TERROIRS TERROIRS

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24heures | Samedi-dimanche 3-4 mai 2014
24heures | Samedi-dimanche 3-4 mai 2014
TERROIRS
TERROIRS
Laurène et
son petit
triporteur
gourmand
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L’esprit des lieux
Chessel, village tranquille, loin et près de tout
«C
hessel, c’est un village
idyllique. Proche du lac et
des montagnes, avec peu
de routes à traverser. On est à la fois près
des centres commerciaux et en même
temps loin de tout. Compte tenu de la
faible desserte du lieu par les bus, il faut
juste une voiture pour se rendre dans les
communes avoisinantes. Le seul hic, ce
sont les moustiques l’été», déclare avec
humour Catherine Creux, gérante du
Poney Ranch. Ce dernier se trouve de
l’autre côté de la route cantonale, à côté
du Golf Club Les Coullaux.
Chessel, dans le district d’Aigle, est
situé au bout du canton. Le pont en fer
de la Porte-du-Scex, qui enjambe le
Rhône depuis 1906, marque du reste la
frontière physique avec le Valais:
Vouvry d’un côté, Port-Valais de
l’autre. Historiquement, les liens avec
les habitants du Vieux-Pays étaient
Elle parcourt les marchés avec ses
bons produits et apporte même l’apéro
Catherine Creux est gérante du Poney Ranch, une des attractions du village.
«Chessel est un village
idyllique. Le seul hic, ce
sont les moustiques l’été!»
Cathy Creux, gérante du Poney Ranch
Originale
Laurène ne veut vendre que des
produits que les autres n’ont pas.
David Moginier Textes
Chantal Dervey Photos
C
ertains matins où il fait
froid, où il pleut, au moment de partir à l’aube
faire une heure de route
avec son épicerie mobile,
Laurène Target pourrait
regretter d’avoir changé de vie. Mais la
Lausannoise n’a jamais remis son choix
en question. Avant, la désormais trentenaire, après des études de Lettres, travaillait dans une petite entreprise de vêtements de ski. «Mais rester enfermée dans
un bureau toute ma vie, j’en serais
morte», rigole-t-elle. Elle cherche son destin. «Comme beaucoup de jeunes de ma
génération, j’en avais un peu marre de
me sentir flouée par ce qu’on me donne à
manger, à vivre ou à travailler. Et, dans le
domaine de la nourriture, j’avais envie
d’en savoir plus.»
Rencontre à trois roues
Elle sillonne la Suisse à la recherche d’artisans, monte un business plan pour
ouvrir une petite épicerie locavore et
gourmande, désespère devant le prix des
locaux jusqu’à ce coup de foudre, fin
2010: elle découvre chez un brocanteur
une Ape, ces petites camionnettes à trois
roues si typiques de l’Italie. «Elle m’attendait. Je l’ai tout de suite achetée, puis
aménagée avec deux copains bricolos.»
Chez Laurène, la petite épicerie, a démarré au quart de tour (mais à 65 km/h).
La voilà donc qui sillonne les marchés
du coin, de Morges à Vevey en passant par
Pully, mais pas à Lausanne qui ne sait pas
très bien quoi faire de ce magasin roulant.
Parallèlement, son compagnon, qui est
dans le secteur, lui monte un site internet, la pousse dans les réseaux sociaux.
«Une affaire comme celle-là, ça ne marche que si on la personnalise, avouet-elle. Même si c’est contre ma nature de
me mettre en avant.» Mais Facebook ou
Twitter lui permettent de signaler les événements spéciaux, de rester en contact
avec sa clientèle. «Depuis trois ans, j’ai
beaucoup d’habitués. De gens qui attendent mon pain d’épices ou qui cherchent
un sirop particulier. A moi de remonter
leurs demandes chez mes fournisseurs.»
Car le credo de Laurène, c’est bien de
mettre en avant ces petits artisans du
coin. Ces derniers font très bien ce qu’ils
savent faire sans toujours réussir à distribuer leurs produits correctement. «On a
un vrai partenariat.» Chez Laurène, il y a
donc toute la gamme des caramels de La
Crème Renversante, de Valérie Henchoz,
à La Chaux-de-Fonds. «Je l’ai connue par
ma grand-mère chaux-de-fonnière.» Ou
les terrines, tapenades ou foies gras de
David Couchinave (Les Délices du SudOuest, à Clarens). «Il a monté sa conserverie. Mais il n’aime pas que je parle de lui
parce que sa production est toute petite.»
