Conflits et mobilisation sociale

Download Report

Transcript Conflits et mobilisation sociale

« Apparemment négative puisqu’elle ne crée
rien, la révolte est profondément positive
puisqu’elle révèle ce qui, en l’homme, est
toujours à défendre »
Albert Camus
« L’homme révolté » (1951)
Conflits et mobilisation sociale
I/ Peut-on éviter les conflits sociaux ?
II/ Les causes de l’émergence des conflits
III/ L'évolution des formes des conflits
I/ Peut-on éviter les conflits
sociaux ?
1°) Conflits et démocratie
2°) Le rôle social ambivalent des conflits
1°) Conflits et démocratie
a- Des oppositions inévitables…
 …qui sourdent
Les conflits latents (ou larvés)
Définition :
Situation potentiellement conflictuelle
dans laquelle des groupes sociaux ont
des valeurs, des intérêts ou des
attentes différentes ou opposées, mais
n’expriment pas cette opposition.
Causes de la latence du conflit ?
Parce qu’il n’a pas encore émergé !
 …ou qui s’expriment
Les conflits ouverts (ou patents)
Définition :
Situation conflictuelle explicite dans laquelle
des groupes sociaux expriment leurs
oppositions de façon plus ou moins violente
mais toujours explicite (verbalisation,
manifestations, affrontements…)
Causes de l’émergence du conflit ?
Parce qu’il n’est plus latent !
L’alchimie des causes qui font émerger (ou pas) les conflits est complexe :
De nombreux conflits qui auraient de bonnes raisons d’émerger ne le font pas et des
conflits qui peuvent être vus comme mineurs peuvent émerger de façon brutale !
1°) Conflits et vitalité démocratique
b- La place des conflits en démocratie
 La liberté d’expression est au
fondement de toute démocratie
Premier amendement de la constitution américaine
Le Congrès ne fera aucune loi qui touche l'établissement
ou interdise le libre exercice d'une religion, ni qui
restreigne la liberté de parole ou de la presse, ou le droit
qu'a le peuple de s'assembler paisiblement et d'adresser
des pétitions au gouvernement pour le redressement de
ses griefs.
 La société totalitaire est la
seule société sans conflits… ouverts !
Le totalitarisme est un
système politique qui
cherche à atteindre une
« perfection » sociale
qui éliminerait toute
nécessité de révolte
 La République est l’espace du débat
organisé
C’est une idée qu’on développera abondamment :
celle de la pacification des conflits
« L’homme est un loup pour l’homme »
Thomas Hobbes
Le Léviathan (1651)
 D’où l’ambiguïté des totalitarismes
autoritaires qui reposent souvent
sur de « bonnes intentions » de la
part de leurs promoteurs
Exemples de régimes politiques « sans histoire » :
Le régime soviétique (URSS)
Le meilleur des mondes (Aldous Huxley)
V pour Vendetta (Alan Moore)
2°) Le rôle social ambivalent des conflits
Aspects positifs
•
Remettent en phase les valeurs et
normes divergentes entre les
groupes minoritaires en croissance
et le groupe dominant
Aspects négatifs
•
Remettent en cause la cohésion
sociale
•
Permettent de s’adapter à l’évolution
des structures démographiques,
sociales ou économiques.
Rendent visibles des conflits qui
pourraient rester latents
•
Sont anxiogènes, déstabilisants,
anomiques
•
Permettent de redistribuer le
pouvoir de façon moins inégalitaire
•
Peuvent dégénérer en guerre civile
ou en violence irréparable
•
Renforcent les identités des
acteurs en lutte.
•
Par définition, ne concernent pas les
sans-voix, sans pouvoir
•
Bilan : les conflits sont un facteur primordial du changement social
II/ Les causes de l’émergence
des conflits
1°) Explications concrètes : les « raisons » de la colère
2°) Explications théoriques : les analyses sociologiques
1°) Explications concrètes : les « raisons » de la colère
a) L'expression d'une conscience collective : le rôle des identités
Louis Chauvel constate que
l’évolution de l’intensité des
inégalités et des identités
permet de comprendre
l’évolution historique des
conflits sociaux.
Identité : Ensemble des
caractéristiques, des goûts,
des valeurs qu’un individu
(ou un groupe social) retient
pour se définir.
Source : Louis Chauvel,
Le retour des Classes sociales,
Revue de l'OFCE, avril 2001
b) Les inégalités et la frustration
Pour que les inégalités soient une source
de mobilisation, il faut qu’elles
provoquent des frustrations. Or, cellesci sont relatives, car elles dépendent de
la situation des groupes sociaux voisins.
Courbe en pointillés : Niveau
d’espérance des individus
Inégalité : Différence
sociale considérée
comme injuste.
Paradoxe de Tocqueville :
« Le désir de l'égalité devient
toujours plus insatiable à mesure
que l'égalité est plus grande »
(Voir site)
On s’aperçoit que, contrairement à
une vision trop « émotive » des
injustices, en démocratie, les
inégalités les plus fortes ne
mobilisent pas autant que les
inégalités dont la réduction est « à
portée de main ».
