danger, les auteurs de textes igbo,
découverts en classe par des générations d’élèves et
étudiés dans les universités du pays, sont régulièrement,
et de plus en plus souvent, cités dans les conversations
comme dans les forums en ligne. Ubesie par exemple est
considéré comme un visionnaire qui a annoncé par
avance ce que deviendrait le pays.
Cet usage de la littérature igbo pour parler de la situation
politique actuelle est intéressant à plus d’un titre. D’abord parce
que ses écrivains ont aujourd’hui supplanté de façon définitive
les classiques britanniques comme Shakespeare dans les
conversations ; ensuite parce qu’il est aujourd’hui admis que les
écrivains africains se doivent de réagir face aux événements qui
secouent leurs pays. Selon Ejinkeonye (2003), les écrivains
publiés en igbo seraient aujourd’hui menacés de retomber dans
un oubli relatif dans leur propre région, du fait que leurs œuvres
sembleraient avoir disparu du programme de certaines écoles.
De plus, en dépit de nombreuses années d’enseignement de
l’igbo à tous les niveaux, cette langue, freinée par l’extrême
mobilité des Igbo, est loin de compter l’important lectorat
escompté. Il est par ailleurs évident que la littérature igbo
continue à être largement méconnue hors du Nigeria.
Si le nom d’Ubesie continue à être cité par les intellectuels igbo,
celui d’Achebe, dont la renommée est aujourd’hui à l’échelle de
la planète, se retrouve dans les pages d’un vaste nombre de
publications. Cette renommée, qui l’a propulsé sur la scène
littéraire internationale et a fait de lui un orateur écouté et
respecté, a amené Achebe à prendre position publiquement
dans le débat actuel sur le standard de sa langue maternelle.
Invité dans le cadre des conférences annuelles d’Odenigbo le 4
Septembre 1999, et devant un public venu de tous les coins du
pays igbo, il exhorta son auditoire à abandonner le standard
durement acquis dans les années 1960 et qui avait permis le
décollage de la littérature igbo après de longues années de
stagnation. Condamnant sans appel le choix qui a produit ce
standard, il s’est fait l’avocat d’une écriture en dialecte, dans
l’attente d’un nouveau standard mieux représentatif de la
variété de l’igbo.
Conclusion
Invité en 2001 dans le cadre des conférences annuelles
d’Ahiajoku, Emenanjo, longtemps directeur de l’Institut national
des langues nigérianes (NINLAN) d’Aba, choisit de rendre
hommage aux auteurs igbo qui l’avaient précédé, comblant ainsi,
le temps d’une ovation et au nom des universitaires, le fossé
entre écrivains anglophones et igbophones :
« Avec votre aimable permission, Monsieur le Président, je vais
demander à ce respectable auditoire de se mettre debout et
d’ôter leurs chapeaux, casquettes et autres couvre-chefs en leurs
noms et en leur honneur, n'ugwu unu niile. Que leur grande âme
généreuse repose en paix, nwa jụụụ, dans le sein de Chineke,
Olisaburuuwà, Ọpụtaobie! Qu’ils atteignent au titre de ndịichie
n’ala Igbo niile et de saints du Très Haut! »