La Tablée sauvage
Parmi sa quinzaine de producteurs, elle
rencontre aussi Stéphanie Dévaud, une
jeune Lausannoise qui court les montagnes pour y dénicher des herbes sauvages
dont elle fait des sirops, des tisanes ou des
confitures, en collaboration avec Laurène. «Autrement, je ne produis pas
grand-chose, du pain d’épices, du granola
ou quelques confitures. Je n’ai ni le temps
ni la structure pour le faire», explique la
jeune femme. A elle, donc, la charge de
faire vivre les produits, de «raconter des
histoires qui séduisent les clients.»
Bien sûr, ce n’est pas facile de vivre de
ce petit commerce. «Mais je suis têtue et
obstinée. Ça commence à tourner et je
sens que j’ai construit quelque chose.
Avec «j’apporte l’apéro» (lire ci-contre),
j’ai élargi mon offre et j’ai d’autres projets
pour cette année. Il faut que ça marche!»
www.chezlaurene.ch Série de produits
Chez Fricote, rue Marterey 36, à Lausanne
Livraisons
Laurène a développé l’idée de «J’apporte l’apéro» en 2013 où elle
livre à domicile ou au bureau des cartons apéro pour quatre ou dix
personnes. Elle s’est aussi beaucoup amusée à livrer des coffrets
Saint-Valentin et veut récidiver pour la Fête des mères. Une
aventure rendue possible avec le site participatif WeMakeIt. «Plus que l’argent, j’avais envie
de savoir si mon concept intéressait les
gens.» Elle a aussi imaginé lancer
«J’apporte le petit-déjeuner», mais
c’est plus difficile à cause des
produits qui sont très périssables.
Elle va prochainement faire livrer
ses apéros par Vélocité. «Il faut que
cela soit simple et rapide.»
Moins 5
Tastevin
Vient de sortir
Un pamplemousse à la meringue
Quand Coppola fait une superproduction
Whisky et futebol
C
L
J
e doit être l’âge, mais il
m’arrive de me répéter.
Comme cette recette de
pamplemousse meringué que
j’avais servie il y a quinze ans. Et
que vous aviez oubliée, non? Ne
vous excusez pas, c’est tout
naturel. Je vous la remets parce
que c’est un dessert tout léger
et frais. Et vite fait.
Ingrédients pour quatre:
5 pamplemousses roses,
2 blancs d’œuf, 60 g de sucre
glace, 2 cs de confiture de
framboise, quelques amandes
effilées (facultatif).
Préparation £ Pelez à vif
trois pamplemousses, y compris la petite peau qui entoure
les quartiers.
£ Coupez en deux les deux
VC6
Contrôle qualité
pamplemousses restants (les
puristes feront des incisions en
dents de scie pour faire joli).
£ Videz les quatre moitiés de
pamplemousse de leur
contenu, et passez celui-ci au
chinois pour en récupérer le jus.
Mélangez ce jus à la confiture
de framboise avec un fouet.
£ Placez vos quartiers de
pamplemousse pelés dans les
demi-fruits évidés, en les
coupant en deux au besoin.
Arrosez-les du mélange
jus-confiture.
£ Battez en neige très ferme les
blancs d’œuf et le sucre glace.
Déposez-le joliment sur les
demi-pamplemousses avec une
poche à douille. Saupoudrez
encore d’un peu de sucre glace.
Déposez quelques amandes
effilées par-dessus puis glissez
dans le four préchauffé à
220 °C pendant cinq minutes.
£ Servez aussitôt. Dave
e cinéaste Francis
Ford Coppola, en
bon Italo-Américain, a toujours vu une
bouteille de vin sur la
table familiale. Avec les
bénéfices du Parrain,
en 1975, il achète
donc par passion le
domaine Inglenook,
à Napa Valley, en
Californie. 600 ha
dont il s’est occupé
avec beaucoup de
talent, y produisant
des grands rouges
et en particulier son
Rubicon, à l’esprit
très bordelais.
Comme Coppola ne
fait pas les choses à
moitié, il a ensuite
racheté la propriété
voisine, en 2002, avant
d’investir le comté de
Sonoma, toujours en
Californie, où il a
ouvert la Francis
Ford Coppola
Winery, à la fois cave
et lieu d’œnotourisme. Ici, il produit
des vins plus
accessibles, depuis
la gamme Rosso &
Bianco jusqu’à la
Director’s Cut. Il y a
aussi sa Diamond
Collection, une
douzaine de vins de
cépages vinifiés par
le talentueux Corey
Beck, dans un style très
nouveau monde.
Par exemple, ce Chardonnay
2012, issu de Monterey. Fermenté en cuves et en barriques
françaises, il offre un bel
équilibre entre acidité et
douceur, avec un nez de
pomme, de melon, une touche
de vanille et une finale légèrement brûlée. Ou ce Syrah-Shiraz 2010, né à Paso Robles et à
Monterey. Des arômes de
framboise, de cerise noire, de
réglisse. Une bouche légèrement boisée mais bien charnue,
une sensation de chocolat et
une douceur finale. D.MOG.