A lire : doc 13p.257
c) Les conditions d’apparition d’un conflit
Ressources :
Organisations et
entrepreneurs de
mouvements
sociaux
Milieux
conducteurs
Les mots
pour le dire
Emergence d’un
mouvement
social
Les conjonctures
politiques
Formes de capitaux, de savoirfaire, de pouvoir de nuisance,
de maîtrise de l'usage des
médias, de maîtrise de l’image
du groupe, voire de force
physique, que peut mobiliser
un groupe contestataire.
Ressources
Milieux
segmentés,
milieux intégrés
Source (voir site)
Eric Neveu,
Sociologie des Mouvements sociaux,
La découverte, 2005
Black is
beautiful
Les mots pour le dire
« 99% contre 1%, idée de génie »
Tout commence par une formule aiguisée comme un slogan marketing, « Nous sommes les 99
% » ; induisant d'évidence son écho « Ils sont le 1 % ». Jusqu'ici, le débat public, de tous bords,
était dominé par la colère ; une immense colère contre ceux accusés d'avoir mené l'Amérique
vers cet état de décrépitude ; une colère protéiforme, parfois haineuse et surtout diffuse :
contre l'Etat fédéral, le Congrès, Wall Street en général ou les banquiers en particulier, les
syndicats, les « feignants » (les sans-emploi), les immigrés, les corrompus, les « progressistes »,
pour le Tea Party, ou les « fascistes », pour la gauche activiste, sans oublier le principal, Barack
Obama, perçu, c'est selon, comme un « socialiste » masqué ou, à l'inverse, comme un « suppôt
de la finance ». Le coup de génie - au diable les outrances - est d'avoir désigné un ennemi
unique, unificateur et évident pour tous : le « 1 % ». Et de l'identifier par un seul sigle : Wall
Street.
Pour gérer plus solidairement la résorption de la dette, Barack Obama voudrait taxer un peu
plus les 2 % des Américains les plus fortunés. Kalle Lasn, un ex-publicitaire retraité de
Vancouver, au Canada, ou plutôt un iconoclaste et un spécialiste assumé du détournement de
slogan (pour autant pas plus marxiste que Groucho), a fait encore plus fort :
1 % lui a suffi pour désigner cette nouvelle strate qui continue
imperturbablement à s'enrichir quoi qu'il advient et qui vit si loin des 99 %
autres. Le succès de la trouvaille est exceptionnel. Les deux notions, 99 % et
1 %, sont quasi entrées dans le lexique public, faisant instantanément sens : le
peuple d'un côté, la nouvelle aristocratie de l'autre.
Sylvain Cypel, Le Monde, 16 décembre 2011
2°) Explications théoriques : les analyses sociologiques
a) L‘analyse marxiste
Rapport social asymétrique qui
permet aux
de
s’approprier la
créée par les
.
Rapport de force inégal qui se
traduit par des privilèges ou
une influence politique et
culturelle, et constitutif des
capitalistes.
« Ensemble des facultés
physiques et intellectuelles qui
existent dans le corps d'un
homme, et qu'il doit mettre
en mouvement pour
produire des choses utiles ».
« Conversion, toujours
renouvelée, d'une partie de
la classe ouvrière en autant
de bras à demi occupés ou
tout à fait désœuvrés »
Manifeste
du parti
communiste
Marx et
Engels (1848)
Attention !
Distinguer
analyse
marxiste
et
marxienne
Le capital
Karl Marx
(1867)
Doc 2 p.220
L’exploitation, une notion économique
La somme des moyens de subsistance nécessaires à la production de la force de travail
comprend les moyens de subsistance des travailleurs (et de leurs remplaçants).
Supposons qu’il faille six heures pour produire les biens
nécessaire à la reproduction d’une journée de force de
travail.
Si un travailleur produit 12 heures par jour,
il va donc « reproduire » deux fois sa
propre force de travail.
ATTENTION
ATTENTION
ATTENTION
ATTENTION
Marx précise que le salaire
est payé à son juste prix !!!
D’où l’importance de l’existence d’une
Armée industrielle de réserve pour
maintenir au plus bas le revenu de
subsistance versé aux travailleurs.
Le capitalisme « révolutionne » la société
Partout où [la bourgeoisie] a conquis le pouvoir,
elle a détruit les relations féodales, patriarcales
et idylliques. Tous les liens variés qui unissent
l'homme féodal à ses supérieurs naturels, elle les
a brisés sans pitié pour ne laisser subsister
d'autre lien, entre l'homme et l'homme, que le
froid intérêt, les dures exigences du « paiement
au comptant ». Elle a noyé les frissons sacrés de
l'extase religieuse, de l'enthousiasme
chevaleresque, de la sentimentalité petitebourgeoise dans les eaux glacées du calcul
égoïste. Elle a supprimé la dignité de l'individu
devenu simple valeur d'échange; aux
innombrables libertés dûment garanties et si
chèrement conquises, elle a substitué l'unique et
impitoyable liberté de commerce. En un mot, à
l'exploitation que masquaient les illusions
religieuses et politiques, elle a substitué une
exploitation ouverte, éhontée, directe, brutale.
Le capitalisme bouleverse donc la
société en la déstabilisant !
La bourgeoisie ne peut exister sans révolutionner
constamment les instruments de production et
donc les rapports de production, c'est-à-dire
l'ensemble des rapports sociaux. (…) Ce
bouleversement continuel de la production, ce
constant ébranlement de toutes les conditions
sociales, cette agitation et cette insécurité
perpétuelles distinguent l'époque bourgeoise de
toutes les précédentes.
Citations : Manifeste du parti communiste
Aliénation : pour Marx, le produit et le contenu
du travail échappent à l’ouvrier. Le travail n’est
plus perçu comme le propre de l’homme, mais
comme un simple moyen d’existence.
Karl Polanyi a repris cette critique en montrant
combien la marchandisation de la terre, du travail
et de la monnaie ont touché le fondement même
de la vie humaine. On ne peut transformer le
travail en marchandise sans transformer son
support (le travailleur) en objet d’échange.
Portée et limites de l’analyse marxiste
Les
(bonnes)
raisons
ne
manquaient pas pour justifier une
mobilisation sociale de grande
ampleur contre la capitalisme…
Récupérer la plus-value
produite par les travailleurs et
injustement extorquée par un
rapport de production inique
…pourtant la lutte finale n’a pas eu lieu
La conscience de classe ouvrière ne fut pas
suffisamment forte pour toucher tous les
exploités et réaliser le « Grand soir »
L’Etat-bourgeois a « acheté » la paix sociale
par des avantages sociaux, et le partage de la
VA a profité aux salariés.
En finir avec des salaires au
minimum de subsistance, qui
paupérisent
Les pays de la révolution socialiste
(URSS) ont été de sanglantes
dictatures
En finir avec la domination
et l’exploitation
La division de la société entre
propriétaires et non-propriétaires des
moyens de production n’est plus
pertinente -> dirigeants salariés !
Se débarrasser d’une classe
sociale « parasite », qui vit du
travail des autres. On comprend la cohérence de la critique marxiste, mais aussi les
raisons de son échec, dû en partie aux réponses et à l’adaptabilité du
système capitaliste et en partie aux faiblesses du marxisme lui-même.
2°) Explications théoriques : les analyses sociologiques
b) L‘analyse de Mancur Olson
Qui c’est celui-là ?
Mancur Olson est un sociologue américain qui a
publié La logique de l’action collective en 1978.
Sa façon d’analyser la société relève de
l’individualisme méthodologique
Individualisme méthodologique :
« Tout ce qui se passe dans une
société , toute catégorie de
phénomènes observables ne peut se
comprendre ou s’expliquer que si l’on
part des actes individuels qui sont à
l’origine de ces phénomènes. »
La logique du social, Raymond Boudon, 1979
Effet émergent : conséquence non
attendue (et même parfois non désirée),
issue de l’agrégation des comportements
individuels des agents rationnels
La rationalité individuelle : ensemble
des comportements qui se traduisent
par la recherche de la maximisation des
gains de nos agissements, en intégrant
leurs coûts présents et futurs.
Exemple :
Le passager clandestin : illustré par le
comportement rationnel d’un individu
qui ne veut pas payer le prix d’un action
qui aura de toute façon lieue sans lui,
c’est un effet émergent négatif étudié
par Olson.
2°) Explications théoriques : les analyses sociologiques
b) L‘analyse de Mancur Olson
Si on suppose que tous les
individus ont intérêt à se
comporter en passager
clandestin, on devrait constater
l’absence d’action collective ! En
effet, si le dernier n’a pas intérêt à
participer à l’action, aucun n’a
intérêt à le faire…
Or, la réalité sociale offre le
constat d’associations diverses
d’individus qui agissent
collectivement
Paradoxe d’Olson
Bien collectif: bien dont le bénéfice n'est pas restreint
aux personnes qui se sont organisées pour l'obtenir.
Ex : hausse des salaires obtenue par un syndicat,
baisse d’impôt obtenue par une association de
contribuables.
Le paradoxe d’Olson est un cas
particulier de « dilemme du
prisonnier », modèle établi par la
théorie des jeux pour montrer que les
comportements rationnels
individuellement peuvent aboutir à
des décisions collectivement néfastes.
2°) Explications théoriques : les analyses sociologiques
b) L‘analyse de Mancur Olson
La contrainte est inévitable pour assurer le paiement des impôts, afin que l'Etat
puisse financer un certain nombre de biens publics qui ne provoqueront jamais un
afflux spontané de contributions librement consenties ; idem pour la politique
d'affiliation syndicale obligatoire et de restriction de l'accès au marché du travail aux
seuls syndiqués (« closed-shop ») qui explique la puissance de certaines branches
syndicales aux USA.