Chardonnay 2012, 16 fr. 50.
Syrah 2010, 18 fr. 50. Chez Manor.
e ne sais pas si c’est mon
imagination, mais j’ai
l’impression qu’on va
beaucoup parler de Brésil
ces prochaines semaines.
Peut-être à cause de
l’imminence de la Coupe
du monde de football,
qui remplit les terrasses et déserte les
bureaux, enfin les
bureaux qui n’ont pas
de téléviseurs.
C’est peut-être pour
cela que le numéro
deux mondial du
marché des whiskies,
l’écossais Ballantine’s,
s’est rappelé qu’il était
présent depuis un
siècle chez les AuriVC6
Contrôle qualité
verde et que ces derniers
l’utilisaient d’une manière
originale. Là-bas, en effet,
on le boit avec un zeste de
citron vert.
Ballantine’s sort donc une
version Brasil, déjà
aromatisée au citron
vert avec une touche
de vanille, dans un
équilibre de goûts
étonnant et plutôt
réussi. La maison
conseille de l’associer
à du cola, ou avec un
thé froid au citron ou
encore avec du jus de
cranberries. Pourquoi
pas? D.MOG.
Prix indicatif: 70 cl, 19 fr.
plus que naturels. Pas seulement avec
la construction dudit pont; il y eut aussi
celle de l’usine électrique de Vouvry en
1910, qui apporta la lumière aux
ménages chessellois un an plus tard,
ou encore l’édification du Grand Canal
entre 1914 et 1920 (1918 à Chessel). «Le
rattachement dans les années 1970 de
la commune au Cercle scolaire
Villeneuve Haut-Lac a «replacé»
Chessel dans son ancrage vaudois»,
explique le syndic Jacques Borgeaud.
La commune compte 355 hectares,
presque un pour chacun de ses
360 habitants. La population a doublé
depuis les années 1970: «Une zone de
villas s’est alors développée, des
familles sont arrivées», se remémore
l’ancien édile Jean-Pierre Borgeaud.
Sans pour autant étiqueter Chessel en
«village-dortoir». Ce sont essentiellement des Vaudois, travaillant à la ville,
qui sont venus s’y installer. Un projet,
qui arrive à échéance cet été, va
pourvoir le centre de la petite commune de 16 nouveaux appartements;
un autre de 40 logements est dans les
cartons. «Nous souhaitons autant que
faire se peut conserver notre cachet
villageois. Que Chessel demeure un
coin agréable à vivre», dit encore le
syndic.
L’impression de calme est renforcée
depuis l’ouverture de la Transchablaisienne, qui relie Villeneuve aux
Evouettes (VS). Les frontaliers,
notamment, n’empruntent donc plus la
Claire-Lise Borgeaud dans
son institut Claire Beauté.
Au Camping du Grand Bois, Joseph
Siffert propose des places à l’année.
route cantonale qui coupe la commune
en deux: d’un côté, le centre du village,
de l’autre le golf et le ranch. Et un peu
partout des champs, presque à perte
de vue. Les terres, formées par les
alluvions du Rhône, sont riches et
variées à Chessel. Elles ont permis
le développement des cultures
maraîchères et la production des
légumes à profusion. «Autrefois, on y
cultivait du maïs, surnommé alors le
«blé turc». Et qui a peut-être donné le
gentilé actuel de Turcs aux habitants
du village. A moins que ce ne soit le
croissant de lune qui orne nos armoiries», résume le syndic,
A un petit kilomètre du cœur du village
se trouve le hameau Au Grand Bois et
son camping éponyme qui propose
des places à l’année. Mieux, il dispose
du seul café-restaurant de Chessel.
«Nous sommes encore un peu plus
isolés depuis l’ouverture de la H144.
Mais justement les résidents et les
touristes de passage apprécient ce
calme. Et la situation idéale comme
point de départ pour une excursion en
montagne ou au bord du Léman»,
plaide son gérant, Joseph Siffert.
A contrario, le cœur même de Chessel,
Mecque du Pocket Bike, course de
mini-moto organisée tous les ans en
septembre, ne possède ni pinte
communale, ni épicerie, ni fleuriste.
L’institut Claire Beauté est la seule
enseigne active. Pour sa gérante, «il
serait peu rentable aujourd’hui d’ouvrir
un commerce à Chessel. Nous sommes
trop proches de Vouvry ou de Villeneuve, déjà très pourvus. En revanche,
l’ouverture d’une pinte communale
serait un plus pour notre village, qui
demeure très actif de par l’implication
de différentes sociétés, notamment
celle de la Jeunesse.»
Christophe Boillat Texte
Chantal Dervey Photos
Lionel Portier Dessin