Résolution du
paradoxe
La fourniture, en même temps que ces biens collectifs dont, par
définition, nul ne peut être exclu, de biens individuels liés à la
participation personnelle au groupe. Ex : aide à trouver un emploi,
défense individuelle, information privilégiée (-> explique le
développement des syndicats de services)
L’importance des facteurs non-rationnels dans le comportement des individus.
Ex : un agriculteur peut « placer les intérêts des autres agriculteurs au-dessus des
siens » et décider de limiter volontairement sa production pour maintenir des prix
élevés.
2°) Explications théoriques : les analyses sociologiques
c) Le modèle d’Albert O. Hirschman
L’individualisme méthodologique classique ne suppose que deux
types de comportements : l’action ou l’inaction. Hirschman va plus
loin en intégrant des possibilités de protestation interne et externe
Exit
Voice
Loyalty
Cette
attitude
de
défection consiste à
refuser de suivre un
groupe en le quittant.
Cette attitude de protestation ou
de prise de parole consiste à faire
connaître son mécontentement à
l’intérieur du groupe.
Cette attitude de loyauté
consiste à se conformer aux
règles de fonctionnement du
groupe.
Exemples
L’abstention électorale
La désyndicalisation
Le boycott d’un produit
Le divorce
Exemples
Le vote extrémiste
Le non-suivi des appels
Le retour du produit
Les disputes conjugales
Exemples
Vote pour un parti majoritaire
Suivi régulier des mots d’ordre
Fidélité à la marque
Fidélité conjugale
Albert Hirschman, économiste et politologue américain a publié Exit, Voice and Loyalty en 1970
III/ L'évolution des formes des
conflits
1°) Les formes traditionnelles : le conflit de classes
2°) L’institutionnalisation des conflits
3°) Nouvelles formes d’actions et nouveaux acteurs sociaux
1°) Les formes traditionnelles d’action : le conflit de classes
a) Le mouvement ouvrier
L’histoire du mouvement ouvrier en France repose sur trois temps forts
L’Internationale
Le front populaire
Mai 1968
Constitution d’un front
d’opposition ouvrier uni
qui donne naissance aux
partis socialistes.
Les avancées sociales obtenues par
les manifestants de 1936 font
« naître » la protection sociale en
France.
Même si la CGT n’est pas à
l’initiative de ce mouvement,
elle en devient rapidement un
« entrepreneur » essentiel.
Les fins
Obtenir des hausses de salaires
Sécurisation de la condition salariale
Faire tomber le système capitaliste
Les moyens
Grève générale intersectorielle
Accords paritaires sous l’égide de l’Etat (Accords
Matignon en 36, Accords de Grenelle en 68)
A lire
Les grandes dates du mouvement ouvrier : doc 8 p.223
1°) Les formes traditionnelles d’action : le conflit de classes
a) Le mouvement ouvrier
Confédération Générale du Travail
(1895)
Cission en 1947
CGT / CGT-Force ouvrière
Fédération de
l’Education Nationale
Cission en 2006
FSU / UNSA
Les syndicats
ouvriers sont au
cœur de l’action
collective
Syndicats :
Associations assurant l’organisation et la défense des salariés pour
la reconnaissance et le respect de leurs droits professionnels,
économiques et sociaux. Ils sont d’abord issus du monde ouvrier.
Confédération
Française des
Travailleurs Chrétiens
Cission en 1964
CFDT / CFTC
En savoir plus :
lire la page 224
1°) Les formes traditionnelles d’action : le conflit de classes
a) Le mouvement ouvrier
Mouvement social :
Action collective visant à
modifier l’ordre social
Mouvement ouvrier:
C’est donc historiquement la première forme de mouvement
social dans le cadre du capitalisme.
Pour aller plus loin (doc 9 p.254) On peut retenir les trois principes d’Alain
Touraine pour définir un mouvement social, en particulier le mouvement ouvrier :
Identité du mouvement, opposition à un adversaire et totalité (projet alternatif)
Le rôle social des syndicats ouvriers :
Rôle intégrateur : formation d’une
communauté de vie ouvrière et populaire
(notamment dans les banlieues rouges) d’une
conscience de classe, une fierté ouvrière.
Rôle réformateur : Les ouvriers sont à
l’avant-garde des luttes sociales. En
combattant le pouvoir patronal, ils ont
contribué à la défense de l’Etat contre le
capitalisme libéral.
1°) Les formes traditionnelles d’action : le conflit de classes
b) La désyndicalisation
Doc 13 p.226
Le constat du lent déclin syndical
Evolution du taux de syndicalisation
(en % du total des salariés).
Qui se syndique
encore ?
Plus de 15 % des salariés
de la fonction publique
Plus de 14 % des cadres
Plus de 10 % des salariés
des entreprises de plus de
50 salariés
Mais…
Source Insee.
6% des ouvriers
4% des entreprises de
moins de 5 salariés
Moins de 3% des salariés
précaires
45 % des salariés pensent que discuter individuellement
avec leur hiérarchie est le meilleur moyen de défendre leurs intérêts. Doc 16 p.228
1°) Les formes traditionnelles d’action : le conflit de classes
b) La désyndicalisation
 Les causes
Les causes du déclin syndical sont
multiples. Aucune ne peut être privilégiée.
On fait véritablement face à un
changement social complexe et
multifactoriel.
La désindustrialisation
et la disparition des
bastions syndicaux
L’individualisme et
l’amélioration des conditions
de vie ouvrières
Les mutations de
l’emploi et l’éclatement
du collectif de travail
Le déclin de l’idéologie
communiste et la rigidité des
formes d’action syndicales
Doc 30 p. 236
1°) Les formes traditionnelles d’action : le conflit de classes
b) La désyndicalisation
La désindustrialisation
Les causes
économiques
Les mutations de
l’emploi et l’éclatement
du collectif de travail
Doc 18 p.229 : L’externalisation
« Le danger de l’externalisation réside dans
l’émiettement du salariat, qui est un facteur de
vulnérabilité (…) Une situation qui marginalise un peu
plus les syndicats, moins présents dans les collectifs
salariés de petite taille, et qui complique leur rôle ».
La disparition des bastions syndicaux
Bassin miniers du Pas de Calais
(dernière mine fermée en 2004)
 Usines Renault à BoulogneBillancourt fermées en 1992
(Seuls les cheminots de la SNCF restent
une force syndicale vive).
1°) Les formes traditionnelles d’action : le conflit de classes
b) La désyndicalisation
Le déclin de l’idéologie
communiste
Les causes
sociologiques
Scores du PCF aux présidentielles
(en % des suffrages exprimés)
1969 : 22 % 1981 : 16 % 1995 : 8 % 2007 : 2 %
L'affaiblissement des mouvements ouvrier et catholique est un élément déterminant de
l’abstention. Les membres des groupes ouvriers votent moins régulièrement que par le
passé. La corrélation négative entre l'abstention et la position dans la hiérarchie sociale,
qui était faible en France jusqu'au milieu des années 1970, est maintenant bien établie
et comparable à celle que l'on observe de longue date aux États-Unis. En raison de la
désindustrialisation, des délocalisations, du chômage, du démantèlement des
communautés ouvrières et de l'effondrement du communisme, les multiples
organisations qui charpentaient et mobilisaient les groupes ouvriers se sont affaissées.
La transmission intergénérationnelle des sympathies partisanes se fait plus difficilement
que par le passé. Des membres de familles anciennement liées au mouvement ouvrier
s'en sont détachés et se trouvent à l'écart des processus de mobilisation. (…) Une
proportion importante et croissante de ce qu'on n'appelle plus le "prolétariat" ou la
"classe ouvrière" est issue d'une immigration qui, au moins jusqu'à présent, se tient et
est tenue à distance des processus de représentation institués. C'est dans les banlieues
où ces catégories se trouvent reléguées que les taux d'abstention sont les plus élevés.
Daniel Gaxie, L’abstention électorale, entre scepticisme et indifférence, juillet 2007
L’individualisme :
Valeur dominante des
sociétés développées selon
laquelle l’individu a une
importance fondamentale,
une place centrale,
supérieure à celle du
groupe dans la société.
Individualisme négatif :
Conception égoïste de
l’individualisme,
caractérisée par une
recherche de confort et de
réussite personnelle dans
un cadre concurrentiel
Le développement de
l’insécurité sociale ou
matérielle qui touchent les
classes populaires isolent et
ne mobilisent pas.
2°) L’institutionnalisation des formes de conflit
a) Qu’est-ce que l’institutionnalisation ?
Une institution est
une organisation
stable, durable et
légitime
Doc 10 et 11
p. 225
Au cours des Trente Glorieuses, un rapport salarial très organisé,
qualifié de « fordiste-keynésien » se met en place, dans lequel les
syndicats jouent un rôle central de partenaires sociaux.
Dans les comités d’entreprise
et les conventions collectives
Dans les caisses de
Sécurité Sociale (gestion
paritaire par les
représentants des
salariés/des employeurs)
Au Conseil Economique et
Social et auprès des institutions
politiques (Sénat, etc.)
Cette institutionnalisation des syndicats, voulue par l’Etat est ambivalente : elle permet
la reconnaissance des revendications syndicales tout en « absorbant » la contestation
dans les formes les plus légitimes et dominantes du pouvoir.
2°) L’institutionnalisation des formes de conflit
b) Institutionnalisation = « trahison » ?
Max Weber, dans Le Savant et la Politique, distingue deux formes de fidélité à ses valeurs.
L’éthique de conviction est une
attitude morale qui consiste à
défendre avant tout ses convictions
en ne transigeant pas sur ses
valeurs.
Les syndicats les plus
révolutionnaires (ou les plus
minoritaires, donc peu
institutionnalisés) restent dans une
logique conflictuelle.
L’éthique de responsabilité est une attitude qui consiste
à admettre que l’on peut sacrifier une partie de ses
valeurs si c’est nécessaire au bon fonctionnement des
objectifs que l’on poursuit.
Les grandes centrales syndicales justifient leur
participation au système de décision par les
avancées sociales qu’elles en retirent.
Il n’empêche qu’elles sont considérées comme
ayant « pactisé » avec les pouvoirs en place.
L’Etat joue de cette contestation par les jeunes syndicats à la recherche d’une
légitimité sur le terrain de la représentation des salariés -> rapport de mai 2006.
2°) L’institutionnalisation des formes de conflit
c) Les groupes de pression : la revendication silencieuse
Un groupe de pression (ou lobby)
est une organisation dont l’objectif
est d’influencer les centres de
pouvoir en faveur des intérêts de
ses membres ou en faveur d’une
cause
ATTENTION
Si les lobbies ne sont pas vraiment des acteurs des
mouvements sociaux, ils participent au changement
social. On les cite car leur existence est une façon très
institutionnalisée de défendre des intérêts.
Docs 17 p. 259 et 18 p.260
En Union Européenne, les
lobbyistes en activité
seraient environ 15.000
personnes (contre 20.000
au Congrès américain)
travaillant pour 3.000
« représentants
d’intérêts » différents.
Aux Etats-Unis, les
lobbies sont des
acteurs essentiels de
la vie démocratique.
Ils sont un moyen
d’exercer sa liberté
d’expression et son
droit d’association
En France, la logique du lobbying
est presque considérée comme une
forme cachée d’action politique
dont le manque de transparence
est peu démocratique. Pourtant, ils
sont bien vus quand ils agissent
pour des causes altruistes ou
environnementales.
3°) Nouvelles formes d’actions et nouveaux acteurs sociaux
a) De nouvelles attentes sociales
La montée des
valeurs
postmatérialistes
Source : Ronald
Inglehart, La transition
culturelle dans les
sociétés industrielles
avancées. 1990 (Chap.2)
« Un processus de changement intergénérationnel des valeurs est en
train de modifier progressivement le système politique et les normes
culturelles des sociétés industrielles avancées. Le passage des valeurs
matérialistes aux valeurs post-matérialistes a engendré de nouveaux
enjeux politiques sur la scène mondiale. (…) De plus, l'émergence des
valeurs post-matérialistes semble n'être qu'un aspect partiel d'un
processus de changement culturel encore plus vaste qui remodèle les
orientations religieuses, le rôle des sexes, les mœurs sexuelles et les
normes culturelles de la société occidentale »
Maintien de l’ordre
Droit de parole au travail
Stabilité de la démocratie
Participation des citoyens
aux décisions
Embellissement des villes et
des campagnes
Société où les idées comptent
plus que l’argent.
Lutte contre l’inflation
Armée puissante
Lutte contre la criminalité
Protection de la liberté
d’expression
Maintien d’une forte
croissance économique
Société plus conviviale, moins
impersonnelle.
3°) Nouvelles formes d’actions et nouveaux acteurs sociaux
a) De nouvelles attentes sociales
Revendications identitaires et reconnaissance sociale
La normalisation
des « anormaux »
La concurrence
victimaire
•Homosexuels
•Minorités ethniques
•Handicapés
•SDF
•Pères célibataires
•Femmes battues
• Vieux
• Marins pêcheurs
• Jeunes des cités…
La crainte de dérive : les classes moyennes, premières
bénéficiaires de la croissance des trente glorieuses, se posent de
plus en plus comme les victimes d’un système qui leur est de
moins en moins favorable. Leurs revendications
postmatérialistes ont désormais plus de poids social ,
médiatique et électoral que les revendications ouvrières.
On retrouve dans la
pyramide de Maslow le
passage des valeurs
matérialistes aux valeurs
postmatérialistes (besoin
de reconnaissance et de
réalisation personnelle)
3°) Nouvelles formes d’actions et nouveaux acteurs sociaux
b) De nouveaux acteurs
Les politisés
Les
syndiqués
Les marginaux
Les sept familles
de rebelles
Les experts
Les alternatifs
Les autonomistes
Les
identitaires
Voir sur le site l’extrait
de La France Rebelle,
2006, Ed. Michalon.
La galaxie des mécontents
On voit combien les
groupes sociaux qui sont
actifs dans la contestation
sont devenus divers.
La multiplication des
acteurs aboutit à un
émiettement des formes
de revendication, chaque
groupe doit élaborer de
nouvelles stratégies pour
être audible.
En dehors des politisés et des syndiqués, la plupart de ces acteurs sont postmatérialistes
3°) Nouvelles formes d’actions et nouveaux acteurs sociaux
Doc 11 p.255
c) Les nouveaux répertoires d’action :
Jeudi Noir : collectif créé en
2006 pour dénoncer la
flambée des prix des loyers
et accélérer l'explosion de la
bulle immobilière. Il mène
des actions festives.
Les nouveaux mouvements
sociaux se caractérisent justement
par leurs nouvelles formes
d’actions, peu institutionnelles,
mais aussi par des valeurs
d’autonomie face au pouvoir
politique (contre-pouvoirs).
Act up,
1993
La barbe
Collectif
féministe
Ces actions
veulent d’abord
être médiatiques
pour toucher les
élus par le biais
de l’opinion
publique.
3°) Nouvelles formes d’actions et nouveaux acteurs sociaux
c) Les nouveaux répertoires d’action :
Une des caractéristiques des nouveaux modes d’action collective consiste donc à
soulever une indignation publique suffisamment forte pour influencer les politiques.
Mais le canal des médias n’est pas neutre.
 Amplifier une
parole contestataire,
en choisissant de la
mettre en avant
(ex: Hiver 54, Abbé
Pierre)
Le pouvoir dominant peut
tenter de contrôler les
canaux d’information, ce
que facilite la proximité
sociale des journaliste et
des élus.
En effet, les
médias peuvent
 Assourdir une parole
contestataire en
privilégiant les acteurs
institutionnels
Internet, en multipliant les
réseaux, permet d’échapper
à ce « monopole » de la
parole publique longtemps
détenu par les médias.
 Produire eux-mêmes
une parole contestataire
(enquêtes, journalisme
d’investigation sur les
scandales financiers,
politiques, judiciaires,…)
Quoi qu’il en soit, ce sont
de plus en plus des
individus qui agissent sur
la scène publique, au
mieux des « collectifs ».
Conclusion
1°) Vers un retour
des conflits du travail
?
« De l’enseigne de restauration
rapide Kentucky Fried Chicken
au sidérurgiste Arcelor Mittal en
passant par la société d’autoroute
Escota, de nombreux secteurs
sont concernés ».
On voit que les revendications postmatérialistes sur les conditions de
travail
et les relations sociales
(dégradées comme le prouve la
vague de suicides sur le lieu de
travail) rejoignent les revendications
matérialistes sur les salaires (« la
fiche de paie redevient un sujet de
tension »).
Le Monde du 16 février 2010
De l’enseigne de restauration
rapide
Kentucky
Fried
Chicken
au
sidérurgiste
Arcelor Mittal en passant par
la société d’autoroute Escota,
de nombreux secteurs sont
concernés.
DARES. Février 2007
Les formes des conflits du
travail sont aussi plus
proches de celles des
nouveaux mouvements
sociaux : plus individuelles,
ponctuelles, médiatiques,
voire spectaculaires (e.g. les
séquestrations de patrons)
Conclusion
2°) Vers un changement de société ?
Le Monde du 24 décembre 2011
« En 2011, bon nombre de puissants de ce monde
ont chuté et une foule d’anonymes, de Tunis à
Tripoli, de la place Tharir à la Puerta del Sol, en
passant par Aden, Manhattan ou Tel-Aviv, a surgit
d’un peu partout. Là pour abattre les dictatures,
ailleurs pour résister à la crise et à la toutepuissance des marchés. Si les objectifs de cette
indignation sans frontières furent différents, il est
frappant de constater les similitudes entre ces
acteurs. Des jeunes, de 20 à 30 ans, souvent
diplômés, férus de nouvelle technologies et déçus
par un monde en pleine dislocation économique et
sociale, que les systèmes politiques n'arrivent plus
à contrôler.
En 2011, d'un seul clic, la génération Facebook est
passée du virtuel au réel, de l'indignation à
l'engagement, le jour dans la rue, la nuit devant
l'écran... Le 4 janvier, la mort de Mohamed
Bouazizi en Tunisie déclencha le premier tsunami
d'une année qui en compta beaucoup. Le 17
décembre précédent, ce jeune vendeur ambulant
de 26 ans s'était immolé par le feu devant le
gouvernorat de Sidi Bouzid, une petite ville au
cœur du pays, parce que la police lui avait
confisqué sa balance et sa charrette. Ce geste
désespéré d'un humilié, d'un sans-grade, d'un
inconnu allait servir de catalyseur aux frustrations
de la rue arabe, se répercutant jusqu'en Egypte,
en Jordanie, à Barheïn, dans les Emirats du Golfe,
au Yémen, en Syrie… »
Le lendemain de sa mort, après des manifestations durement
réprimées sans tout le pays, des blogueurs comme Slim
Amamou ou Aziz Amami inondèrent la Toile, les réseaux
sociaux et Twitter d'un message qui allait faire le tour de la
planète: « Monsieur le Président, ton peuple est en train de
s'immoler. » La seule réponse du pouvoir de Ben Ali fut
d'arrêter, le 6 janvier, Slim Amamou et Aziz Amami qui, en
déclenchant la géolocalisation de leur portable, révélèrent à
tous qu'ils se trouvaient dans les sous-sols de sinistre
réputation du ministère de l'intérieur du boulevard Bourguiba
à Tunis. Le 14 janvier, face à l'ampleur de la contestation, Zine
El-Abidine Ben Ali prit le chemin de l'exil. Dans la foulée, Slim
Amamot à 35 ans, devint un éphémère secrétaire d'Etat à la
jeunesse et aux sports du premier gouvernement d’union
nationale tunisien.
Ensuite, il y eut Le Caire Et la place Tahrir. Avec un certain Wael
Ghonim, chef du marketing de Google pour le Proche-Orient,
qui se retrouva en prison parce que, sur sa page Facebook, il
avait écrit: « Nous sommes tous des Khaled Said», en référence
à un jeune homme battu à mort par la police à Alexandrie en
juin 2010. Pour le soutenir, des milliers de personnes
campèrent place Tahrir. Le 8 février, le jour de sa libération, il
clama sur cette même place: « Je ne suis pas un héros. Vous
êtes les héros, c'est vous qui êtes restés surplace. Il faut que
vous insistiez pour que nos revendications soient satisfaites. »
Quelques jours plus tard, le président Moubarak abandonnait
le pouvoir... Puis, en Lybie, la ville de Benghazi se souleva
contre l'arbitraire de Mouammar Kadhafi. Et ainsi de suite.
Amman. Aden. Damas. (…)
Le 15 mai, à Madrid, « los indignados » envahissent la Puerta
del Sol. Ils disent: « Nous n'avons rien inventé. Nos pères sont
les manifestants du "printemps arabe"...Vous ne faisons que
reproduire leur combat car nous luttons aussi contre une
dictature, celle des marchés. » Ils s'en prennent à la classe
politique qui ne fait pas son travail, aux financiers qui se sont
enrichis pendant que la crise ruinait les classes populaires...
Le 14 juillet, Tel-Aviv prend le relais. « Aujourd'hui, il y a un énorme fossé entre la
population d'Israël et le gouvernement. C'est la racine commune d'un grand nombre de
soulèvements dans le monde: partout les gens s'éveillent, parce qu'ils en ont assez
d'être déçus, d'être roulés dans la farine », explique, dans Le Monde, Daphni Leef, une
des porte-parole. Londres suit. Puis le Chili. Et le 17 septembre, Nevs York. Des
dizaines de milliers de personnes veulent occuper Occuper Wall Street et se
définissent comme les 99%, par opposition au 1% des Américains qui totalisent seuls
42 % de la richesse du pays. Pendant ce temps, à Los Angeles, une certaine Kristen
Christian 27 ans, appelle sur Facebook à boycotter les banques car elles veulent taxer
de 5 dollars tous les détenteurs d'une carte de crédit n’ayant pas 20000 dollars sur
leurs comptes. Résultat, le 5 novembre, 85 000 personnes retirent 4,5 milliards de
dollars (3,7 milliards d'euros) des grandes banques...
Il faudrait également parler de ces Japonais en combinaison blanche, masqués, les
mains et les pieds protégés, qui, chaque matin, depuis mars, pénètrent dans la
centrale de Fukushima-Daiichi, pour réparer ce qui est réparable et tenter de juguler la
fuite des radiations. Nul ne sait leurs noms, anonymes parmi les anonymes, mus par
on ne e sait quel sens du devoir, nécessité de la compassion et force de l'endurance.
Souvenez-vous de Yuko. cette jeune femme enroulée dans une couverture au milieu
d'une montagne de ruines. Et de Futoshi Thoba, le maire de Rikuzentakata, qui ne
quitta pas son poste à la tête d'une ville ravagée bien que sa femme fût déclarée
disparue. Ou de Yoshitomo Sugihara, un fermier de Nagatoro, à côté de la centrale, qui
précisait à un reporter du Monde: « Je suis devenu le cobaye de ce désastre. De toute
manière, avec tout ce que j'ai dû prendre dans les premières semaines, je ne crains plus
rien. »
En France, les « indignés » ne firent guère recette. Les intouchables, si ! Ceux du film
du même nom, handicapés, gamins des cités, dont l'incroyable succès a offert, à
travers Omar Sy. une échappée sociale, comme si la banlieue faisait du bouche-àbouche à un monde nécrosé. Une bouffée d'air frais dans une société où la relation en
tête à tête avec l'autre, en tant que personne réelle, ayant un corps, des pensées, une
odeur, une voix, est facilement éludée. Il faut parallèlement souligner l'émergence des
invisibles, cette « France d'à côté », exposée à la mondialisation et abandonnée par la
démocratie, qui entre colère sourde et résignation rageuse, ne croit plus au progrès et
se sent disqualifiée...
Ces inconnus, ces anonymes, ces « foules sentimentales » chères à Alain Souchon ont
bousculé l’histoire. Bonne nouvelle.
Ce qu’on peut retenir :
Les liens entre les conflits sociaux et le changement social sont réciproques :
 Les conflits font évoluer la société en modifiant les valeurs et les normes
dominantes sous l’influence des groupes de pression, des entrepreneurs de
mouvements sociaux, des collectifs et des activistes divers (jusqu’aux
artistes, blogueurs et associatifs plus ou moins connus qui sont des leaders
d’opinion)
 Les conflits sociaux subissent eux-mêmes l’influence de la société : ils
s’adaptent aux valeurs postmodernes s’éloignent des formes d’actions
institutionnelles que rejettent les citoyens (ex : la crainte de tous les
collectifs d’être « récupérés » par un pouvoir institué).
Fin (du chapitre, mais pas des conflits…)